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10/07/2020 | FRANCE | N°19DA00262

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 10 juillet 2020, 19DA00262


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 26 octobre 2018 par laquelle le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de

retard, et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 26 octobre 2018 par laquelle le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui accorder un délai de départ volontaire de six mois, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1804223 du 21 décembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2019, M. A..., représenté par Me C... B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de l'Eure du 26 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller,

- et les observations de M. A..., en l'absence de son avocat.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant togolais, né le 7 juillet 1990, a déclaré être entré irrégulièrement en France le 11 octobre 2016. Par un arrêté du 26 octobre 2018, le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 21 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. La décision attaquée énonce l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée, de manière suffisamment circonstanciée pour mettre utilement M. A... en mesure de discuter les motifs de cette décision. Par suite, cette décision est suffisamment motivée au regard des exigences posées en la matière par les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

3. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet, avant de prendre sa décision, n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A....

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 7°) l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : .../... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, M. A... résidait en France de manière continue depuis deux ans. S'il est marié avec une ressortissante française depuis le 3 février 2018, leur mariage ainsi que leur vie commune étaient récents à la date de la décision attaquée. Aucun enfant n'est issu de cette union. L'appelant ne démontre pas une particulière insertion sociale et n'établit pas disposer d'autres liens particuliers d'ordre privé sur le territoire français, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches au Togo où demeure son fils mineur né d'une précédente union et où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-six ans. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de titre de séjour porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions précitées du 7°) de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. En fondant sa décision sur le rejet de la demande de l'intéressé par la Cour nationale du droit d'asile alors qu'elle lui avait donné acte de son désistement, le préfet a entaché sa décision d'une erreur de fait. Toutefois, l'autorité préfectorale aurait pris la même décision si elle n'avait pas commis cette erreur.

7. A compter du 7 août 2018, date de notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, l'appelant ne bénéficiait plus du droit de se maintenir sur le territoire français en vertu des dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. S'il a sollicité une nouvelle demande d'admission au séjour, le 10 septembre 2018, auprès des services de la préfecture des Yvelines, il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'il a fait connaître sa nouvelle situation aux autorités compétentes dès son mariage et son changement de résidence dans ce département. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, et notamment qu'elle l'aurait empêché de se présenter au rendez-vous fixé par la préfecture des Yvelines le 23 novembre 2018, doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour est illégale.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit être écarté.

10. Pour les mêmes raisons que celles qui sont exposées au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions précitées du 7°) de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 21 décembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Eure du 26 octobre 2018.

Sur les conclusions à fins d'injonction :

13. Le présent arrêt se bornant à rejeter la demande de M. A... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. A... une somme que celui-ci réclame au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du préfet de l'Eure qui n'établit avoir engagé des frais spécifiques liés à la présente instance qui excèderaient le coût normal de fonctionnement des services contentieux de la préfecture de l'Eure, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le préfet de l'Eure sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

N°19DA00262 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00262
Date de la décision : 10/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Minet
Avocat(s) : TRAORE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-10;19da00262 ?
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