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09/07/2020 | FRANCE | N°18DA01591

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 18DA01591


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre communal d'action sociale d'Armentières a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'avis du 3 juin 2015 par lequel le conseil de discipline de recours a proposé de substituer une exclusion temporaire de fonctions de trois jours à la sanction de révocation prononcée à l'encontre de Mme B... G....

Par un jugement n° 1506453 du 30 mai 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé l'avis du conseil de discipline de recours se prononçant en faveur d'une

sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois jours.

Proc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre communal d'action sociale d'Armentières a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'avis du 3 juin 2015 par lequel le conseil de discipline de recours a proposé de substituer une exclusion temporaire de fonctions de trois jours à la sanction de révocation prononcée à l'encontre de Mme B... G....

Par un jugement n° 1506453 du 30 mai 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé l'avis du conseil de discipline de recours se prononçant en faveur d'une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois jours.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 juillet 2018 et le 20 mai 2020, Mme G..., représentée par Me C... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 mai 2018 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a annulé l'avis du conseil de discipline de recours ;

2°) de mettre la somme de 2 500 euros à la charge du centre communal d'action sociale d'Armentières sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me H... D..., représentant Mme B... G..., et de Me E... F..., représentant le centre communal d'action sociale d'Armentières.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... G..., qui est née le 14 mars 1967, est depuis le 1er juillet 2012 auxiliaire de soins principal de 2ème classe à temps complet, au sein du service de soins infirmiers à domicile du centre communal d'action sociale d'Armentières. Le 10 septembre 2014, le conseil de discipline a proposé une exclusion de fonctions de deux ans au motif de fait de maltraitance envers une personne âgée chez laquelle elle intervenait. Par un arrêté du 19 septembre 2014, le président du centre communal d'action sociale d'Armentières a révoqué de Mme G... I...-ci saisit alors le conseil de discipline de recours du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Nord. Le 3 juin 2015, celui-ci a proposé une sanction d'exclusion temporaire de trois jours, sans sursis, au motif que la seule faute à reprocher à Mme G... était une fausse déclaration d'accident de travail. La sanction d'exclusion temporaire de trois jours a été prononcée par un arrêté du 10 juillet 2015 du président du centre communal d'action sociale d'Armentières. Mme G... relève appel du jugement du 30 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille, sur recours du centre communal d'action sociale d'Armentières, a annulé l'avis du 3 juin 2015 du conseil de discipline de recours du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Nord.

Sur la fin de non-recevoir soulevée par Mme G... :

2. Lorsqu'une loi nouvelle institue, sans comporter de disposition spécifique relative à son entrée en vigueur, un délai de prescription d'une action disciplinaire dont l'exercice n'était précédemment enfermé dans aucun délai, le nouveau délai de prescription est immédiatement applicable aux procédures en cours mais ne peut, sauf à revêtir un caractère rétroactif, courir qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle. En vertu de l'article 36 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, aucune procédure disciplinaire ne peut être engagée au-delà d'un délai de trois ans à compter du jour où l'administration a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits passibles de sanction. Ces dispositions, publiées au Journal officiel du 21 avril 2016, sont entrées dès le lendemain en vigueur. Dès lors, à la date de saisine des premiers juges, le délai de prescription n'avait pas commencé à courir et l'action disciplinaire n'était pas prescrite. La demande du centre communal d'action sociale d'Armentières n'a donc pas perdu d'intérêt, cet établissement public pouvant, le cas échéant, tirer les conséquences d'une éventuelle annulation en prenant une nouvelle sanction plus sévère que I... proposée par le conseil de discipline de recours. Par suite, la fin de non-revoir de Mme G..., tirée de la prescription de l'action disciplinaire, doit être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Troisième groupe : (...) - l'exclusion temporaire de fonctions de seize à deux ans ; Quatrième groupe : (...) la révocation ". L'article 91 de la même loi dispose que : " Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction du (...) quatrième groupe peuvent introduire un recours auprès du conseil de discipline départemental ou interdépartemental (...). L'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que I... proposée par le conseil de discipline de recours ".

4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée, le cas échéant, par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial, est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.

5. Il ressort du rapport disciplinaire du 4 juillet 2014 qu'il est reproché à Mme G... d'avoir, le vendredi 20 juin 2014, coupé de manière très grossière et particulièrement disgracieuse les cheveux de Mme M. chez laquelle elle intervenait. Cette patiente avait auparavant une coupe soignée et les aides-soignantes lui coiffaient chaque jour les cheveux, avec un élastique dont elles remontaient la queue avec une pince. Mme G... soutient qu'elle n'a pas coupé les cheveux de Mme M., personne âgée, atteinte de la maladie d'Alzheimer, totalement désorientée et incapable de s'exprimer. Il ressort toutefois des pièces du dossier que, d'une part, Mme A..., collègue de travail de Mme G..., a informé sa hiérarchie par écrit le 26 juin 2014 de ce qu'elle lui avait elle-même confié, le lendemain des faits, qu'elle avait coupé les cheveux de Mme M., sans lui expliquer les raisons de son geste. D'autre part, il ressort aussi des pièces du dossier que lors d'un échange le 23 juin 2014, à 16 heures 18, entre Mme S. et Mme G... sur le réseau social Facebook, cette dernière a demandé à cette collègue, à propos de la réunion de coordination organisée par la responsable du service d'aide à domicile : " Pourrais-tu dire demain à la réunion, si elle en parle, que c'est un coup de sa fille qui veut être remboursée d'un coiffeur ' ". En cause d'appel, Mme G... ne dément plus avoir tenu ces propos. Il ressort enfin des pièces du dossier que la fille de Mme M. avait surpris Mme G..., le 19 juin 2014, avec une paire de ciseaux et que I...-ci lui avait expliqué qu'elle souhaitait couper un fil qui dépassait à la robe de sa mère. Par ailleurs, l'état de santé de Mme M. justifie, pour des raisons de sécurité, l'absence chez elle de tout instrument coupant ou tranchant. Les ciseaux utilisés pour une coupe de cheveux grossière et disgracieuse ont donc été nécessairement amenés et utilisés par une tierce personne. Par suite, les faits de maltraitance sur une personne vulnérable et gravement handicapée qui sont reprochés à Mme G... sont établis.

6. Il ressort également des pièces du dossier, et particulièrement d'un fil de discussion du 18 mars 2014 sur le réseau social Facebook, que Mme G... a tenté de transformer en accident du travail, le 20 mars 2014, une douleur à l'épaule dont elle souffrait depuis un certain temps. La production de cette fausse déclaration d'accident de travail a finalement été reconnue en cause d'appel par l'intéressée.

7. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres faits reprochés à Mme G..., constitués par des manquements au devoir de réserve et par des vols de denrées alimentaires chez des patients, la sanction d'exclusion temporaire de trois jours sans sursis proposée par le conseil de discipline de recours n'est pas disproportionnée à la gravité des faits commis, constituant une faute professionnelle lourde née d'un comportement gravement inadapté.

Sur les conclusions de Mme G... tendant la confirmation du jugement en ce qui concerne la fausse déclaration d'accident du travail et les manquements au devoir de réserve :

8. L'intérêt à faire appel d'un jugement s'apprécie par rapport à son dispositif et non par rapport à ses motifs, l'appel ne pouvant tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué. Par suite, les conclusions de Mme G... en tant qu'elles visent la confirmation du jugement en ce qui concerne sa fausse déclaration l'accident du travail et les manquements au devoir de réserve sont irrecevables et doivent être rejetées.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 30 mai 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé l'avis du conseil de discipline de recours se prononçant en faveur d'une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois jours. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du centre communal d'action sociale d'Armentières présentées sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre communal d'action sociale d'Armentières présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... G... et au centre communal d'action sociale d'Armentières.

Copie sera adressée, pour information, au préfet du Nord et au centre de gestion de la fonction publique territoriale du Nord.

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N°18DA01591

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01591
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Motifs - Faits de nature à justifier une sanction.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Procédure - Conseil de discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP CATTOIR ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-09;18da01591 ?
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