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08/04/2021 | FRANCE | N°20DA01752

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 avril 2021, 20DA01752


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. D... E... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 septembre 2020 par lequel le préfet de l'Eure l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2003817 du 8 octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregist

rée le 9 novembre 2020, M. A..., représenté par Me B... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. D... E... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 septembre 2020 par lequel le préfet de l'Eure l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2003817 du 8 octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2020, M. A..., représenté par Me B... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du 27 septembre 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 signée le 19 juin 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 20 mai 1982, déclare être entré en France en 2016. Il a sollicité l'asile le 13 mars 2017. Par un arrêté du 27 juillet 2017, le préfet de la Seine-et-Marne a ordonné son transfert aux autorités italiennes. A la suite d'une interpellation lors d'un contrôle routier, le préfet de l'Eure, par un arrêté du 27 septembre 2020, l'a obligé à quitter le territoire français, sans lui accorder de délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 8 octobre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du jugement que pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le premier juge s'est fondé sur l'absence de souscription par M. A... de la déclaration obligatoire prévue à l'article 22 paragraphe 2 de la convention d'application de l'accord Schengen. Le premier juge s'est borné à exercer son office en constatant au surplus qu'aucune pièce du dossier ne permettait d'établir que M. A... serait effectivement entré en France le 13 février 2016 et que le titre de séjour italien produit au dossier présentait une faible force probante. Le premier juge, qui n'était pas tenu d'informer les parties qu'il envisageait de répondre de cette façon au moyen, n'a, ainsi, pas entaché son jugement d'irrégularité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ". Aux termes de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités compétentes de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent. 2. Les étrangers résidant sur le territoire de l'une des Parties contractantes et qui se rendent sur le territoire d'une autre Partie contractante sont astreints à l'obligation de déclaration visée au paragraphe 1. 5...°". L'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur (...) ". L'article R. 211-32 du même code ajoute que : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un État membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ". La souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.

4. Le titre de séjour italien produit par M. A... ne présente pas de garanties d'authenticité suffisantes. Il indique être valable jusqu'au 26 février 2016, mais cette date a été ajoutée de manière manuscrite sur le document qui mentionne également une autre date de naissance que celle déclarée par l'intéressé. De plus, le requérant, qui allègue être entré en France le 13 février 2016, n'établit pas en avoir souscrit à la déclaration obligatoire prévue à l'article 22 paragraphe 2 de la convention d'application de l'accord Schengen. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. M. A... est lié par un pacte civil de solidarité conclu le 23 juillet 2019 avec une compatriote titulaire d'une carte de résident. Un enfant est né le 6 février 2019 de cette union. Toutefois, cette union est récente à la date de l'arrêté en litige. Le requérant n'apporte aucune pièce probante de nature à établir la réalité de son concubinage depuis 2017. Il n'établit pas être dépourvu d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine, où résident son fils ainsi que sa soeur. Il ne justifie d'aucune insertion sociale ou professionnelle. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. A... ne pourrait pas reconstituer la cellule familiale qu'il forme avec sa partenaire et son enfant en Côte d'Ivoire. Par suite, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Le requérant ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont applicables que pour l'examen d'une demande de titre de séjour.

7. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".

8. Si les pièces médicales produites établissent que M. A... a été opéré le 17 mai 2018 pour une cataracte et que des médicaments lui ont été prescrits pour cette pathologie, aucune d'entre elles ne donne d'indication sur les conséquences d'une absence de prise en charge médicale. L'intéressé s'est par ailleurs borné à indiquer, sans autre précision, lors de son audition par les forces de l'ordre suivre un traitement pour l'asthme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

9. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. _ L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants; (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou s'il a fait usage d'un tel titre ou document ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 ; (...) ; h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. ".

10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'a pas exécuté la décision de transfert prise à son encontre en 2017 et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français. Il a également déclaré lors de son audition qu'il ne souhaitait pas regagner son pays. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire.

Sur la décision fixant le pays de destination :

11. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; (...). /Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".

12. Si M. A... fait valoir être menacé en Côte d'Ivoire, en raison de ses opinions politiques, il n'apporte aucun élément probant de nature à établir la réalité de ses allégations. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

13. Il résulte de l'ensemble ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... C... pour M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Eure.

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N°20DA01752

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01752
Date de la décision : 08/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : NZALOUSSOU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-04-08;20da01752 ?
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