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04/02/2021 | FRANCE | N°20DA00154

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 04 février 2021, 20DA00154


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 3 janvier 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Nord a refusé de le titulariser ainsi que l'arrêté du même jour par lequel le président a mis fin à son stage en qualité d'adjoint technique territorial et a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 1er février 2017.

Par un jugement n° 1701541 du 26 novembre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa d

emande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 3 janvier 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Nord a refusé de le titulariser ainsi que l'arrêté du même jour par lequel le président a mis fin à son stage en qualité d'adjoint technique territorial et a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 1er février 2017.

Par un jugement n° 1701541 du 26 novembre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 janvier 2020 et 17 septembre 2020, M. I... B..., représenté par Me C... F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cette décision et cet arrêté du 3 janvier 2017 ;

3°) d'enjoindre au département du Nord de le réintégrer dans ses fonctions, avec effet au 1er février 2017, dans un délai de deux mois ;

4°) de mettre à la charge du département du Nord les entiers dépens ainsi que la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 ;

- le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme J... A..., présidente-rapporteure,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me D... E... substituant Me H..., pour le département du Nord.

Considérant ce qui suit :

1. M. I... B... a été recruté par le département du Nord en qualité d'adjoint technique territorial de 2ème classe stagiaire, chargé de maintenance au collège Jules Verne de Maubeuge, à compter du 1er juillet 2015. Par un arrêté du 3 janvier 2017, notifié par une lettre du même jour, le président du conseil départemental du Nord a refusé de le titulariser à la fin de sa période de stage et l'a licencié à compter du 1er février 2017. M. B... relève appel du jugement du 26 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 5 du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage./ Le licenciement est prononcé après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d'emplois dans lequel l'intéressé a vocation à être titularisé. ". Aux termes de l'article 10 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux : " A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination au vu notamment d'une attestation de suivi de la formation d'intégration établie par le Centre national de la fonction publique territoriale. / Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l'autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Les adjoints techniques territoriaux stagiaires et les adjoints techniques territoriaux principaux de 2e classe stagiaires qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire, ou dont le stage complémentaire n'a pas été jugé satisfaisant, sont soit licenciés s'ils n'avaient pas auparavant la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur grade d'origine. ".

3. Aux termes de l'article L. 421-23 du code de l'éducation : " I. Par dérogation aux dispositions des lois n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les agents de l'Etat ou des collectivités territoriales affectés dans un établissement public local d'enseignement conservent leur statut, sont administrés par la collectivité dont ils dépendent statutairement et sont placés sous l'autorité du chef d'établissement./ (...) Le chef d'établissement est assisté des services d'intendance et d'administration ; il encadre et organise le travail des personnels techniciens, ouvriers et de service placés sous son autorité. ".

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le stage de M. B... a fait l'objet de rapports d'évaluation les 17 décembre 2015 et 29 juin 2016 établis par la principale du collège, chargée d'encadrer et organiser le travail des personnels techniciens, ouvriers et de service placés sous son autorité. En sa qualité de cheffe d'établissement, elle était à même d'évaluer l'aptitude de M. B... à exercer les fonctions qui lui ont été confiées. Aucune disposition légale ou réglementaire n'imposait qu'un avis de nature technique sur les compétences de M. B... soit recueilli, ni que l'avis du correspondant territorial du département soit sollicité. Par ailleurs, la référence au personnel " TOS ", c'est-à-dire " technicien, ouvriers et de service ", qui n'existe plus depuis le transfert de ces agents au département, s'agissant des collèges, ou au discours d'un vice-président du conseil général dans ces rapports ne sont pas de nature à remettre en cause leur régularité. Le moyen tiré de ce que la procédure aurait été viciée doit être écarté.

5. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir que l'arrêté portant refus de titularisation et licenciement est intervenu près de six mois après sa dernière évaluation de stage et que cette période de six mois supplémentaires n'a pas été prise en compte, il ressort des pièces du dossier que cette évaluation du 29 juin 2016 est intervenue à la veille de la fin théorique de son stage d'un an. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que la décision de licenciement intervienne dans un délai déterminé une fois le stage achevé. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté en raison du délai avec lequel il est intervenu doit être écarté.

6. Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne. L'autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu'elle retient caractérisent des insuffisances dans l'exercice des fonctions et la manière de servir de l'intéressé. Il résulte de ce qui précède que, pour apprécier la légalité d'une décision de refus de titularisation, il incombe au juge de vérifier qu'elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu'elle n'est entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste dans l'appréciation de l'insuffisance professionnelle de l'intéressé, qu'elle ne revêt pas le caractère d'une sanction disciplinaire et n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir.

7. En troisième lieu, le président du conseil départemental du Nord a fondé sa décision de ne pas titulariser M. B... à l'issue de son stage sur le fait que l'intéressé n'a pas les compétences professionnelles requises, ce qui aboutit à la mise en danger des usagers de l'établissement ainsi que de lui-même et qu'il manque également de respect par rapport à l'autorité hiérarchique et fonctionnelle.

8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des deux rapports d'évaluation de la cheffe d'établissement des 17 décembre 2015 et 29 juin 2016, ainsi que du courrier du 5 juillet 2016 adressé par cette dernière à l'autorité territoriale, que M. B... ne dispose pas de toutes les compétences pour exercer ses missions de chargé de maintenance en établissement scolaire. Il y est notamment relevé qu'il ne sait pas diagnostiquer une panne, ni mettre en oeuvre les mesures correctives telles que savoir couper la vanne d'arrivée d'eau, et a besoin de solliciter l'avis technique du gestionnaire ou du principal adjoint. La circonstance qu'il ait été employé en tant qu'agent contractuel au cours des années scolaires 2013/2014 et 2014/2015 et qu'il dispose d'un diplôme de niveau V n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par l'autorité territoriale. En dépit d'une première évaluation réalisée en décembre 2015, et d'un entretien le 22 mars 2016 entre l'intéressé, le correspondant territorial et le gestionnaire, aucune amélioration n'a pu être constatée par la cheffe d'établissement. Contrairement à ce que soutient le requérant, le suivi de deux formations en octobre et novembre 2016 n'impliquait pas qu'une nouvelle évaluation soit portée sur son aptitude professionnelle alors qu'il a bénéficié d'une année complète de stage sans pouvoir démontrer ses capacités. La circonstance qu'il n'ait pas fait l'objet d'un entretien professionnel est sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige. Par ailleurs, les rapports de stage indiquent que M. B... méconnaît le principe hiérarchique alors qu'il est sous l'autorité fonctionnelle de la cheffe d'établissement. Il ressort également d'une note circonstanciée du 11 avril 2017 de la principale, qui atteste de faits antérieurs à l'arrêté en litige, et qui se sont produits au cours la période de stage de M. B..., que celui-ci se comportait comme un chef à l'égard de son collègue, placé en contrat unique d'insertion, lui interdisait d'effectuer certaines tâches et lui avait également expliqué comment se dissimuler au sein de l'établissement pour se soustraire aux tâches. Enfin, les attestations produites par le requérant d'une amie et de sa soeur témoignant de ce que ce collègue, que M. B... côtoyait en dehors de l'établissement, se serait plaint de ses conditions de travail, ne suffisent pas à remettre en cause la matérialité des faits invoqués par l'autorité territoriale pour justifier de l'insuffisance professionnelle du requérant. Dans ces conditions, le président du conseil départemental du Nord n'a ni entaché l'arrêté en litige d'une inexactitude matérielle des faits, ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation de l'insuffisance professionnelle de M. B....

9. En dernier lieu, les dispositions de l'article 10 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux prévoient la faculté pour l'autorité administrative de prolonger la période de stage pour une durée maximale d'un an. Elles ne créent pas de droit à la prorogation de stage pour l'agent. Si M. B... fait valoir n'avoir pas bénéficié d'une prorogation, il ne ressort pas des pièces du dossier et compte tenu des éléments exposés au point précèdent que l'autorité territoriale aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne décidant pas d'une prolongation de son stage.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. L'instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, ses conclusions présentées sur ce fondement doivent être également rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par le département du Nord sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département du Nord au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... F... pour M. I... B... et à Me G... H... pour le département du Nord.

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N°20DA00154

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00154
Date de la décision : 04/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Stage. Fin de stage.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : DELABY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-02-04;20da00154 ?
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