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15/02/2018 | FRANCE | N°17DA00832

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 15 février 2018, 17DA00832


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de son éloignement.

Par un jugement n° 1700437 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregi

strés les 4 mai et 21 juin 2017, M. B... A..., représenté par Me D...C..., demande à la cour :

1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de son éloignement.

Par un jugement n° 1700437 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 mai et 21 juin 2017, M. B... A..., représenté par Me D...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller,

- et les observations de Me D...C..., représentant M.A....

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Nord :

1. Considérant que la requête d'appel de M. A...ne constitue pas la seule reproduction littérale de ses écritures de première instance et énonce à nouveau, de manière précise, les critiques adressées à la décision dont il avait demandé l'annulation au tribunal administratif ; qu'une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que le préfet du Nord n'est dès lors pas fondé à soutenir que la requête d'appel de M. A...est irrecevable ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité " ;

4. Considérant que, pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M.A..., de nationalité guinéenne, sur le fondement des dispositions citées au point 2, le préfet du Nord a relevé que celui-ci avait produit, à l'appui de sa demande, la copie d'un extrait d'acte de naissance délivré le 17 février 2015 par un officier d'état civil de la commune de Mamou (Guinée) dont la police aux frontières de Lille a constaté, dans un rapport établi le 18 août 2016, qu'il présentait les caractéristiques d'un document contrefait ; que le préfet en a déduit, d'une part, l'existence d'une fraude commise par M. A...et, d'autre part, que les conditions fixées par les dispositions citées au point 3 n'étaient pas remplies en l'espèce ;

En ce qui concerne le motif de fraude :

5. Considérant que si le rapport de la police aux frontières du 19 août 2016 relève, en particulier, que le timbre sec légalisant le document au verso, libellé " Ministère des Affaire Etrangères ", présente une faute d'accord, il ressort des pièces du dossier que cette faute est présentée, par les autorités guinéennes, comme ayant un caractère volontaire et poursuivant un objectif de lutte contre la fraude, ainsi que cela résulte des termes de la note verbale du ministère des affaires étrangères et des guinéens de l'étranger du 17 octobre 2016 produite par le requérant ; que si ce document ne présente lui-même aucune garantie d'authenticité, sa teneur est confirmée par un échange entre la direction centrale de la police aux frontières et l'ambassade de France en Guinée, transmis au tribunal pour enfants de Lille dans le cadre d'une procédure judiciaire et produit devant la cour ; que, dans ces conditions, l'authenticité de ce cachet doit être regardée comme établie ;

6. Considérant que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que si M. A...a été interpellé et placé en garde à vue pour usage de faux document administratif, le ministère public a classé sans suite la procédure au motif que cette infraction n'était pas caractérisée ;

7. Considérant qu'enfin, M. A...a également produit à l'appui de sa demande de titre de séjour et devant la juridiction administrative un jugement supplétif du 20 avril 2016 tenant lieu d'acte de naissance ainsi qu'un nouvel extrait d'acte de naissance établi le 24 octobre 2016, qui contiennent les mêmes indications que l'extrait d'acte de naissance du 17 février 2015 et dont l'authenticité n'est pas remise en cause par l'administration ; que l'état civil du requérant est également confirmé par les mentions figurant sur le passeport et sur la carte d'identité consulaire qui lui ont été délivrés par les autorités guinéennes et dont il n'est pas davantage allégué qu'ils seraient falsifiés ou usurpés ;

8. Considérant que, dans ces conditions, et malgré les autres observations faites par la police aux frontières dans son rapport du 19 août 2016 quant à la forme de l'extrait d'acte de naissance du 17 février 2015, les pièces du dossier ne permettent pas de tenir pour établi que M. A... aurait délibérément commis des manoeuvres frauduleuses visant à tromper l'administration lors de la présentation des documents en début de procédure ; que, dès lors, le caractère frauduleux de ces pièces n'est pas établi et le motif de l'arrêté préfectoral qui repose sur la fraude doit être censuré ;

En ce qui concerne l'autre motif de refus :

9. Considérant que la décision attaquée repose sur un second motif selon lequel M. A...ne remplit pas les conditions prévues par l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que, notamment, il s'est " rendu coupable de détention et d'usage de faux document administratif en vue d'obtenir un titre de séjour " ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 8, les pièces du dossier ne permettent pas de tenir pour établi que M. A...se serait rendu responsable de manoeuvres frauduleuses et, ainsi qu'il a été rappelé au point 6, l'intéressé n'a fait l'objet d'aucune poursuite à l'issue de l'enquête judiciaire portant sur ces faits ; que, dès lors, cette partie de la motivation de la décision attaquée est entachée d'inexactitude matérielle ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préfet du Nord, qui a d'ailleurs relevé dans la motivation de sa décision que M.A..., confié au service de l'aide sociale à l'enfance alors qu'il était âgé de seize ans, justifie suivre une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et présente de bons résultats, aurait pris, même en tenant compte des autres éléments figurant dans sa motivation, la même décision s'il ne s'était pas fondé sur ce fait matériellement inexact ; que, par suite, ce second motif de refus de titre de séjour est également entaché d'illégalité ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 8 et 9 que M. A...est fondé à demander l'annulation de la décision prononçant le refus de titre de séjour ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination de son éloignement ; que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, il en résulte que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant qu'eu égard à ses motifs, le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet du Nord doive délivrer un titre de séjour à M.A... ; qu'il appartient en effet à l'autorité préfectorale de procéder à un examen complet de la situation de l'intéressé pour apprécier notamment s'il remplit l'ensemble des conditions fixées par l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, le cas échéant, d'une autre disposition sur le fondement de laquelle il serait saisi ; qu'ainsi, il y a lieu de lui enjoindre de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'intervalle une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les frais liés au litige :

12. Considérant qu'en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me D...C..., sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 25 avril 2017 et l'arrêté du préfet du Nord du 6 octobre 2016 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer pendant la durée de ce réexamen une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me D...C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur, au préfet du Nord et à Me D...C....

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00832
Date de la décision : 15/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Charles-Edouard Minet
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : RIVIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-02-15;17da00832 ?
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