Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 mars 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités italiennes.
Par un jugement n° 1801178 du 1er juin 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2018, M. B...C...A..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2018 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...A..., ressortissant soudanais né le 20 février 1993, a déposé une demande d'asile en France le 23 janvier 2018. La consultation d'Eurodac a fait apparaître l'existence d'une prise d'empreintes et d'une demande d'asile en Italie. Ce pays, consulté par la France, a accepté de le reprendre en charge. Par un arrêté du 30 mars 2018, la préfète de la Seine-Maritime a procédé au transfert de l'intéressé vers l'Italie. M. C...A...relève appel du jugement du 1er juin 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignation d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) " et aux termes de l'article 62 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " L'admission provisoire est demandée sans forme au président du bureau ou de la section ou au président de la juridiction saisie. (...) L'admission provisoire peut être prononcée d'office si l'intéressé a formé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été définitivement statué ".
3. M. C...A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 août 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai. Par suite, ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet.
Sur la légalité de l'arrêté de transfert :
4. En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
5. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.
6. L'arrêté en litige vise le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et précise, en particulier, que M. C... A...a demandé l'asile en Italie et que les autorités italiennes, saisies le 23 janvier 2018 sur le fondement du paragraphe 1, b), de l'article 18 de ce règlement, ont implicitement accepté de le reprendre en charge le 23 mars 2018. Il est, ainsi, suffisamment motivé.
7. Aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable / (...) ". Aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". Aux termes de l'article 3 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit à son intégrité physique et mentale ". Aux termes de l'article 4 de la même Charte : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
8. L'Italie étant membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de ces textes. Cette présomption est toutefois réfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant. Dans cette hypothèse, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités italiennes répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile.
9. En l'espèce, M. C...A...ne produit aucun document de nature à établir que la situation générale en Italie ne permettrait pas d'y assurer un niveau de protection suffisant aux demandeurs d'asile et que sa réadmission vers ce pays l'exposerait à un risque personnel de traitement inhumain ou dégradant. Il ne fournit aucune précision ni aucun élément sur le séjour qu'il a effectué en Italie avant de se rendre en France, sa durée et les difficultés qu'il y aurait rencontrées, notamment en termes d'accueil ou de traitement de sa demande d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier que sa demande ne serait pas traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision en litige aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 3.2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et des stipulations de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doivent être écartés.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais du procès doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. C...A...tendant au bénéfice de l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...A...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...A..., au ministre de l'intérieur et à Me D....
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
N°18DA01979 4