Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...F...épouse E...et M. A...E...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler les arrêtés du 21 juin 2018 du préfet du Nord refusant de leur délivrer un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office.
Par deux jugements n° 1805828 et 1805810 du 9 août 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2019, sous le n° 19DA00173, Mme F... épouseE..., représentée par Me D...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 juin 2018 du préfet du Nord ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-166/13 du 5 novembre 2014 et C-249/13 du 11 décembre 2014 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et MmeE..., ressortissants azerbaïdjanais, nés respectivement le 18 juillet 1986 et le 11 septembre 1986, entrés en France en juin 2014 selon leurs déclarations, ont demandé leur admission au séjour au titre de l'asile. Leurs demandes ont été rejetées par deux décisions du 30 septembre 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui a également rejeté leurs demandes de réexamen comme irrecevables le 22 septembre 2016. Ces décisions ont été confirmées par deux décisions du 2 mars 2017 de la Cour nationale du droit d'asile. Ils relèvent appel des jugements du 9 août 2018 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 21 juin 2018 du préfet du Nord refusant de leur délivrer un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office.
2. Les requêtes n° 19DA00173 et n° 19DA00174 présentées pour M. et Mme E...présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les décisions de refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. " Aux termes du III de l'article R. 723-19 du même code : " La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire. ".
4. Il résulte de ces dispositions, que l'étranger qui demande l'asile, a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé, comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé. Cette preuve peut être rapportée par la production d'un extrait du système d'information de l'Office, dont les données relatives à la notification à l'intéressé de la décision statuant définitivement sur sa demande d'asile font foi jusqu'à la preuve du contraire.
5. Le préfet du Nord produit un extrait de la base de données " TelemOfpra ", relative à l'état des procédures des demandes d'asile dont il ressort que les décisions de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande d'asile de M. et de MmeE..., leur ont été notifiées le 10 mars 2017. Les requérants, qui ne font état d'aucun élément contraire, ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le 21 juin 2018, date à laquelle les arrêtés contestés ont été pris, ils bénéficiaient du droit de se maintenir en France.
6. Si M. et Mme E...soutiennent que le sens de la décision prise par la Cour nationale du droit d'asile n'est pas établi par les pièces du dossier, et qu'il n'est donc pas certain que leur recours a été rejeté, nonobstant la mention d'un rejet figurant dans le relevé de l'application " Telemofpra ", ils ne produisent pas, à l'appui de ce moyen, les décisions qui leur ont été notifiées qui seules seraient susceptibles de remettre en cause ces mentions. Dans ces conditions, M. et Mme E... ne peuvent être regardés comme contestant sérieusement les mention figurant dans le relevé de l'application " Telemofpra " selon laquelle leur recours a été rejeté par la Cour nationale du droit d'asile.
7. En deuxième lieu, M. et Mme E...soutiennent qu'ils ont établi en France leur vie familiale et personnelle et qu'ils ont eu deux enfants, dont l'un est d'ailleurs né sur le territoire français. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier que les intéressés sont entrés en France en juin 2014, après avoir vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans dans leur pays d'origine où ils ne justifient pas être dépourvus de toute attache. De même nationalité, ils sont tous les deux en situation irrégulière et font l'objet de la même mesure d'éloignement. Rien ne s'oppose à ce que M. et Mme E... reconstituent leur vie privée et familiale en dehors du territoire national accompagné de leurs deux jeunes enfants mineurs. Dans ces conditions, et eu égard notamment aux conditions de séjour des intéressés en France, les arrêtés en litige ne portent pas, à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, une atteinte excessive et ne méconnaissent ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, les décisions en litige ne sont pas entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leur situation au regard de leur vie privée et familiale.
8. Enfin, les requérants réitèrent leur moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Cependant, ils n'apportent pas en appel d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le premier juge sur ce moyen. Par suite, il y a lieu, par adoption du motif retenu à bon droit par le premier juge, de l'écarter.
Sur les décisions faisant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, des décisions de refus de titre de séjour doit être écarté.
10. En second lieu, le droit d'être entendu, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des principes généraux du droit de l'Union Européenne, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision d'éloignement, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision défavorable est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie.
11. L'étranger, lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, y compris au titre de l'asile, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement et d'une interdiction de retour sur le territoire français. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, et, le cas échéant, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée a été prise plusieurs mois après le prononcé de la décision de la Cour nationale du droit d'asile leur refusant la qualité de réfugié. Il appartenait à M. et Mme E...de fournir spontanément à l'administration, notamment à la suite du rejet de leur demande d'asile, tout élément utile relatif à leur situation. Ils n'établissent pas avoir alors présenté ces éléments. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de leur droit à être entendus doit être écarté.
Sur les décisions fixant le pays de destination :
12. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de titre de séjour et de celle d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté leurs demandes. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de Mme F...épouse E...et de M. E...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...F...épouseE..., à M. A... E...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Nord.
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N°19DA00173,19DA00174