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29/12/2020 | FRANCE | N°19DA01701

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 29 décembre 2020, 19DA01701


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler le refus du maire de Caugé de délivrer un certificat de non-opposition à sa déclaration préalable déposée le 26 novembre 2014 pour le changement de destination d'une construction située sur un terrain localisé au lieu-dit Branville à Caugé, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer ce certificat de non-opposition.

Par un jugement n° 1800163 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Rouen a

rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler le refus du maire de Caugé de délivrer un certificat de non-opposition à sa déclaration préalable déposée le 26 novembre 2014 pour le changement de destination d'une construction située sur un terrain localisé au lieu-dit Branville à Caugé, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer ce certificat de non-opposition.

Par un jugement n° 1800163 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2019, M. C... B..., représenté par Me A... F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision d'opposition à sa déclaration préalable ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Caugé la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me A... F..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'objet du litige :

1. M. B... a acquis en 2004 une maison d'habitation située sur le territoire de la commune de Caugé dans le département de l'Eure. Le précédent propriétaire avait édifié cet immeuble après avoir obtenu, le 12 avril 1984, un permis de construire pour un abri de jardin.

2. Le 26 novembre 2014, M. B... a déposé, en vue d'une régularisation, une déclaration préalable de travaux afin de modifier la destination de ce bâtiment. Par un arrêté du 11 décembre 2014, le maire de Caugé s'est opposé à cette déclaration.

3. Cet arrêté n'ayant été notifié à M. B... que le 30 décembre suivant, celui-ci, s'estimant bénéficiaire d'une décision tacite de non-opposition à sa déclaration préalable à compter du 26 décembre 2014, affirme avoir sollicité du maire de Caugé la délivrance d'un certificat de non-opposition tacite à cette déclaration préalable.

4. M. B... relève appel du jugement du 28 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen, après avoir regardé la demande comme étant dirigée contre la décision d'opposition à déclaration préalable en relevant que M. B... n'établissait pas avoir demandé au maire de lui délivrer un certificat de non-opposition, a rejeté sa demande d'annulation de cette décision d'opposition à déclaration préalable.

Sur la régularité du jugement :

5. M. B... soutient que le jugement attaqué comporte, en son point 7, une erreur matérielle en ce qu'il désigne la décision du 11 décembre 2014 comme étant une décision de non-opposition à déclaration préalable alors qu'il s'agissait d'une décision d'opposition.

6. Toutefois, alors que les autres motifs du jugement contesté ont bien évoqué une décision formelle d'opposition à déclaration préalable, cette simple erreur matérielle, sans incidence sur le fond du litige, n'a pas affecté la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier pour ce motif doit être écarté.

Sur la légalité de la décision du 11 décembre 2014 :

En ce qui concerne la légalité externe :

7. M. B... soulève des moyens de légalité externe à l'encontre de la décision d'opposition à déclaration préalable du 11 décembre 2014, tirés de ce que cette décision serait insuffisamment motivée et serait entachée d'un vice de procédure, en l'absence de procédure contradictoire préalable.

8. Cependant, l'intéressé n'a soulevé devant le tribunal administratif de Rouen que des moyens tirés de l'illégalité interne de la décision attaquée. Par suite, il n'est pas recevable à invoquer, après l'expiration du délai de recours contentieux, ces moyens de légalité externe qui ne sont pas d'ordre public et qui sont fondés sur une cause juridique distincte.

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant de la prescription de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme :

9. Aux termes de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. / Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables : (...) e) Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les débats parlementaires, que la prescription ainsi instituée ne s'applique qu'aux seuls cas où la construction a été édifiée en méconnaissance du permis de construire initialement délivré, à l'exclusion de ceux où la construction a été édifiée sans permis de construire.

11. En l'espèce il ressort des pièces versées au dossier, et en particulier du permis de construire délivré en 1984, que la construction objet du présent litige a procédé non pas d'une autorisation de construire une maison individuelle d'habitation mais d'une autorisation qui permettait uniquement la construction d'un abri de jardin. Il suit de là que cette construction doit être regardée comme ayant été réalisée sans permis de construire au sens des dispositions précitées du e) de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme.

12. Dès lors, et alors même, en tout état de cause, que le maire de Caugé s'est fondé, pour s'opposer à la demande de déclaration préalable de l'intéressé, non pas sur l'irrégularité de la construction existante au regard du permis de construire délivré en 1984 mais sur la méconnaissance des dispositions des articles N1 et N2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Caugé, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la prescription instituée par les dispositions précitées de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme, dans le champ de laquelle le changement de destination faisant l'objet de sa déclaration préalable n'entre pas.

S'agissant de la délivrance d'une autorisation de régularisation :

13. D'une part, lorsqu'un immeuble a été édifié en violation des prescriptions du permis de construire initialement sollicité, une nouvelle autorisation ne peut être légalement accordée pour permettre la régularisation de la construction que si elle est conforme aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date de sa délivrance. Dans l'hypothèse où doit être appréciée l'existence d'un changement de destination, l'autorité compétente doit prendre en considération la destination du bâtiment telle qu'elle a été initialement autorisée ainsi que, le cas échéant, tout changement ultérieur de destination qui a fait l'objet d'une autorisation, mais non la destination donnée à l'immeuble par les travaux réalisés de façon irrégulière.

14. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire délivré en 1984 concernait un cellier à usage d'abri de jardin d'une surface hors oeuvre nette de 23 m², qu'aucun changement de destination de cette construction n'a été autorisé depuis cette date et que le changement de la destination effective, pour un usage d'habitation, de la construction objet du présent litige a procédé de travaux réalisés de façon irrégulière. Dès lors, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'il incombait au maire de prendre en compte cette nouvelle destination effective.

15. D'autre part, aux termes de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Caugé approuvé le 26 juin 2007 : " Sont interdites les constructions et installations de quelque destination que ce soit, exceptés les types d'occupation ou d'utilisation du sol mentionnés à l'article 2 ". Aux termes de l'article N2 du même règlement : " Sont admises, à l'exception des interdictions mentionnées à l'article 1, les constructions et installations de quelque destination que ce soit, notamment : / - l'aménagement et l'extension des bâtiments et établissements existants, ainsi que leurs annexes ; / - la reconstruction des constructions existantes après sinistre (...) ".

16. Ainsi que l'a déjà jugé le Conseil d'Etat dans sa décision n° 361212 du 26 mai 2014, si ces dispositions permettent l'aménagement et l'extension des bâtiments existants, quelle que soit leur destination, elles n'autorisent pas le changement de destination d'un bâtiment existant.

17. La demande de M. B..., qui tend à modifier la destination de son bâtiment par transformation d'un abri de jardin en une construction à usage d'habitation, constitue un changement de destination qui n'est pas autorisé par les dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Caugé applicables à la parcelle ZB n° 169 objet du présent litige.

18. Il résulte de ce qui précède que le maire de Caugé a pu légalement s'opposer à la déclaration préalable présentée par M. B... le 26 novembre 2014.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Caugé qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... réclame au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... F... pour M. C... B..., à Me E... D... pour la commune de Caugé, à la ministre de la transition écologique et à Me A... F....

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.

N°19DA01701 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01701
Date de la décision : 29/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis - Permis tacite.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis - Permis tacite - Retrait.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SCHMIDT-SARELS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-12-29;19da01701 ?
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