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23/06/2020 | FRANCE | N°18DA01478

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 23 juin 2020, 18DA01478


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser la somme totale de 14 630 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2015, en indemnisation des préjudices résultant de l'erreur de diagnostic et du défaut de prise en charge conforme aux règles de l'art à la suite de l'accident dont elle a été victime le 15 octobre 2012, ainsi qu'une somme de 1 200 euros au titre de

s entiers dépens.

Par un jugement n° 1603030,1603143 du 29 juin 2018, le tri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser la somme totale de 14 630 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2015, en indemnisation des préjudices résultant de l'erreur de diagnostic et du défaut de prise en charge conforme aux règles de l'art à la suite de l'accident dont elle a été victime le 15 octobre 2012, ainsi qu'une somme de 1 200 euros au titre des entiers dépens.

Par un jugement n° 1603030,1603143 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Rouen a condamné le centre hospitalier universitaire de Rouen à verser la somme de 2 027,50 euros à Mme C... en indemnisation de ses préjudices, et mis à la charge de cet établissement les frais et honoraires d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 200 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 juillet 2018 et le 28 juin 2019, Mme C..., représentée par Me D... A..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il a limité à 2 027,50 euros la somme mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser la somme totale de 14 420 euros en indemnisation des préjudices qu'elle a subis, avec intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2016 et capitalisation de ceux-ci ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., alors âgée de cinquante-six ans, présentant un traumatisme du genou droit à la suite d'un dérobement mécanique survenu le 15 octobre 2012 sur son lieu de travail, a été admise le lendemain au service des urgences du centre hospitalier universitaire de Rouen en raison d'une enflure importante de ce genou et de douleurs. Après s'être vu prescrire une contention et un traitement antalgique, l'intéressée est retournée à son domicile. A la suite de la persistance de phénomènes douloureux importants et d'une consultation chirurgicale le 12 novembre 2012, le diagnostic d'une rupture du tendon rotulien avec ascension de la rotule a été posé, nécessitant une intervention chirurgicale réalisée le 14 novembre 2012. Mme C... a recherché la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen en raison du retard de diagnostic et des manquements commis dans sa prise en charge médicale le 15 octobre 2012. Elle relève appel du jugement du 29 juin 2018 du tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a limité à 2 027,50 euros la somme mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen en indemnisation des préjudices subis.

2. Aucune des parties ne conteste, en appel, que l'erreur de diagnostic de la rupture du tendon rotulien dont a été victime Mme C... et la faute commise dans son suivi médical sont de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 4 du jugement attaqué, de confirmer cette responsabilité.

3. Mme C... soutient que cette erreur de diagnostic et le manquement commis dans sa prise en charge médicale ne peuvent être regardés comme ayant été à l'origine d'une perte de chance de 25 % d'échapper au dommage subi et demande sa réparation intégrale.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Rouen dont le rapport a été remis le 30 juin 2016, que le retard de traitement subi par Mme C... à la suite de la faute de diagnostic commise lors de sa prise en charge au centre hospitalier universitaire de Rouen le 15 octobre 2012, n'a été à l'origine que d'une perte de chance, évaluée par l'expert à 25 %, d'échapper à un déficit de flexion du genou droit correspondant à un déficit fonctionnel permanent de 5 %. Les premiers juges ont justement évalué ce chef de préjudice en accordant à Mme C... à ce titre, après application du coefficient de perte de chance, une somme de 1 350 euros.

5. En revanche, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il résulte du rapport d'expertise que le déficit fonctionnel temporaire et les douleurs subis par Mme C..., évalués par l'expert respectivement à 50 % sur une période d'un mois (15 octobre - 13 novembre 2012) et à 2,5 sur une échelle de 7, ne résultent pas de l'intervention du 14 novembre 2012 mais sont en lien direct avec l'erreur de diagnostic commise le 15 octobre 2012. Mme C... est, par suite, fondée à soutenir qu'aucun coefficient de perte de chance ne saurait être imputé sur l'indemnisation de ces chefs de préjudice, qu'il y a lieu de fixer, respectivement, aux sommes de 210 euros et 2 500 euros.

6. Enfin, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le préjudice résultant de la perte de la chance d'obtenir un résultat plus satisfaisant compte tenu du retard dans la prise en charge de la pathologie de Mme C... ne présente pas en lui-même un caractère indemnisable, l'ampleur de la chance perdue étant prise en compte dans l'évaluation de chacun des postes de préjudice résultant du dommage corporel subi.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a limité à 2 027,50 euros la somme mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen en indemnisation des préjudices subis, qu'il y a lieu de porter à la somme de 4 060 euros, qui portera intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2016. La capitalisation des intérêts a été demandée lors de l'introduction de la requête d'appel le 17 juillet 2018. A cette date, il était dû au moins une année d'intérêts. Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande.

8. Il y a enfin lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 2 027,50 euros que le jugement du tribunal administratif de Rouen du 29 juin 2018 a condamné le centre hospitalier universitaire de Rouen à verser à Mme C... est portée à la somme de 4 060 euros, qui portera intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2016. Les intérêts échus à la date du 17 juillet 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Rouen versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 29 juin 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au centre hospitalier universitaire de Rouen, à la mutuelle générale de l'éducation nationale et à la société M comme Mutuelle.

2

N°18DA01478


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01478
Date de la décision : 23/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : CAPITAINE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-23;18da01478 ?
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