Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société HSBC France a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 2 août 2014 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé implicitement l'autorisation de licencier Mme G... I... ainsi que la décision expresse du 7 août 2014 de rejet de son recours gracieux, et d'annuler la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique par le ministre du travail, née le 3 février 2015.
Par un jugement n° 1502899 du 11 octobre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 décembre 2017, la société HSBC France, représentée par Me J... H..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 11 octobre 2017 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 août 2014 de l'inspecteur du travail refusant le licenciement de Mme I... et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique par le ministre du travail, née le 3 février 2015.
2°) d'annuler la décision du 7 août 2014 de l'inspecteur du travail refusant le licenciement de Mme I... et la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique par le ministre du travail, née le 3 février 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de Mme I... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... I... a été embauchée depuis 2001 sous contrat à durée indéterminée par la société HSBC France. Elle occupe un poste de conseiller premier à l'agence de Montbéliard (Doubs) depuis le 22 janvier 2013. Elle détient le mandat de déléguée du personnel suppléante. La société HSBC France relève appel du jugement du 11 octobre 2017 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 août 2014 de l'inspecteur du travail de la section 04 de l'unité territoriale Nord-Lille refusant le licenciement de Mme I... et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique par le ministre du travail, née le 3 février 2015.
2. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis des fonctions de délégué du personnel, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec leurs fonctions représentatives normalement exercées ou leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'autorité compétente de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables à son contrat de travail et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi. En outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir un motif d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence.
3. Tout en reconnaissant l'absence de volonté d'enrichissement personnel ou d'intentions malveillantes de sa salariée, la société HSBC France reproche à Mme I... d'avoir apposé des signatures apocryphes ou modifié des dates dans sept dossiers de clients, contrevenant ainsi aux règles internes de l'employeur aux termes desquelles les clients doivent signer eux-mêmes les documents de la banque.
4. Dans le dossier de M. A..., si Mme I... reconnaît avoir modifié une date sur la fiche conseil en assurance d'un financement, le 27 janvier 2013 étant transformé en 16 janvier 2013, celle-ci a toutefois affirmé avoir agi à la demande du service SRE de la société HSBC France. Il ressort effectivement du document interne de la société HSBC France du 17 mars 2014, analysant les fautes reprochées à cette salariée, que " la modification a été demandée par le SRE puisque le prêt associé était terminé au 16 janvier 2013 " et que " le défaut de conseil n'a pas été retenu car une erreur dans le montage de l'opération la rend inintéressante pour le client qui reste donc libre de ne pas donner suite à notre proposition ". Par suite, les faits reprochés, bien que constitutifs d'une faute, ne peuvent être regardés comme suffisamment graves pour justifier un licenciement.
5. Dans le dossier de M. B..., il est reproché à Mme I... d'avoir effectué un " copier-coller " de la signature originale dans un projet d'investissement d'un placement en assurance-vie fait le 11 mars 2014, en photocopiant la signature apposée sur un autre document puis en la découpant et en la collant. La seule circonstance que l'employeur soutient que la signature litigieuse ne serait pas aussi nette que les signatures originales et que la couleur du stylo utilisé pour la signature diffèrerait de celle des paraphes ne peut établir la réalité de cette faute.
6. Si les mêmes griefs que ceux évoqués au point précédent sont également reprochés à Mme I... dans le bordereau d'ouverture d'un " PEA-PME " et dans trois autres documents du dossier de M. F..., cette salariée ayant reconnu avoir apposé des signatures apocryphes, il ressort clairement des pièces du dossier et particulièrement d'un courrier électronique et d'une lettre de M. F..., communiqués à l'inspecteur du travail lors de son enquête préalable, que Mme I... a agi ainsi à la demande de ce client. Par suite, les faits reprochés, bien que constitutifs d'une faute, ne peuvent être regardés comme suffisamment graves pour justifier un licenciement.
7. Dans le dossier de M. C..., il est également reproché à Mme I... d'avoir effectué un " copier-coller " de la signature originale, de la manière exposée au point 5. Toutefois, la seule circonstance que l'employeur soutienne que la signature litigieuse ne serait pas aussi nette que les signatures originales ne peut établir la réalité de cette faute.
8. Dans le dossier de M. E..., l'employeur reproche à sa salariée l'apposition d'une signature apocryphe tout en convenant que le document contractuel relatif à une assurance-vie a été envoyé signé par le client, domicilié à Lyon, par courrier électronique adressé à Mme I... sur sa boîte aux lettres professionnelle. La société HSBC France n'établit pas, en l'espèce, la réalité d'une faute commise par celle-ci en se limitant à affirmer que cette situation constituerait un manquement à ses procédures internes, aux termes desquelles les clients doivent signer eux-mêmes les documents de la banque.
9. Dans le dossier de M. D..., Mme I... a reconnu avoir apposé deux signatures sur le projet d'investissement et le profil investisseur, selon le procédé exposé au point 5. Les faits reprochés, bien que constitutifs d'une faute, ne peuvent toutefois, dans les circonstances de l'espèce, être regardés comme suffisamment graves pour justifier un licenciement dès lors qu'il est constant que les vices de forme ont été régularisés par la salariée, qu'aucune plainte n'a été déposée et que la banque n'a subi aucun préjudice.
10. Dans le dossier de Mme A..., il est également reproché à Mme I... un " copier-coller " de la signature de la cliente dans un placement de fonds, suite au décès de son mari. Si la société HSBC France soutient qu'un document comprenant une copie de sa signature, collée à la place de la signature de la cliente, figure dans ce dossier, Mme I... soutient, sans être démentie, que la cliente, âgée de quatre-vingt onze ans, et qui n'a formulé aucune doléance sur ce point auprès de la banque, est venue elle-même à l'agence, accompagnée de son gendre et de sa fille, pour faire virer des fonds d'une assurance de son défunt mari vers son assurance-vie. La société HSBC France n'établit pas, dès lors, que Mme A... n'aurait pas signé elle-même le document de virement.
11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir de Mme I..., que la société HSBC France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 11 octobre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme I..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la société HSBC France une somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la société HSBC France le versement à Mme I... d'une somme de 1 500 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société HSBC France est rejetée.
Article 2 : La société HSBC France versera la somme de 1 500 euros à Mme I... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société HSBC France, à la ministre du travail et à Mme G... I....
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N°17DA02408
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