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22/10/2020 | FRANCE | N°20DA00794-20DA00795

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 22 octobre 2020, 20DA00794-20DA00795


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... C... B... et Mme G... C... B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les deux arrêtés du 20 décembre 2019 par lesquels la préfète de la Somme leur a refusé la délivrance de titres de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement.

Par un jugement nos 2000459 et 2000460 du 28 mai 2020, le tribunal administratif d'Amiens a annulé ces arrêtés et a enjoint à la pré

fète de la Somme de délivrer respectivement à M. et à Mme C... B... un certificat de rés...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... C... B... et Mme G... C... B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les deux arrêtés du 20 décembre 2019 par lesquels la préfète de la Somme leur a refusé la délivrance de titres de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement.

Par un jugement nos 2000459 et 2000460 du 28 mai 2020, le tribunal administratif d'Amiens a annulé ces arrêtés et a enjoint à la préfète de la Somme de délivrer respectivement à M. et à Mme C... B... un certificat de résidence de ressortissant algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 2 juin 2020 sous le n° 20DA00794, la préfète de la Somme demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mai 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé son arrêté pris à l'encontre de Mme C... B... ;

2°) de rejeter l'ensemble des moyens et conclusions présentés par Mme C... B... devant le tribunal administratif d'Amiens.

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II. Par une requête, enregistrée le 2 juin 2020 sous le n° 20DA00795, la préfète de la Somme demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mai 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé son arrêté pris à l'encontre de M. C... B... ;

2°) de rejeter l'ensemble des moyens et conclusions présentés par M. C... B... devant le tribunal administratif d'Amiens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le loi n° 971-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... A..., présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées n° 20DA00794 et n° 20DA00795 présentées par la préfète de la Somme présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

2. M. C... C... B... et son épouse, Mme G... C... B..., ressortissants algériens nés respectivement le 13 novembre 1980 et le 13 juin 1991, sont entrés régulièrement en France en novembre 2015 munis de visas de court séjour afin d'y solliciter l'asile. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 décembre 2016, confirmées par deux décisions de la Cour nationale du droit d'asile du 3 octobre 2017. Les 20 septembre et 6 novembre 2019, M. et Mme C... B... ont sollicité la délivrance de certificats de résident portant la mention " vie privée et familiale " en faisant valoir, au soutien de leur demande, l'état de santé de Mme C... B.... Par deux arrêtés du 20 décembre 2019, la préfète de la Somme a refusé de leur délivrer les titres de séjour ainsi sollicités, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement. La préfète de la Somme relève appel du jugement du 28 mai 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé ces deux arrêtés.

Sur le bien-fondé du motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7 au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) ".

4. Pour annuler les arrêtés en litige comme reposant d'une part, concernant Mme C... B..., sur une méconnaissance des stipulations précitées de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, et comme reposant d'autre part, concernant M. C... B..., sur une erreur manifeste d'appréciation, le tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur les documents médicaux produits par M. et Mme C... B... dont il a estimé que les constatations étaient de nature à remettre en cause les avis des 7 mai 2018 et 21 novembre 2019 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur l'état de santé de Mme C... B... sur sur lesquels s'est fondée la préfète de la Somme pour refuser la délivrance d'un titre de séjour aux intéressés. Ces avis indiquent que si l'état de santé de Mme C... B... nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. En cause d'appel, la préfète de la Somme fait valoir que cette appréciation est erronée et que par ailleurs, l'Algérie dispose de structures psychiatriques adaptées pour la prise en charge de la requérante. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et en particulier des certificats médicaux établis les 1er septembre 2018 et 22 janvier 2020 par le médecin psychiatre de Mme C... B..., lequel assure son suivi depuis plus de trois ans, qu'une interruption de prise en charge de l'intéressée, qui souffre d'un " état anxio-dépressif important et persistant avec une humeur triste, de fortes angoisses et des insomnies, apparaissant en rapport aux résurgences d'un état de stress post-traumatique " en raison duquel elle bénéficie d'un traitement médicamenteux, risque de provoquer une " décompensation majeure aux conséquences d'une exceptionnelle gravité ". Ces certificats médicaux, eu égard à leur caractère particulièrement précis et circonstancié, sont de nature à établir qu'un défaut de prise en charge médicale entraînerait, pour l'intéressée, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et donc à remettre en cause les conclusions du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur lesquelles s'est fondée la préfète de la Somme, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges. D'autre part, alors que ce n'est pas le motif retenu par l'arrêté du 20 décembre 2019 et que la préfète n'a pas explicitement sollicité de substitution de motif, elle ne peut utilement se prévaloir de la disponibilité des soins dans le pays d'origine. Il suit de là que c'est également à bon droit que les premiers juges ont retenu, qu'en refusant le séjour au titre de la vie privée et familiale à M. C... B..., présent auprès de son épouse depuis leur entrée sur le territoire français, la préfète de la Somme a commis une erreur manifeste d'appréciation.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que la préfète de la Somme, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif d'Amiens a annulé les deux arrêtés en litige du 20 décembre 2019 et a enjoint à la préfète de la Somme de délivrer à M. et Mme C... B... des certificats de résidence de ressortissants algériens.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. L'exécution du présent arrêt n'appelle pas d'autre mesure d'exécution que celle qui a été prescrite par le tribunal administratif. Les conclusions à fin d'injonction présentées par M. et Mme C... B... ne peuvent, dès lors, être accueillies.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, le versement à Me E..., avocat de M. et Mme C... B..., une somme globale de 1 200 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que leur conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la préfète de la Somme sont rejetées.

Article 2 : L'Etat versera à Me E..., avocat de M. et Mme C... B..., une somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que leur conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme C... B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. C... C... B..., à Mme G... C... B..., et à Me F... E....

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Somme.

Nos20DA00794,20DA00795 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00794-20DA00795
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP FRISON ET ASSOCIES ; SCP FRISON ET ASSOCIES ; SCP FRISON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-22;20da00794.20da00795 ?
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