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09/02/2021 | FRANCE | N°19DA01125

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 09 février 2021, 19DA01125


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société OK Menuiseries a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner Lille Métropole Habitat, office public de l'habitat de la métropole européenne de Lille, à lui verser, d'une part, la somme de 52 370,96 euros au titre de factures restées impayées, d'autre part, la somme de 172 489 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2015 puis capitalisés en réparation de son préjudice matériel.

Par un jugement n° 1602950 du 19 mars 2019, le tribunal admin

istratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société OK Menuiseries a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner Lille Métropole Habitat, office public de l'habitat de la métropole européenne de Lille, à lui verser, d'une part, la somme de 52 370,96 euros au titre de factures restées impayées, d'autre part, la somme de 172 489 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2015 puis capitalisés en réparation de son préjudice matériel.

Par un jugement n° 1602950 du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 mai 2019, et un mémoire, enregistré le 25 février 2020, la SARL OK Menuiseries, représentée par Me C... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner Lille Métropole Habitat à lui verser, d'une part, la somme de 48 496,14 euros et, d'autre part, la somme de 172 489 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2015 puis capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de Lille Métropole Habitat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 23 mars 2020 ;

- la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n°2005-1742 du 30 décembre 2005 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me A... B..., représentant l'office public de l'habitat de la métropole Européenne de Lille.

Considérant ce qui suit :

1. Par un marché notifié le 20 septembre 2012, l'office public de l'habitat Lille Métropole Habitat a conclu avec la société OK Menuiseries un marché à bons de commande de travaux de menuiserie bois/PVC (lot n° 10). Par un courrier du 2 novembre 2015, l'office public de l'habitat a procédé à la résiliation de ce marché.

2. La société OK Menuiseries relève appel du jugement du 19 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'office public de l'habitat à lui verser, d'une part, une somme correspondant à une facture restée impayée et, d'autre part, une indemnité en réparation du préjudice ayant résulté de l'absence de commande depuis le 1er juillet 2015 et de la résiliation du marché.

Sur les conclusions à fin de paiement de travaux :

En ce qui concerne la recevabilité des conclusions :

3. Il résulte de l'instruction qu'une réclamation préalable, portant notamment sur le règlement de deux factures impayées, l'une émise le 27 avril 2015 pour un montant de 48 496,14 euros et l'autre émise le 23 avril 2015 pour un montant de 1 323,19 euros, a été adressée par la société OK Menuiseries à l'office public de l'habitat par un courrier du 21 décembre 2015. Dès lors, la fin de non-recevoir fondée sur l'absence de la réclamation préalable exigée par l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ne peut pas être accueillie.

En ce qui concerne le bien-fondé des conclusions :

4. D'une part, il résulte des éléments produits en appel que la facture n° 1512 de 48 496,14 euros, dont la société appelante réclame le règlement, a fait l'objet d'un devis n° 15/0106 du 8 janvier 2015 adressé à Lille Métropole Habitat pour un chantier relatif à la résidence Valmy à Roubaix et d'un bon de commande n° 945340 du même montant du 23 avril 2015, mentionnant le devis n° 15/0106, pour des travaux à réaliser avant le 30 juin 2015. Une autre facture du même montant, datée du 15 juin 2015, a mentionné le détail des prestations consistant, pour l'essentiel, à fournir et à poser 54 nouveaux vélux et à procéder notamment au démontage des anciens châssis, à l'élargissement de la trémie, à la rectification des ébrasements et au remplacement des tuiles.

5. D'autre part, dans sa lettre portant résiliation du marché du 2 novembre 2015, l'office public de l'habitat a lui-même reconnu, en lui reprochant cette circonstance, que la société OK Menuiseries avait exécuté des travaux à la résidence Valmy à Roubaix pour un montant de 48 496,14 euros.

6. Il résulte de ce qui précède, même si la facture susmentionnée ne comportait pas la référence du marché et n'a pas été intégrée à un projet de décompte contractuel, que les travaux dont la société OK Menuiseries demande le paiement ont été effectués sur la demande de l'office public de l'habitat et ont été effectivement exécutés. Dans ces conditions, la société appelante est fondée à demander la condamnation de l'office public de l'habitat à lui verser la somme de 48 496,14 euros en règlement de la facture émise le 27 avril 2015.

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

En ce qui concerne l'absence d'émission de bons de commande :

7. Aux termes de l'article L. 421-26 introduit au code de la construction et de l'habitation par l'article 132 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 : " Les marchés des offices publics de l'habitat sont régis par les dispositions applicables aux marchés des personnes publiques ou privées soumises aux règles fixées par l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ".

8. Aux termes de l'article 43 du décret du 30 décembre 2005susvisé alors applicable : " I. - Un marché à bons de commande est un marché conclu avec un ou plusieurs opérateurs économiques et exécuté au fur et à mesure de l'émission de bons de commande. / Dans ce marché le pouvoir adjudicateur a la faculté de prévoir un minimum et un maximum en valeur ou en quantité, ou un minimum, ou un maximum, ou encore être conclus sans minimum ni maximum. / L'émission des bons de commande s'effectue sans négociation ni remise en concurrence préalable des titulaires, selon des modalités expressément prévues par le marché. / Les bons de commande sont des documents écrits adressés aux titulaires du marché. Ils précisent celles des prestations, décrites dans le marché, dont l'exécution est demandée et en déterminent la quantité ".

9. Le 2 de l'article 1er du cahier des clauses administratives particulières du marché a prévu que le marché à bons de commande en litige " est sans seuil (ni minimum, ni maximum) ".

10. Dans ces conditions, l'office public de l'habitat n'était pas tenu de passer un montant minimal de commandes au titulaire du lot n°10 de ce marché. La circonstance que l'office se soit abstenu de solliciter la société appelante depuis le 1er juillet 2015 jusqu'à la fin du marché, à la supposer établie, n'a dès lors pu lui créer aucun préjudice.

11. Il résulte de ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de l'office public de l'habitat à ce titre, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense.

En ce qui concerne la résiliation du marché :

12. Il résulte de l'instruction que la société OK Menuiseries a accepté des réaliser des prestations en dehors du périmètre géographique du lot n° 10 du marché pour un montant non contesté de 134 926,55 euros et au-delà de son champ d'intervention technique pour un montant non contesté de 22 580,12 euros.

13. Dans la mesure où ces prestations ont été exécutées après l'émission de bons de commande d'un agent habilité de l'office public de l'habitat et en l'état des productions de l'office public de l'habitat à l'instance, ces agissements ne peuvent pas être regardés comme ayant présenté un caractère " frauduleux " au sens du i) du 3.1. de l'article 46 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux, permettant à la personne publique de résilier le marché sur un tel fondement.

14. Toutefois, dès lors que l'exécution de ces bons de commande a empiété, durant près de dix-huit mois et pour des montants non négligeables, sur l'exécution des prestations prévues au bénéfice des titulaires des autres lots du marché, ces irrégularités doivent être regardées comme constitutives d'inexécutions d'obligations contractuelles caractérisant des fautes d'une gravité suffisante justifiant qu'il soit mis fin sans indemnité à l'exécution du lot n° 10 du marché.

15. Par suite, la société appelante, qui en tout état de cause n'a subi aucun préjudice en l'absence d'un montant minimal de commandes garanti par le marché, n'est pas fondée à réclamer une indemnisation au titre de la résiliation de ce lot, prononcée par un courrier du 2 novembre 2015, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par l'office public de l'habitat.

16. Il résulte de tout ce qui précède que la société OK Menuiseries est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'office public de l'habitat à lui verser la somme de 48 496,14 euros.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

17. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société OK Menuiseries, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Lille Métropole Habitat la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

18. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Lille Métropole Habitat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société OK Menuiseries et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 19 mars 2019 est annulé.

Article 2 : Lille Métropole Habitat est condamné à verser la somme de 48 496,14 euros à la société OK Menuiseries.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société OK Menuiseries est rejeté.

Article 4 : Lille Métropole Habitat versera à la société OK Menuiseries une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de Lille Métropole Habitat présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... D... pour la société OK Menuiseries, et à Lille Métropole Habitat, office public de l'habitat de la métropole européenne de Lille.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01125
Date de la décision : 09/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : STIENNE-DUWEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-02-09;19da01125 ?
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