Vu la requête, enregistrée le 14 aout 2013, présentée pour M. C...A..., demeurant..., par Me B...D...; M. A...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1303959 du 29 juin 2013 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille en tant que ce dernier a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 juin 2013 par lequel le préfet du Nord a prononcé une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, à verser à son avocat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Hoffmann, président de chambre ;
1. Considérant que M.A..., de nationalité tunisienne né le 3 janvier 1986, relève appel du jugement du 29 juin 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 juin 2013 du préfet du Nord en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : " 1. Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; qu'aux termes de la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / (...) / - refusent une autorisation (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
3. Considérant que M. A...ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, laquelle a été transposée dans le droit national par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ; que la décision contestée, qui n'avait pas à faire état de tous les éléments caractérisant la situation personnelle et familiale du requérant, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de l'intéressé ;
4. Considérant que selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition signé par M.A..., qu'il a été entendu par les services de police le 23 juin 2013, en particulier en ce qui concerne son âge, sa nationalité, sa situation de famille, ses attaches dans son pays d'origine, les raisons et conditions de son entrée en France ainsi que ses conditions d'hébergement ; que M. A...a eu, ainsi, la possibilité, au cours de cet entretien, de faire connaître des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur la décision prise à son encontre ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé disposait d'informations tenant à sa situation personnelle qu'il a été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure qu'il conteste et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait le principe général du droit d'être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, doit être écarté ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
6. Considérant que, si M. A...fait valoir qu'il est régulièrement entré sur le territoire français le 19 juin 2004, qu'il est demeuré depuis lors dans ce pays où résident des membres de sa famille dont ses demi-frère et demi-soeur de nationalité française, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il ne justifie ni de sa date d'entrée effective sur le territoire national, ni être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine au sein duquel réside sa mère avec laquelle il reste encore en relations, ainsi qu'il ressort de ses propres déclarations enregistrées sur le procès-verbal de police ; que M.A..., célibataire et sans charge de famille, n'établit pas davantage être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie privée et familiale en Tunisie où il a vécu de nombreuses années ; que, par suite, eu égard notamment aux conditions de séjour en France de l'intéressé, M.A..., qui n'a pas cru au demeurant devoir déférer à une précédente mesure d'éloignement prononcée par le préfet de la Seine-Saint-Denis dont la légalité avait été confirmée par un jugement rendu le 18 octobre 2010 par le tribunal administratif de Montreuil, n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement prise par le préfet du Nord aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis par cette dernière ; que le requérant ne peut non plus utilement invoquer la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'entre pas dans la catégorie des étrangers pouvant bénéficier de la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences qu'elle comporte sur la situation personnelle de M.A... ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre par le préfet du Nord ;
Sur le délai de départ volontaire :
8. Considérant que la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est, dès lors, suffisamment motivée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à l'examen de la situation particulière du requérant ;
9. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de la défense doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4 ci-dessus ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que M. A...ne peut exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire est privée de base légale ;
11. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;
12. Considérant que, si M. A...soutient qu'il présentait des garanties de représentation suffisantes dès lors qu'il disposait d'une adresse fixe en France et était titulaire d'un passeport en cours de validité, il ressort toutefois des termes de l'arrêté attaqué que, pour justifier son refus de faire bénéficier l'intéressé d'un délai de départ volontaire, le représentant de l'Etat s'est également fondé sur la circonstance que M. A...s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement et qu'il avait fait usage, notamment lors de son interpellation, de documents d'identité falsifiés ; que, par suite, et en tout état de cause, le préfet pouvait, par ces seuls motifs et sans commettre d'erreur de droit, décider de priver le requérant d'un délai de départ volontaire ;
Sur le pays de renvoi :
13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait privée de base légale ;
14. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 4 et 6, les moyens tirés tant de la méconnaissance du principe général du droit de défense que de l'atteinte à la vie privée et familiale et à l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Nord.
''
''
''
''
4
N°13DA01408