Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a décidé son transfert aux autorités bulgares.
Par jugement n° 1902003 du 24 juin 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2019, et un mémoire, enregistré le 24 février 2020, M. B... A..., représenté par Me C..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) à titre principal, de constater la caducité de l'arrêté du 26 avril 2019 et donc un non-lieu à statuer ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement du 24 juin 2019 ;
3°) en conséquence, d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003, tel que modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 du 30 janvier 2014 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant afghan entré irrégulièrement en France, a déposé une demande d'asile le 27 décembre 2018. La consultation d'Eurodac ayant révélé que l'intéressé avait demandé auparavant l'asile en Bulgarie, le préfet de la Seine-Maritime a saisi les autorités bulgares d'une demande de reprise en charge le 21 janvier 2019, un accord implicite est intervenu le 5 février 2019, un premier arrêté préfectoral de transfert de l'intéressé vers la Bulgarie a été pris le 1er mars 2019 puis annulé par le tribunal administratif de Rouen le 8 avril 2019 et un second arrêté de transfert vers ce pays a été pris le 26 avril 2019 puis confirmé par le tribunal le 24 juin 2019.
Sur les conclusions présentées à titre principal :
2. D'une part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a eu pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement n° 604/2013, lequel délai courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis et a recommencé à courir intégralement à compter de la notification au préfet du jugement du tribunal quel qu'en soit le sens, soit à compter du 25 juin 2019.
3. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, conformément au 2 de l'article 9 du règlement n° 1560/2003, les autorités bulgares ont été informées, le 3 octobre 2019, de la décision du préfet de prolonger le délai de transfert jusqu'au 25 décembre 2020.
4. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la France est devenue responsable de l'examen de la demande d'asile et que le présent litige a donc perdu son objet.
Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
5. Si, en réponse à un mémoire déposé le 17 juin 2019 par M. A..., le préfet a déposé le 21 juin suivant un mémoire qui n'a pas été communiqué, le moyen tiré de ce que le tribunal s'est fondé sur ce dernier mémoire n'a été assorti d'aucune précision. En tout état de cause, il résulte des pièces du dossier que le tribunal a statué sur les moyens présentés par ce mémoire de M. A... au regard non de ce mémoire du préfet mais des pièces auparavant produites en défense.
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté :
S'agissant de la légalité externe :
6. D'une part, conformément à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision attaquée a visé le règlement n° 604/2013 et relevé que M. A... avait auparavant présenté une demande d'asile en Bulgarie, une telle motivation ayant fait apparaître qu'il était fait application du b), c) ou d) du 1 de l'article 18 ou du 5 de l'article 20 du règlement.
7. D'autre part, si les documents d'information remis à M. A... le 27 décembre 2018 étaient rédigés en farsi alors que l'intéressé avait déclaré comprendre le dari, il s'agit de deux variétés du persan, le farsi est langue officielle de l'Afghanistan et ces documents n'ont pas été traduits en dari, de sorte qu'on pouvait raisonnablement supposer, conformément à l'article 4 du règlement n° 604/2013, que l'intéressé comprenait le farsi.
8. Enfin, la production de l'avis de réception émis, dans le réseau Dublinet, par le point d'accès national de l'Etat requis lorsqu'il reçoit une demande des autorités françaises n'est pas le seul moyen d'établir qu'étaient remplies, au sens des articles 23 et 25 du règlement n° 604/2013, les conditions de reprise en charge du demandeur d'asile, le juge administratif se prononçant au vu de tous les éléments produits, par exemple au vu des dates de consultation du fichier Eurodac et de saisine du point d'accès national français ou de la confirmation explicite par l'Etat requis de son acceptation implicite de reprise en charge. En l'espèce, en admettant même que le constat d'accord implicite n'ait pas ensuite été transmis aux autorités bulgares, l'avis de reception du point d'accès national bulgare daté du 21 janvier 2019 a été produit.
S'agissant de la légalité interne :
9. D'une part, il ressort de la motivation du transfert que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de M. A....
10. D'autre part, eu égard au niveau de protection des libertés et droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, les craintes d'un demandeur d'asile quant au défaut de protection dans un tel Etat sont présumées non fondées, l'intéressé devant apporter des éléments circonstanciés pour renverser la présomption. En l'espèce, le requérant ne démontre ni qu'il a fait l'objet en Bulgarie d'une mesure d'éloignement vers l'Afghanistan, ni en tout état de cause qu'il a épuisé toutes les voies de recours contre une telle mesure. En l'espèce, même si M. A... était suivi pour des douleurs aux dents, à un poignet et à un genou, le transfert n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation et n'a pas violé les articles 53-1 de la Constitution, 17-1 et 17-2 du règlement n° 604/2013, 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
11. Enfin, en application du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013, la Bulgarie, premier Etat membre auprès duquel M. A... avait déposé une demande d'asile, était responsable de l'examen de sa demande d'asile. Même si l'intéressé a ensuite demandé l'asile en Slovénie, l'arrêté attaqué n'était ainsi pas entaché d'erreur de droit.
12. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 26 avril 2019 et du jugement du 24 juin 2019 et que ses conclusions à fin d'injonction et au titre des frais de justice doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me C....
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
N°19DA02601 4