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31/07/2019 | FRANCE | N°19DA00820

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 31 juillet 2019, 19DA00820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 février 2019 du préfet du Nord décidant sa remise aux autorités espagnoles pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1900577 du 11 mars 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 avril 2019 et le 31 mai 2019, M. A... C..., représenté par Me D... B..., demande à l

a cour :

1°) d'annuler ce jugement;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 février 2019 du préfet du Nord décidant sa remise aux autorités espagnoles pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1900577 du 11 mars 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 avril 2019 et le 31 mai 2019, M. A... C..., représenté par Me D... B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord d'enregistrer sa demande d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- et les observations de M. E... A... C....

Considérant ce qui suit :

1. M. E... A... C..., ressortissant ivoirien né le 26 juillet 2000, a formulé le 3 octobre 2018 une demande d'asile en France. Lors de l'instruction de sa demande, il est apparu que ses empreintes digitales avaient été relevées en Espagne, le 1er août 2018, sous le numéro ES 2 183796529. Les autorités espagnoles ont été saisies le 15 octobre 2018 d'une demande de prise en charge sur le fondement de l'article 13.1 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013. Un accord implicite est né ensuite le 15 décembre 2018. M. A... C... relève appel du jugement du 11 mars 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2019 du préfet du Nord décidant sa remise aux autorités espagnoles pour l'examen de sa demande d'asile.

2. Aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. / Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend ".

3. M. A... C... est arrivé très récemment en France ainsi qu'il est dit au point 1. Il est en outre célibataire et sans enfant. La seule circonstance qu'il soit scolarisé au lycée Jean Bouin, à Saint-Quentin, qu'il maîtrise le français, qu'il effectue des stages en entreprise et que sa famille d'accueil souligne ses qualités personnelles, ne peut établir, compte tenu des conditions et de la durée de son séjour, que le préfet du Nord aurait porté, à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

4. Aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un Etat membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier Etat membre auprès duquel la demande a été introduite, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable devient l'Etat membre responsable (...) ".

5. L'Espagne étant membre de l'Union Européenne, et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de ces textes. Cette présomption est toutefois réfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant. Dans cette hypothèse, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités espagnoles répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile.

6. M. A... C... se borne à invoquer ses mauvaises conditions de rétention en Espagne, à Algésiras, durant soixante-douze heures. Pour regrettable qu'elle soit, cette situation n'établit pas la réalité d'une défaillance systémique de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Espagne. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 4 doit être écarté.

7. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 5 et 6, M. A... C... ne peut sérieusement soutenir que la décision de remise à l'Espagne, pays de l'Union européenne, signataire de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants au sens des stipulations de l'article 3 de cette convention. Par suite, ce moyen doit être écarté.

8. Aux termes du premier paragraphe de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". La faculté laissée à chaque Etat membre, par ces dispositions, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Si M. A... C... affirme parfaitement maitriser le français, élément de nature à favoriser une intégration en France, cette seule circonstance ainsi que le fait qu'il bénéficie d'une famille d'accueil, ne sont pas de nature à établir la réalité de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commis le préfet du Nord au regard des dispositions précitées, en ne faisant pas usage de la faculté qu'elles ouvrent de procéder à l'examen de sa demande d'asile, et le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 doit, dès lors, être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Nord.

1

4

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00820
Date de la décision : 31/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : RACLE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-07-31;19da00820 ?
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