Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner l'Etat, ou à titre subsidiaire la société H4 Valorisation et Mme P... C..., M. T... D..., M. L... F... ainsi que la société ABAC ingénierie à lui verser la somme de 1 189 612,58 euros au titre des modifications et des travaux complémentaires du marché de construction de l'hôtel de police et d'extension du palais de justice du Havre.
Par un jugement n° 1303535 du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a fait droit partiellement à la demande de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale en condamnant l'Etat à verser à la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale la somme globale de 360 119,24, avec intérêts capitalisés. Il a également condamné Mme P... C..., M. T... D..., M. L... F... et la société ABAC ingénierie à verser à la même société la somme de 22 721,25 euros, avec intérêts capitalisés et a condamné Mme P... C..., M. T... D..., M. L... F... et la société ABAC ingénierie à garantir l'Etat à hauteur de 25 650,33 euros
Par un arrêt n° 16DA00228-16DA00263 du 22 février 2018, la cour administrative d'appel de Douai a annulé les articles 1ers à 5 de ce jugement et a rejeté les conclusions de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale.
Par une décision n° 420086 du 21 octobre 2019, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt de la cour administrative d'appel de Douai en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale dirigées contre la société H4, auparavant dénommée H4 Valorisation et contre Mme C..., M. D..., M. F... et la société ABAC ingénierie et a renvoyé l'affaire devant cette cour.
Procédure devant la cour :
I) Par une requête initialement enregistrée le 2 février 2016 sous le n° 16DA00228, le ministre de l'intérieur et le ministre de la justice, représentés par Me R... J..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rouen du 8 décembre 2015, en tant qu'il a prononcé une condamnation à l'encontre de l'Etat et n'a fait que partiellement droit aux conclusions appelant en garantie le groupement de maîtrise d'oeuvre ;
2°) de rejeter les conclusions, dirigées contre l'Etat, présentées par la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale devant le tribunal administratif ;
3°) de condamner Mme P... C..., M. T... D..., M. L... F... et la société ABAC ingénierie à garantir entièrement l'Etat, en cas de condamnation ;
4°) de mettre à la charge de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II) Par une requête initialement enregistrée sous le n° 16DA00263 le 8 février 2016, et des mémoires enregistrés le 9 mars 2017, le 18 avril 2017 et le 19 mai 2017, la société Coopérative Métropolitaine d'Entreprise Générale, représentée par Me G... N..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 8 décembre 2015 en tant qu'il a n'a que partiellement fait droit à ses conclusions indemnitaires dirigées contre l'Etat et contre la société H4 Valorisation, Mme P... C..., M. T... D..., M. L... F... et la société ABAC ingénierie ;
2°) de condamner, à titre principal, l'Etat, ou à titre subsidiaire la société H4 Valorisation, Mme P... C..., M. T... D..., M. L... F... et la société ABAC ingénierie, à lui verser la somme de 1 189 612,58 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 1er mars 2011, eux-mêmes capitalisés ;
3°) de mettre les frais d'expertise à la charge de l'Etat ou, subsidiairement, à la charge des autres parties ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, ou à titre subsidiaire des autres parties, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et la condamnation aux dépens.
Reprise d'instance après cassation :
Par des mémoires, enregistrés le 15 novembre 2019 et le 19 février 2021, la société H4, représentée par Me A... Q..., demande à la cour :
1°) de rejeter les demandes formées par la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale à son encontre ;
2°) de mettre à la charge de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;
- et les observations de Me O... M..., substituant Me G... N... pour la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale.
Considérant ce qui suit :
1. Les ministères de la justice et de l'intérieur ont engagé, en 2007, une opération de construction d'un hôtel de police et d'extension du palais de justice au Havre. Pour la mise en oeuvre de cette opération, l'Etat, représenté par le préfet de la région Haute-Normandie, a conclu avec la société H4 Valorisation, un contrat de mandat de maîtrise d'ouvrage et a confié la maîtrise d'oeuvre des travaux à un groupement composé de Mme C..., M. D..., M. F... et de la société ABAC Ingénierie. Par un marché conclu le 28 novembre 2007, la société H4 Valorisation a chargé le groupement solidaire composé des sociétés Coopérative métropolitaine d'entreprise générale, mandataire, Crystal et Clemessy de l'exécution des travaux, la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale étant désignée comme mandataire de ce groupement. La société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale a saisi le tribunal administratif de Rouen d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat ou, à titre subsidiaire, de la société H4 Valorisation ainsi que des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre, à lui verser la somme de 1 189 612,58 euros hors taxes au titre des modifications et des travaux complémentaires. Par un jugement du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a fait partiellement droit à cette demande. Par un arrêt du 22 février 2018, la cour administrative d'appel de Douai a annulé les articles 1ers à 5 de ce jugement et rejeté les conclusions de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale. Par une décision du 21 octobre 2019, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale dirigées contre le groupement de maîtrise d'oeuvre et la société H4 valorisation devenue société H4. Il a renvoyé cette affaire dans cette mesure, devant la cour administrative d'appel de Douai. En cours d'instance, M. D... est décédé et ses ayant droit s'y sont substitués. La cour ne demeure donc saisie que des conclusions de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale dirigées contre le groupement de maîtrise d'oeuvre ainsi que contre le mandataire du maître d'ouvrage, qui ne peuvent avoir pour fondement que la responsabilité quasi-délictuelle des intervenants et qui ont donné lieu à l'article 2 du jugement du tribunal administratif. La cour reste également saisie par voie de conséquence des conclusions d'appel incident et d'appel provoqué liées à ces conclusions d'appel principal.
Sur les conclusions dirigées contre la société H4 :
2. Il résulte de l'article 3 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, aujourd'hui codifié dans le code de la commande publique, qu'il appartient aux constructeurs, s'ils entendent obtenir la réparation de préjudices consécutifs à des fautes du mandataire du maître d'ouvrage dans l'exercice des attributions qui lui ont été confiées, de rechercher la responsabilité du maître d'ouvrage, seule engagée à leur égard, et non celle de son mandataire, y compris dans le cas où ce dernier a signé les marchés conclus avec les constructeurs, dès lors qu'il intervient au nom et pour le compte du maître d'ouvrage, et n'est pas lui-même partie à ces marchés. Le cas échéant, le maître d'ouvrage dont la responsabilité est susceptible d'être engagée à ce titre peut appeler en garantie son mandataire sur le fondement du contrat de mandat qu'il a conclu avec lui. La responsabilité du mandataire du maître d'ouvrage à l'égard des constructeurs, qui ne peut jamais être mise en cause sur le terrain contractuel, ne peut l'être, sur le terrain quasi-délictuel, que dans l'hypothèse où les fautes alléguées auraient été commises en-dehors du champ du contrat de mandat liant le maître d'ouvrage et son mandataire. En revanche, les constructeurs ne sauraient rechercher la responsabilité du mandataire du maître d'ouvrage en raison de fautes résultant de la mauvaise exécution ou de l'inexécution de ce contrat.
3. En l'espèce, la société H4 Valorisation a conclu avec l'Etat une convention de mandat de maîtrise d'ouvrage pour la construction d'un hôtel de police et d'un palais de justice au Havre, conformément aux dispositions de la loi du 12 juillet 1985. La société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale recherche la responsabilité quasi délictuelle de la société H4 en soutenant que la société H4 Valorisation a manqué d'anticipation et a eu une gestion " au fil de l'eau " a entraîné l'arrêt du chantier pendant treize semaines. Il s'agit donc de fautes alléguées en lien avec l'exécution de la convention de mandat. Par suite, la Coopérative métropolitaine d'entreprise générale ne peut rechercher la responsabilité de la société H 4 pour des fautes en lien avec sa mission de mandataire du maître d'ouvrage.
Sur les conclusions dirigées contre les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre et sur les conclusions d'appel incident de ce groupement :
En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées par le groupement de maîtrise d'oeuvre :
4. Le groupement de maîtrise d'oeuvre, en indiquant s'associer au moyen d'irrecevabilité soulevé par le maître d'ouvrage, doit être regardé comme soutenant que la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale n'a pas saisi le tribunal dans les six mois suivant la notification de la réponse apportée à sa réclamation sur le décompte général de son marché, conformément à l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché. Toutefois, l'Etat n'établissait pas en première instance et n'établit toujours pas, que la réponse apportée à la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale le 30 mai 2011 ait été effectivement notifiée à cette société. Par suite, cette fin de non-recevoir doit, en tout état de cause, être écartée.
5. Ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dans son arrêt du 21 octobre 2019, la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale n'a pas renoncé à tout contentieux en signant le protocole transactionnel qui ne l'engageait qu'à l'égard de l'Etat. Ses conclusions dirigées contre le mandataire du maître d'ouvrage et contre le groupement de maîtrise d'oeuvre sont donc recevables. Par suite, la fin de non-recevoir, opposée par le groupement pour ce motif, ne pourra qu'être écartée.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité du jugement opposé par le groupement de maîtrise d'oeuvre :
6. Le groupement de maîtrise d'oeuvre soutient que le jugement du tribunal administratif du 8 décembre 2015 n'aurait pas dû fixer le solde du marché alors qu'il n'était pas saisi de conclusions en ce sens. Toutefois, l'arrêt de la présente cour n° 16DA00228-16DA00263 du 22 février 2018 a annulé le jugement en tant qu'il a statué sur le solde du marché et cet arrêt est devenu définitif sur ce point.
En ce qui concerne la responsabilité quasi-délictuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre :
7. La société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale demande que le jugement du tribunal administratif de Rouen du 8 décembre 2015 soit réformé en ce qu'il a exclu son indemnisation à hauteur de la somme de 1 189 612,58 euros et, notamment, pour les coûts occasionnés respectivement par le choix d'une teinte différente pour les panneaux en béton poli, par les goulottes en inox dans les salles d'audience, par la purge des remblais des vestiges et par l'arrêt de l'atelier murette guide. Elle soutient que dans chacun des cas, la faute de la maîtrise d'oeuvre est à l'origine de coûts supplémentaires. Elle demande également que ce jugement soit réformé en ce qu'il a diminué son indemnisation sur le terrain quasi-délictuel au motif d'une faute exonératoire de sa part à hauteur de 50%.
S'agissant de l'allongement de la durée du chantier :
8. La société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale soutient d'abord que l'allongement de la durée du chantier résulte d'une faute de la maîtrise d'oeuvre. Il résulte du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif que le décalage du calendrier de travaux a pour origine l'insuffisance des sondages. Néanmoins, il ne conclut pas que celle-ci résulte d'une faute de la maîtrise d'oeuvre ou de la maîtrise d'ouvrage mais d'une réalité imprévisible liée à l'extrême hétérogénéité du terrain. L'appelante n'apporte aucun élément pour remettre en cause ces conclusions et pour démontrer une faute de la maîtrise d'oeuvre. Par ailleurs si l'appelante soutient qu'elle a été contrainte de réaliser des travaux modificatifs par la faute de la maîtrise d'oeuvre, elle n'établit pas qu'elle n'aurait pas été indemnisée de ces mêmes travaux dans le cadre des avenants signés par le maître d'ouvrage. Par suite, cette demande ne peut qu'être rejetée.
S'agissant du choix d'une teinte différente pour les panneaux en béton poli :
9. Il résulte du rapport d'expertise que ce choix a été imposé par l'architecte de la commune du Havre. A aucun moment, l'appelante n'a attiré l'attention de la maîtrise d'oeuvre sur le surcoût de ce choix, alors qu'elle a présenté elle-même les trois échantillons de béton à l'architecte de la ville. Elle n'a pas, non plus, présenté de devis sur ce point au maître d'oeuvre au cours du chantier. Par suite, l'appelante ne démontre pas de faute de la maîtrise d'oeuvre sur ce point et en tout état de cause, compte tenu de ce qu'elle n'a pas appelé l'attention de la maîtrise d'oeuvre sur le surcoût, elle a commis une faute totalement exonératoire.
S'agissant des goulottes inox dans les salles du palais de justice :
10. Il résulte du cahier des clauses techniques particulières du lot 3.2 " menuiseries intérieures bois " que celui-ci prévoyait que les fils électriques passent dans les meubles. L'appelante n'a pas réalisé cette prestation, ainsi que le note le rapport d'expertise . Elle n'a pas fait valoir de surcoût, ni n'a produit de devis sur ce point en cours d'exécution de chantier. Compte tenu de ces éléments, la faute de l'appelante exonère totalement la responsabilité, qui n'est par ailleurs pas établie, de la maîtrise d'oeuvre dans le surcoût de cette prestation.
S'agissant de la purge des remblais des vestiges :
11 La société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale réclame d'abord la prise en compte de ces travaux, au titre d'une sujétion imprévue. Elle n'établit pas une faute de la maîtrise d'oeuvre. En tout état de cause, il résulte du rapport d'expertise que l'appelante n'a jamais produit les justificatifs demandés par la maîtrise d'oeuvre puis par l'expert et n'établit pas qu'il s'agit d'un ouvrage complémentaire qui ne soit pas rémunéré au titre du marché ou des avenants. L'appelante n'apporte aucun élément pour remettre en cause les conclusions de l'expert. Par suite, elle n'établit pas la réalité de son préjudice sur ce point et sa demande doit en conséquence être rejetée pour ce motif.
S'agissant de l'arrêt de l'atelier murette guide :
12. Il résulte également de l'expertise que l'appelante n'a jamais produit les justificatifs de l'immobilisation et des surcouts allégués. Elle n'établit ainsi ni la réalité de son préjudice sur ce point, ni d'ailleurs non plus une faute de la maîtrise d'oeuvre.
S'agissant de l'habillage des rives des escaliers :
13. Il résulte de l'instruction que le cahier des clauses techniques particulières du lot 3.5 : " revêtements de sols souples " prévoyait que la pose des sols devait être réalisée conformément au document technique unifié 53.2 relatif aux revêtements de sols en polychlorure de vinyle collé. Ce document technique unifié indique que sauf traitement particulier des rives, les revêtements sont arasés en périphérie. Il n'est pas contesté que l'appelante n'ayant pas réalisé cette pose conformément à ces recommandations a réalisé un habillage des rives. Si l'expert considère que cette prestation a apporté une plus-value à l'ouvrage, il note que l'entreprise n'en a jamais réclamé le coût au cours de l'exécution du chantier. Compte tenu de ces éléments, la faute commise par l'appelante exonère, en tout état de cause, la maîtrise d'oeuvre de toute responsabilité. Les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre sont donc fondés à demander que le jugement du tribunal administratif de Rouen soit réformé en ce qu'il les a condamnés à payer la somme de 15 216,25 euros hors taxes à la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale.
S'agissant des radiateurs plinthes dans la salle des pas perdus du palais de justice :
14. Il résulte de l'instruction et notamment de la note technique établie par la société Gecamex faite " dans les intérêts du groupement de maitrise d'oeuvre " dans le cadre de l'expertise, que " la maîtrise d'oeuvre a bien demandé à l'appelante de mettre en place des radiateurs plinthe " à la place de radiateurs en panneaux prévus dans le marché. Elle indique que la " maîtrise d'oeuvre juge la demande fondée sur le principe ". L'expert a également validé cette demande de l'appelante. Il n'est pas sérieusement contesté que le groupement de maîtrise d'oeuvre n'a pas fait valider cette prestation par le mandataire du maître d'ouvrage. Compte tenu de ces éléments, les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ne peuvent alléguer comme ils le font que ces travaux n'auraient pas fait l'objet d'une demande préalable de leur part. La société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale a donc pu de bonne foi estimer que cette demande de la maîtrise d'oeuvre était validée par le maître d'ouvrage, s'agissant de travaux dont la note technique précitée, établie à la demande du maître d'oeuvre, reconnait le caractère utile et indispensable. Elle est donc fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement du tribunal administratif de Rouen a retenu une faute exonératoire de sa part à hauteur de cinquante pour cent. Ce jugement est donc réformé en ce qu'il a limité la condamnation des membres de la maîtrise d'oeuvre à la somme de 3 718,13 euros sur un montant réclamé de 7 436,27 euros hors taxes, auquel il sera fait droit en totalité, compte tenu de ce qui vient d'être exposé.
15. Enfin, si la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale doit être regardée comme invoquant d'autres chefs de préjudice compte tenu du chiffrage de sa demande à 1 189 612 ,58 euros hors taxes, elle n'apporte aucune précision sur ces postes et ne démontre pas, en tout état de cause, la faute de la maîtrise d'oeuvre sur ces postes.
16. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède et notamment des points 13 et 14, que la condamnation des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre à l'égard de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale doit être diminuée d'un montant de 11 498, 12 euros hors taxes, soit de 13 797,74 euros toutes taxes comprises. Par suite, l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Rouen doit être réformé en ce qu'il a fixé la condamnation des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre à la somme de 22 721,25 euros toutes taxes comprises à verser à la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale. Cette somme doit être ramenée à la somme de 8 923,52 euros toutes taxes comprises.
Sur les conclusions d'appel provoqué de la maîtrise d'oeuvre :
17. Les membres de la maîtrise d'oeuvre appellent en garantie la société H4. Or, les principes rappelés au point 2 excluent que la responsabilité du mandataire du maître d'ouvrage soit recherchée par les constructeurs pour les fautes commises dans l'exécution de sa mission, seule la responsabilité du mandant pouvant être mise en cause. Par suite, les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société H4 ne peuvent qu'être rejetées.
18. Si le groupement de maîtrise d'oeuvre appelle également en garantie l'Etat pour les condamnations prononcées à son encontre en soutenant que celui-ci aurait mal défini le programme et aurait eu une mauvaise gestion du budget du chantier, il n'apporte aucun élément de nature à établir la faute de l'Etat. Au contraire, l'expert a estimé que l'allongement du chantier résultait d'une " réalité imprévisible " et non d'une faute de la maîtrise d'ouvrage. Par suite l'appel en garantie dirigé contre l'Etat ne peut qu'être rejeté.
Sur les dépens :
19. Le Conseil d'Etat n'a cassé l'arrêt de la cour qu'en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale dirigées contre la société H4 et contre les membres de la maîtrise d'oeuvre. La mise à la charge de l'appelante des dépens par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 22 février 2018 est donc devenue définitive. Par suite, les conclusions de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale sur ce point ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société H4, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale et les membres de la maîtrise d'oeuvre lui demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société H4 et non compris dans les dépens. De même, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge du groupement de maîtrise d'oeuvre, qui n'est pas la partie essentiellement perdante dans la présente instance, la somme que la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale demande à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante la somme réclamée à ce titre par le groupement de maîtrise d'oeuvre.
DÉCIDE :
Article 1er : La condamnation de Mme C..., de Mme S... née D..., de Mme E... née D... et de M. I... D..., tous ayant droit de M. T... D..., de M. F... et de la société Abac ingénierie est ramenée à la somme de 8 923,52 euros.
Article 2 : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Rouen du 8 décembre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La coopérative métropolitaine d'entreprise générale versera, à la société H4, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Me G... N... pour la société Coopérative métropolitaine d'entreprise générale, à Me A... Q... pour la société H4, à Me B... U... pour Mme C..., pour Mme H... S... née D..., Mme K... E... née D..., M. I... D..., pour M. F... et pour la société Abac ingénierie et au ministre de l'intérieur ainsi qu'au ministre de la justice.
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N°19DA02406
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