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22/09/2020 | FRANCE | N°18DA00187

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 22 septembre 2020, 18DA00187


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... F... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision par laquelle le maire de la commune de Liancourt a implicitement rejeté leur demande du 16 décembre 2011 tendant à ce qu'il fasse usage de ses pouvoirs de police pour réglementer la circulation des véhicules dans la rue où est située leur maison d'habitation.

Par un jugement n° 1201221 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14DA02003 du 19 juill

et 2016, la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement et a enjoint au m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... F... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision par laquelle le maire de la commune de Liancourt a implicitement rejeté leur demande du 16 décembre 2011 tendant à ce qu'il fasse usage de ses pouvoirs de police pour réglementer la circulation des véhicules dans la rue où est située leur maison d'habitation.

Par un jugement n° 1201221 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14DA02003 du 19 juillet 2016, la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement et a enjoint au maire de la commune de Liancourt de prendre toutes mesures utiles pour faire cesser les troubles à la tranquillité et à la sécurité publiques rue Pasquier dans un délai de quatre mois à compter de la notification de l'arrêt.

Par une décision du 22 mars 2017, le Conseil d'Etat n'a pas admis le pourvoi présenté par la commune de Liancourt.

Par un arrêt n° 18DA00187 du 14 mai 2019, la cour administrative d'appel de Douai a enjoint au maire de la commune de Liancourt de porter la période d'interdiction, édictée par son arrêté du 27 mars 2018 et concernant la rue René Pasquier, à la totalité de la période nocturne, soit entre 22 heures et 7 heures du matin, de modifier en conséquence les horaires de livraison autorisés et de procéder à la mise en place d'une signalisation adéquate de ces interdictions, dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Elle lui a également enjoint de prendre des mesures pour remédier aux empiètements sur le trottoir au droit de l'habitation des requérants par la mise en place de dispositifs physiques tels que des barrières, des poteaux ou des plots de béton afin d'assurer la sécurité des piétons et d'éviter la dégradation des biens, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance du 25 janvier 2018, le président de la cour a prescrit l'ouverture d'une procédure juridictionnelle, enregistrée sous le n° 18DA00187, en vue d'obtenir, à la demande de M. et Mme F..., l'exécution de l'arrêt n° 14DA02003. Par cette demande et des mémoires, enregistrés le 14 février 2018, le 27 avril 2018, 25 mars 2019, 10 avril 2019, 6 février 2020, 10 juin et 13 juillet 2020, M. et Mme F..., représentés par Me D... E..., demandent à la cour de prescrire les mesures propres à assurer une complète exécution de cet arrêt et de celui du 14 mai 2019. Ils concluent, en l'état de leurs dernières écritures, à ce que la cour :

1°) fasse injonction à la commune de Liancourt :

- de déplacer l'aire de livraison de la maison de retraite ou, à défaut, de réglementer le tonnage des camions qui y accèdent en imposant l'arrêt des moteurs et des groupes frigorifiques ;

- d'interdire la circulation des poids-lourds dans la rue Pasquier et de mettre en place des obstacles physiques afin d'éviter la dégradation des biens et assurer la sécurité des piétons, notamment par la mise en place de poteaux pour empêcher les manoeuvres dangereuses ainsi qu'une signalisation ;

- de mettre en place une signalisation adéquate pour informer les usagers de cette interdiction ;

- de faire respecter cette interdiction de livraison entre 22 heures et 7 heures du matin ;

- de mettre en place des poteaux au bord du trottoir de leur habitation, suffisamment importants pour éviter toute manoeuvre dangereuse des camions de livraison ;

2°) prescrive que ces travaux devront être réalisés dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) mette à la charge de la commune de Liancourt une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,

- et les observations de Me B... C..., substituant Me D... E..., représentant M. et Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt du 14 mai 2019, devenu définitif, la cour a, à la demande M. et Mme A... F..., propriétaires d'une maison d'habitation située rue Pasquier à Liancourt, enjoint au maire de la commune, d'une part, de porter la période d'interdiction, édictée par son arrêté du 27 mars 2018 et concernant la rue René Pasquier, à la totalité de la période nocturne, soit entre 22 heures et 7 heures du matin, de modifier en conséquence les horaires de livraison autorisés et de procéder à la mise en place d'une signalisation adéquate de ces interdictions, dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, d'autre part, de prendre des mesures pour remédier aux empiètements sur le trottoir au droit de l'habitation des requérants par la mise en place de dispositifs physiques tels que des barrières, des poteaux ou des plots de béton afin d'assurer la sécurité des piétons et d'éviter la dégradation des biens, dans un délai de deux mois à compter de la notification du même arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'en exécution de l'arrêt du 14 mai 2019, la commune de Liancourt a pris un nouvel arrêté le 20 mai 2019, interdisant rue René Pasquier, tous bruits entre 22 heures et 7 heures du matin, susceptibles de porter atteinte par leur intensité, leur durée, leur caractère agressif ou répétitif, à la santé ou à la tranquillité des habitants. Elle a également imposé que les opérations de livraison aux entreprises, artisans et établissements publics soient uniquement effectuées entre 7 heures et 22 heures, que les engins utilisés pour les livraisons ainsi que les équipements nécessaires à ces opérations ne devaient pas générer de bruit excessif pour le voisinage et que les véhicules de livraison, en attente ou en cours de livraison, devaient avoir leurs moteurs arrêtés. Cet arrêté limite ainsi les nuisances sonores pendant la totalité de la période nocturne qui court de 22 heures à 7 heures du matin en vertu des dispositions de l'article R. 1336-7 du code de la santé publique. Il ressort des pièces du dossier et du constat d'huissier établi le 22 janvier 2020 à la demande de M. et Mme F... que cette interdiction de livraisons entre 22 heures et 7 heures a fait l'objet d'une signalisation adéquate à l'entrée et à la sortie de la rue Pasquier. En outre, la commune produit des courriers adressés le 2 juillet 2019 par le directeur de la maison de retraite à tous ses fournisseurs pour leur demander de respecter ces horaires. Par suite, et dans la mesure où, comme l'a jugé la cour dans son précédent arrêt, il n'appartient pas à la commune de procéder au déplacement de l'aire de livraison d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, la commune de Liancourt, à qui il appartient en revanche de faire respecter les horaires d'interdiction de livraison fixés par son arrêté du 20 mai 2019, justifie avoir pris les mesures d'exécution nécessaires sur ce point.

4. En second lieu, la cour a jugé que les manoeuvres réalisées par les véhicules de livraison sur la voie de circulation étaient susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique, compte tenu notamment des empiétements manifestes et importants sur le trottoir au droit de l'habitation des requérants, et qu'il y avait lieu d'enjoindre à la commune de procéder à la mise en place des dispositifs évoqués au point 1 dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Il ressort des pièces du dossier, notamment du constat d'huissier mentionné au point 3 que, si la commune de Liancourt a, en exécution de l'arrêt du 14 mai 2019 précité, installé un plot " genre béton " sur le trottoir devant la maison d'habitation de M. et Mme F..., elle ne justifie cependant pas avoir pris toutes les mesures requises pour remédier aux empiètements mentionnés précédemment par la mise en place de ce seul dispositif, isolé, installé sur un encart dépourvu de goudron, et fragile, ainsi qu'en témoigne la rapidité de sa détérioration à la suite de son installation. Ce dispositif est ainsi insuffisant pour préserver le trottoir jouxtant la maison d'habitation de M. et Mme F... afin d'assurer la sécurité des piétons et d'éviter la dégradation des biens à la suite des manoeuvres des camions de livraison. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au maire de la commune de Liancourt de procéder, au droit de la maison d'habitation de M. et Mme F..., à la mise en place de barrières ou de poteaux ou plots de béton dans des conditions assurant une solidité suffisante du dispositif installé, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Enfin, si M. et Mme F... soutiennent dans le dernier état de leurs écritures que le fort tonnage des camions de livraison aux abords de leur domicile a causé l'affaissement des caniveaux et la disparition des joints ciment entraînant ainsi le ruissellement des eaux pluviales dans le sol de leur habitation, cette circonstance nouvelle, au demeurant non établie, est sans incidence sur l'appréciation du bien-fondé des mesures prises par la commune de Liancourt dans le cadre de la présente procédure.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Liancourt le versement à M. et Mme F... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées au titre de ces mêmes dispositions par la commune de Liancourt ne peuvent, en revanche, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est enjoint au maire de la commune de Liancourt de prendre des mesures pour remédier aux empiètements sur le trottoir au droit de l'habitation des requérants par la mise en place de dispositifs physiques tels que des barrières, poteaux ou plots de béton dans des conditions assurant une solidité suffisante du dispositif installé, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Article 2 : La commune de Liancourt versera à M. et Mme F... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme F... est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Liancourt au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... F... et à la commune de Liancourt.

Copie en sera adressée au préfet de l'Oise.

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N°18DA00187


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00187
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Étendue des pouvoirs de police - Obligation de faire usage des pouvoirs de police.

Procédure - Jugements - Exécution des jugements - Prescription d'une mesure d'exécution.


Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : CABINET BERTHAUD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-09-22;18da00187 ?
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