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24/11/2016 | FRANCE | N°15DA00645

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 24 novembre 2016, 15DA00645


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner la commune de Conches-en-Ouche à lui verser la somme de 450 000 euros en réparation des préjudices subis à la suite de l'acquisition de l'hôtel de la Grand'Mare consécutive à une décision de préemption du maire de cette commune du 1er février 2010, puis par sa cession à la communauté de communes de Conches-en-Ouche, par une délibération de son conseil municipal du 6 juillet 2010.

Par un jugement n° 1301580 du 17 février 20

15, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner la commune de Conches-en-Ouche à lui verser la somme de 450 000 euros en réparation des préjudices subis à la suite de l'acquisition de l'hôtel de la Grand'Mare consécutive à une décision de préemption du maire de cette commune du 1er février 2010, puis par sa cession à la communauté de communes de Conches-en-Ouche, par une délibération de son conseil municipal du 6 juillet 2010.

Par un jugement n° 1301580 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2015, M. C...D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement ;

2°) de condamner la commune de Conches-en-Ouche à lui verser la somme de 450 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas été averti du jour de l'audience publique ;

- les décisions de la commune sont la cause directe de son préjudice ;

- la décision de préemption prise par le maire le 1er février 2010, motivée par des objectifs généraux, n'est pas justifiée ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- la présence d'un conseiller municipal qui avait un intérêt personnel à l'affaire et qui a influencé le vote, a entaché d'illégalité la délibération du 6 juillet 2010 par laquelle la commune de Conches-en-Ouche a cédé à la communauté de communes du pays de Conches-en-Ouche l'immeuble préempté.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2015, la commune de Conches-en-Ouche, représenté par la SELARL Huon-Sarfati, conclut au rejet de la requête et la mise à la charge du requérant d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La clôture d'instruction a été fixée au 16 septembre 2016.

La cour a pris connaissance d'un mémoire, enregistré le 25 octobre 2016, présenté par la commune de Conches-en-Ouche, reçu après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Christian Bernier, président-rapporteur ;

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me A...E..., représentant la commune de Conches-en-Ouche.

1. Considérant que M. C...D..., propriétaire d'un hôtel à Conches-en-Ouche, a demandé la condamnation de cette commune en faisant valoir qu'il avait subi une diminution de son chiffre d'affaires depuis l'ouverture de l'hôtel de la Grand'Mare, survenue après la décision du 1er février 2010 par laquelle le maire de cette commune a décidé de préempter ce bien et la délibération du 6 juillet 2010 par laquelle le conseil municipal de la commune l'a cédé à la communauté de communes de Conches-en-Ouche ; qu'il relève appel du jugement du tribunal administratif de Rouen qui, après avoir retenu l'absence de lien de causalité entre ces deux décisions et le préjudice allégué, a rejeté sa demande d'indemnité ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, d'une part, que l'article R. 411-6 du code de justice administrative dispose que : " A l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-1 à R. 751-4, les actes de procédure sont accomplis à l'égard du mandataire ou du représentant unique mentionné à l'article R. 411-5, selon le cas " ; qu'aux termes de l'article R. 431-1 de ce code : " Lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire " ; qu'un avocat est un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-1 du code de justice administrative ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4 , du jour où l'affaire sera appelée à l'audience " ; qu'aux termes de l'article R. 711-2-1 du même code : " Les parties ou leur mandataire inscrits dans l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 peuvent être convoqués à l'audience par le moyen de cette application. / Les dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article R. 611-8-2 sont applicables " ; qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article R. 611-8-2 : " Les parties ou leur mandataire sont réputés avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été ainsi adressé, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties ou leur mandataire sont alertés de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par eux. / Lorsque le juge est tenu, en application d'une disposition législative ou réglementaire, de statuer dans un délai inférieur ou égal à un mois, la communication ou la notification est réputée reçue dès sa mise à disposition dans l'application " ;

4. Considérant que la demande présentée par M. D...à l'aide d'un avocat a été enregistrée devant le tribunal administratif de Rouen le 7 juin 2013 par une requête adressée par voie postale sous forme " papier " ; que la procédure a été basculée, le 24 janvier 2014, pour les deux parties à l'instance, M. D...et la commune de Conches-en-Ouche, dans l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 du code de justice administrative, dénommée Télérecours ; que si l'avocat de M. D...a néanmoins encore produit son dernier mémoire par courriel le 21 février 2014, puis l'a régularisé par un envoi postal reçu le 24 février 2014, la commune de Conches-en-Ouche a produit son dernier mémoire dans l'application informatique le 15 avril 2014 ; que ce mémoire a été communiqué par le biais cette application au mandataire de M. D...le 13 mai suivant, qui en accusé réception en ouvrant ce document dans l'application informatique le 14 mai 2014 ; que les parties ont également été convoquées à l'audience publique du 27 janvier 2015 par un avis d'audience qui a été mis à leur disposition le 29 décembre 2014 dans l'application informatique mentionnée à l'article R. 414 1 du code de justice administrative ; qu'en vertu des dispositions du 3ème alinéa de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, citées au point 3, cet avis, à défaut de consultation dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, était réputé avoir été reçu par la partie à l'issue de ce délai de huit jours ; qu'il est constant que le conseil du requérant n'a ouvert ce message dans l'application et n'en a donc accusé réception que le 4 mai 2015, soit postérieurement à l'audience ; que, toutefois, cette circonstance est sans influence sur la régularité de la mise à disposition de l'avis d'audience au mandataire de M. D... ; que les dispositions du code de justice administrative mentionnées au point 2 ne prévoient pas que l'avis d'audience doive également être adressé à la partie elle-même ; que M. D... n'est donc pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité faute d'avoir été convoqué à l'audience par le moyen d'une lettre recommandée avec accusé de réception postal ;

Sur la demande d'indemnisation :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'hôtel-restaurant de la Grand'Mare à Conches-en-Ouche, qui avait cessé d'être exploité, a été vendu aux enchères le 5 janvier 2010 ; que, par un arrêté du maire du 1er février 2010, la commune de Conches-en-Ouche a décidé d'acquérir cet immeuble en vertu de son droit de préemption ; que le 5 juillet 2010, le conseil de la communauté de communes du pays de Conches-en-Ouche, qui compte parmi ses missions " l'amélioration et l'extension des capacités touristiques " et a développé une politique en faveur du maintien des capacités hôtelières dans son ressort, a souhaité acquérir cet immeuble dans la perspective d'une remise en activité de l'hôtel après la réalisation de travaux de mise aux normes et de sécurité de l'établissement ; que, par une délibération du 6 juillet 2010, le conseil municipal de Conches-en-Ouche a autorisé la cession de l'immeuble à la communauté de communes qui, postérieurement à la vente le 22 octobre 2010, a fait réaliser les travaux nécessaires puis a signé le 13 décembre 2011 un bail de location avec le nouvel exploitant ;

6. Considérant que la perte de chiffre d'affaires dont fait état M. D...ne résulte directement ni de la décision du maire de Conches-en-Ouche de préempter l'immeuble, ni de la décision de la commune de le céder à la communauté de communes ; que si elle peut avoir résulté, tout du moins en partie, du rétablissement de l'exploitation de l'hôtel de la Grand'Mare à la suite de sa réhabilitation dans les conditions indiquées au point précédent, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est, au demeurant, pas soutenu que ces deux décisions seraient intervenues dans des conditions telles que ce projet d'amélioration des capacités hôtelières de Conches-en-Ouche aurait faussé le jeu normal de la concurrence entre les établissements hôteliers du secteur, lesquels font d'ailleurs aussi l'objet de mesures de soutien de la part des autorités publiques ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a retenu l'absence de lien de causalité entre les deux décisions dont il conteste la légalité et le préjudice constitué par la diminution alléguée de son chiffre d'affaires ; qu'au demeurant, un tel préjudice ne présente pas, pour le surplus, un caractère anormal et spécial ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Conches en Ouche, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le paiement de la somme que M. D...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du requérant le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Conches-en-Ouche et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : la requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : M. D...versera à la commune de Conches-en-Ouche une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-2 du code de justice administratif.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et à la commune de Conches-en-Ouche.

Délibéré après l'audience publique du 10 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- M. Christian Bernier, président-assesseur,

- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 novembre 2016.

Le président-assesseur,

Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,

Président de chambre,

Signé : O. YEZNIKIAN

Le greffier,

Signé : C. SIRE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances et au ministre de l'intérieur en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Christine Sire

2

N°15DA00645


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00645
Date de la décision : 24/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

68-02-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : CABINET HUON ET SARFATI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-11-24;15da00645 ?
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