Vu la procédure suivante : Procédure antérieure : M.A... G...et Mme B...C...ont demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Vendin-lez-Béthune à leur verser à titre de dommages et intérêts la somme de 4 850 euros sur le fondement de la responsabilité sans faute et celle de 10 000 euros sur le fondement de la responsabilité pour faute, en réparation des préjudices résultant des nuisances sonores provoquées par la salle des fêtes communale, d'enjoindre à la commune de diligenter les travaux à l'effet de procéder à l'isolation de cette salle des fêtes, et de mettre à sa charge une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°1404385 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Lille a condamné la commune de Vendin-lez-Béthune à verser à M. G...et à Mme C...une indemnité de 4 850 euros, a mis à la charge de la commune la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 7 septembre 2015, la commune de Vendin-lez-Béthune, représentée par la SCP Capelle-Habourdin, demande à la cour : 1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Lille ; 2°) de rejeter les demandes de M. G...et de MmeC... ; 3°) de mettre à la charge de M. G...et de Mme C...la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal n'a pas motivé son jugement en ce qui concerne le caractère anormal du préjudice ; - les nuisances sonores préexistaient à l'acquisition de la maison par les demandeurs en 1997 et ne se sont pas aggravées depuis cette date ; - le préjudice résultant des nuisances sonores n'est pas anormal, l'utilisation de la salle des fêtes qui présente un caractère occasionnel ne se prolongeant pas en période nocturne ; - il n'est pas non plus spécial, deux autres habitations étant dans une situation identique et la salle des fêtes se situant en zone urbaine ; - la commune n'a pas commis de faute ; - les conclusions aux fins d'injonction étaient irrecevables comme l'a jugé le tribunal. Par un mémoire en défense enregistré le 5 janvier 2017, M.A... G...et Mme B...C..., représentés par Me D...H..., demandent à la cour : 1°) de confirmer le jugement en tant qu'il a condamné la commune au titre de la responsabilité sans faute, et de porter l'indemnité à la somme de 5 000 euros ; 2°) d'infirmer le jugement en tant qu'il a rejeté leur demande de condamnation de la commune au titre de la responsabilité pour faute et de la condamner à leur verser la somme de 10 000 euros à ce titre ; 3°) de mettre à la charge de la commune la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - les moyens de la requête ne sont pas fondés ; - le maire n'ayant pas pris les mesures appropriées pour faire cesser les nuisances sonores ni procédé à des travaux d'insonorisation, la responsabilité pour faute de la commune est engagée sur le fondement de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. La clôture de l'instruction est intervenue le 27 février 2017. Vu les autres pièces du dossier.
Vu : - le code de la santé publique ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Christian Bernier, président-rapporteur, - les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public, - et les observations de Me E...F..., représentant la commune de Vendin-lez-Béthune. 1. Considérant que la maison acquise en 1997 par M. G...et Mme C...est voisine de la salle des fêtes appartenant à la commune de Vendin-lez-Béthune qui, depuis 1984, la loue ou la met à la disposition d'associations pour des réunions ou des manifestions festives ; que M. G...et MmeC..., qui se plaignent depuis 2004 de nuisances sonores et d'occasionnelles incivilités imputées à des utilisateurs de cette salle, après avoir obtenu en 2012 la désignation d'un expert, ont demandé au tribunal administratif de condamner la commune à les indemniser de leurs préjudices ; que la commune de Vendin-lez-Béthune relève appel du jugement du tribunal administratif de Lille du 7 juillet 2015 en tant qu'il l'a condamnée à verser à M. G...et à Mme C...une indemnité de 4 850 euros sur le fondement de la responsabilité sans faute ; que M. G...et à MmeC..., par la voie de l'appel incident, demandent à la cour de porter cette indemnité à la somme de 5 000 euros et de condamner la commune de Vendin-lez-Béthune à leur verser une somme supplémentaire de 10 000 euros sur le fondement de la responsabilité pour faute ; Sur la régularité du jugement : 2. Considérant que, pour estimer que la responsabilité sans faute de la commune était engagée, le tribunal a entendu se fonder sur les constats d'un rapport d'expertise en ce qui concerne le niveau de nuisances sonores, y compris en journée, compte tenu des valeurs d'émergence admissibles au regard de dispositions des articles R. 1334-30 à R. 1334-35 du code de la santé publique et les troubles de jouissance en résultant pour M. G...et MmeC..., après avoir retenu que ces inconvénients excédaient ceux inhérents au voisinage d'une salle des fêtes ; qu'il a ainsi suffisamment motivé son jugement quant au caractère anormal du préjudice ; que, par suite, le moyen de la commune tiré de l'irrégularité commise sur ce point doit être écarté ; Sur l'appel principal et l'appel incident relatifs à la responsabilité sans faute : 3. Considérant que le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement ; qu'il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages, qui doivent revêtir un caractère anormal et spécial pour ouvrir droit à réparation, résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure ; que ne sont pas susceptibles d'ouvrir droit à indemnité les préjudices qui n'excèdent pas les sujétions susceptibles d'être normalement imposées, dans l'intérêt général, aux riverains des ouvrages publics ; 4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de son rapport que l'expert désigné par le président du tribunal administratif de Lille s'est prononcé sur les caractéristiques acoustiques de la salle ; qu'il a constaté, d'une part, qu'en période nocturne, en raison d'une isolation insuffisante liée à la structure du bâtiment elle-même, les seuils d'émergences fixés par les articles R. 1334-32 et R. 1334-33 du code de la santé publique sont dépassés, que les portes soient ouvertes ou fermées, qu'il s'agisse d'une manifestation musicale ou d'une réunion de plusieurs dizaines de personnes ; qu'il a constaté, d'autre part, qu'en période diurne, le niveau d'émergence reste inférieur aux limites réglementaires tant que les portes de la salle des fêtes restent fermées mais qu'il est dépassé quand les portes sont ouvertes, ce qui peut se produire fréquemment en été, ou en lors de fêtes familiales quand les allées et venues sont nombreuses ; qu'enfin, il a constaté qu'il n'y a pas d'émergence quand la salle abrite des réunions calmes de quelques personnes ; qu'en revanche, il n'avait pas à fournir de constats relatifs à l'existence et au niveau des dépassements enregistrés au cours des années au cours desquels M. G...et Mme C...ont résidé à proximité de cette salle ; que, par suite, la commune de Vendin-lez-Béthune est fondée à soutenir que les constats du rapport de l'expert ne pouvaient suffire à justifier l'existence d'un préjudice anormal et spécial pour les années écoulées ; 5. Considérant, en second lieu, que, pour répondre aux plaintes des riverains, la commune de Vendin-lez-Béthune a décidé que la salle cesserait d'être utilisée après 22 heures, une clause en ce sens étant insérée dans les contrats de location ; qu'en outre, et notamment depuis 2012, elle a considérablement réduit l'utilisation de la salle ; que c'est ainsi qu'en 2012, celle-ci a été utilisée à neuf reprises dont quatre fois seulement pour des repas dansants de 12h00 à 20h00 et pour un vin d'honneur, le plus souvent en période hivernale ; qu'en 2013, elle a été utilisée également à neuf reprises dont deux fois pour des vins d'honneur et deux fois pour des repas dansants de 12h00 à 20h00 ; qu'en 2014, elle a été louée à sept reprises dont trois fois pour des vins d'honneur et une fois pour un repas dansant, toujours en période diurne ; que les tournois d'échec, les concours de manille et les réunions de l'association Loto qui s'y déroulent régulièrement ne sont pas au nombre des manifestions bruyantes ; qu'enfin, il n'est pas établi que la salle aurait accueilli depuis 2007 des manifestations musicales susceptibles de déranger le voisinage hormis les occasionnels repas dansants qui se sont terminés en tout état de cause à 20h00 ; qu'en outre, ainsi que l'a relevé l'expert, un limiteur de pression acoustique installé par la commune coupe les alimentations électriques de sonorisation à partir d'un niveau de 95 dB, notablement inférieur à la limite réglementaire de 105 dB ; 6. Considérant qu'ainsi et compte tenu de l'usage effectif de la salle depuis plusieurs années et au regard des constatations techniques de l'expert, la gêne occasionnée par les rares manifestations festives bruyantes n'excèdent pas les sujétions susceptibles d'être normalement imposées, dans l'intérêt général, aux riverains des ouvrages publics et ne présentent pas de ce fait un caractère anormal ; que, de surcroît, l'ouvrage mis en service en 1984 préexistait à l'achat de la maison par M. G...et Mme C...en 1997 qui ne pouvaient ignorer la gêne à laquelle les exposait la proximité immédiate de cet équipement public ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que la situation se serait aggravée depuis cette acquisition mais au contraire qu'elle a été maîtrisée progressivement par la commune ; que les intéressés n'établissent pas davantage la réalité d'un préjudice anormal et spécial pour une période de temps déterminée ; qu'enfin, les incivilités et les intrusions dans leur propriété alléguées, et dont la fréquence et la gravité ne peut être appréciée au vu des éléments dont ils font état, apparaissent comme étant étrangers au fonctionnement même de l'ouvrage ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Vendin-lez-Béthune est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille l'a condamnée sur le fondement de la responsabilité sans faute ; que, par suite, les conclusions d'appel incident de M. G...et de Mme C...tendant à une majoration de l'indemnité allouée à ce titre doivent être rejetées ; Sur les conclusions d'appel incident de M. G...et de MmeC... présentées sur le fondement de la responsabilité pour faute : 8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / (...) / 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits, y compris les bruits de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ; (...) " ; 9. Considérant, en premier lieu, que les travaux d'insonorisation d'un bâtiment dont la commune est propriétaire et gestionnaire ne relèvent pas des pouvoirs de police du maire ; qu'en outre, la circonstance que la commune n'ait pas entrepris les travaux que l'expert judiciaire avait préconisés dans son rapport, ne révèle pas par elle-même une faute susceptible d'engager la responsabilité de la commune ; 10. Considérant, en second lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le maire aurait manqué aux obligations qu'il tient, en matière de police administrative, des dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, compte tenu de l'usage de la salle ou de ses abords, notamment en 2009 et 2011 ; 11. Considérant qu'il résulte des deux points précédents, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des conclusions d'appel incident, que M. G...et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande indemnitaire fondée sur la responsabilité pour faute de la commune ; 12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler l'article 1er du jugement par lequel le tribunal a condamné la commune à indemniser les demandeurs ainsi que l'article 2 par lequel il a mis sa charge les frais exposés par ces derniers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Sur les dépens : 13. Considérant que la charge définitive des dépens de l'instance et notamment les frais et honoraires de l'expert désigné par ordonnance du 12 juin 2012 du président du tribunal administratif de Lille doivent être mise à la charge de M. G...et de MmeC... ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative 14. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de M. G...et MmeC..., qui sont les parties perdantes tant en première instance qu'en appel, une somme de 2 000 euros à verser la commune de Vendin-lez-Béthune sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de ces deux instances ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune qui n'est pas la partie perdante ni en appel ni en première instance, la somme que réclament M. G...et Mme C...sur le même fondement ; DECIDE : Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Lille du 7 juillet 2015 sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. G...et Mme C...en première instance et leurs conclusions d'appel sont rejetées. Article 3 : Les dépens de l'instance sont mis à la charge de M. G...et Mme C.... Article 4 : M. G...et Mme C...verseront à la commune de Vendin-lez-Béthune une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M.A... G..., à Mme B...C...et à la commune de Vendin-Lez-Béthune. Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord. Délibéré après l'audience publique du 4 mai 2017 à laquelle siégeaient : - M. Olivier Yeznikian, président de chambre, - M. Christian Bernier, président-assesseur, - Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller. Lu en audience publique le 18 mai 2017. Le président-rapporteur,Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,Président de chambre,Signé : O. YEZNIKIANLe greffier,Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme,Le greffier en chef,Par délégation,Le greffier,Christine Sire 2N°15DA01493