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13/10/2020 | FRANCE | N°19DA01243

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 13 octobre 2020, 19DA01243


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2017, M. et Mme C... H... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 5 mars 2015 par laquelle le maire de la commune de Criel-sur-Mer ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par M. E... B..., ensemble les décisions des 15 et 16 février 2017 par lesquelles la même autorité ne s'est pas opposée aux déclarations préalables de travaux déposées par M. B....

Par un jugement n° 1703824 du 28 mars

2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2017, M. et Mme C... H... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 5 mars 2015 par laquelle le maire de la commune de Criel-sur-Mer ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par M. E... B..., ensemble les décisions des 15 et 16 février 2017 par lesquelles la même autorité ne s'est pas opposée aux déclarations préalables de travaux déposées par M. B....

Par un jugement n° 1703824 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mai 2019, M. et Mme C... H..., représentés par Me G... A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés de non-opposition à déclaration préalable de travaux du 5 mars 2015 et des 15 et 16 février 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Criel-sur-Mer et de M. et Mme B... la somme de 4 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code du travail ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me G... A..., représentant M. et Mme H..., et de Me D... F..., représentant M. et Mme B....

M. et Mme B... ont présenté une note en délibéré enregistrée le 30 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

1. M. et Mme H... relèvent appel du jugement du 28 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du maire de Criel-sur-Mer du 5 mars 2015 de ne pas s'opposer à la déclaration préalable de travaux n° 07619215C0002 déposée par M. B... le 5 janvier 2015 pour la rénovation de six logements, d'autre part, des décisions de la même autorité des 15 et 16 février 2017 de ne pas s'opposer aux déclarations préalables de travaux n° 07619217C0005 et n° 07619217C0008 déposées par M. B... les 23 et 24 janvier 2017 pour la réalisation, sur le même immeuble, d'un escalier et d'ouvertures.

En ce qui concerne la décision du 5 mars 2015 :

2. Aux termes de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme : " Aucune action en vue de l'annulation d'un permis de construire ou d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable n'est recevable à l'expiration d'un délai d'un an à compter de l'achèvement de la construction ou de l'aménagement. / Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d'achèvement mentionnée à l'article R. 462-1. "

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a déposé en mairie le 12 septembre 2016 la déclaration d'achèvement des travaux prévue à l'article R. 462-1 du code de l'urbanisme.

4. D'une part, si cette déclaration mentionnait un numéro de la déclaration préalable de travaux omettant deux chiffres et comportant une erreur sur un troisième chiffre, cette omission et cette erreur de pure forme sont sans incidence sur la détermination de la date d'achèvement des travaux. L'absence des documents devant être annexés à la déclaration d'achèvement des travaux, à la supposer effective, est aussi sans influence sur la détermination de cette date. Enfin, la circonstance, à la supposer établie, que les déclarations déposées aient été entachées de fraude sur la surface habitable ou sur la destination des locaux, est également sans incidence sur la détermination de la date d'achèvement des travaux.

5. D'autre part, aucune preuve contraire de la date d'achèvement des travaux susmentionnée n'a été fournie à l'instance.

6. Dans ces conditions, les travaux doivent être regardés comme achevés, au sens de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme, à la date du 12 septembre 2016.

7. Par suite, la demande de M. et Mme H... tendant à l'annulation de la décision du 5 mars 2015 du maire de Criel-sur-Mer de ne pas s'opposer à la déclaration préalable de travaux n° 07619215C0002, qui a été enregistrée le 8 décembre 2017 soit plus d'un an après l'achèvement des travaux, était tardive. L'exception tirée de la tardiveté de cette demande doit donc, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres fins de non-recevoir opposées, être accueillie.

En ce qui concerne les décisions des 15 et 16 février 2017 :

S'agissant de l'objet des décisions attaquées :

8. Il ressort des pièces du dossier que la décision de non-opposition à déclaration préalable du 15 février 2017 portait seulement, compte tenu des travaux déjà déclarés antérieurement, sur les travaux d'ouverture d'une fenêtre et que la décision de non-opposition à déclaration préalable du 16 février 2017 concernait l'ajout d'un escalier et d'une ouverture en haut de cet escalier, l'ensemble des travaux ainsi projetés concernant non pas la parcelle AN 53 mais seulement la parcelle AN 54.

S'agissant de l'exception d'illégalité de la décision du 5 mars 2015 :

9. L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale.

10. Si les appelants excipent de l'illégalité de la décision du 5 mars 2015 susanalysée, les deux décisions en litige n'ont pas été prises en application de la décision du 5 mars 2015 et celle-ci n'en constitue pas leur base légale. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité, le moyen tiré de cette exception doit être écarté.

S'agissant du contenu des déclarations déposées par M. B... :

11. Aux termes de l'article R. 431-35 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable : " La déclaration préalable précise : (...) c) La nature des travaux ou du changement de destination / d) S'il y a lieu, la surface de plancher et la destination et la sous-destination des constructions projetées définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 ". Aux termes de l'article R. 431-36 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le dossier joint à la déclaration comprend : " (...) c) Une représentation de l'aspect extérieur de la construction faisant apparaître les modifications projetées et si le projet a pour effet de modifier celui-ci (...) Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente ".

12. La circonstance que les documents produits dans le dossier de déclaration préalable seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'arrêté de non-opposition que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

13. D'une part, si les appelants soutiennent que la mention d'une surface habitable de 358,20 m² figurant dans les deux déclarations préalables de travaux susmentionnées était erronée et qu'elle ne correspondait pas à la surface existante mais comprenait une partie nouvelle, il ressort des pièces du dossier qu'ils prennent en compte les locaux implantés sur la parcelle AN 53 qui ne faisaient pas l'objet des décisions de non-opposition à déclaration en cause.

14. D'autre part, il n'est pas établi que les locaux implantés sur la parcelle AN 54 aient changé de destination à l'occasion de ces deux déclarations de travaux.

15. Enfin, si les appelants exposent que le déclarant a mentionné à tort une réouverture de fenêtre alors qu'en l'absence de preuve d'une ancienne ouverture qui aurait été obturée, les travaux ont porté en réalité sur la création d'une nouvelle ouverture, le photomontage joint à la déclaration du 23 janvier 2017 permettait à l'autorité administrative d'apprécier tant les dimensions et la position exacte de l'ouverture ainsi créée que les modifications apportées à l'aspect de la façade.

16. Dans ces conditions, il n'est pas établi que des omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier aient été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité des projets à la réglementation applicable.

S'agissant de la nécessité d'un permis de construire et d'un architecte :

17. Aux termes de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires : a) Les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à vingt mètres carrés ; b) Dans les zones urbaines d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à quarante mètres carrés ; (...) c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 ; d) Les travaux nécessaires à la réalisation d'une opération de restauration immobilière au sens de l'article L. 313-4. Pour l'application du c du présent article, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ".

18. D'une part, aux termes de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme : " Les destinations de constructions sont : 1° Exploitation agricole et forestière ; 2° Habitation ; (...) ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que les travaux décrits dans les déclarations préalables ayant donné lieu aux décisions de non-opposition des 15 et 16 février 2017, qui portaient sur l'ouverture d'une fenêtre ainsi que la création d'un escalier extérieur et d'une autre ouverture, aient eu pour objet d'augmenter la surface de plancher au-delà du seuil fixé par l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme ou impliquaient de changer la destination de la construction au sens de l'article R. 151-27 du même code. En particulier, il n'est pas établi que la destination de la construction existante comprenant l'ancien moulin ait été modifiée par ces travaux.

19. D'autre part, aux termes de l'article L. 313-4 du code de l'urbanisme : " Les opérations de restauration immobilière consistent en des travaux de remise en état, d'amélioration de l'habitat, (...) ayant pour objet ou pour effet la transformation des conditions d'habitabilité d'un immeuble ou d'un ensemble d'immeubles. Elles sont engagées à l'initiative soit des collectivités publiques, soit d'un ou plusieurs propriétaires (...) et sont menées dans les conditions définies par la section 3 du présent chapitre. Lorsqu'elles ne sont pas prévues par un plan de sauvegarde et de mise en valeur approuvé, elles doivent être déclarées d'utilité publique ". Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les travaux concernés par les deux déclarations préalables se rapportaient à une opération de restauration immobilière au sens de cette disposition.

20. Il résulte de ce qui précède que le maire de la commune de Criel-sur-Mer a pu, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme, estimer que les travaux projetés par M. B... pouvaient faire l'objet de déclarations préalables sans être soumis à permis de construire.

21. Par suite, M. B... n'était pas dans l'obligation de recourir à un architecte pour établir sa déclaration préalable de travaux, en application de l'article L. 431-1 du code de l'urbanisme dont les dispositions ne s'appliquent qu'à la demande de permis de construire.

En ce qui concerne le plan local d'urbanisme :

22. Les immeubles concernés par les deux décisions de non-opposition à déclaration préalable sont situés sur la parcelle AN 54 qui est classée en zone UC par le plan local d'urbanisme de la commune de Criel-sur-Mer. Le moyen tiré de ce que les travaux faisant l'objet de ces décisions portent sur des immeubles classés en zone A par le plan local d'urbanisme, dans laquelle est interdite toute habitation non liée à l'activité agricole, ne peut donc qu'être écarté.

En ce qui concerne le plan de prévention des risques naturels :

23. Les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles s'imposent au demandeur d'une autorisation d'urbanisme sans qu'il soit besoin de les reprendre dans cette autorisation. Il incombe toutefois à l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation, le cas échéant, d'y préciser les conditions d'application d'une prescription générale contenue dans le plan, ainsi que d'en subordonner l'octroi au respect d'autres prescriptions spéciales complémentaires qui lui apparaissent nécessaires en application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

24. D'une part, il ressort du point 3.1.2.2. du règlement du plan de prévention des risques naturels de la commune de Criel-sur-Mer que sont autorisées en zone rouge " les rénovations, sans changement d'affectation ou de destination ". Ainsi, la création de l'ouverture d'une fenêtre sur la façade donnant sur la rivière Yères, située dans cette zone, n'a pas méconnu ce règlement.

25. D'autre part, il ressort du point 3.3.2.2. du même règlement que sont autorisés en zone bleu clair " l'aménagement de combles ou la création d'un nouvel étage des constructions existantes à usage d'habitation (...) à condition d'assurer la sécurité des occupants ". Or la création d'un escalier et une nouvelle ouverture en haut de cet escalier, situés dans cette zone, ne porte pas atteinte à la sécurité des occupants et donc n'a pas méconnu ce règlement.

En ce qui concerne les autres moyens :

26. D'une part, le moyen tiré de la méconnaissance des articles R. 111-18 et R. 111-20 du code de la construction et de l'habitation, portant sur l'accès des personnes handicapées aux bâtiments d'habitation collectifs et sur la réglementation thermique des bâtiments nouveaux et des parties nouvelles de bâtiments, est sans influence sur la légalité des décisions en litige qui ont été prises pour l'application des dispositions d'urbanisme.

27. D'autre part, l'allégation selon laquelle le déclarant aurait eu recours à de la main d'oeuvre en méconnaissance de la réglementation du travail relative à la sécurité des salariés ou des dispositions relatives au séjour des étrangers en France, est sans rapport avec la méconnaissance des règles d'urbanisme et, par suite, ne peut utilement être invoquée.

28. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de leur demande, que M. et Mme H... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du maire de Criel-sur-Mer de non-opposition à déclaration préalable de travaux des 5 mars 2015 et 15 et 16 février 2017.

Sur les frais liés au litige :

29. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Criel-sur-Mer et M. et Mme B..., qui n'ont pas la qualité de partie perdante, versent à M. et Mme H... la somme que ceux-ci réclament au titre des frais du litige.

30. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme H... la somme que la commune de Criel-sur-Mer et M. et Mme B... demandent au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme H... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Criel-sur-Mer et de M. et Mme B... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... H..., à la commune de Criel-sur-Mer, à M. et Mme E... B... et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

N°19DA01243 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01243
Date de la décision : 13/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : A.A.R.P.I. GALLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-13;19da01243 ?
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