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26/05/2020 | FRANCE | N°18DA01588

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 26 mai 2020, 18DA01588


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etablissement français du sang à lui verser, au titre du remboursement des débours qu'elle a exposés pour son assurée Mme D... A... à la suite de sa contamination par le virus de l'hépatite C, la somme de 147 307,44 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2015 ainsi que la somme de 4 238,89 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 20

17, la somme de 11 895,74 euros au titre des arrérages échus de la pension d'inv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etablissement français du sang à lui verser, au titre du remboursement des débours qu'elle a exposés pour son assurée Mme D... A... à la suite de sa contamination par le virus de l'hépatite C, la somme de 147 307,44 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2015 ainsi que la somme de 4 238,89 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2017, la somme de 11 895,74 euros au titre des arrérages échus de la pension d'invalidité de Mme A... avec intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2016 et la somme de 57 158,10 euros au titre des arrérages capitalisés de la pension d'invalidité au 31 août 2013, ou de condamner cet établissement à la rembourser des arrérages au fur et à mesure qu'ils seront versés à Mme A....

Par un jugement n° 1603644 du 12 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 juillet 2018 et le 9 janvier 2019, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois, représentée par Me B... E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Etablissement français du sang à lui verser, au titre du remboursement de ses débours exposés pour son assurée Mme A..., la somme de 54 809,20 euros au titre des prestations temporaires, avec intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2015 ;

3°) de condamner cet établissement à lui verser la somme de 40 733,53 euros au titre des arrérages échus de la rente d'invalidité, avec intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de sa requête d'appel ;

4°) de condamner cet établissement à lui verser les arrérages échus et à échoir de la pension d'invalidité à compter du 1er décembre 2017 au fur et à mesure ou si le tiers le préfère, le capital représentatif de 51 710,67 euros ;

5°) de condamner cet établissement à lui verser les soins viagers au fur et à mesure ou si le tiers le préfère, la somme de 4 292,93 euros représentative du capital de ses frais futurs ;

6°) d'ordonner la capitalisation des intérêts ;

7°) de mettre à la charge de l'Etablissement français du sang une somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

8°) de mettre à la charge de cet établissement une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me F... C..., représentant la société Axa France Iard.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de son accouchement à la clinique des Augustins de Douai, le 24 novembre 1987, Mme A... a subi une transfusion sanguine. Présentant le 13 novembre 2008 un état de fatigue persistant, elle s'est vu diagnostiquer le virus de l'hépatite C. L'intéressée a saisi l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales d'une demande d'indemnisation des préjudices résultant de sa contamination. Cet office, après avoir diligenté une expertise, a reconnu le caractère transfusionnel de cette contamination et a indemnisé l'intéressée. La caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois relève appel du jugement du 12 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etablissement français du sang (EFS) à lui rembourser ses débours et prestations qu'elle a exposés pour son assurée Mme A....

Sur l'intervention de la société Axa France Iard :

2. Est recevable à former une intervention, devant le juge du fond comme devant le juge de cassation, toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige. La société Axa France Iard, assureur de l'Etablissement français du sang justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet indemnitaire du présent litige. Par suite, son intervention est recevable.

Sur les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois :

3. Aux termes de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique : " Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite B ou C (....) sont indemnisées au titre de la solidarité nationale par l'office mentionné à l'article L. 1142-22 dans les conditions prévues à la seconde phrase du troisième alinéa de l'article L. 3122-1, aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3122-2, au premier alinéa de l'article L. 3122-3 et à l'article L. 3122-4, à l'exception de la seconde phrase du premier alinéa. / (...) L'office et les tiers payeurs ne peuvent exercer d'action subrogatoire contre l'Etablissement français du sang, venu aux droits et obligations des structures mentionnées à l'avant-dernier alinéa, si l'établissement de transfusion sanguine n'est pas assuré, si sa couverture d'assurance est épuisée ou encore dans le cas où le délai de validité de sa couverture est expiré. (...) " ;

4. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique que le recours subrogatoire des tiers payeurs est soumis à la condition que l'établissement de transfusion sanguine soit assuré, que sa couverture d'assurance ne soit pas épuisée et que le délai de validité de cette couverture ne soit pas expiré. Ainsi, l'Etablissement français du sang ne peut être condamné à rembourser les débours exposés par une caisse primaire d'assurance maladie au profit de son assuré social victime avérée d'une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C que lorsque cet établissement peut lui-même bénéficier d'une garantie par les assureurs des structures qu'il a reprises ou par ses propres assureurs. Une telle garantie n'est possible qu'à la condition, d'une part, que le ou les centres de transfusion sanguine fournisseurs du ou des produits effectivement administrés à la victime soient identifiés et, d'autre part, qu'ils soient assurés, que leur couverture d'assurance ne soit pas épuisée ou encore que le délai de validité de cette couverture ne soit pas expiré.

5. Il résulte de l'instruction que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, substitué à l'Etablissement français du sang, a, à la suite de la demande d'indemnisation de Mme A... formulée le 20 janvier 2011, reconnu le caractère transfusionnel de la contamination de l'intéressée lors de son accouchement le 24 novembre 1987 et indemnisé celle-ci au titre de la solidarité nationale. Cependant, ainsi que cela ressort d'une lettre du 23 juin 2011 du médecin chargé de cette enquête à l'attention du médecin référent de cet office et de l'expertise diligentée par ce dernier, aucune enquête transfusionnelle n'a pu être réalisée afin d'identifier les numéros de lots des deux flacons de sang utilisés pour Mme A... et retrouver leur origine dès lors que la clinique des Augustins devenue la clinique Saint Amé ne disposait plus d'archives. Il résulte de ces éléments que les numéros de lots et l'origine des produits sanguins en cause sont inconnus et, par suite, qu'aucune identification du centre de transfusion fournisseur de ces produits sanguins n'a pu être opérée. Du fait de l'impossibilité d'identifier l'établissement de transfusion sanguine, l'Etablissement français du sang se trouve en conséquence privé du bénéfice d'une couverture d'assurance. Contrairement à ce que soutient la caisse primaire d'assurance maladie requérante, la société Axa France Iard n'a pas à établir qu'elle n'était pas l'assureur en 1987 de l'ensemble des centres de transfusion sanguines de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie. Dans ces conditions, la condition tenant à la couverture assurantielle prévue à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique précité pour l'exercice d'un recours subrogatoire de la caisse primaire d'assurance maladie contre l'Etablissement français du sang ne peut être regardée comme remplie.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Sa demande tendant au paiement de l'indemnité forfaitaire de gestion doit également être rejetée ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois la somme demandée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, ni en tout état de cause, celle demandée par la compagnie Axa France Iard au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et la société Axa France Iard au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois, à l'Etablissement français du sang, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la société Axa France Iard et à Mme D... A....

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N°18DA01588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01588
Date de la décision : 26/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Recours ouverts aux débiteurs de l'indemnité - aux assureurs de la victime et aux caisses de sécurité sociale - Action récursoire.

Santé publique.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : CABINET COURTEAUD PELLISSIER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-05-26;18da01588 ?
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