La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2025 | FRANCE | N°24BX02963

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 12 juin 2025, 24BX02963


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2401359 du 19 septembre 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour

:



Par une requête enregistrée le 12 décembre 2024, M. B... A..., représenté par Me Chamberland-Poulin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2401359 du 19 septembre 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 décembre 2024, M. B... A..., représenté par Me Chamberland-Poulin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 19 septembre 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer dans le même délai sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, ainsi que de procéder sans délai à l'effacement de son inscription au système d'information Schengen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 500 euros hors taxe sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

- elle a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu, consacré à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-1 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu, consacré à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation concernant son état de santé ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu, consacré à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation concernant sa situation en France et son état de santé ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2025, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une décision n° 2024/002983 du 7 novembre 2024, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant marocain né le 26 mai 1985, est entré régulièrement en France le 6 novembre 2019 muni d'un visa C valable jusqu'au 25 novembre 2019 pour une durée autorisée de séjour en France de trente jours. Après avoir bénéficié d'un premier titre de séjour en qualité d'étranger malade, valable du 5 octobre 2022 au 4 juillet 2023, M. A... a sollicité, le 12 mai 2023, le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 15 novembre 2023, le préfet de la Gironde a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 19 septembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / a) le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...). ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux États membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance par une autorité d'un État membre est inopérant. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente serait tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter son point de vue de manière utile et effective. En particulier, l'étranger qui sollicite la délivrance d'un titre de séjour, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il lui appartient donc, lors du dépôt de sa demande, de produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande, et il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Par ailleurs, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu avoir une influence sur le contenu de la décision.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a pu, à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour, faire valoir les éléments susceptibles de venir au soutien de ses prétentions, notamment à propos de son état de santé. Il a été également en mesure d'apporter des éléments supplémentaires qu'il aurait jugés nécessaires pendant l'instruction de sa demande de titre de séjour par les services préfectoraux. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à être entendu doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

4. En premier lieu, la décision portant refus de séjour en litige vise les dispositions dont elle fait application, notamment celles de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle précise les raisons pour lesquelles le préfet de la Gironde a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A..., au vu, d'une part, de l'avis rendu le 26 septembre 2023 par le collège des médecins de l'Office français de l'intégration et de l'immigration (OFII) mentionnant que si le défaut de prise en charge de cette dernière est susceptible d'entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et d'autre part, des pièces produites par le requérant à l'appui de sa demande. Elle comporte par ailleurs des éléments relatifs aux conditions d'entrée et de séjour de M. A... en France, ainsi qu'aux liens dont il dispose sur le territoire national. Dans ces conditions, l'arrêté attaqué comporte l'ensemble des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement. Si M. A... soutient que l'arrêté attaqué indique à tort qu'il ne justifie pas de son insertion dans la société française et qu'il est démuni de ressources personnelles suffisamment stables lui permettant de subvenir à ses besoins, cette erreur, à la supposer établie, est en tout état de cause sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation formelle de la décision en litige. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de séjour doit être écarté comme manquant en fait.

5. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la motivation de l'arrêté en litige, que le préfet de la Gironde a procédé à un examen particulier de la situation de M. A... avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". Aux termes de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ".

7. Il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

8. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi allant dans le sens de ses conclusions. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

9. Il ressort des pièces du dossier que par un avis du 26 septembre 2023, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, et que son état de santé lui permet de voyager sans risque.

10. Il est constant que M. A..., qui souffre d'un trouble schizophrénique, est suivi au centre médico-psychologique (CMP) du centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux et fait l'objet d'un traitement neuroleptique injectable à effet retard par Xeplon. Il soutient qu'il ne dispose pas des ressources nécessaires pour consulter un psychiatre privé ainsi que pour se procurer son traitement au Maroc, et se prévaut à ce titre de deux certificats médicaux des 21 et 30 novembre 2023 émanant d'une praticienne hospitalière du CHU de Bordeaux, ainsi que du guide des médicaments remboursables au Maroc consultable sur le site de l'Agence nationale de l'assurance maladie (ANAM) du Maroc, dont il ressort que le Xeplon n'est " pas forcément disponible au Maroc " et non remboursé. Toutefois, le requérant, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait, comme en France, exercer une activité professionnelle, même partielle, n'établit pas qu'il ne serait pas en mesure d'assumer le coût des soins à charge. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que le traitement en cause peut être substitué par un autre neuroleptique, remboursé au Maroc. Si les deux certificats déjà mentionnés n'excluent pas un risque de décompensation ou d'apparition d'effets indésirables, de sorte que " la balance bénéfice/risque est actuellement en faveur du maintien du traitement actuel ", il ne ressort pas de ces documents, que M. A..., dont la maladie a été diagnostiquée en 2009 et qui n'est entré en France qu'en 2019, n'aurait pas accès, en cas de retour au Maroc, où il a conservé des attaches familiales fortes, à une prise en charge appropriée. Enfin, la circonstance invoquée, au regard de son caractère général, qu'il y aurait un déficit de psychiatres au Maroc et que les établissements publics disposeraient de peu de moyens, ne permet pas d'infirmer l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII, dont le préfet s'est approprié les termes, sur la possibilité pour le requérant de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Gironde aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en édictant la décision attaquée.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

12. Si M. A... se prévaut de sa présence en France depuis le 6 novembre 2019, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que l'intéressé, qui s'est maintenu après l'expiration de son visa, le 25 novembre 2019, a fait l'objet d'une première mesure d'éloignement le 29 octobre 2020 qu'il n'a pas exécutée, d'autre part, qu'il a disposé d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur une période de 9 mois, du 5 octobre 2022 au 4 juillet 2023, ne lui ayant pas donné vocation à s'installer durablement en France. Si le requérant a occupé un emploi d'ouvrier du bâtiment entre les 31 août et 30 septembre 2020 et effectué des missions d'intérim depuis le 9 février 2023, cette circonstance ne démontre pas une intégration particulière stable et pérenne en France. Par ailleurs, alors même que trois membres de sa fratrie résident en France, dont deux régulièrement, et que sa sœur atteste l'héberger, il est constant que M. A... n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans et où résident toujours ses parents et trois autres de ses frères et sœurs. Dans ces conditions, et compte tenu de ce que M. A... est célibataire et sans charge de famille en France, le préfet de la Gironde n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en prononçant à son encontre une décision de refus de titre de séjour. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées des article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle du requérant doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, aucun des moyens dirigés à l'encontre de la décision portant refus de séjour n'étant fondé, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

14. En deuxième lieu, en application des dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui est fondée sur le 3° de l'article L. 611-1 du même code, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus de titre de séjour, dès lors que celle-ci est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit être écarté.

15. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 12, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M. A... doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

16. En premier lieu, aucun des moyens dirigés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant fondé, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination doit être écarté.

17. En deuxième lieu, la décision contestée vise notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article

L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle indique par ailleurs que M. A... n'établit pas qu'il serait exposé à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, la décision attaquée, qui comporte ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée. Pour les mêmes motifs, la motivation de la décision en litige ne révèle pas un défaut d'examen sérieux de la situation de l'intéressé.

18. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 16, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M. A... doivent être écartés.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 15 novembre 2023. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juin 2025.

La rapporteure,

Béatrice Molina-AndréoLa présidente,

Evelyne BalzamoLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX02963


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24BX02963
Date de la décision : 12/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Béatrice MOLINA-ANDREO
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : CHAMBERLAND POULIN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-12;24bx02963 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award