Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1703214 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai 2018 et 2 octobre 2018, M. A...B..., représenté par Me D...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- et les observations de Me D...C..., représentant M.B....
Considérant ce qui suit :
Sur la décision de refus de titre de séjour :
1. Par un arrêté du 8 septembre 2016, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs n° 245 de la préfecture du Nord, le préfet du Nord a donné à Mme E...F..., adjointe au directeur de l'immigration et de l'intégration de la préfecture, délégation à l'effet de signer notamment les décisions de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français avec ou sans délai. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté.
2. La décision comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
3. Il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet du Nord n'aurait pas procédé à un examen sérieux et complet de la situation de M. B....
4. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Enfin, aux termes de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger et pour écarter la présomption d'authenticité dont bénéficie un tel acte, l'autorité administrative procède aux vérifications utiles ou y fait procéder auprès de l'autorité étrangère compétente. L'article 47 du code civil précité pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il incombe donc à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. En revanche, l'administration française n'est pas tenue de solliciter nécessairement et systématiquement les autorités d'un autre Etat afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet Etat est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié.
5. M. B...est entré irrégulièrement sur le territoire français le 26 février 2015, dépourvu de document de voyage. Compte tenu de son âge, les actes produits faisant apparaître une date de naissance au 30 juin 1999, il a fait l'objet d'un placement provisoire à l'aide sociale à l'enfance par une ordonnance du parquet du tribunal de grande instance de Lille du 26 février 2015 puis d'un placement pour une durée de deux ans à l'aide sociale à l'enfance à compter du 27 février 2015 par un jugement du juge des enfants de ce tribunal rendu le 31 mars 2015. Ce jugement a retenu la minorité de l'intéressé après avoir écarté successivement le critère de l'apparence physique ou le caractère probant des testes osseux et en se fondant sur un extrait d'acte de naissance et sa concordance avec les déclarations de l'intéressé. Ce jugement indique également qu'" aucune des parties à la procédure n'en remettait en cause l'authenticité ". A l'appui de sa demande de titre de séjour, M. B...a joint un extrait d'acte de naissance établi le 27 juin 1999 en Guinée et un jugement supplétif de nationalité rendu le 22 juillet 2016 par le tribunal de première instance de N'Zerekore. Pour écarter la valeur probante et l'authenticité de ces documents, le préfet du Nord s'est fondé sur une expertise établie le 25 août 2016 par la direction zonale de la police aux frontières du Nord qui a émis un avis défavorable sur l'authenticité de l'extrait d'acte de naissance en raison de plusieurs anomalies telles que les mentions pré-imprimées en laser-toner, des fautes d'orthographe sur le tampon humide et des incohérences de numérotation de l'acte. Il ressort également de cette expertise que la transcription du jugement supplétif ne comporte aucune sécurité documentaire. Dès lors, le préfet du Nord a pu légalement, sans recourir à la consultation préalable des autorités guinéennes, considérer que ces éléments extérieurs étaient suffisamment précis et probants pour retenir le caractère falsifié des documents présentés par l'intéressé. En outre, la carte d'identité consulaire produite a pour vocation d'établir la preuve de résidence à l'étranger d'un ressortissant et n'est donc pas un document d'identité. Elle a, en outre, été établie sur la base des documents dont l'authenticité est contestée. Le passeport fourni a été établi postérieurement à l'arrêté contesté et ne permet pas de vérifier l'authenticité de la date de naissance. Enfin, l'examen osseux qui a été pratiqué sur l'intéressé le 25 août 2016 au centre hospitalier universitaire de Lille, lui donne un âge supérieur à dix-neuf ans. Si ce type d'examen comporte une marge d'erreur qui fait obstacle à ce qu'il lui puisse lui être conféré une valeur probante suffisante, il constitue néanmoins un indice qui corrobore en l'espèce les suspicions d'inauthenticité nées de l'examen documentaire pratiqué par les services de police. Par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Nord aurait commis une erreur de procédure ou de droit en écartant comme dépourvus de valeur probante les documents fournis et en retenant que l'intéressé n'était pas mineur à sa date d'entrée en France.
6. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée ; / (...) ".
7. Ainsi qu'il a été dit au point 5, M.B..., ressortissant guinéen, qui, en outre, a conservé des liens même épisodiques avec sa mère vivant au Guinée, n'a pas justifié par des documents suffisamment probants comme ayant été confié à l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de seize ans au moment de son arrivée en France. Par suite, en estimant que M. B...ne remplissait pas les conditions prévues par les dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'a pas fait une inexacte application de ces dispositions.
8. Lorsqu'il est saisi d'un titre de séjour, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses, d'examiner si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement autre que celui invoqué par l'étranger. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que M. B...a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce dernier n'établit pas avoir sollicité un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et il ne ressort pas, en outre, des termes de la décision attaquée que ce fondement aurait été examiné d'office par le préfet du Nord. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour méconnaîtrait les dispositions de cet article est inopérant.
9. M.B..., ressortissant guinéen, déclare être entrée sur le territoire français le 26 février 2015. Il ressort des pièces du dossier que M. B...a intégré à compter de décembre 2015 une première année de certificat d'aptitude professionnelle " agent polyvalent de restauration " au sein du lycée professionnel Lavoisier à Roubaix, que durant l'année scolaire 2016-2017, il est inscrit dans une formation en alternance en contrat d'apprentissage avec une entreprise dans le domaine de la restauration au lycée Hôtelier international de Lille. Une telle situation ne lui donne pas droit à un maintien prolongé en France et l'intéressé ne démontre pas, en outre, l'impossibilité de poursuivre sa formation hors de France. Il ressort également des pièces du dossier qu'il est célibataire sans enfant à charge. Il n'établit pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où, selon les déclarations qu'il a fait figurer dans son dossier de demande de titre de séjour signé par lui le 25 juillet 2016, résident sa mère, son père, sans mention de son décès, ainsi qu'un frère de dix-huit ans et une soeur de treize ans. Compte tenu des conditions et de la durée de son séjour en France, le préfet n'a pas porté au droit au respect à une vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Par suite, le préfet du Nord n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est illégale.
Sur la décision d'obligation de quitter le territoire :
11. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision d'obligation de quitter le territoire.
12. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 1, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.
13. L'arrêté attaqué, qui contient l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde, est suffisamment motivé.
14. Il ne ressort ni de cette motivation ni des autres pièces du dossier que le préfet du Nord n'aurait pas procédé à l'examen de la situation individuelle de M. B....
15. Pour les mêmes raisons que celles énoncées aux points 8 et 9, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
16. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision d'obligation de quitter le territoire français est illégale.
Sur la décision octroyant un délai de départ volontaire :
17. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 1, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision doit être écarté.
18. Aux termes des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. ".
19. Si M. B...soutient que la décision du préfet du Nord de lui accorder un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il n'apporte aucune précision quant aux circonstances qui justifieraient, selon lui, qu'un délai supérieur lui soit accordé à titre exceptionnel, ni ne précise d'ailleurs quel délai aurait dû lui être accordé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
20. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire est illégale.
Sur la décision fixant le pays de destination :
21. Il résulte de ce qui a été dit au point 16 que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
22. La décision attaquée contient l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
23. M. B...n'apporte pas d'éléments de nature à établir la réalité des risques personnels encourus en cas de retour en Guinée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté
24. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi 10 juillet 1991 doivent être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre de l'intérieur et à Me D...C....
N°18DA00935 2