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15/07/2020 | FRANCE | N°18DA02130

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 15 juillet 2020, 18DA02130


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...'homme et Mme F... E... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2016, par lequel le maire de Bézancourt, agissant au nom de l'Etat, a accordé à l'exploitation agricole de la Saussaye un permis de construire un hangar à usage de stockage de céréales et de remise de matériel sur un terrain situé route des Andelys au lieu-dit Ferme de la Saussaye. Les requérants ont également demandé au tribunal d'annuler la décision implicite rejetant leur recours

gracieux dirigé contre l'arrêté.

Par un jugement n° 1700895 du 22 août 2018...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...'homme et Mme F... E... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2016, par lequel le maire de Bézancourt, agissant au nom de l'Etat, a accordé à l'exploitation agricole de la Saussaye un permis de construire un hangar à usage de stockage de céréales et de remise de matériel sur un terrain situé route des Andelys au lieu-dit Ferme de la Saussaye. Les requérants ont également demandé au tribunal d'annuler la décision implicite rejetant leur recours gracieux dirigé contre l'arrêté.

Par un jugement n° 1700895 du 22 août 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2018, M. et Mme C... et Véronique A...'homme, représentés par Me D... B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 22 août 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Bézancourt du 12 septembre 2016 ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aurélien Gloux-Saliou, premier conseiller,

- les conclusions de M. Charles-Edouard Minet, rapporteur public,

- et les observations de Me D... B..., représentant M. et Mme A...'homme.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 12 septembre 2016, le maire de Bézancourt, agissant au nom de l'Etat, a délivré à l'exploitation agricole à responsabilité limitée de la Saussaye un permis de construire un hangar à usage de stockage de céréales et de remise de matériel sur un terrain situé route des Andelys au lieu-dit Ferme de la Saussaye. M. C... A...'homme, propriétaire d'un ensemble immobilier implanté sur une parcelle voisine du terrain d'assiette du projet, et Mme F... E..., son épouse, ont présenté à l'encontre de l'arrêté du 12 septembre 2016 un recours gracieux qui a été implicitement rejeté. Ils interjettent appel du jugement du 22 août 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté et du rejet implicite de leur recours gracieux.

Sur la régularité du jugement :

2. En vertu de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, la décision rendue par la juridiction administrative contient le nom des parties.

3. Si les appelants soutiennent que les premiers juges ont attribué un prénom erroné à M. C... A...'homme dans l'en-tête, les visas et le dispositif de leur jugement, l'article R. 741-2 du code de justice administrative n'exige la mention que du nom des parties. Il ressort, en tout état de cause, du jugement contesté, en particulier de son point 3, que les premiers juges, bien qu'ils aient attribué à M. C... A...'homme le prénom de son frère Pierre, gérant de l'exploitation agricole bénéficiaire du permis, ne se sont pas mépris sur son identité ni n'ont entaché leur décision de partialité. Par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une telle atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité des lieux dans lesquels la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé dans le second temps du raisonnement, pour apprécier la légalité des permis de construire délivrés, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux visés à l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme cité ci-dessus.

5. D'une part, si les requérants soutiennent que le gérant de l'exploitation agricole de la Saussaye aurait frauduleusement laissé entendre, dans sa demande de permis de construire, qu'il était propriétaire de l'ensemble du corps de ferme situé au lieu-dit Ferme de la Saussaye, cette circonstance est sans incidence sur l'appréciation qu'a portée l'autorité administrative sur l'éventuelle atteinte causée par le projet au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants. En tout état de cause, le moyen ainsi développé manque en fait, dès lors que la demande de permis de construire indique sans erreur, tant dans le formulaire de demande que sur le plan de situation PC1, les parcelles dont est propriétaire le gérant de l'exploitation agricole de la Saussaye. En outre, la notice explicative du projet, en précisant que " l'habitation du tiers le plus proche sera à plus de 56 mètres du projet ", faisait clairement apparaître que le gérant n'était pas propriétaire de toutes les habitations situées au lieu-dit.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les lieux dans lesquels a vocation à s'insérer le projet se composent, pour l'essentiel, d'un corps de ferme ordonné autour de divers bâtiments d'habitation ou de stockage du dix-neuvième siècle formant une cour quadrangulaire fermée, de vastes hangars agricoles modernes accolés à l'un des côtés de cette cour ainsi que de champs cultivés isolant ce lieu-dit, dénommé Ferme de la Saussaye, du bourg le plus proche. Le projet consiste, quant à lui, à construire un hangar agricole d'une surface de plancher de 425 mètres carrés, couvert de tôle d'acier nervuré de teinte ardoise et protégé par une charpente métallique à deux pentes. Destiné à être édifié sur un terrain situé en bordure du chemin qui mène, depuis la route départementale n° 916, au lieu-dit, ce hangar se situerait, comme en témoigne notamment le plan de masse PC2 inclus dans la demande de permis, dans le prolongement des bâtiments agricoles existants, qui occupent une surface totale très supérieure à la sienne. Telle que décrite dans la demande de permis, l'implantation prévue, peu avant l'entrée dans la cour du corps de ferme composant le lieu-dit, n'aurait pas pour effet d'enclaver cet ensemble architectural, contrairement à ce que soutiennent les requérants, qui n'établissent pas non plus, par les photographies qu'ils versent au dossier, que le hangar viendrait obstruer une prétendue vue sur le corps de ferme depuis la route départementale. En outre, si les requérants produisent une photographie, prise dans la cour du corps de ferme, sur laquelle a été ajoutée une représentation stylisée du futur hangar, cette représentation, censée démontrer que le hangar s'élèverait en surplomb de la cour, est contredite par les mesures de hauteur indiquées dans la demande de permis, notamment dans le plan de masse PC2, ainsi que par les images constituant le volet paysager PC6 PC7 PC8. Enfin, eu égard à la vocation agricole du lieu, à la présence de hangars déjà imposants, à la volumétrie en comparaison modeste du projet et à la situation isolée du lieu-dit au milieu de champs cultivés, la seule circonstance que le corps de ferme comporterait des bâtiments anciens typiques de l'architecture du pays de Bray n'est pas de nature à établir que le futur hangar porterait atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants. Dans ces conditions, en accordant le permis de construire litigieux, le maire de Bézancourt n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 111-1 du code de l'urbanisme : " Le règlement national d'urbanisme s'applique sur l'ensemble du territoire. / Toutefois : / 1° Les dispositions des articles L. 111-3 à L. 111-5 ne sont pas applicables dans les territoires où un plan local d'urbanisme, un document d'urbanisme en tenant lieu ou une carte communale est applicable (...) " et aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : / (...) 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole (...) ".

8. Si les requérants soutiennent qu'en accordant le permis de construire attaqué, le maire de Bézancourt a méconnu les dispositions de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, dès lors que l'activité de l'exploitation agricole de la Saussaye est inexistante et que la construction projetée ne lui est pas nécessaire, il ressort des pièces du dossier qu'une carte communale, approuvée par un arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 10 juin 2008, est applicable sur le territoire de la commune de Bézancourt. Par suite, en vertu de l'article L. 111-1 du code de l'urbanisme, les dispositions de l'article L. 111-4 du même code n'y sont pas applicables. Le moyen est donc inopérant.

9. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 22 août 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Bézancourt du 12 septembre 2016 accordant un permis de construire à l'exploitation agricole de la Saussaye et de la décision implicite rejetant leur recours gracieux.

Sur les frais de l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent les requérants au titre des frais exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...'homme est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et Véronique A...'homme, à l'exploitation agricole à responsabilité limitée de la Saussaye et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Copie en sera adressée pour information à la commune de Bézancourt.

No18DA02130 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18DA02130
Date de la décision : 15/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Aurélien Gloux-Saliou
Rapporteur public ?: M. Minet
Avocat(s) : SUXE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-15;18da02130 ?
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