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18/05/2017 | FRANCE | N°16DA01726

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 18 mai 2017, 16DA01726


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 19 novembre 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1601469 du 19 juillet 2016, le tribunal administratif de Rouen a reje

té sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 septem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 19 novembre 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1601469 du 19 juillet 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 septembre 2016, M. C...A..., représenté par la SELARL Eden avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me B...D...au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- les moyens soulevés à l'encontre du refus d'admission au séjour étaient opérants, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif ;

- la décision lui refusant l'admission au séjour est insuffisamment motivée ;

- elle comporte une erreur de fait dans la mesure où elle ne fait pas état de la naissance du deuxième enfant en France ;

- elle a été prise en violation des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle a été prise en violation des dispositions du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle repose sur une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire française est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant de l'admettre au séjour ;

- elle a été prise en violation des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle repose sur une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ;

- elle a été prise en violation des dispositions du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle a été prise en violation de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant le délai de départ volontaire ;

- elle a été prise en violation de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le Kosovo comme pays de destination a été prise en violation de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégalité du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- elle a été prise en violation du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2017, la préfète de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 septembre 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 ;

- le décret n° 2015-1166 du 21 septembre 2015 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur la légalité de la décision refusant de l'admettre au séjour :

1. Considérant que la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

2. Considérant que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code ; qu'ainsi, saisi d'une demande d'autorisation de séjour présenté uniquement au titre de l'asile ou de la protection subsidiaire, le préfet n'est pas tenu d'examiner d'office si le demandeur est susceptible de se voir délivrer une autorisation de séjour à un autre titre ; que, dans le cas où le préfet se borne à rejeter une demande d'autorisation de séjour présentée uniquement au titre de l'asile, sans examiner d'office d'autres motifs d'accorder un titre à l'intéressé, ce dernier ne peut utiliser soulever devant le jugement de l'excès de pouvoir saisi de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus du préfet des moyens de légalité interne sans rapport avec la teneur de la décision contestée ;

3. Considérant qu'à la suite du rejet de la demande d'asile du requérant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le préfet de la Seine-Maritime s'est borné à prendre une décision de refus d'admission au séjour présentée uniquement au titre de l'asile ; que, dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle, qui sont sans rapport avec la teneur de la décision, doivent être écartés comme inopérants ; que le moyen tiré de l'erreur de fait de la décision dans la mesure où elle ne fait pas état de la naissance du deuxième enfant en France, qui n'est pas davantage en lien avec la teneur de la décision, doit également être écarté comme inopérant ; qu'il en va de même du moyen tiré de la méconnaissance du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit être écarté ;

En ce qui concerne l'impossibilité d'éloigner un étranger dont la demande d'asile est en cours d'examen :

5. Considérant que M.A..., ressortissant kosovar, entend se prévaloir des dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vertu desquelles : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. " ; que, toutefois, les dispositions du III de l'article 35 de la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile prévoient que notamment les articles L. 743-1 à L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " dans leur rédaction résultant de la présente loi, s'appliquent aux demandes d'asile présentées à compter d'une date fixée par décret en Conseil d'Etat qui ne peut être postérieure au 1er novembre 2015 " ; que l'article 30 du décret du 21 septembre 2015 pris pour l'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile et notamment de son article 35, prévoit que : " (...) les articles (...) L. 743-1 à L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction résultant de la loi précitée, s'appliquent aux demandes d'asile présentées à compter du 1er novembre 2015 " ; qu'il résulte donc de ces dispositions transitoires que les nouvelles dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont applicables qu'aux demandes d'asiles présentées à compter du 1er novembre 2015 ; que ces dispositions sont édictées sous réserve de celles visées au II de l'article 35 de la loi du 29 juillet 2015 précitée qui ne concernent celles des dispositions " en tant qu'elles prévoient que l'enregistrement de la demande d'asile intervient dans un délai de trois jours ouvrés à compter de sa présentation " ; que les dispositions dont l'étranger entend se prévaloir ne sont pas au nombre de celles visées dans l'exception du II de l'article 35 de la loi du 29 juillet 2015 ; qu'il est constant que la demande d'asile de M. A...a été déposée le 27 mai 2015 ; que, par suite, ce dernier ne peut utilement se prévaloir des dispositions nouvelles de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur au moment du dépôt de la demande d'asile de M.A... : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) / 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne. Constitue une demande d'asile reposant sur une fraude délibérée la demande présentée par un étranger qui fournit de fausses indications, dissimule des informations concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin d'induire en erreur les autorités. (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code alors en vigueur au moment du dépôt la demande d'asile de M. A...: " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) " ;

7. Considérant que le préfet de la Seine-Maritime a traité la demande d'asile de M. A...selon la procédure prioritaire, en raison du rejet d'une première demande d'asile de celui-ci ; que les dispositions de l'article L. 742-6 précitées étaient applicables lors du dépôt de la demande de M. A... ; que, dès lors, le préfet était fondé à prendre une mesure d'éloignement, en vertu de ces dispositions, dès la notification de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que, par suite, il n'a pas entaché son arrêté d'illégalité en se fondant sur ces dispositions ;

En ce qui concerne les moyens tirés de l'atteinte à la vie privée et familiale et à sa situation personnelle :

8. Considérant que M. A...déclare être entré en France le 5 août 2013, puis avoir été rejoint par sa compagne et leur premier enfant en décembre 2014 ; qu'il a versé au dossier l'acte de naissance de leur second enfant, né le 11 octobre 2015 à Rouen ; que sa fille aînée est désormais scolarisée en classe de petite section ; qu'à la suite d'une première demande de séjour au titre de l'asile, il n'a pas déféré à un arrêté de réadmission vers la Hongrie du 18 octobre 2013, arrêté confirmé par le tribunal administratif de Rouen et la cour administrative d'appel de Douai ; qu'il s'est maintenu en situation irrégulière sur le territoire français en dépit d'une mesure d'éloignement prononcée à son encontre ; qu'il a déposé une seconde demande de séjour au titre de l'asile le 27 mai 2015 qui a été également rejetée ; que s'il est titulaire d'une promesse d'embauche en date du 12 décembre 2015 pour occuper un poste de ravaleur dans la société I.S. Concept, il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ses allégations, il a transféré le centre de ses intérêts en France où il réside avec sa famille depuis quatre ans ; que si plusieurs de ses cousins habitent en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il ne présente pas d'intégration particulière au sein de la société française et ne fait état d'aucune démarche en ce sens ; qu'il n'est pas contesté que la cellule familiale peut se reconstruire hors de France et notamment au Kosovo, pays dont toute la famille a la nationalité ; qu'ainsi et compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant :

10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la fille de M. A...ne puisse poursuivre sa scolarité hors de France et notamment au Kosovo ; que le refus de titre de séjour n'a ni pour objet, ni pour effet de séparer les enfants de M. A...de leurs parents ; qu'alors même qu'ils ont vécu plusieurs années en France et que sa fille aînée y est scolarisée, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces circonstances révèlent une atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen relatif au délai de départ volontaire :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. Toutefois, lorsqu'il est accompagné d'un enfant mineur ressortissant d'un autre Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse dont il assure seul la garde effective, il ne peut être tenu de rejoindre qu'un pays membre de l'Union européenne ou avec lequel s'applique l'acquis de Schengen. L'étranger obligé de quitter le territoire français peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. A Mayotte, l'étranger ne peut bénéficier d'une aide au retour mais, dans des circonstances exceptionnelles et sous réserve de l'existence d'un projet économique viable, d'une aide à la réinsertion économique, ou, s'il est accompagné d'un ou plusieurs enfants mineurs, de mesures d'accompagnement, dans des conditions définies par arrêté du ministre de l'intérieur et du ministre chargé des outre-mer. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) " ;

12. Considérant que M. A...allègue que la scolarité de sa fille aînée aurait justifié qu'un délai supérieur au délai de droit commun de trente jours prévu par les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui soit accordé ; que, toutefois, le délai de départ volontaire est un délai administratif octroyé pour faciliter le départ et non pour achever un cursus scolaire ; que la circonstance qu'il invoque ne peut être utilement opposée à l'autorité administrative eu égard à la portée de la disposition ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant le délai de départ volontaire doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le Kosovo comme pays de destination :

13. Considérant qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

14. Considérant que M. A...déclare qu'il a été le témoin de l'assassinat d'un de ses amis au Kosovo et qu'il a fait l'objet d'intimidations et de menaces de morts sans pouvoir bénéficier de la protection de la police kosovare ; que, toutefois, il ne verse au dossier aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques personnels, directs et actuels qu'il encourrait en cas de retour en Kosovo ; qu'au demeurant, ses demandes d'asiles ont été rejetées à deux reprises par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et par la Cour nationale du droit d'asile par une ordonnance du 18 avril 2016 ; qu'ainsi, il n'est pas établi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auraient été méconnues ;

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :

15. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français étant légale, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision faisant interdiction de retour sur le territoire national ne peut qu'être écarté ;

16. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la rédaction applicable à la décision litigieuse : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / (...) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (...) / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

17. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour, d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger ; qu'elle doit, par ailleurs, faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet ; qu'elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision, une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace ; qu'en revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément ;

18. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime , pour prononcer la mesure litigieuse, s'est fondé sur la durée et les conditions d'entrée et de séjour en France du requérant, qui s'est maintenu de manière irrégulière sur le territoire français malgré une première décision d'éloignement en 2013 confirmée par le juge administratif ; que ce dernier a ensuite déposé une nouvelle demande d'asile qui a été rejetée sur le fondement des dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au titre de l'examen en procédure prioritaire ; qu'il s'est donc maintenu en France uniquement à la faveur de la prolongation de ses demandes ; qu'en outre, l'intéressé ne justifie pas de l'existence de liens familiaux en France, ni d'autres liens intenses et stables ; que la cellule familiale a, ainsi qu'il a été dit, la possibilité de se reconstruire hors de France et notamment au Kosovo ; que, dès lors, et alors même que la présence de M. A...ne constitue pas une menace à l'ordre public, l'interdiction de retour prononcée à son encontre pour une durée de deux ans ne présente pas un caractère excessif ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que cette décision a été prise en méconnaissance du III de l'article L. 511-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans ; que, par voie de conséquence, ses conclusions au titre de l'article 37 la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au ministre de l'intérieur et à Me B...D....

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 4 mai 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- M. Christian Bernier, président-assesseur,

- M. Xavier Fabre, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 mai 2017.

Le président-assesseur,

Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,

Président-rapporteur,

Signé : O. YEZNIKIAN

Le greffier,

Signé : C. SIRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Christine Sire

N°16DA01726 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01726
Date de la décision : 18/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02-01-01 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité interne. Étrangers ne pouvant faire l`objet d`une OQTF ou d`une mesure de reconduite. Demandeurs d'asile.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-05-18;16da01726 ?
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