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12/11/2020 | FRANCE | N°20DA00517-20DA00518

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 12 novembre 2020, 20DA00517-20DA00518


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Madame F... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1904555 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de réexaminer la situation de Madame F....

Procédure devant la co

ur :

I. Par une requête enregistrée le 20 mars 2020 sous le numéro 20DA00517, le préfet de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Madame F... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1904555 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de réexaminer la situation de Madame F....

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 20 mars 2020 sous le numéro 20DA00517, le préfet de l'Eure demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement rendu par le tribunal administratif de Rouen le 5 mars 2020 sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative.

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II. Par une requête enregistrée le 20 mars 2020 sous le numéro 20DA00518, le préfet de l'Eure demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 mars 2020 ;

2°) de rejeter la requête de première instance de Mme F....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... B..., présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. Madame A... F... est une ressortissante camerounaise, née le 1er juin 1959 à Douala (Cameroun). Elle déclare être entrée en France le 1er août 2013. Elle a obtenu quatre titres de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle a demandé le renouvellement de son titre de séjour en 2018. Par un arrêté du 26 juillet 2019, le préfet de l'Eure a refusé de lui renouveler le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Par un jugement du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Rouen a prononcé l'annulation de l'arrêté du 26 juillet 2019 et a enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à l'intéressée une autorisation provisoire de séjour, procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, et a mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance. Le préfet de l'Eure d'une part, relève appel de ce jugement et, d'autre part, demande à la cour d'en prononcer le sursis à exécution.

Sur la jonction :

2. Les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement. Il y a donc lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur la requête n°20DA00518 :

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

3. D'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement (le demandeur) ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 31322, R. 313-23 et R. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté (...). L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " I. - Un référentiel général de sécurité fixe les règles que doivent respecter les fonctions des systèmes d'information contribuant à la sécurité des informations échangées par voie électronique telles que les fonctions d'identification, de signature électronique, de confidentialité et d'horodatage. Les conditions d'élaboration, d'approbation, de modification et de publication de ce référentiel sont fixées par décret. / II. - Lorsqu'une autorité administrative met en place un système d'information, elle détermine les fonctions de sécurité nécessaires pour protéger ce système. Pour les fonctions de sécurité traitées par le référentiel général de sécurité, elle fixe le niveau de sécurité requis parmi les niveaux prévus et respecte les règles correspondantes. Un décret précise les modalités d'application du présent II. / III. - Les produits de sécurité et les prestataires de services de confiance peuvent obtenir une qualification qui atteste de leur conformité à un niveau de sécurité du référentiel général de sécurité. Un décret précise les conditions de délivrance de cette qualification. Cette délivrance peut, s'agissant des prestataires de services de confiance, être confiée à un organisme privé habilité à cet effet ". Aux termes de l'article 1er du décret du 2 février 2010 pris pour l'application des articles 9, 10 et 12 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " Le référentiel général de sécurité prévu par l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 susvisée fixe les règles auxquelles les systèmes d'information mis en place par les autorités administratives doivent se conformer pour assurer la sécurité des informations échangées, et notamment leur confidentialité et leur intégrité, ainsi que la disponibilité et l'intégrité de ces systèmes et l'identification de leurs utilisateurs. / Ces règles sont définies selon des niveaux de sécurité prévus par le référentiel pour des fonctions de sécurité, telles que l'identification, la signature électronique, la confidentialité ou l'horodatage, qui permettent de répondre aux objectifs de sécurité mentionnés à l'alinéa précédent. / La conformité d'un produit de sécurité et d'un service de confiance à un niveau de sécurité prévu par ce référentiel peut être attestée par une qualification, le cas échéant à un degré donné, régie par le présent décret ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le référentiel général de sécurité ainsi que ses mises à jour sont approuvés par arrêté du Premier ministre publié au Journal officiel de la République française. L'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information concourt à l'élaboration de ce référentiel et à sa mise à jour en liaison avec la direction interministérielle du numérique. Ce référentiel est mis à disposition du public par voie électronique ". L'arrêté du 13 juin 2014 portant approbation du référentiel général de sécurité et précisant les modalités de mise en oeuvre de la procédure de validation des certificats électroniques approuve, en son article 1er, la version 2.0 du référentiel général de sécurité prévu à l'article 2 du décret du 2 février 2010 et, en son article 2, en assure la disponibilité par voie électronique sur le site internet de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information et sur le site internet du secrétariat général à la modernisation de l'action publique.

5. En l'espèce, il est constant que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, produit au dossier par le préfet de l'Eure, est revêtu des signatures électroniques des trois médecins membres du collège médical de l'office. En se bornant à soutenir, en première instance, que le défaut de production dudit avis par le préfet de l'Eure ne permet pas de s'assurer de l'intégrité du procédé de signature électronique auquel les médecins signataires ont eu recours, sans expliquer en quoi ce procédé aurait méconnu les orientations du référentiel général de sécurité instauré par les dispositions précitées, Mme F... n'apporte pas les précisions suffisantes permettant d'apprécier le bien-fondé du moyen soulevé. En outre, l'avis transmis par le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration comporte la mention selon laquelle il a été émis après que le collège en ait délibéré, mention faisant foi jusqu'à preuve du contraire. La requérante ne verse au dossier aucun élément probant de nature à remettre en cause le caractère collégial de la délibération. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Eure est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur ce motif pour annuler son arrêté du 26 juillet 2019 par lequel il a refusé de renouveler le titre de séjour de Mme F..., l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

6. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme F... devant le tribunal administratif de Rouen.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

7. En premier lieu, le préfet de l'Eure, après avoir mentionné les considérations de droit applicables, a rappelé la situation de Mme F... au regard de son droit au séjour, a indiqué que l'avis rendu par le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration ne le liait pas et a indiqué l'état de santé de la requérante au regard de cet avis. Le préfet, qui n'avait pas à reprendre expressément, et de manière exhaustive, la situation personnelle de l'intéressé, a cité les éléments pertinents dont il avait connaissance et qui fondent sa décision. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision refusant de renouveler le titre de séjour de Mme F... doit être écarté.

8. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 6 que le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration doit être écarté.

9. En troisième lieu, il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier, que le préfet de l'Eure, qui n'était pas tenu de viser toutes les circonstances de fait de la situation de l'intéressée, se serait cru en situation de compétence liée par l'avis du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration ou qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme F... avant de prendre la décision contestée. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

11. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires, doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un accès effectif au traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

12. Dans son avis du 29 avril 2019, le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration a retenu que l'état de santé de Mme F... nécessite une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge médicale peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, l'état de santé de l'intéressée peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Mme F..., atteinte d'une hépatite chronique, soutient qu'elle doit bénéficier d'un suivi régulier et que la disponibilité des traitements ne se serait pas améliorée depuis la délivrance de son dernier titre de séjour. Ces éléments, ne permettent pas, à eux-seuls, de contredire l'appréciation portée par le collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration et les pièces produites par le préfet de l'Eure. En outre, si Mme F... soutient que son traitement n'est pas substituable, cette allégation ne ressort d'aucune pièce du dossier. Enfin, la requérante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, à la supposer établie et, en tout état de cause, postérieure à l'édiction de l'arrêté contesté, que le Cameroun soit gravement touché par la pandémie de Covid-19. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

13. En dernier lieu, Mme F... déclare être entrée en France en 2013. Contrairement à ce qu'elle indique, il ressort des pièces du dossier qu'elle dispose toujours d'attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu au moins jusque l'âge de 54 ans et où résident trois de ses fils. Afin de justifier de son insertion sociale et professionnelle, la requérante produit plusieurs contrats de travail à durée déterminée successifs d'une activité de garde d'enfants à temps partiel depuis 2017. Toutefois, elle ne justifie pas d'une ancienneté professionnelle importante en France ou d'une qualification professionnelle particulière. En outre, elle ne peut utilement se prévaloir de son mariage avec un ressortissant français, postérieur à l'édiction de l'arrêté contesté. En tout état de cause, la requérante n'apporte aucune précision quant à la durée et l'intensité de cette relation. Dès lors, en édictant l'arrêté contesté, le préfet de l'Eure n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme F.... Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

14. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision refusant de lui renouveler son titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

15. En premier lieu, lorsqu'un refus de séjour est assorti d'une obligation de quitter le territoire français, la motivation de cette dernière se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique. Il ressort de ce qui a été dit au point 7 que la décision portant refus de titre de séjour comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse doit, par suite, être écarté.

16. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 14 que Mme F... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".

18. Il résulte de ce qui a été dit au point 13 que Mme F... n'apporte aucun élément de nature à contredire l'appréciation portée par le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration et par le préfet de l'Eure sur l'accessibilité des soins au Cameroun. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

19. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité.

Sur le délai de départ volontaire :

20. Mme F... soutient que l'arrêté attaqué, en ce qu'il lui octroie un délai de départ volontaire de trente jours, emporte des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle dès lors que ce bref délai entraîne l'impossibilité pour la requérante de se rendre à ses rendez-vous médicaux. Cependant, l'intéressée n'établit, ni même n'allègue, qu'elle aurait fait état, lors de sa demande ou de l'instruction de son dossier, de circonstances particulières nécessitant l'octroi d'un délai supérieur à trente jours. Dès lors, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui octroyant un délai de départ volontaire de trente jours, qui est par ailleurs le délai de droit commun, emporte des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

21. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est entachée d'illégalité.

Sur le pays de destination :

22. En premier lieu, les motivations en fait de la décision fixant le pays de destination et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne se confondent pas nécessairement. En revanche, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'arrêté attaqué précise la nationalité de Mme F... et énonce notamment qu'aucun élément ne permet de considérer que la décision méconnaîtrait les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, la décision par laquelle le préfet de l'Eure a fixé le pays de destination énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté.

23. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 14 que Mme F... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

24. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il établit être légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) ". Aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi. (...) ". Aux termes de l'article 3 de la même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

25. Ainsi qu'il a été dit précédemment au point 12, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme F... ne pourrait bénéficier d'un traitement médical approprié à son état de santé, en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la violation des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés.

26. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 13, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

27. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est entachée d'illégalité.

28. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de l'Eure, que Mme F... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté par lequel le préfet de l'Eure a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Sur la requête n°20DA00517 :

29. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête du préfet de l'Eure tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête n° 20DA00517 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

30. Les conclusions présentées à fin d'injonction et celles prononcées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 par Mme F... ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1904555 du 5 mars 2020 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme F... devant le tribunal administratif de Rouen ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n°20DA00517 tendant au sursis à l'exécution du jugement.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme A... F..., et à Me C... D....

Copie en sera transmise au préfet de l'Eure.

2

N°20DA00517-20DA00518


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00517-20DA00518
Date de la décision : 12/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-11-12;20da00517.20da00518 ?
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