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28/05/2019 | FRANCE | N°19DA00225

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (quater), 28 mai 2019, 19DA00225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a prononcé son transfert vers la Suisse.

Par un jugement n° 1804497 du 2 janvier 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2019, M. A..., représenté par Me C...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jug

ement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2018 de la préfète de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a prononcé son transfert vers la Suisse.

Par un jugement n° 1804497 du 2 janvier 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2019, M. A..., représenté par Me C...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2018 de la préfète de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et d'enregistrer sa demande d'asile dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative ou, subsidiairement, de ces dernières dispositions.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- l'échange de notes du 14 août 2013 entre la Suisse et l'Union européenne concernant la reprise du règlement UE no 604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 20 octobre 2015 désignant les préfets compétents pour enregistrer les demandes d'asile et déterminer l'Etat responsable de leur traitement (métropole) ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant éthiopien né le 15 mai 1992, est entré en France le 25 août 2018, selon ses déclarations, et a présenté une demande d'asile auprès du guichet unique de la préfecture de la Seine-Maritime. La consultation du système " Eurodac " a révélé qu'il avait été enregistré comme demandeur d'asile en Suisse le 4 septembre 2015. Les autorités de cet Etat ayant donné, le 26 septembre 2018, leur accord exprès en vue de la reprise en charge de l'intéressé, la préfète de la Seine-Maritime, par un arrêté du 28 novembre 2018, a prononcé son transfert vers la Suisse. M. A... fait appel du jugement du 2 janvier 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en annulation de cet arrêté.

Sur les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 5 de l'article 5 et du paragraphe 3 de l'article 35 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, et du paragraphe 4 de l'article 5 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 :

2. En premier lieu, l'article 35 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride prévoit, en son paragraphe 1, que les Etats membres veillent à ce que les autorités chargées de l'exécution des obligations de ce règlement disposent des ressources nécessaires pour l'accomplissement de leur mission et, en son paragraphe 3, que ces autorités reçoivent la formation nécessaire en ce qui concerne l'application du règlement. Ces dispositions sont relatives aux modalités de coopération entre les Etats et n'ont pas pour objet, ni pour effet, de créer au profit des demandeurs de protection internationale un droit dont ils seraient susceptibles de se prévaloir à l'encontre de l'administration. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 35 du règlement (UE) n° 604/2013 doit donc être écarté.

3. En second lieu, il résulte des paragraphes 2 et 4 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale que, lorsqu'une autorité distincte est désignée pour " traiter les cas en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 ", les " États membres veillent à ce que le personnel de cette autorité dispose des connaissances appropriées ou reçoive la formation nécessaire pour remplir ses obligations lors de la mise en oeuvre de la présente directive ". L'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile désigne le préfet de département et, à Paris, le préfet de police en tant qu'autorité compétente, en particulier, pour procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile et prononcer une mesure de transfert en application de l'article L. 742-3 de ce code. Le même article prévoit la possibilité pour le ministre de l'intérieur et le ministre chargé de l'asile de donner par arrêté conjoint, compétence à un préfet de département et, à Paris, au préfet de police pour exercer ces missions dans plusieurs départements.

4. Si M. A... soutient qu'aucune disposition n'a été édictée pour assurer la transposition en droit interne des objectifs rappelés au point précédent de la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013, celles du paragraphe 5 de l'article 5 du règlement n° 604/2013 prévoyant que l'entretien individuel dont bénéficie le demandeur d'asile afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat responsable est " mené par une personne qualifiée en vertu du droit national ", sont, en tout état de cause, d'effet direct en droit interne. L'absence de texte spécifique précisant en droit français la notion de " personne qualifiée " au sens de ces dernières dispositions ne fait, par ailleurs, pas par elle-même obstacle à ce que les préfets de département territorialement compétents prennent les mesures nécessaires pour s'assurer que les agents placés sous leur autorité et affectés à l'accueil des demandeurs d'asile présentent une qualification suffisante pour l'accomplissement de cette mission, en particulier en leur assurant une formation ou, à tout le moins, l'accès à une information suffisante comme le prévoit la directive.

5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'entretien du 17 septembre 2018 s'est déroulé dans le service d'accueil des demandeurs d'asile placé sous l'autorité de la préfète de la Seine-Maritime, compétente en vertu de l'arrêté du 20 octobre 2015 visé précédemment, pour les départements de la Seine-Maritime et de l'Eure. Il n'est pas sérieusement contesté que M. A... a bien été reçu lors de cet entretien par un agent de ce service, lequel doit être regardé, en l'absence notamment de tout élément permettant de supposer un défaut de formation ou d'accès à une information suffisante, comme une personne qualifiée en vertu du droit national pour mener cet entretien. En particulier, il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que le compte-rendu d'entretien mentionne " Monsieur A...B...déclare ne pas vouloir retourner en Suisse car il aurait eu une obligation de quitter le territoire suisse. ", que l'agent qui a conduit l'entretien aurait été insuffisamment qualifié pour recueillir les éléments pertinents relatifs à la situation particulière de l'intéressé.

Sur les autres moyens :

6. En premier lieu, la légalité de la décision de transfert n'est pas subordonnée à la délivrance préalable de l'information prévue par l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 sur l'autorité responsable du traitement informatisé des données concernant le demandeur d'asile.

7. En deuxième lieu, si la requête à fin de prise en charge adressée aux autorités suisses, ainsi que l'arrêté contesté se réfèrent aux dispositions du b) du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 relatives à la reprise en charge des demandeurs d'asile en cours d'examen, alors que la demande d'asile de M. A...a été rejetée dans cet Etat, cette circonstance ne permet pas de tenir pour établi que la préfète de la Seine-Maritime aurait procédé à un examen insuffisant de la situation particulière de M. A....

8. En troisième lieu, s'agissant des moyens tirés de ce que M. A... n'aurait pas reçu l'information prévue par l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dans des conditions lui permettant de la comprendre, de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté, de ce que la préfète de la Seine-Maritime aurait insuffisamment examiné la possibilité de mettre en oeuvre la clause de souveraineté figurant au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 et commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de faire application de cette clause, le requérant n'apporte en appel aucun élément de droit ou de fait de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le magistrat désigné sur son argumentation de première instance. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le premier juge.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

4

N°19DA00225


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 19DA00225
Date de la décision : 28/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-05-28;19da00225 ?
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