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14/05/2019 | FRANCE | N°18DA00187

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (bis), 14 mai 2019, 18DA00187


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...E...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision par laquelle le maire de la commune de Liancourt a implicitement rejeté leur demande du 16 décembre 2011 tendant à ce qu'il fasse usage de ses pouvoirs de police pour réglementer la circulation des véhicules dans la rue où est située leur maison d'habitation.

Par un jugement n° 1201221 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14DA02003 du 19 juillet

2016, la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement et a enjoint au mai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...E...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision par laquelle le maire de la commune de Liancourt a implicitement rejeté leur demande du 16 décembre 2011 tendant à ce qu'il fasse usage de ses pouvoirs de police pour réglementer la circulation des véhicules dans la rue où est située leur maison d'habitation.

Par un jugement n° 1201221 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14DA02003 du 19 juillet 2016, la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement et a enjoint au maire de la commune de Liancourt de prendre toutes mesures utiles pour faire cesser les troubles à la tranquillité et à la sécurité publiques rue Pasquier dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Par une décision du 22 mars 2017, le Conseil d'Etat n'a pas admis le pourvoi présenté par la commune de Liancourt.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance du 25 janvier 2018, le président de la cour a prescrit l'ouverture d'une procédure juridictionnelle, enregistrée sous le n° 18DA00187, en vue d'obtenir, à la demande de M. et MmeE..., l'exécution de l'arrêt n° 14DA02003. Par cette demande et des mémoires, enregistrés le 14 février 2018, le 27 avril 2018, le 25 mars 2019 et le 10 avril 2019, M. et MmeE..., représentés par Me C...D..., demandent à la cour de prescrire les mesures propres à assurer une complète exécution de cet arrêt. Ils concluent, dans l'état de leurs dernières écritures, à ce que la cour :

1°) fasse injonction à la commune de Liancourt :

- de déplacer l'aire de livraison de la maison de retraite ou, à défaut, de réglementer le tonnage des camions qui y accèdent en imposant l'arrêt des moteurs et des groupes frigorifiques ;

- d'interdire la circulation des poids-lourds dans la rue Pasquier et de mettre en place des obstacles physiques afin d'éviter la dégradation des biens et assurer la sécurité des piétons, par notamment la mise en place de poteaux pour empêcher les manoeuvres dangereuses ainsi qu'une signalisation ;

- de réglementer les horaires de livraison entre 22 heures et 7 heures du matin ;

- de mettre en place une signalisation adéquate ;

2°) prescrive que ces travaux devront être réalisés dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) mette à la charge de la commune de Liancourt une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M. et MmeE....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt du 19 juillet 2016, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Douai a, à la demande M. et Mme A...E..., propriétaires d'une maison d'habitation située rue Pasquier à Liancourt, d'une part, annulé le jugement du 16 octobre 2014 du tribunal administratif d'Amiens rejetant leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Liancourt a refusé de faire usage de ses pouvoirs de police pour limiter les nuisances générées par l'établissement d'hébergement pour les personnes âgées dépendantes (EPHAD) situé en face de leur habitation et, d'autre part, enjoint au maire de la commune de prendre toutes mesures utiles pour faire cesser les troubles à la tranquillité et à la sécurité publiques rue Pasquier dans un délai de quatre mois à compter de la notification de l'arrêt.

2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. / (...) ".

3. En premier lieu, la Cour a jugé que la circulation des camions de fort tonnage et de livraison se rendant à la maison de retraite générait des nuisances sonores importantes dès 4 heures 30 le matin selon les jours à raison de manoeuvres de véhicules de livraison, ces activités étant à l'origine d'émergences sonores non conformes aux textes réglementaires en période nocturne, soit entre 22 heures et 7 heures, de nature à compromettre la tranquillité publique. Il ressort des pièces du dossier qu'en exécution de l'arrêt, la commune de Liancourt a pris un arrêté le 27 mars 2018, interdisant rue René Pasquier, tous bruits entre 23 heures et 6 heures du matin, susceptibles de porter atteinte de par leur intensité, leur durée, leur caractère agressif ou répétitif, à la santé ou à la tranquillité des habitants. Elle a également imposé que les opérations de livraison aux entreprises, artisans et établissements publics soient uniquement effectuées entre 6 heures et 23 heures, que les engins utilisés pour les livraisons ainsi que les équipements nécessaires à ces opérations ne devaient pas générer de bruit excessif pour le voisinage et que les véhicules de livraison, en attente ou en cours de livraison devaient avoir leurs moteurs arrêtés. Cet arrêté, s'il a pour objet de limiter les nuisances sonores pendant la période de 23 heures à 6 heures du matin, ne limite cependant pas ces nuisances pendant la totalité de la période nocturne qui court de 22 heures à 7 heures du matin en vertu des dispositions de l'article R. 1336-7 du code de la santé publique. En outre, si la commune de Liancourt fait valoir qu'une déviation a été créée avenue Pierre Bérégovoy, ce qui a permis le détournement de la circulation des camions et poids-lourds de la rue Pasquier, cette déviation ne concerne cependant pas les camions de livraison de l'EHPAD. Par suite, et dans la mesure où il n'appartient pas à la commune de procéder au déplacement de l'aire de livraison d'un établissement de santé, il y a seulement lieu d'enjoindre à la commune de Liancourt d'étendre la période d'interdiction, édictée par son arrêté du 27 mars 2018 à la totalité de la période nocturne, soit entre 22 heures et 7 heures du matin, de modifier en conséquence les horaires de livraison autorisés et de procéder à la mise en place d'une signalisation adéquate de ces interdictions, dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

4. En second lieu, la Cour a jugé que les manoeuvres réalisées par les véhicules de livraison sur la voie de circulation étaient susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique, compte tenu notamment des empiétements manifestes et importants sur le trottoir au droit de l'habitation des requérants, ces empiétements ne permettant pas le passage d'éventuels piétons et de véhicules. La commune de Liancourt ne justifie pas avoir pris des mesures pour remédier à ces empiètements par la mise en place de dispositifs physiques tels que des barrières, des poteaux ou des plots de béton afin de préserver le trottoir jouxtant la maison d'habitation de M. et Mme E...afin d'assurer la sécurité des piétons et d'éviter la dégradation des biens à la suite de manoeuvres des camions de livraison. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au maire de la commune de Liancourt de procéder à la mise en place de ces dispositifs dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Liancourt le versement à M. et Mme E...de une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées au titre de ces mêmes dispositions par la commune de Liancourt ne peuvent, en revanche, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est enjoint au maire de la commune de Liancourt de porter la période d'interdiction, édictée par son arrêté du 27 mars 2018 et concernant la rue René Pasquier, à la totalité de la période nocturne, soit entre 22 heures et 7 heures du matin, de modifier en conséquence les horaires de livraison autorisés et de procéder à la mise en place d'une signalisation adéquate de ces interdictions, dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Liancourt de prendre des mesures pour remédier aux empiètements sur le trottoir au droit de l'habitation des requérants par la mise en place de dispositifs physiques tels que des barrières, des poteaux ou des plots de béton afin d'assurer la sécurité des piétons et d'éviter la dégradation des biens, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Article 3 : La commune de Liancourt versera à M. et Mme E...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Liancourt au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme E...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...E...et à la commune de Liancourt.

Copie en sera adressée au préfet de l'Oise.

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N°18DA00187


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 18DA00187
Date de la décision : 14/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Étendue des pouvoirs de police - Obligation de faire usage des pouvoirs de police.

Procédure - Jugements - Exécution des jugements - Prescription d'une mesure d'exécution.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : CABINET BERTHAUD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-05-14;18da00187 ?
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