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26/01/2016 | FRANCE | N°14DA00783

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 26 janvier 2016, 14DA00783


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 2 août 2011 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Nord-Pas-de-Calais a refusé la reconnaissance d'une structure de soins palliatifs de cinq lits identifiés dans son service de médecine.

Par un jugement n° 1204177 du 12 mars 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête e

t un mémoire, enregistrés le 9 mai 2014 et le 5 novembre 2014, la société Hôpital privé de Villene...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 2 août 2011 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Nord-Pas-de-Calais a refusé la reconnaissance d'une structure de soins palliatifs de cinq lits identifiés dans son service de médecine.

Par un jugement n° 1204177 du 12 mars 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 mai 2014 et le 5 novembre 2014, la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 mars 2014 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler la décision du 2 août 2011 du directeur général de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais ;

3°) d'enjoindre à l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont relevé d'office le moyen tiré du champ d'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs en ce qu'après avoir précisé que les articles L. 6114-1 et D. 6114-1 du code de la santé publique ne prévoyaient aucune condition particulière pour la conclusion des avenants, il a indiqué que le critère relatif à l'activité des soins palliatifs présentait un caractère objectif ;

- la décision en litige est insuffisamment motivée au regard de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

- la procédure suivie n'a pas été contradictoire au regard de la procédure inhérente au mécanisme de négociation des avenants aux contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens ainsi que de la circulaire du 25 mars 2008 des ministres de la santé et de la jeunesse, des sports et de la vie associative relative au référentiel national d'organisation des réseaux de santé en soins palliatifs ;

- en estimant que l'activité de soins palliatifs était faible au sein de l'hôpital privé de Villeneuve d'Ascq, l'ARS a ajouté une condition non prévue par les textes ;

- le directeur de l'ARS a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où la zone de proximité de Roubaix-Tourcoing est déficitaire en nombre de lits de soins palliatifs et est classée en zone prioritaire à ce titre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 août 2014, le ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Milard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.

1. Considérant que la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq a, le 14 mars 2011, dans le cadre de la révision de son contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens, adressé à l'agence régionale de santé (ARS) Nord-Pas-de-Calais une demande de reconnaissance de cinq lits identifiés en soins palliatifs dans son service de médecine ; qu'elle relève appel du jugement du 12 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 août 2011 par laquelle le directeur général de l'ARS Nord-Pas-de-Calais a refusé la reconnaissance de ces lits identifiés soins palliatifs ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, pour écarter le moyen tiré de l'absence de mise en oeuvre d'une procédure contradictoire invoqué par la société requérante, le tribunal administratif de Lille s'est borné à répondre que ni les dispositions du code de la santé publique applicables aux contrats pluriannuels ne prévoyaient une telle procédure, ni la circulaire du 25 mars 2008 des ministres de la santé et de la jeunesse, des sports et de la vie associative relative au référentiel national d'organisation des réseaux de santé en soins palliatifs ; que s'il a également précisé que la décision attaquée n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, ce motif était surabondant ; qu'il suit de là que le moyen soulevé par la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq tiré de ce que les premiers juges se seraient fondés sur un moyen relevé d'office tiré du champ d'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et auraient ainsi entaché le jugement attaqué d'irrégularité doit être écarté ;

3. Considérant que si la société requérante relève que le jugement attaqué est également entaché d'une contradiction de motifs, cette circonstance, à la supposer avérée, affecte non pas la régularité du jugement mais son bien-fondé ; que, par suite, elle ne peut utilement soutenir que le jugement attaqué serait entaché pour ce motif d'une irrégularité de nature à provoquer son annulation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / -refusent une autorisation (...) " ;

5. Considérant que la décision du 2 août 2011 du directeur général de l'ARS Nord-Pas-de-Calais en litige refusant à la société requérante la reconnaissance de cinq lits identifiés soins palliatifs constitue une décision de refus de conclure un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens conclu entre l'ARS et cet établissement ; que cette décision n'est pas une décision de refus d'autorisation et ne constitue pas un avantage dont l'attribution constitue un droit ; que par suite, elle n'est pas soumise à l'obligation de motivation au sens des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6112-7 du code de la santé publique : " Les établissements publics de santé et les établissements de santé privés participant au service public hospitalier organisent la délivrance de soins palliatifs, en leur sein ou dans le cadre de structures de soins alternatives à l'hospitalisation. Le projet d'établissement arrête une organisation compatible avec les objectifs [fixés] par le schéma régional d'organisation des soins. " ; qu'aux termes de l'article L. 6114-1 du même code : " L'agence régionale de santé conclut avec chaque établissement de santé ou titulaire de l'autorisation prévue à l'article L. 6122-1 un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens d'une durée maximale de cinq ans. Lorsqu'il comporte des clauses relatives à l'exécution d'une mission de service public, le contrat est signé pour une durée de cinq ans. / Les contrats sont signés par le directeur général de l'agence régionale et les personnes physiques et morales mentionnées à l'alinéa précédent. / Ils peuvent faire l'objet d'une révision par avenant. (...) " ; que selon les termes de l'article L. 6114-2 du même code : " Les contrats mentionnés à l'article L. 6114-1 déterminent les orientations stratégiques des établissements de santé ou des titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 6122-1 et des groupements de coopération sanitaire sur la base du projet régional de santé défini à l'article L. 1434-1, notamment du schéma régional d'organisation des soins défini aux articles L. 1434-7 et L. 1434-9 ou du schéma interrégional défini à l'article L. 1434-10. / Ils identifient les services au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et définissent, pour chacun d'entre eux, le nombre de référents en soins palliatifs qu'il convient de former ainsi que le nombre de lits qui doivent être identifiés comme des lits de soins palliatifs. (...) " ;

7. Considérant qu'il ne résulte pas de ces dispositions, ni d'aucune autre du code de la santé publique qu'une procédure contradictoire spécifique préalablement à la conclusion d'un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens soit organisée ; que la circulaire du 25 mars 2008 mentionnée au point 2, ne le prévoit pas davantage ;

8. Considérant qu'ainsi que le rappelle les dispositions précitées de l'article L. 6114-2, les contrats conclus avec l'agence régionale de santé déterminent les orientations stratégiques des établissements dans le cadre d'un projet régional de santé dont l'objectif, ainsi que le précisent les dispositions de l'article L. 1434-1 du même code est, d'une part, d'assurer la mise en oeuvre de la politique de santé publique et, d'autre part, de veiller notamment à ce que la répartition territoriale de l'offre de soins permette de satisfaire les besoins de santé de la population ; qu'ainsi, l'organisation du réseau de soins palliatifs doit avoir une aire géographique pertinente afin de renforcer la cohérence des projets mis en oeuvre en liaison avec les orientations définies par le schéma régional d'organisation sanitaire ; qu'au regard des ces objectifs et de la nécessité de porter une appréciation cohérente sur l'offre de soins proposée, le directeur de l'ARS a pu, sans ajouter une condition non prévue par les textes, se fonder sur la faiblesse de l'activité en soins palliatifs au sein de la société requérante ;

9. Considérant que, pour refuser la demande de reconnaissance de cinq lits identifiés en soins palliatifs à la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq, le directeur de l'ARS s'est fondé sur ce que l'activité de soins palliatifs développée par la société requérante, qui était de huit séjours en 2010, ne justifiait pas la reconnaissance de ces lits, que la concentration de lits en soins palliatifs dans un service pouvait conduire à une mini-unité de soins palliatifs, ce qui ne correspond pas à la vocation de ces lits et que l'organisation de la prise en charge de la formation restait insuffisante en ce qui concerne le personnel affecté aux soins palliatifs ;

10. Considérant, d'une part, comme cela a été dit au point 8, que l'organisation du réseau de soins palliatifs doit avoir une aire géographique pertinente afin de renforcer la cohérence des projets mis en oeuvre en liaison avec les orientations définies par le schéma régional d'organisation sanitaire (SROS) ; que si la société requérante, qui ne conteste pas le motif tiré de ce que la concentration de lits en soins palliatifs dans un service conduisant à une mini-unité de soins palliatifs ne correspondait pas à la vocation de ces lits, fait valoir qu'elle est située dans une zone prioritaire au regard des objectifs nationaux et régionaux de prise en charge des soins palliatifs, il ressort toutefois des pièces du dossier notamment du tableau établi en juin 2009 précisant le nombre de lits en soins palliatifs par zones au sein de la région Nord-Pas-de-Calais et de l'écart par rapport aux objectifs de lits fixés souhaités, que la zone de Roubaix-Tourcoing n'a été répertoriée que comme une zone de priorité relative dans la mesure où seul un déficit de dix lits a été constaté par rapport à l'objectif maximal ; qu'en outre, la zone de Lille, à laquelle appartient la société requérante, n'est plus prioritaire, l'objectif maximal de lits ayant été atteint ; que par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le nombre de séjours avec diagnostic de soins palliatifs à titre principal constaté au sein de l'établissement au titre des années 2009 et 2010, comparé à ceux des séjours relevés au service de médecine de l'hôpital était faible et ne justifiait ainsi pas la reconnaissance de ces lits ;

11. Considérant, d'autre part, que la société requérante a indiqué que le plan de formation de l'année 2011 intégrait des formations diplômantes spécifiques notamment dans trois domaines, la prise en charge des patients atteints de cancer, la manutention des patients et la prise en charge de la douleur, sans préciser toutefois le contenu et le nombre de ces formations ; que par suite, en l'absence d'élément lui permettant d'apprécier l'adéquation de ces formations par rapport aux personnels concernés, le directeur de l'ARS a pu estimer, à bon droit, que la prise en charge de la formation des personnels concernés n'était pas suffisante ;

12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, qu'eu égard notamment à l'absence de besoins constatés par rapport aux orientations stratégiques définies par le SROS et à la faiblesse de l'activité de soins palliatifs au sein de cet établissement pour les années 2009 et 2010, le directeur de l'ARS n'a pas, en refusant de faire droit à la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq, entaché la décision du 2 août 2011 en litige d'une erreur manifeste d'appréciation ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'enfin, à supposer même que la défense à l'instance a entraîné un surcroît de travail pour les services du ministère des affaires sociales et de la santé, il ne constitue pas des frais spécifiques exposés par l'Etat à l'occasion d'une instance juridictionnelle ; que les conclusions du ministre des affaires sociales et de la santé présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du ministre des affaires sociales et de la santé présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Hôpital privé de Villeneuve d'Ascq et au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Copie sera adressée à l'agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais-Picardie.

Délibéré après l'audience publique du 12 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 janvier 2016.

Le rapporteur,

Signé : M. MILARDLe président de chambre,

Signé : M. B...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°14DA00783


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 14DA00783
Date de la décision : 26/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-07 Santé publique. Établissements privés de santé.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS CORMIER BADIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-01-26;14da00783 ?
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