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04/12/2019 | FRANCE | N°18DA00503

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 04 décembre 2019, 18DA00503


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 à raison de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel il avait placé la cession d'un logement lui appartenant à Béthune (Pas-de-Calais).

Par un jugement n° 1404901 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure

devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 mars 2018, et par un mémoire, enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 à raison de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel il avait placé la cession d'un logement lui appartenant à Béthune (Pas-de-Calais).

Par un jugement n° 1404901 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 mars 2018, et par un mémoire, enregistré le 19 décembre 2018 et qui n'a pas été communiqué, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et contributions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 13 août 2010, l'administration fiscale a remis en cause le régime d'exonération des plus-values sous lequel M. C... avait placé la cession d'un logement lui appartenant à Béthune (Pas-de-Calais). M. C... relève appel du jugement du 29 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 à raison de cette remise en cause.

Sur la charge de la preuve :

2. En vertu de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements et des justifications, en particulier, sur tous les éléments servant de base à la détermination du revenu foncier notamment sur les plus-values définies aux articles 150 U à 150 VH du même code. L'article L. 69 de ce livre ajoute que les contribuables qui se sont abstenus de répondre à de telles demandes sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu.

3. Il résulte de l'instruction que, par une lettre adressée le 10 juin 2010 à M. C... à son nouveau domicile de Boulogne-sur-Mer, l'administration lui a demandé, sur le fondement des dispositions, rappelées au point précédent, de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, de lui communiquer toutes pièces justifiant le caractère de résidence habituelle et effective, au jour de la cession, du logement, désigné sous le lot de copropriété n°14, qu'il avait cédé à Béthune. Cette demande, que M. C... a, contrairement à ce qu'il allègue, effectivement reçue le 12 juin 2010, comme en atteste l'avis de réception postal correspondant produit par le ministre en appel, précisait qu'à défaut de réponse dans le délai imparti de deux mois, l'imposition serait établie d'office en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales.

4. Il est constant que M. C... n'a apporté aucune réponse à cette demande. Aussi, l'imposition ayant, en conséquence, été établie d'office, l'intéressé supporte la charge de la preuve, en application de l'article L. 193 du même livre.

Sur le bien-fondé des impositions et contributions en litige :

5. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I.- (...) les plus-values réalisées par les personnes physiques (...), lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis (...) ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. / (...) / II.- Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : / 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession ; / (...) ".

6. Pour démontrer, comme il lui incombe, que le logement en cause constituait sa résidence principale à la date de sa cession, le 28 mars 2008, M. C... a versé à l'instruction plusieurs documents, tels l'acte notarié d'acquisition de ce logement, des factures d'électricité, une attestation d'assurance, des relevés des dépenses de copropriété, les avis d'imposition à la taxe d'habitation et à la redevance audiovisuelle émis au titre de l'année 2008, ainsi qu'une attestation des locataires du logement mitoyen, que M. C... avait fait aménager en même temps que celui en cause dans une partie d'immeuble qu'il avait acquise le 12 avril 2007.

7. D'une part, l'acte notarié, établi le 12 avril 2007 pour constater cette acquisition mentionne l'intention qui était celle de M. C... de fixer dans le logement en cause le lieu de sa résidence principale. Il résulte, au demeurant, de l'instruction que cette acquisition, réalisée après souscription d'un emprunt destiné à financer l'achat d'une résidence principale, s'est inscrite dans un contexte dans lequel M. C... avait, à la fin de l'année 2005, cédé, après division, le logement attenant au salon de coiffure qu'il exploitait à Barlin et qui constituait jusqu'alors sa résidence principale, l'intéressé ayant pris ensuite en location un appartement dans l'attente de la réalisation des travaux d'aménagement de son nouveau logement. D'autre part, les factures d'électricité versées à l'instruction, dont la plus ancienne a été établie sur la base d'un relevé du compteur correspondant au logement en cause, révèlent l'existence d'une consommation électrique, à compter du 24 septembre 2007, ce qui, alors même que celle-ci pourrait être regardée comme faible, corrobore les dires de M. C... selon lesquels il se serait installé, au cours l'été 2007, dans le logement qu'il venait de faire aménager dans les parties d'immeubles acquises par lui à Béthune. Les deux autres factures produites font d'ailleurs apparaître, à compter du 16 novembre 2007 et jusqu'au 16 janvier 2008, un niveau de consommation électrique près de trois fois supérieur, puis, durant la période suivante, du 16 janvier 2008 au 14 mars 2008, une consommation à peine plus faible. Enfin, l'attestation d'assurance et les avis d'imposition à la taxe d'habitation et à la redevance audiovisuelle, que l'intéressé verse, par ailleurs, à l'instruction, permettent d'établir que celui-ci a effectivement occupé le logement en cause à tout le moins à compter du 1er janvier 2008 et qu'il a d'ailleurs déclaré celui-ci comme constituant, à cette date, sa résidence principale. Il ne résulte d'aucun élément de l'instruction, ni n'est même allégué par le ministre en défense que l'administration aurait remis en cause, d'ailleurs, la situation résultant de cette déclaration en matière de taxe d'habitation ou de redevance audiovisuelle.

8. Si le ministre fait valoir en défense, ce qui n'est pas contesté, que M. C... a fait établir, dès le 17 janvier 2008, une attestation de superficie ainsi que les diagnostics immobiliers imposés par la loi avant toute vente d'un immeuble d'habitation et que le logement en cause a effectivement été vendu le 28 mars 2008, ni ces circonstances, ni la brièveté de la période durant laquelle M. C... s'est maintenu dans ce logement ne suffisent à remettre en cause les indices concordants énumérés au point précédent, qui établissent que l'intéressé, quelles qu'aient été alors ses intentions quant au maintien de ce logement dans son patrimoine, y avait, à tout le moins au 1er janvier 2008, soit à une date antérieure à la cession du bien, fixé sa résidence habituelle. Il en est de même des faits que M. C... a continué de recevoir son courrier à l'adresse du salon de coiffure qu'il exploitait alors à Barlin et que ses comptes bancaires y sont restés domiciliés, ce qu'il justifie par des raisons de commodité pratique que le ministre ne conteste pas sérieusement. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que l'appartement cédé par lui le 28 mars 2008 constituait sa résidence principale au jour de cette cession, au sens et pour l'application des dispositions précitées du II de l'article 150 U du code général des impôts, et que l'administration lui a refusé à tort le bénéfice de l'exonération de plus-value de cession que ces dispositions instaurent.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 à raison de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel il avait placé la cession d'un logement lui appartenant à Béthune. Il y a, par suite, lieu de prononcer la décharge sollicitée. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au titre des frais de procédure exposés par M. C....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1404901 du 29 décembre 2017 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : M. C... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 à raison de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel il avait placé la cession d'un logement lui appartenant à Béthune.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°18DA00503

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00503
Date de la décision : 04/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-08-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Plus-values des particuliers. Plus-values immobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. Binand
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CABINET FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-12-04;18da00503 ?
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