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08/10/2020 | FRANCE | N°18DA00768

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 octobre 2020, 18DA00768


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre des finances et des comptes publics sur la demande qu'il lui a adressée le 24 décembre 2014 tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du 24 décembre 2014 ainsi que de la capitalisation de ces intérêts à compter du 25 décembre 2015, en

réparation des préjudices résultant de sa mise à l'écart au sein du service et de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre des finances et des comptes publics sur la demande qu'il lui a adressée le 24 décembre 2014 tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du 24 décembre 2014 ainsi que de la capitalisation de ces intérêts à compter du 25 décembre 2015, en réparation des préjudices résultant de sa mise à l'écart au sein du service et de la privation des missions qu'il exerçait, d'enjoindre au ministre des finances et des comptes publics de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre à cette même autorité le réexamen de sa demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1503300 du 13 février 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et des mémoires complémentaires, enregistrés les 13 avril 2018, 16 juillet 2018 et 11 décembre 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 13 février 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre des finances et des comptes publics sur la demande qu'il lui a adressée le 24 décembre 2014 tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie et à l'indemnisation des préjudices subis ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros, augmentée des intérêts légaux ainsi que de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices subis;

4°) d'enjoindre au ministre de l'économie et des finances de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre à cette même autorité de réexaminer sa demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2010-986 du 26 août 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Entré à la direction générale des finances publiques le 1er mars 1993, M. A... a été nommé au grade d'inspecteur divisionnaire des finances publiques de classe normale en qualité d'expert au sein de la direction régionale des finances publiques du Nord-Pas-de-Calais et du département du Nord à compter du 1er janvier 2014. Il a été placé en congés de maladie du 10 février au 13 avril 2014, du 25 juin au 11 juillet 2014 et du 23 juillet 2014 au 10 mai 2015. Il a adressé, le 24 décembre 2014, une demande au ministre des finances et des comptes publics tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Lille en date du 13 février 2018 rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre des finances et des comptes publics a rejeté la demande qu'il lui a adressée le 24 décembre 2014.

Sur la régularité du jugement :

2. Le tribunal administratif de Lille, qui n'était pas tenu de répondre à chacun des arguments avancés par M. A..., n'a pas insuffisamment motivé son jugement en ne précisant pas en quoi les pièces produites par l'intéressé n'étaient pas de nature à établir la réalité du lien entre son activité professionnelle et ses troubles dépressifs, ni en quoi ces pièces permettaient d'estimer que ses affectations successives étaient conformes aux dispositions statutaires. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

3. Le III de l'article 4 du décret du 16 août 2010 dispose que : " Les inspecteurs divisionnaires des finances publiques peuvent se voir confier au sein des structures mentionnées au 1° du I : 1° La responsabilité d'un service, notamment d'un service de contrôle fiscal, ou des fonctions d'encadrement au sein de ces services ; 2° La responsabilité d'un poste comptable ou les fonctions d'adjoint au responsable d'un tel poste./ Ils peuvent également assurer des missions d'expertise ou des missions particulières au sein de ces structures ou en administration centrale. ".

4. Il résulte de l'instruction que les fonctions dévolues à M. A..., à son arrivée dans la division du recouvrement en janvier 2014, au sein de la cellule chargée du soutien aux postes comptables pour les actions en recouvrement forcé complexes, étaient cohérentes avec les missions figurant sur sa fiche de poste en sa qualité d'expert dans le domaine du recouvrement. Si celle-ci faisait état de missions complémentaires, et notamment du suivi du contentieux dans ses phases administratives et juridictionnelles, le fait que M. A... ne les ait pas exercées dès son arrivée et dans un contexte de création récente de la division du recouvrement ne saurait caractériser une faute de l'administration. Par ailleurs, la circonstance que l'annuaire de la division se soit borné à faire figurer sa qualité d'inspecteur divisionnaire et non d'inspecteur divisionnaire expert et ait omis d'ajouter son numéro de téléphone, ne saurait davantage révéler l'existence d'un comportement vexatoire de la part de l'administration. S'agissant de l'octroi tardif des habilitations informatiques auxquelles M. A... devait pouvoir accéder, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport du 23 janvier 2015 qui a été établi par le service des ressources humaines de la direction générale des finances publiques qui n'apparaît pas dépourvu d'objectivité contrairement à ce que soutient l'intéressé, que de tels retards ne sont pas imputables à sa hiérarchie et ont concerné tous les agents entrés au sein de la direction à la même date que M. A.... En outre, le fait qu'il se soit vu refuser de participer à la " journée du recouvrement " du 20 mars 2014 ne saurait être regardé comme constitutif d'une faute dès lors qu'il résulte de l'instruction que, compte tenu des capacités d'accueil limitées, seul un agent par direction pouvait y participer, même si, pour la division du recouvrement, le responsable de cette division avait décidé qu'il s'agirait de son adjointe. Dans ces conditions, aucune mise à l'écart ou privation de ses fonctions ne peut être reprochée à l'administration. Il résulte également de l'instruction, qu'à la suite des congés de maladie de l'intéressé du 10 février au 13 avril 2014 et de l'entretien qu'il a eu le 14 avril 2014 avec le directeur régional des finances publiques, M. A... a reçu une lettre de mission datée du 18 avril 2014 le chargeant, à titre principal, d'assurer le traitement des dossiers fiscaux comportant des propositions d'admission en non-valeur. Cette attribution, non exclusive d'autres missions comme le mentionne la lettre de mission, ne saurait établir que l'intéressé aurait exercé des fonctions ne correspondant pas à la nature et au niveau des emplois que son appartenance à son grade d'inspecteur divisionnaire des finances publiques de classe normale lui donnait vocation à occuper. Enfin, il résulte de l'instruction qu'à la suite d'une altercation avec son supérieur hiérarchique le 1er juillet 2014, M. A... a été, par une décision du 2 juillet 2014 du directeur régional des finances publiques, affecté au pôle de recouvrement spécialisé de la direction régionale des finances publiques du Nord-Pas-de-Calais et du département du Nord où il n'apparaît pas davantage avoir exercé des missions subalternes comme il le soutient. Dans ces conditions, il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance d'une faute de l'administration à son encontre de nature à engager la responsabilité de l'Etat.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

5. L'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dispose que : " Le fonctionnaire en activité a droit : [...] 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ".

6. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

7. Pour justifier le lien direct entre son état dépressif et l'exercice de ses fonctions ou ses conditions de travail, le requérant produit, pour la première fois en appel, un compte-rendu daté du 24 mai 2015 d'un examen médical réalisé par le docteur Callipel ainsi qu'un certificat médical du 19 août 2015 établi par le docteur Sandret. Toutefois ces pièces, qui sont peu circonstanciées et se bornent pour l'essentiel à faire état des dires de M. A..., ne permettent pas d'établir un lien direct entre son état dépressif et l'exercice de ses fonctions ou ses conditions de travail au sein de la division du recouvrement de la direction régionale des finances publiques du Nord-Pas-de-Calais et du département du Nord dans laquelle il venait de prendre son poste. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait eu un comportement vexatoire à son encontre qui aurait été de nature à créer un contexte professionnel pathogène. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée en défense, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre des finances et des comptes publics a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. A... doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction assorties d'une astreinte, et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

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N°18DA00768

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00768
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP G. THOUVENIN, O. COUDRAY ET M. GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 09/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-08;18da00768 ?
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