Vu la requête, enregistrée le 10 février 2014, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me C... D...; Mme B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1304864 du 12 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2013 du préfet du Nord lui refusant le renouvellement de son titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Hoffmann, président de chambre ;
1. Considérant que MmeB..., de nationalité algérienne née le 1er mars 1940, relève appel du jugement du 12 novembre 2013 du tribunal administratif de Lille qui a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2013 par lequel le préfet du Nord a refusé le renouvellement de son titre de séjour pour raisons de santé et l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ;
Sur le refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé " ; que l'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin de l'agence régionale de santé d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays, quelle est la durée prévisible du traitement, et indiquant si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que le préfet, lorsqu'il rejette, au vu d'un avis défavorable émis par le médecin de l'agence régionale de santé, une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour sollicitée en qualité d'étranger malade, doit indiquer, dans sa décision, les éléments de droit et de fait qui justifient ce refus ; qu'il peut satisfaire à cette exigence de motivation soit en reprenant les termes ou le motif déterminant de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé rendu conformément aux prescriptions de l'arrêté du 9 novembre 2011, soit en joignant cet avis à sa décision ; que, dès lors, en visant les stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord précité et en mentionnant qu'il ressort de l'avis rendu le 14 janvier 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé que l'état de santé de la requérante nécessitait une prise en charge dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que l'intéressée, qui pouvait voyager, pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont elle est originaire, la décision attaquée comporte l'exposé suffisant des motifs de fait et de droit sur lesquels elle se fonde ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait ;
4. Considérant qu'en application des stipulations précitées du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, si l'état de santé du ressortissant algérien nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe des possibilités de traitement médical approprié en Algérie, le demandeur peut utilement se prévaloir de ce qu'il ne pourrait pas effectivement accéder aux soins dont il a besoin en raison d'éléments tenant à la situation générale de son pays ou à sa situation personnelle ; que ce n'est toutefois qu'à l'initiative du demandeur faisant état de tels éléments susceptibles de faire obstacle à un accès effectif aux possibilités de soins que le préfet est tenu de se prononcer sur la condition de l'accessibilité aux soins ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la demande de titre de séjour, que Mme B... ait fait état d'éléments susceptibles de faire obstacle à ce qu'elle puisse effectivement accéder aux possibilités de soins existant en Algérie ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait omis de procéder, sur ce point, à un examen particulier de sa situation ; qu'il ne ressort pas davantage des autres pièces du dossier que le représentant de l'Etat se serait abstenu d'examiner sa situation au regard de ses conditions de séjour en France et des attaches familiales qu'elle entretient dans ce pays ;
5. Considérant que l'arrêté attaqué se fonde sur l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé du Nord/Pas-de-Calais et sur la circonstance selon laquelle, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié est disponible dans son pays d'origine ; que ni les comptes-rendus médicaux produits par MmeB..., qui se bornent à rappeler, sans se prononcer sur la disponibilité des soins en Algérie, que l'intéressée souffre d'une détérioration cognitive importante avec atteinte mnésique, ni le certificat médical établi le 3 juin 2013 par un praticien du centre hospitalier d'Annaba, postérieurement à la décision de refus de séjour et dont la teneur n'exclut pas au demeurant la possibilité d'un suivi au moins partiel de la pathologie de Mme B... dans son pays d'origine, ne permettent de remettre en cause l'appréciation portée par le préfet sur la disponibilité de soins appropriés en Algérie ; qu'enfin, en se bornant à soutenir qu'elle ne disposerait pas des moyens nécessaires pour financer les examens de suivi indispensables à son état de santé, MmeB..., qui n'apporte aucune précision sur le traitement qui lui est prescrit ainsi que sur le coût de sa prise en charge médicale en Algérie et qui dispose, en outre, d'attaches familiales proches dans son pays d'origine en la personne d'un de ses fils, n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet du Nord aurait méconnu les stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
6. Considérant que, si la requérante soutient qu'elle est entrée en France le 26 mars 2010 munie d'un visa de court séjour pour rejoindre deux de ses enfants, dont l'un est de nationalité française et l'autre titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, et que son mari étant décédé au cours de l'année 2008, elle est désormais prise en charge par l'une de ses filles, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que, compte tenu notamment tant de la durée que des conditions de séjour en France de MmeB..., qui n'est pas dépourvue de toute attache familiale en Algérie où réside un autre des ses fils et où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de 70 ans, la décision de refus de séjour prise par le préfet du Nord ait porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a pas, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences qu'elle comporterait sur sa situation personnelle ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant qu'un justiciable ne peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des stipulations inconditionnelles d'une directive que lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ; qu'il suit de là que Mme B...ne peut se prévaloir des stipulations de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, laquelle a été transposée dans le droit national par la loi du 16 juin 2011 susvisée, antérieurement à la décision litigieuse ;
8. Considérant qu'en vertu des termes des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables en l'espèce, la mesure d'éloignement prise par le préfet n'a pas à être spécifiquement motivée, dès lors que la décision de refus de séjour, à laquelle elle fait suite, comporte elle-même une motivation suffisante ; que la décision par laquelle le préfet du Nord a écarté la demande de titre de séjour introduite par la requérante était suffisamment motivée en fait et en droit ; qu'en conséquence, le moyen tiré de l'absence de motivation de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de MmeB..., dont la situation personnelle a, en outre, été examinée, doit être écarté ;
9. Considérant que Mme B...a sollicité son admission au séjour pour raison de santé ; qu'elle a donc été mise à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé l'admission au séjour et l'a également obligée à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; que, par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendue préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue ;
10. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance par la mesure d'éloignement des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont elle serait entachée doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 ;
Sur le pays de renvoi :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que les moyens tirés tant de la méconnaissance par la décision précitée des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que de l'illégalité, par voie d'exception, des décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français ne peuvent être accueillis ;
12. Considérant, enfin, que, si Mme B...soutient que la décision attaquée méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle ne pourra bénéficier d'un traitement approprié hors de France, ce moyen doit être écarté dès lors, qu'ainsi qu'il a été dit, la requérante peut bénéficier dans son pays d'origine de la prise en charge médicale exigée par son état de santé ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Nord.
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N°14DA00243