Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du
22 septembre 2020 par lequel le maire de la commune de Bordeaux a retiré la déclaration préalable qui lui avait été implicitement délivrée le 24 juin 2020, pour la reconstruction d'un studio sur un terrain situé 73 rue Marsan à Bordeaux, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n°2101034 du 26 avril 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 26 juin 2023 et
7 novembre 2024, Mme C..., représentée par Me Achou-Lepage, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 26 avril 2023 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2020 du maire de Bordeaux ainsi que la décision du 5 janvier 2021 rejetant son recours gracieux. ;
3°) d'enjoindre à la commune de Bordeaux de lui délivrer la déclaration préalable tacite née le 1er juin 2020 ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Bordeaux le versement d'une somme de
2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, une décision tacite de non-opposition est née le 1er juin 2020 et est devenue définitive en application de l'article 12 ter de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire ;
- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'arrêté contesté est illégal dès lors qu'il n'a pas été notifié dans les formes prescrites par l'article R. 424-10 du code de l'urbanisme ; il n'est pas établi, qu'à considérer qu'une déclaration préalable tacite soit née le
24 juin 2020, que cette dernière ait été retirée dans le délai de trois mois fixé par l'article
L. 424-5 du code de l'urbanisme, dès lors qu'elle n'en a pas reçu notification ;
- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la déclaration préalable en litige a pour objet la reconstruction à l'identique d'un studio qui bénéficie de la cristallisation des règles applicables prévues par les dispositions de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme et est permise par les dispositions du règlement d'urbanisme applicable ; la reconstruction à l'identique autorise des aménagements mineurs, et est en l'espèce conforme aux dispositions du règlement de la zone UP1 du PLU de Bordeaux Métropole.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2024, la commune de Bordeaux, représentée par Me Hounieu, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Héloïse Pruche-Maurin,
- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public,
- et les observations de Me Caparros, représentant Mme C... et de Me Caïjeo, représentant la Commune de Bordeaux.
Considérant ce qui suit :
1. Par procès-verbal dressé le 5 juin 2019, l'agent assermenté de Bordeaux Métropole a constaté la démolition sans autorisation d'une construction existante d'une surface de plancher d'environ 14 m2, sur une parcelle cadastrée section PT n°109p, située 73 rue Marsan à Bordeaux. Le 19 février 2020, la propriétaire, Mme C..., a déposé, en vue de régulariser ces travaux, une déclaration préalable portant sur la démolition et la reconstruction d'un studio de volume et de surface identiques. Par arrêté du 23 juin 2020, le maire de Bordeaux s'est opposé à cette déclaration. Par arrêté du 18 août 2020, le maire de Bordeaux a retiré l'arrêté du
23 juin 2020. Par l'arrêté contesté du 22 septembre 2020, le maire de la commune de Bordeaux a retiré la déclaration préalable qu'il avait implicitement délivrée à Mme C... le 24 juin 2020. Par un courrier du 18 novembre 2020, Mme C... a formé un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté, rejeté par décision du maire de Bordeaux du 5 janvier 2021. Par la présente requête, Mme C... relève appel du jugement du 26 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de ce dernier arrêté du 22 septembre 2020, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable (...), tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. (....) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 423-23 du même code : " Le délai d'instruction de droit commun est de : a) Un mois pour les déclarations préalables ; (...) ". Aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : a) Décision de non-opposition à la déclaration préalable ; (...) ". Aux termes de l'article R. 423-19 du même code : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. ". Aux termes de l'article R. 423-22 du même code : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. ". Aux termes de l'article R. 423-38 du même code : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. ". Aux termes de l'article R. 423-39 du même code : " L'envoi prévu à l'article
R. 423-38 précise : a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; b) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l'objet d'une décision tacite de rejet en cas de demande de permis ou d'une décision tacite d'opposition en cas de déclaration ; c) Que le délai d'instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie. ". Aux termes de l'article R. 423-40 du même code : " Si dans le délai d'un mois mentionné à l'article R. 423-38, une nouvelle demande apparaît nécessaire, elle se substitue à la première et dresse de façon exhaustive la liste des pièces manquantes et fait courir le délai mentionné au a de l'article R. 423-39. ".
4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un dossier de déclaration préalable est incomplet, l'administration doit inviter le demandeur, dans un délai d'un mois à compter de son dépôt, à compléter sa demande dans un délai de trois mois en lui indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. Si le demandeur produit, dans ce délai de trois mois à compter de la réception du courrier l'invitant à compléter sa demande, l'ensemble des pièces manquantes répondant aux exigences du livre IV de la partie réglementaire du code de l'urbanisme, le délai d'instruction commence à courir à la date à laquelle l'administration les reçoit et, si aucune décision n'est notifiée à l'issue du délai d'instruction, une décision de non-opposition à déclaration préalable nait. A l'inverse, si le demandeur ne fait pas parvenir l'ensemble des pièces manquantes répondant aux exigences du livre IV dans le délai de trois mois, une décision tacite de rejet naît à l'expiration de ce délai. Lorsque l'administration estime, au vu des nouvelles pièces ainsi reçues dans ce délai de trois mois, que le dossier reste incomplet, elle peut inviter à nouveau le pétitionnaire à le compléter, cette demande étant toutefois sans incidence sur le cours du délai et la naissance d'une décision tacite de rejet si le pétitionnaire n'a pas régularisé son dossier au terme de ce délai. Enfin, le délai d'instruction n'est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n'est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l'urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l'expiration du délai d'instruction, sans qu'une telle demande puisse y faire obstacle.
5. Enfin, aux termes l'article 12 ter de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et l'adaptation des procédures pendant cette même période, dans sa version applicable au litige, dispose que :
" Sans préjudice de la faculté de prévoir, pour les mêmes motifs que ceux énoncés à l'article 9, une reprise des délais par décret, les délais d'instruction des demandes d'autorisation et de certificats d'urbanisme et des déclarations préalables prévus par le livre IV du code de l'urbanisme, y compris les délais impartis à l'administration pour vérifier le caractère complet d'un dossier ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l'instruction, ainsi que les procédures de récolement prévues à l'article L. 462-2 du même code, qui n'ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus. Ils reprennent leur cours à compter du
24 mai 2020. / Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 est reporté à l'achèvement de celle-ci. / Les mêmes règles s'appliquent aux délais impartis aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, aux services, autorités ou commissions, pour émettre un avis ou donner un accord dans le cadre de l'instruction d'une demande ou d'une déclaration mentionnée à l'alinéa précédent ainsi qu'au délai dans lequel une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou une autorisation d'urbanisme tacite ou explicite peut être retirée, en application de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ".
6. Il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que Mme C... a déposé sa demande d'autorisation le 19 février 2020. Par un premier courrier du 12 mars 2020, le maire de Bordeaux l'a informée qu'il manquait des pièces à son dossier et que le délai d'instruction d'un mois commencerait à courir à partir de la date de réception de ces pièces en mairie de Bordeaux. Par un second courrier du 28 avril 2020, le maire de Bordeaux a réitéré sa demande. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes mêmes de l'arrêté attaqué, que la pétitionnaire a complété son dossier le 19 mai 2020. Ainsi, et tandis que cette dernière date n'est pas sérieusement contestée et qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier et n'est pas même allégué que la demande de pièces manquantes aurait été illégale, le délai d'instruction d'un mois qui aurait dû commencer à courir à compter de la réception de ce dossier complet, soit pendant la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020, a été reporté à l'achèvement de celle-ci, soit au 24 mai 2020, en application de l'article 12 ter de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 précité, pour expirer le 24 juin 2020. Contrairement à ce que soutient la requérante, la circonstance, à la supposer établie, qu'elle ait reçu la première demande de pièces complémentaires après le 12 mars 2020, soit une fois les délais suspendus, étant sans incidence sur ce point. Par suite le moyen tiré de ce qu'une décision de non opposition tacite serait née le 1er juin 2020, et que le retrait opéré serait tardif doit être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 424-10 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " La décision accordant ou refusant le permis ou s'opposant au projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est notifiée au demandeur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal, ou, dans les cas prévus à l'article
R. 423-48, par échange électronique. (...) ".
8. D'une part, et comme retenu à juste titre par les premiers juges, Mme C... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la légalité de l'arrêté de retrait en litige des dispositions précitées de l'article R. 424-10 du code de l'urbanisme qui ne concernent que les refus de permis, les oppositions à déclarations préalables et des autorisations assorties de participations ou prescriptions.
9. D'autre part, la requérante soutient également, qu'à supposer qu'une décision de non opposition tacite soit née le 24 juin 2020, le retrait litigieux serait tardif à défaut de lui avoir été notifié de manière effective à son adresse dans le délai de trois mois prescrit par les dispositions précitées de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et plus spécifiquement de la notification faite par acte d'huissier, que la requérante produit
elle-même, que l'arrêté contesté lui a été signifié le 23 septembre 2020 " chez Mme A... ", sa mère chez qui elle élit domicile et dont elle a indiqué l'adresse dans sa demande. En l'absence d'éléments tangibles apportés par la requérante permettant de remettre en cause cet acte d'huissier de justice, dont il ne ressort d'aucun des termes qu'il ne lui ait pas été signifié physiquement, le moyen tiré de ce qu'elle n'aurait jamais reçu notification du retrait litigieux, sous-entendant que le retrait serait tardif, doit être écarté.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme :
" Lorsqu'un bâtiment régulièrement édifié vient à être détruit ou démoli, sa reconstruction à l'identique est autorisée dans un délai de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement. ". Aux termes de l'article 1.3.1 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole, relatif aux conditions particulières relatives à la reconstruction à l'identique : " En application des dispositions du Code de l'urbanisme, dès lors qu'il a été régulièrement édifié, la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée. / Toutefois, toute reconstruction est interdite si celle-ci expose ses occupants à un risque certain et prévisible de nature à mettre gravement en danger leur sécurité. / Par ailleurs, dans le cas où la destruction résulte d'une démolition volontaire, la reconstruction à l'identique n'est autorisée que si l'édification d'une construction équivalente s'avère impossible dans le cadre de l'application du présent règlement. ".
11. Il ressort des pièces du dossier et notamment du formulaire CERFA de demande, complété des différents plans et des photographies jointes au procès-verbal de constat d'infraction dressé le 5 juin 2019, que la construction existante présentait, avant destruction, une surface d'emprise au sol d'environ 12,34 m2 et une surface de plancher d'environ 11 m2, qu'elle donnait sur une cour intérieure et s'implantait en mitoyenneté de deux bâtiments, en cœur de parcelle. Il est par ailleurs constant que la destruction de cette construction résulte d'une démolition volontaire. Or il ne ressort d'aucune pièce du dossier, et notamment pas du motif de retrait opposé par le maire fondé sur la méconnaissance de l'article 1.4.1.3 du règlement de la zone UP1 du PLU de Bordeaux Métropole dès lors que le projet, qui consiste en la création d'un logement, ne prévoit pas une place de stationnement, que l'édification d'une construction équivalente s'avèrerait impossible dans le cadre de l'application de ce règlement. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté de retrait attaqué méconnaitrait les dispositions précitées de l'article L. 111-15 du code de l'urbanisme et 1.3.1 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2020.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bordeaux, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme C... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Bordeaux au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera à la commune de Bordeaux une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la commune de Bordeaux.
Délibéré après l'audience du 22 mai 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente assesseure,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025.
La rapporteure,
Héloïse Pruche-MaurinLa présidente,
Evelyne Balzamo
La greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX01738