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03/12/2020 | FRANCE | N°18DA01746

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 03 décembre 2020, 18DA01746


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Houdaer et Associés a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1602215 du 21 juin 2018, le tribunal administ

ratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Houdaer et Associés a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1602215 du 21 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 août 2018 et le 10 mars 2020, la SARL Houdaer et Associés, représentée par Me Wibaut, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité dès lors que le procès-verbal de remise à l'administration de fichiers informatiques comportant des éléments de sa comptabilité n'a été établi que lors de la restitution de ces fichiers par le service vérificateur, le jour de la réunion de synthèse mettant un terme à la vérification de sa comptabilité ;

- elle a été privée de la garantie tenant à la possibilité de saisir le supérieur hiérarchique du vérificateur et l'interlocuteur fiscal départemental ;

- c'est à tort que l'administration a regardé les indemnités kilométriques versées à son gérant comme insuffisamment justifiées ;

- la détermination par le vérificateur du montant des indemnités kilométriques admises en déduction de ses résultats imposables au titre des années 2010 et 2011 procède d'une évaluation erronée ;

- les cotisations versées au conseil de l'ordre des commissaires aux comptes étaient déductibles de son résultat imposable comme engagées dans l'intérêt de l'entreprise ;

- l'administation n'établit pas que les insuffisances de versement de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été constatées procédaient d'un manquement délibéré justifiant l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

Par des mémoires, enregistré le 4 janvier 2019 et le 20 mai 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Houdaer et Associés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Houdaer et Associés, qui exerce l'activité d'expertise comptable, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration a, notamment, constaté une insuffisance de versement par cette société de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable et remis en cause la déduction de son résultat imposable, d'une part, d'une partie des sommes qu'elle avait comptabilisées en charges comme correspondant au remboursement de frais de déplacements professionnels exposés par son gérant et, d'autre part, de cotisations versées au conseil de l'ordre des commissaires aux comptes. Les rectifications ainsi envisagées ont été portées à la connaissance de la SARL Houdaer et Associés par une proposition de rectification du 27 juin 2013, puis partiellement maintenues à la suite des observations présentées par la contribuable et de la saisine de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, dont l'avis a été rendu le 27 septembre 2017. La SARL Houdaer et Associés a, en conséquence, été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période vérifiée, assortis de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, ainsi qu'à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2010 et 2011, qui ont été mis en recouvrement le 16 octobre 2015 pour un montant total de 49 827 euros. La SARL Houdaer et Associés relève appel du jugement du 21 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 54 du code général des impôts : "'Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration (...)'". Aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "'Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contrôle porte sur l'ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l'élaboration des déclarations rendues obligatoires par le code général des impôts ainsi que sur la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l'exécution des traitements (...)'". Enfin, aux termes du I de l'article L 47 A du même livre, dans sa rédaction applicable : " Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable peut satisfaire à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général. L'administration peut effectuer des tris, classements ainsi que tous calculs aux fins de s'assurer de la concordance entre la copie des enregistrements comptables et les déclarations fiscales du contribuable. L'administration restitue au contribuable, avant la mise en recouvrement, les copies des fichiers transmis et n'en conserve aucun double (...)'".

3. Ni les dispositions rappelées de l'article L 47 A du livre des procédures fiscales, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'impose qu'un document écrit, daté et signé par le contribuable et par le vérificateur soit établi lors de la remise à ce dernier, sous forme dématérialisée, des copies des écritures comptables du contribuable. Si le paragraphe 17 de l'instruction 13 L-2-08 du 6 mars 2008, dont les énonciations ont été reprises au paragraphe n° 180 du Bulletin officiel des finances publiques - impôt (BOFiP) sous la référence BOI-CF-IOR-60-40-10 prévoit à son point n° 17 que " la remise des fichiers informatiques sera formalisée par écrit sur un document remis par le vérificateur et contresigné par le contribuable ", cette doctrine administrative ne peut, à supposer que la société requérante ait entendu s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, être utilement invoquée devant le juge de l'impôt dès lors qu'elle est relative à la procédure d'imposition. Si, par ailleurs, il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification, et notamment de celles de l'article L 13, que les vérifications de comptabilité se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée et que le vérificateur ne peut emporter les originaux de certains documents dans les bureaux de l'administration que sur demande écrite du contribuable, après avoir remis à l'intéressé un reçu détaillé des pièces remises et à condition de ne pas priver le contribuable de la possibilité d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, la prise par celui-ci de simples copies, sous format papier ou dématérialisé, d'éléments de la comptabilité informatisée dont le contribuable a conservé les originaux ne constitue pas un emport irrégulier de documents de nature à vicier la procédure d'imposition.

4. En l'espèce, il résulte des indications données en défense par l'administration, non formellement contestées par la société requérante, et des mentions figurant tant sur le procès-verbal de remise au vérificateur de fichiers informatique, comportant des éléments de la comptabilité tenue par la SARL Houdaer et Associés au moyen d'un système informatisé, que sur le procès-verbal de restitution au contribuable de ces fichiers, tous deux signés le 25 juin 2013 par le vérificateur et le représentant de la SARL Houdaer et Associés, que les fichiers remis ne constituaient que de simples copies. Dès lors, la circonstance que le procès-verbal de remise au vérificateur n'a été signé, postérieurement à cette remise, que le jour de la restitution des fichiers à la SARL Houdaer et Associés, lors de la tenue de la réunion de synthèse mettant un terme aux opérations de vérification, n'a pas eu pour conséquence de priver cette société d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur et de vicier la procédure d'imposition.

5. En second lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ". La charte des droits et obligations du contribuable vérifié assure au contribuable qui en fait la demande la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de rectification, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur puis avec l'interlocuteur départemental dans les conditions qu'elle précise. Un contribuable qui n'a, à aucun moment de la procédure de vérification, manifesté son intention de demander à bénéficier de ces garanties, peut utilement soutenir que, compte tenu des circonstances de fait, et notamment des informations portées à sa connaissance dans la proposition de rectification ou dans la réponse à ses observations, l'administration l'a induit en erreur sur la possibilité d'obtenir leur mise en œuvre alors même qu'elle n'était pas légalement tenue de faire connaître au contribuable, à ce stade de la procédure, la faculté pour celui-ci d'en bénéficier.

6. En l'espèce, il résulte des indications non contestées figurant dans la proposition de rectification qu'un exemplaire de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, joint à l'avis de vérification, avait été reçu par la SARL Houdaer et Associés le 12 avril 2013, avant l'engagement des opérations de contrôle. La réponse de l'administration aux observations de cette société, qui se borne à l'informer de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, ne peut être regardée comme revenant, même implicitement, sur la faculté pour celle-ci de débattre, en cas de désaccord sur le bien-fondé de l'imposition envisagée par l'administration, avec le supérieur hiérarchique du vérificateur puis avec l'interlocuteur départemental. Il en va de même de l'absence de rappel de cette possibilité dans le courrier notifiant à la SARL Houdaer et Associés l'avis de la commission. Il s'ensuit que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration, qui n'était pas légalement tenue, à ces stades de la procédure, de rappeler cette faculté au contribuable, aurait manqué au principe de loyauté dans le déroulement de la procédure d'imposition.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".

8. En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

En ce qui concerne les frais de déplacement versés par la société requérante à son gérant :

9. Il résulte des indications figurant dans la proposition de rectification du 27 juin 2013 qu'au cours des années 2010 et 2011, le gérant de la SARL Houdaer et Associés a utilisé, pour les déplacements exigés par son activité au sein de cette société, un véhicule dont il était propriétaire. La société requérante a versé à ce dernier, au cours de ces deux années, des indemnités kilométriques dont les montants respectifs de 15 666,73 euros et de 16 974,52 euros, avaient été calculés sur la base d'une distance parcourue de 41 933 kilomètres pour l'année 2010 et de 40 512 kilomètres pour l'année 2011, déterminée à partir des relevés kilométriques portés chaque semaine sur l'agenda du gérant de la société.

10. Le vérificateur a, toutefois, constaté des discordances entre ces distances et les kilométrages relevés sur les factures d'entretien du véhicule personnel du gérant de la société, établies le 8 octobre 2010 et le 27 octobre 2010, qui faisaient respectivement état de distances de 29 189 kilomètres et de 31 050 kilomètres parcourues par ce véhicule depuis le 8 décembre 2009, date de sa mise en service, alors que les frais de déplacements professionnels remboursés par la société requérante à son gérant avaient été déterminés sur la base de distances parcourues supérieures, qui s'élevaient à 31 151 kilomètres pour la période du 1er janvier 2010 au 8 octobre 2010 et à 34 139 kilomètres pour la période du 1er janvier 2010 au 27 octobre 2010. De même, le vérificateur a relevé que la facture d'entretien du 26 juin 2012 faisait apparaître une distance parcourue par le véhicule depuis sa mise en service de 85 512 kilomètres, supérieure de 3 000 kilomètres seulement, pour une période supplémentaire de six mois, aux déplacements indemnisés par la société durant les exercices 2010 et 2011. Enfin, la SARL Houdaer et Associés, qui ne présentait aucun état des frais kilométriques remboursés, ne procédait à aucune distinction entre les déplacements effectués par son gérant dans le cadre de ses fonctions et ceux qu'il avait entrepris à titre personnel ou dans le cadre de ses activités professionnelles extérieures à l'entreprise.

11. Il résulte des indications figurant dans la même proposition de rectification, ainsi que dans la réponse en date du 30 septembre 2013 aux observations de la société, qu'eu égard à ces incohérences, l'administration a estimé que la distance totale parcourue par le véhicule du gérant de la SARL Houdaer et Associés devait être évaluée pour chacune des années 2010 et 2011 à 34 200 kilomètres, correspondant au kilométrage annuel moyen du véhicule déterminé d'après la facture d'entretien du 26 juin 2012. L'administration a considéré qu'une distance de 2 000 kilomètres devait être en être retranchée, comme représentative de l'utilisation annuelle du véhicule de son gérant à des fins privatives. Faisant application d'un taux d'indemnité kilométrique, non contesté devant le juge de l'impôt, de 0,419 euro, l'administration a ainsi estimé que les indemnités kilométriques versées au gérant de la SARL Houdaer et Associés pour des montants de 15 667 euros en 2010 et de 16 975 euros en 2011, devaient être regardées comme correspondant à des déplacements professionnels non justifiés à hauteur de 2 175 euros, au titre de l'exercice 2010, et de 3 482 euros, au titre de l'exercice 2011, et pouvaient, pour le surplus, être admises en déduction, y compris en ce qui concerne les indemnités correspondant à la prise en charge par la SARL Houdaer et Associés des trajets effectués par son gérant entre son domicile et son lieu de travail. Il en est résulté un redressement des bases d'impositions de la société requérante à l'impôt sur les sociétés de 2 175 euros au titre de l'année 2010 et de 3 482 euros au titre de l'année 2011.

12. En premier lieu, la SARL Houdaer et Associés soutient que, pour apprécier la cohérence des éléments qui lui étaient présentés au titre des exercices clos en 2010 et en 2011, le vérificateur ne pouvait se référer au kilométrage figurant sur la facture d'entretien établie le 26 juin 2012 qui, incluant des données relatives à la période de six mois suivant les années en litige, ne pouvait être considérée comme représentative des distances parcourues au cours des exercices vérifiés par le véhicule de son gérant, dont l'utilisation était en constante diminution depuis l'année 2011. Toutefois, à la supposer établie par la production d'une facture d'entretien en date du 12 février 2013, cette diminution n'était pas significative, dès lors que, que d'après les données fournies par la société requérante elle-même, le kilométrage moyen mensuel parcouru entre le 26 juin 2012 et le 12 février 2013 s'élevait à plus de 2 000 kilomètres, soit à plus de 12 000 kilomètres sur une période de six mois. Ainsi, compte tenu des autres incohérences relevées par le vérificateur, mentionnées au point 10, c'est à bon droit que celui-ci a estimé que les relevés kilométriques hebdomadaires portés par le gérant de la société requérante sur son agenda ne constituaient pas des justificatifs suffisants des sommes déduites en charges, et ce, alors même que le paragraphe 16 de la documentation de base publiée le 10 février 1999 sous la référence 5 F-1151, à laquelle la SARL Houdaer et Associés se réfère sans toutefois s'en prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, recommande au service d'apprécier avec souplesse ce type de justificatif.

13. En second lieu, la SARL Houdaer et Associés soutient que le service ne pouvait davantage évaluer la distance totale parcourue annuellement par le véhicule de son gérant en retenant la moyenne de 34 200 kilomètres, déterminée à partir de la facture d'entretien du 26 juin 2012. Elle fait valoir, d'une part, que la facture d'entretien du 27 octobre 2010, à laquelle elle se réfère à titre d'exemple, fait apparaître une distance parcourue par le véhicule depuis sa mise en service de 31 050 kilomètres, alors que l'application de la moyenne retenue par l'administration conduirait à évaluer cette même distance à 30 685 kilomètres et, d'autre part, que la distance moyenne des déplacements professionnels annuels effectués par son gérant, déterminée à partir des factures d'entretien du véhicule pour la période comprise entre le 8 octobre 2010 et le 27 octobre 2010, s'établirait à 35 560 kilomètres, au lieu des 32 200 kilomètres retenus par l'administration pour l'utilisation du véhicule à des fins autres que personnelles. Toutefois, la SARL Houdaer et Associés se borne à alléguer qu'entre le 8 octobre 2010 et le 27 octobre 2010, ce véhicule n'aurait pas été utilisé pour des besoins privés. Elle ne donne pas non plus de précisions sur son éventuelle utilisation dans le cadre des autres activités professionnelles de son gérant au cours de cette même période. Celle-ci ne peut, par ailleurs, en raison de son extrême brièveté, être regardée comme représentative de la période vérifiée, ni même du seul exercice 2010. Enfin, si dans la réponse aux observations de la société du 30 septembre 2013, l'administration a considéré que l'usage privatif du véhicule ne pouvait être inférieur à 2 000 kilomètres par an, le gérant de la société requérante avait lui-même déclaré, au cours de la vérification de comptabilité, qu'il réalisait à l'occasion de ses vacances un kilométrage annuel de l'ordre de 4 000 à 5 000 kilomètres, de sorte que l'imprécision relative à la détermination de la part de l'utilisation du véhicule à des fins personnelles, retenue dans un sens favorable à la SARL Houdaer et Associés, est largement supérieure à celle résultant de la prise en compte par l'administration du kilométrage figurant sur la facture d'entretien du 26 juin 2012 pour déterminer la distance totale parcourue par celui-ci. Le moyen ainsi soulevé par la société requérante doit donc être écarté.

14. Enfin, la SARL Houdaer et Associés soutient que, dans sa réponse aux observations présentées par son gérant sur les rectifications proposées à ce dernier à la suite de la vérification de comptabilité dont elle-même a fait l'objet, puis dans le cadre du litige qui a opposé l'administration à son gérant devant le tribunal administratif de Lille, l'administration a admis que les sommes réintégrées dans ses résultats imposables au titre des années 2010 et 2011 devaient être imposées entre les mains de celui-ci, non en tant que revenus distribués, sur le fondement des dispositions du 1° du I de l'article 109 du code général des impôts, mais dans la catégorie des rémunérations de gérants majoritaires des gérants de sociétés à responsabilité limitée, sur le fondement des dispositions de l'article 62 du code général des impôts. Toutefois, la SARL Houdaer et Associés ne peut, en tout état de cause, invoquer sur le fondement des dispositions combinées du 1er alinéa de l'article L. 80 A et de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, la prise de position de l'administration fiscale dont elle entend ainsi se prévaloir, dès lors que celle-ci est postérieure à l'imposition primitive.

15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 14 que la SARL Houdaer et Associés n'est pas fondée à soutenir, tant sur le terrain de la loi fiscale et que sur celui de la doctrine de l'administration, que c'est à tort que le service a réintégré dans ses résultats imposables au titre des années 2010 et 2011 les sommes respectives de 2 175 euros et de 3 482 euros.

En ce qui concerne les cotisations versées au conseil de l'ordre des commissaires aux comptes :

16. L'administration a refusé le droit pour la SARL Houdaer et Associés de déduire de ses résultats imposables le montant des cotisations versées pour l'adhésion de son gérant au conseil de l'ordre des commissaires aux comptes, à hauteur de 911 euros en 2010 et de 1 093 euros en 2011. Il n'est pas contesté que la SARL Houdaer et Associés n'effectue elle-même aucune mission de commissariat aux comptes et que son gérant exerce cette activité en son nom propre. Si la société requérante soutient que, pour pouvoir accueillir en stage des candidats à l'inscription sur la liste des commissaires aux comptes, elle doit compter parmi ses effectifs une personne elle-même inscrite sur cette liste et ayant acquitté ses cotisations à l'ordre de sa profession, il n'est, en tout état de cause, pas soutenu par la société requérante qu'elle aurait effectivement accueilli de tels stagiaires durant les exercices en litige ni même seulement envisagé de procéder à de tels recrutements. C'est, dès lors, à bon droit que l'administration a considéré que ces dépenses n'avaient pas été supportées dans l'intérêt de la SARL Houdaer et en a refusé la déductibilité des résultats imposables de cette société.

Sur les pénalités :

17. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré " ;

18. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % prévue par ces dispositions aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à la SARL Houdaer et Associés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, l'administration ne s'est pas seulement fondée, contrairement à ce que soutient la société requérante, sur la circonstance que la rétention, jusqu'à l'encaissement effectif des prestations facturées, de la taxe dont elle était redevable, constituait la méconnaissance d'une règle élémentaire de liquidation de cet impôt qu'elle ne pouvait ignorer. Le service a également retenu le caractère récurrent de ce manquement, précédemment relevé lors d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2007 et 2008 et a, en outre, relevé le caractère significatif du montant total des droits éludés, qui s'élevait à plus de 30 000 euros au titre de la période correspondant aux exercices 2010 et 2011. Dans ces conditions, le caractère délibéré des insuffisances de versement de la taxe sur la valeur ajoutée doit être regardé comme établi et c'est à bon droit que l'administration a infligé à la SARL Houdaer et Associés la pénalité de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Houdaer et Associés n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions et pénalités contestées. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par la SARL Houdaer et Associés au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Houdaer et Associés est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Houdaer et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

7

No18DA01746


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01746
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées.


Composition du Tribunal
Président : M. Binand
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL WIBLAW

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-12-03;18da01746 ?
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