Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2012, présentée pour M. D...B..., demeurant..., par Me C...A...; M. B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1202059 du 4 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté, en date du 8 mars 2012, par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime, en date du 8 mars 2012 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à MeA..., au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller ;
1. Considérant que M.B..., ressortissant camerounais né le 25 décembre 1976, est entré en France, selon ses déclarations, une première fois en juin 2003 ; qu'il a quitté le territoire français après le rejet de sa demande d'asile, en dernier lieu, par la commission des recours des réfugiés le 5 avril 2005 ; que, repris en charge par la France le 1er février 2010 après son interpellation aux Pays-Bas, il a de nouveau sollicité le statut de réfugié ; que cette nouvelle demande a été, en dernier lieu, rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 avril 2011 ; que M. B...a alors sollicité du préfet de la Seine-Maritime son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il relève appel du jugement du 4 octobre 2012 du tribunal administratif de Rouen rejetant sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 mars 2012 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de l'admettre au séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il devrait être reconduit ;
Sur le refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée comporte les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde ; qu'elle est, dès lors, suffisamment motivée ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet de la Seine-Maritime a commis une erreur de fait en rappelant les éléments de la situation familiale complexe décrite par l'intéressé ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M.B..., entré en France pour la première fois en 2003 à l'âge de 27 ans, ne justifie pas de liens privés et sociaux d'une intensité propre à faire regarder la France comme le centre de ses intérêts privés, alors qu'il a quitté le territoire français après avoir fait l'objet d'un refus d'admission à l'asile puis d'une obligation de quitter le territoire en 2005 ; qu'il n'établit pas la stabilité ancienne de sa vie maritale avec une ressortissante camerounaise, titulaire d'un titre de séjour temporaire ; qu'il n'est pas dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où réside sa mère, alors que ses enfants résident aux Pays-Bas avec leur mère ; que, dès lors, la décision contestée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel qu'il résulte des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
5. Considérant, en premier lieu, que compte tenu de ce qui a été dit dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré, par la voie de l'exception d'illégalité, de ce que la décision litigieuse portant obligation de quitter le territoire français est illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour sur laquelle elle se fonde, doit être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la directive du 16 décembre 2008 : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 4) " décision de retour " : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour " ; qu'aux termes de l'article 12 de la même directive : " 1. Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-672 du 16 juin 2011 prise pour la transposition de cette directive : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) ; 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. (...) /. La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ;
7. Considérant que l'obligation de quitter le territoire français dont est assorti un refus de titre de séjour constitue, avec ce dernier, une décision unique de retour au sens de la directive du 16 décembre 2008 et n'a, par suite, pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle que comporte ce refus ; qu'il suit de là, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que doit être écarté le moyen tiré de l'incompatibilité avec les objectifs de la directive du 16 décembre 2008 des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour lorsque cette obligation assortit une telle décision ;
8. Considérant, en troisième lieu, que, selon les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger relevant d'une catégorie visée par ce texte lorsque, notamment, la délivrance ou le renouvellement du titre de séjour sollicité lui a été refusé ou que ce titre lui a été retiré ; que l'article R. 313-13 du même code prévoit également que, " en cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français " ; qu'il s'ensuit que l'étranger qui sollicite la délivrance d'un titre de séjour ne peut, du fait même de l'accomplissement de cette démarche tendant à son maintien en France, ignorer, qu'en cas de refus, il ne peut légalement se maintenir sur le territoire français, qu'il doit en principe prendre l'initiative de quitter le territoire et qu'il est également susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'il est ainsi mis à même, pendant la procédure d'instruction de sa demande de titre de séjour, s'il l'estime utile, de présenter tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu des décisions administratives concernant non seulement son droit au séjour en France, mais aussi son possible éloignement du territoire français ; qu'il n'a pas alors à attendre que l'autorité administrative prenne l'initiative de l'informer expressément qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français, en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité ; que, dans ces conditions, en s'abstenant de procéder à une telle information préalable, le préfet qui assortit son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français, ne méconnaît pas, de ce seul fait, le droit de l'étranger, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union et qui a été rappelé par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union, d'être entendu préalablement à cette mesure ; qu'en outre, et dans l'hypothèse où il aurait été porté atteinte dans une situation donnée au droit d'être entendu ainsi reconnu aux étrangers par le droit de l'Union, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (10 septembre 2013, aff. n° C-383/13) qu'il appartient au juge national chargé de l'appréciation de la légalité de la décision affectée de ce vice d'apprécier, dans chaque cas d'espèce, si cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent ;
9. Considérant que M. B...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il a donc été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé la délivrance d'un tel titre et l'a également obligé à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; qu'il en a d'ailleurs usé au cas d'espèce ; qu'il n'invoque aucun autre élément de nature à établir que son droit à être entendu aurait été méconnu ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, il n'est pas fondé à soutenir que cette garantie, telle qu'elle est consacrée par le droit de l'Union, a été méconnue ;
10. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence ou s'est cru lié par sa décision de refus de séjour en prononçant l'obligation de quitter le territoire attaquée ;
11. Considérant, en dernier lieu, que, ainsi qu'il a été indiqué au point 4, le préfet n'a pas méconnu, par sa décision portant obligation de quitter le territoire, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. B...;
Sur la décision fixant le pays de destination :
12. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, comporte la mention sommaire des motifs de droit et des circonstances de fait qui constituent le fondement de la décision fixant le pays de destination, alors même que M. B... n'a fait état d'aucune menace pesant sur lui en cas de retour au Cameroun ; que ce dernier n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de destination ;
13. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime aurait méconnu l'étendue de sa compétence en ce qu'il se serait cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile dès lors, qu'ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée qu'il a procédé à un examen de la situation du requérant et pris position au regard des dispositions précitées ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
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N°12DA01658