Vu la requête, enregistrée le 28 mai 2002 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Guy X, demeurant ..., par Me Bourlion, avocat ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-292 du 2 avril 2002 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 novembre 1998 par lequel le maire de Pernant l'a mis en demeure de cesser immédiatement les travaux de construction et aménagements entrepris sur un terrain cadastré ZB 213 à Pernant ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Pernant en date du 25 novembre 1998 ;
Il soutient que les constructions en cause qui peuvent être déplacées en temps limité entrent dans le champ d'application du 4ème alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme en vue desquelles une demande de permis de construire n'est pas nécessaire ;
Vu la décision et le jugement attaqués ;
Code C Classement CNIJ : 68-03-05-02
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 août 2002, présenté pour la commune de Pernant, représentée par son maire en exercice, qui conclut au rejet de la requête ; elle soutient que M. X a réalisé divers aménagements et constructions sans permis de construire, lui permettant d'ouvrir une friterie ouverte au public ; que la commune de Pernant est dotée d'un plan d'occupation des sols (P.O.S.) approuvé le 21 juin 1993 et le terrain en cause se situe en zone I.N.A.L. du plan d'occupation des sols, zone qui interdit les constructions à usage commercial ; que des procès-verbaux d'infraction ont été dressés les 22 novembre 1996, 24 septembre et 6 octobre 1998 à l'encontre de M. X pour les installations en cause ; que les installations réalisées par M. X sont bien soumises à la réglementation des permis de construire conformément à l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme ; qu'en effet, M. X a réalisé une construction préfabriquée de 26 m2 hors oeuvre nette posée au sol ; que cette construction comporte une porte et deux fenêtres pourvues de volets et sert de bureaux pour l'activité de la friterie ; qu'aucune autorisation n'a été délivrée pour les constructions réalisées par M. X, telles que caravanes et autres, également soumises à autorisation ; que ces installations non autorisées sont installées en méconnaissance de l'application des règles d'urbanisme qui exigent bien le dépôt préalable et l'obtention d'une autorisation de construire et du règlement du plan d'occupation des sols qui interdit dans la zone les bâtiments à usage commercial ; que l'infraction commise, constituée par l'implantation d'installations sans autorisation en méconnaissance des articles L. 421-1 et R. 442 du code de l'urbanisme et des règles du plan d'occupation des sols n'est pas contestable ; que les conditions dans lesquelles l'arrêté interruptif des travaux a été pris et notifié sont régulières en application de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 25 février 2003, présenté pour la commune de Pernant qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire pour les mêmes motifs ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 mars 2003, présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins que sa requête par le même moyen et soutient en outre que l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Amiens le 11 février 2003 le relaxe de l'ensemble des chefs de poursuites ; que la Cour relève notamment que son activité de restauration rapide ne peut être considérée comme frappée d'interdiction dès lors que la dérogation prévue par le plan d'occupation des sols se réfère aux équipements de restauration exclusive ; que si cette installation est soumise à autorisation en vertu des articles R. 411-1 et suivants du code de l'urbanisme, il a bénéficié d'une autorisation tacite dans la mesure où aucun chef de poursuite pour défaut d'autorisation n'a été relevé à son encontre et qu'il a au demeurant obtenu ladite autorisation avant même l'acquisition du terrain ; qu'il démontre, par les procès-verbaux de constat, le caractère rapidement démontable de l'ensemble des constructions ; que la cour d'appel d'Amiens relève que si effectivement l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme dispose qu'en dehors des espaces urbanisés des communes, les installations et constructions sont interdites sur une bande de 75 mètres de part et d'autre de l'axe des routes à grande circulation, il dispose également en son alinéa 3 que cette contrainte ne s'applique pas aux adaptations, réfections et extensions de constructions déjà existantes ; que la cour d'appel relève également que s'agissant de la mise en place des cathédrales et pylônes, ceux-ci étant inférieurs à 12 mètres de hauteur, l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme est totalement inapplicable à la présente édification ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 mars 2004, présenté pour M. Guy X ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2004 où siégeaient
M. Merloz, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Quinette, premier conseiller :
- le rapport de M. Merloz, président de chambre,
- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête de M. X est dirigée contre un jugement en date du 2 avril 2002 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 novembre 1998 par lequel le maire de Pernant l'a mis en demeure de cesser immédiatement les travaux de construction et aménagements entrepris sur un terrain cadastré ZB 213 à Pernant ;
Considérant que l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux autorités et juridictions administratives qu'en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire de leurs décisions ; que, toutefois, il en va autrement lorsque la légalité d'une décision administrative est subordonnée à la condition que les faits qui servent de fondement à cette décision constituent une infraction pénale ; que, dans cette hypothèse, l'autorité de la chose jugée s'étend exceptionnellement à la qualification juridique donnée aux faits par le juge pénal ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme : ... Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 a été dressé, le maire peut... si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux... L'autorité judiciaire peut à tout moment... se prononcer sur la mainlevée ou le maintien des mesures prises pour assurer l'exécution des travaux. En tout état de cause l'arrêté du maire cesse d'avoir effet en cas de décision de non-lieu ou de relaxe... Dans le cas de construction sans permis de construire..., le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux... ; copie de l'arrêté du maire est transmise sans délai au ministère public... ;
Considérant que des agents assermentés de la direction départementale de l'équipement de l'Aisne ont dressé à l'encontre de M. X les 22 novembre 1996, 24 septembre 1998 et 6 octobre 1998 des procès-verbaux d'infraction au motif qu'il avait procédé, sur un terrain cadastré ZB 213 situé en bordure de la R.N. 31 sur le territoire de la commune de Pernant, à divers aménagements, installations et constructions sans permis de construire et en méconnaissance du plan d'occupation des sols de la commune de Pernant ; qu'au vu de ces procès-verbaux, le maire de Pernant a, par arrêté du 25 novembre 1998, mis en demeure M. X de cesser immédiatement les travaux engagés ;
Considérant que la cour d'appel d'Amiens a, par un arrêt en date du 11 février 2003, passé en force de chose jugée, décidé que la réalisation des travaux par M. X n'était pas constitutive d'une infraction pénale et l'a relaxé des fins de la poursuite ; qu'en raison de l'autorité de la chose jugée qui s'attache à cette décision du juge pénal, l'arrêté du maire de Pernant, en date du 25 novembre 1998, doit être regardé comme dépourvu de base légale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Pernant en date du 25 novembre 1998 ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 2 avril 2002 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du maire de Pernant en date du 25 novembre 1998 est annulé.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guy X, à la commune de Pernant et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
Copie sera transmise au Procureur de la République.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 18 mars 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 1er avril 2004.
L'assesseur le plus ancien
Signé : M. Merlin-Desmartis
Le président-rapporteur
Signé : G. Merloz
Le greffier
Signé : B. Robert
La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
Bénédicte Robert
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02DA00446