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12/06/2025 | FRANCE | N°23BX00809

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 12 juin 2025, 23BX00809


Vu la procédure suivante :



REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La cour administrative d'appel de Bordeaux

1ère chambre



Procédure contentieuse antérieure :



La société France Mode Industrie et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le maire de

Pointe-à-Pitre leur a délivré un permis de construire avec prescriptions, ensemble la décision de refus née du silence gardé par la commune de Pointe-à-pitre à la

suite de leur demande du 6 juillet 2021 de retrait du permis délivré.

Par un jugement n°2101245 du 26 janvier 2023, le...

Vu la procédure suivante :

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La cour administrative d'appel de Bordeaux

1ère chambre

Procédure contentieuse antérieure :

La société France Mode Industrie et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le maire de

Pointe-à-Pitre leur a délivré un permis de construire avec prescriptions, ensemble la décision de refus née du silence gardé par la commune de Pointe-à-pitre à la suite de leur demande du 6 juillet 2021 de retrait du permis délivré.

Par un jugement n°2101245 du 26 janvier 2023, le tribunal administratif de Guadeloupe a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 23 mars et 23 octobre 2023, France Mode Industrie (FRAMI), représentée par Me Brillat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 janvier 2023 du tribunal administratif de Guadeloupe ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le maire de Pointe-à-Pitre lui a délivré un permis de construire, ensemble la décision de refus née du silence gardé par la commune de Pointe-à-Pitre à la suite de leur demande du 6 juillet 2021 de retrait du permis délivré ;

3°) d'enjoindre au maire de Pointe-à-Pitre de retirer l'arrêté du 20 juillet 2019, dans un délai de 30 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Pointe-à-Pitre le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le maire a illégalement accordé le permis de construire contesté dès lors que lorsqu'une demande porte sur des travaux qui concernent un bâtiment édifié sans autorisation, cette demande doit porter sur l'ensemble du bâtiment ; à défaut, le maire est en compétence liée pour refuser l'octroi de l'autorisation sollicitée ;

- l'arrêté du 29 juillet 2019 contesté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas démontré que les avis de la " S/CCDS " et de la " S/CCDA " ait été recueillis conformément aux dispositions de l'article L. 422-4 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté contesté est entaché d'un vice forme dès lors qu'il porte sur de " nouvelles constructions " d'une " surface de plancher crée de 2250 m2 " or cela ne correspond pas à sa demande ;

- la décision implicite de refus de sa demande de retrait de l'arrêté du 29 juillet 2019 est illégale dès lors que la commune avait obligation de retirer le permis de construire illégal ;

- le permis de construire contesté est illégal dès lors qu'il ne correspond pas à la demande qu'elle a présentée ; il méconnaît les dispositions des articles UY 4.1 et UY 11.3 du plan local d'urbanisme de Pointe-à-Pitre ;

- le maire ne pouvait faire application des règles d'urbanisme applicables aux constructions nouvelles dès lors qu'elle établit l'existence légale du bâtiment préexistant ; si le maire considérait que la construction existante n'avait pas d'existence légale, il ne pouvait requalifier la demande et était tenu de rejeter la demande de permis de construire.

La procédure a été communiquée à la commune de Pointe-à-Pitre qui n'a pas produit de mémoire en défense dans la présente instance.

Par ordonnance du 6 décembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 1er février 2024 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héloïse Pruche-Maurin,

- et les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 29 juillet 2019, le maire de Pointe-à- Pitre a accordé à la société France Mode Industrie (FRAMI) un permis de construire assorti de prescriptions portant sur une nouvelle construction d'une surface de plancher de 2250 m2 à destination de commerce et d'entrepôt sur un terrain situé rue Henri Dessout, lieudit Bergevin à Point-à-Pitre. Par courrier du 6 juillet 2021, la société FRAMI a demandé le retrait de cet arrêté. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé sur cette demande. Par la présente requête, la société FRAMI relève appel du jugement du 26 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Guadeloupe a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2019, ensemble la décision de rejet de sa demande de retrait du 6 juillet 2021.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) ". Ces dispositions visent, dans un but de sécurité juridique, à permettre au bénéficiaire d'une autorisation d'urbanisme, ainsi qu'à l'auteur de cette décision, d'être informés à bref délai de l'existence d'un recours contentieux dirigé contre elle. En revanche, elles n'exigent pas que le bénéficiaire d'une autorisation d'urbanisme notifie à l'auteur de cette décision le recours contentieux qu'il forme pour la contester lorsqu'elle est assortie de prescriptions ou pour contester ces prescriptions elles-mêmes.

3. Il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée par la commune de Pointe-à-Pitre à la demande de la société FRAMI tendant à l'annulation de l'arrêté du

29 juillet 2019, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux, et tirée de ce que ce recours n'avait pas fait l'objet des formalités prescrites à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme doit être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 29 juillet 2019 :

4. Lorsqu'une construction a été édifiée sans autorisation en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble du bâtiment. De même, lorsqu'une construction a été édifiée sans respecter la déclaration préalable déposée ou le permis de construire obtenu ou a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé. Il en va ainsi même dans le cas où les éléments de construction résultant de ces travaux ne prennent pas directement appui sur une partie de l'édifice réalisée sans autorisation. Dans l'hypothèse où l'autorité administrative est saisie d'une demande qui ne satisfait pas à cette exigence, elle doit inviter son auteur à présenter une demande portant sur l'ensemble des éléments devant être soumis à son autorisation. Cette invitation, qui a pour seul objet d'informer le pétitionnaire de la procédure à suivre s'il entend poursuivre son projet, n'a pas à précéder le refus que l'administration doit opposer à une demande portant sur les seuls nouveaux travaux envisagés.

5. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des écritures en défense en première instance de la commune, que le maire de Pointe-à-Pitre a considéré qu'alors que la demande en litige avait été déposée " pour entreprendre des travaux de réaménagement (création d'un niveau supplémentaire intérieur) et de mise aux normes (sécurité et accessibilité) d'un commerce " , les recherches menées par les services instructeurs de la commune avaient abouti au constat que le bâtiment sur lequel portait la demande de la société FRAMI n'avait pas d'existence juridique et qu'il n'y avait pas de permis de construire initial. Le maire en a informé la société FRAMI qui n'a pas fourni de copie du permis de construire qui aurait été préalablement obtenu. Le maire a, dès lors, requalifié la demande comme portant sur une nouvelle construction, et accordé le permis de construire contesté. Toutefois, aucune des pièces du dossier, notamment pas l'acte de vente du terrain daté du 5 novembre 1996 portant sur la parcelle en litige, n'établit la régularité de l' édification des constructions présentes sur le terrain ni ne permet de conclure, à l'existence d'un permis de construire initial. Le maire était par suite, tenu de s'opposer à la demande présentée par la société FRAMI qui portait sur les seuls nouveaux travaux envisagés sur une construction édifiée sans permis de construire, cette illégalité n'étant pas régularisable. Dès lors, le permis délivré était illégal et le maire était tenu de faire droit à la demande de retrait de la société FRAMI.

6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté attaqué, ensemble la décision rejet du recours gracieux formé par la société FRAMI.

7. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société FRAMI est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Guadeloupe a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2019, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Compte tenu des motifs retenus aux points précédents conduisant à l'annulation du permis de construire contesté, ensemble la décision implicite de refus de retrait opposée à la société FRAMI, le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Pointe-à-Pitre une somme de 1 500 euros à verser à la société FRAMI sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Guadeloupe du 26 janvier 2023 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 29 juillet 2019 du maire de Pointe-à-Pitre est annulé, ensemble la décision de rejet de la demande de la société FRAMI de retrait du 6 juillet 2021 de cet arrêté.

Article 3 : La commune de Pointe-à-Pitre versera à la société FRAMI une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société France Mode Industrie (FRAMI) et à la commune de Pointe-à-Pitre.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025.

La rapporteure,

Héloïse Pruche-MaurinLa présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 23BX00809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00809
Date de la décision : 12/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : BRILLAT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-12;23bx00809 ?
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