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29/04/2025 | FRANCE | N°23BX01450

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 29 avril 2025, 23BX01450


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme A... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel la maire d'Artigueloutan a retiré la décision tacite par laquelle elle ne s'est pas opposée à leur déclaration préalable en vue du rehaussement d'un muret soutenant une clôture, ensemble la décision du 5 mai 2021 par laquelle cette même autorité a rejeté leur recours gracieux formé contre cet arrêté



Par un jugement n° 2101672 du 2

8 mars 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel la maire d'Artigueloutan a retiré la décision tacite par laquelle elle ne s'est pas opposée à leur déclaration préalable en vue du rehaussement d'un muret soutenant une clôture, ensemble la décision du 5 mai 2021 par laquelle cette même autorité a rejeté leur recours gracieux formé contre cet arrêté

Par un jugement n° 2101672 du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 mai 2023 et 28 octobre 2024, M. et Mme C..., représentés par Me Caubet-Hilloutou, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mars 2023 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 et la décision du 5 mai 2021 de la maire d'Artigueloutan ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Artigueloutan la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit ; le projet litigieux n'était pas soumis à l'obligation de déclaration préalable, dès lors qu'il porte sur une construction existante ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ; l'arrêté du 8 mars 2021 a été pris après l'expiration du délai de retrait de la décision tacite de non-opposition à leur déclaration préalable, dès lors, d'une part, que la demande de pièces complémentaires était tardive et, d'autre part, que cette demande concernait des pièces non exigibles ;

- l'arrêté attaqué a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors, d'une part, qu'un délai insuffisant leur a été laissé pour présenter leurs observations, d'autre part, que ce délai n'a pas été respecté et, enfin, qu'ils n'ont pas été informés de la possibilité de se faire représenter par un avocat ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit ; l'arrêté attaqué est illégal, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de l'article 3.3 du titre II du règlement du plan de prévention des risques d'inondation ; cet article méconnait les articles L. 562-1 et R. 562-5 du code de l'environnement ; l'interdiction des murs bahuts n'est ni nécessaire ni cohérente ; cet article est entaché d'une violation du principe d'égalité ; leur projet est permis par d'autres dispositions du règlement du plan de prévention des risques d'inondation.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 septembre 2024, ainsi que des mémoires enregistrés les 2 décembre 2024 et 18 février 2025 qui n'ont pas été communiqués, la commune d'Artigueloutan, représentée par Me Bernal, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués dans la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vincent Bureau,

- les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public,

- et les observations de Me Caubet-Hilloutou, représentant M. et Mme C..., et celles de Me Bernal, représentant la commune d'Artigueloutan.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C..., propriétaires d'une maison située sur la parcelle cadastrée section AD n° 765 sur le territoire de la commune d'Artigueloutan, ont déposé le 2 novembre 2020 une déclaration préalable en vue du rehaussement d'un muret soutenant la clôture grillagée de leur propriété. Par un arrêté du 8 mars 2021, la maire d'Artigueloutan a retiré sa décision implicite de non-opposition à cette déclaration préalable. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 28 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté, ensemble la décision du 5 mai 2021 par laquelle la maire d'Artigueloutan a rejeté leur recours gracieux formé contre cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Pau a omis de se prononcer, par le jugement attaqué, sur une branche du moyen de M. et Mme C... soulevé devant lui relatif à l'absence de prolongation du délai d'instruction de leur déclaration préalable, tenant à ce que les pièces complémentaires qui leur ont été demandées pour compléter cette déclaration n'étaient pas exigibles. Cette branche du moyen, qui n'était pas un simple argument, n'était pas inopérante, et les requérants sont par suite fondés à soutenir que le tribunal administratif de Pau, en s'abstenant d'y répondre, a entaché le jugement d'une insuffisance de motivation.

4. Le jugement du tribunal administratif de Pau du 28 mars 2023 doit être annulé en conséquence, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de régularité soulevés par les appelants.

5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de Pau.

Sur la légalité de l'arrêté du 8 mars 2021, ensemble la décision du 5 mai 2021 :

6. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme : " Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature ou de leur très faible importance, sauf lorsqu'ils sont implantés dans un secteur sauvegardé dont le périmètre a été délimité ou dans un site classé : (...) / f) Les murs dont la hauteur au-dessus du sol est inférieure à deux mètres, sauf s'ils constituent des clôtures régies par l'article R. 421-12 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 421-12 du même code : " Doit être précédée d'une déclaration préalable l'édification d'une clôture située : (...) / d) Dans une commune ou partie de commune où le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme a décidé de soumettre les clôtures à déclaration. ".

7. En l'espèce, par une délibération du 30 janvier 2020 devenue exécutoire le 5 février 2020, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de Pau Béarn Pyrénées a décidé de soumettre l'édification de clôtures à déclaration préalable sur le territoire des communes appartenant à la communauté d'agglomération, au nombre desquelles figure la commune d'Artigueloutan. Cette délibération précise que " constituent des clôtures les murs, murets, treillis, pieux, palissades, grilles, barbelés, grillages, portes de clôtures, destinés à fermer un passage ou un espaces ". Il ressort des pièces du dossier, notamment de la note circonstanciée accompagnant la demande de déclaration préalable déposée par M. et Mme C..., que les travaux considérés ont pour objet de rétablir à une hauteur de 40 cm au-dessus du niveau du sol le muret en béton qui soutient le grillage de la clôture à l'ouest de leur parcelle, alors que ce muret s'élevait au jour de leur demande à 17 cm au point le plus bas. De tels travaux doivent être regardés comme apportant à la clôture existante une modification substantielle de nature à rendre nécessaire la déclaration prévue par l'article R. 421-12 du code de l'urbanisme.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. (...) ". Aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'administration n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique. ". Aux termes de l'article L. 211-2 de ce code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 4° Retirent (...) une décision créatrice de droits (...) ".

9. La décision portant retrait d'une décision de non-opposition à déclaration préalable est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle doit, par suite, être précédée d'une procédure contradictoire, permettant au titulaire de cette autorisation d'urbanisme d'être informé de la mesure qu'il est envisagé de prendre, ainsi que des motifs sur lesquels elle se fonde, et de bénéficier d'un délai suffisant pour présenter ses observations. Les dispositions précitées font également obligation à l'autorité administrative de faire droit, en principe, aux demandes d'audition formées par les personnes intéressées en vue de présenter des observations orales, alors même qu'elles auraient déjà présenté des observations écrites. Ce n'est que dans le cas où une telle demande revêtirait un caractère abusif qu'elle peut être écartée. Le respect du caractère contradictoire de la procédure prévue par les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration constitue une garantie pour le titulaire de cette autorisation d'urbanisme que l'autorité administrative entend rapporter. Eu égard à la nature et aux effets d'un tel retrait, le délai de trois mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme oblige l'autorité administrative à mettre en œuvre la procédure contradictoire préalable à cette décision de retrait de manière à éviter que le bénéficiaire de l'autorisation ne soit privé de cette garantie.

10. Il ressort des pièces du dossier que, par une lettre du 15 février 2021, la maire d'Artigueloutan a informé M. et Mme C... de son intention de retirer la décision implicite de non-opposition à leur déclaration préalable au motif que cette décision méconnaissait les articles 3.2, 3.3 et 4.1.2 du règlement du plan de prévention des risques d'inondation (PPRi) de l'Ousse et de ses affluents, et les a invités à présenter d'éventuelles observations écrites ou orales dans un délai maximum de huit jours à compter de la réception de cette lettre, en présence, le cas échéant de leur conseil. Par un courriel du 18 février 2021, dont ils ont accusé réception, M. et Mme C... ont été convoqués à la mairie d'Artigueloutan le 25 février 2021 afin que leur soient exposés les motifs d'illégalité de leur autorisation d'urbanisme. Les intéressés se sont rendus à cet entretien avec la maire d'Artigueloutan et un représentant du service instructeur. La décision de retrait est ensuite intervenue le 8 mars 2021.

11. D'une part, si les requérants soutiennent qu'ils n'ont pas été informés de la possibilité de se faire assister par un conseil lors de l'entretien du 25 février 2021, il est constant que le courrier du 15 février 2021, qu'ils ne contestent pas avoir reçu, mentionnait cette possibilité. Par ailleurs, si ce courrier indiquait qu'ils pouvaient présenter des observations écrites " ou " orales, il ne pouvait s'en déduire le caractère nécessairement exclusif de l'une ou l'autre de ces modalités et les requérants ne sont pas fondés à prétendre qu'ils auraient ainsi été irrégulièrement dissuadés de formuler des observations écrites dans la mesure où ils ont répondu à la convocation de la mairie et présenté à cette occasion des observations orales. Enfin, la circonstance que M. et Mme C... n'aient disposé que d'un délai de 7 jours entre la convocation à l'entretien et celui-ci n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie dès lors qu'ils ont encore bénéficié d'un délai de 11 jours après cet entretien avant qu'intervienne la décision de retrait.

12. D'autre part, la circonstance que la décision attaquée se fonde sur les dispositions des articles 3.2, 3.3 et 4.1.2 du règlement du PPRi de l'Ousse et de ses affluents alors que le courrier du 15 février 2021 ne se référait qu'à l'article 3.3 de ce règlement n'a privé M. et Mme C... d'aucune garantie dès lors qu'il est constant que ces dispositions comportent un objet identique tenant à l'interdiction des murs bahuts.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 423-19 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. ". Aux termes de l'article R. 423-22 du même code : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. ". Aux termes de l'article R. 423-38 du même code : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. ". Aux termes de l'article R. 423-41 du même code : " Une demande de production de pièce manquante notifiée après la fin du délai d'un mois prévu à l'article R. 423-38 ou ne portant pas sur l'une des pièces énumérées par le présent code n'a pas pour effet de modifier les délais d'instruction définis aux articles R. 423-23 à R. 423-37-1. ". Aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / a) Décision de non-opposition à la déclaration préalable (...) ".

14. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un dossier d'autorisation d'urbanisme est incomplet, l'administration doit inviter le demandeur, dans un délai d'un mois à compter de son dépôt, à compléter sa demande dans un délai de trois mois en lui indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. Si le demandeur produit, dans ce délai de trois mois à compter de la réception du courrier l'invitant à compléter sa demande, l'ensemble des pièces manquantes répondant aux exigences du livre IV de la partie réglementaire du code de l'urbanisme, le délai d'instruction commence à courir à la date à laquelle l'administration les reçoit et, si aucune décision n'est notifiée à l'issue du délai d'instruction, un permis de construire est tacitement accordé. A l'inverse, si le demandeur ne fait pas parvenir l'ensemble des pièces manquantes répondant aux exigences du livre IV dans le délai de trois mois, une décision tacite de rejet naît à l'expiration de ce délai. Lorsque l'administration estime, au vu des nouvelles pièces ainsi reçues dans ce délai de trois mois, que le dossier reste incomplet, elle peut inviter à nouveau le pétitionnaire à le compléter, cette demande étant toutefois sans incidence sur le cours du délai et la naissance d'une décision tacite de rejet si le pétitionnaire n'a pas régularisé son dossier au terme de ce délai. Enfin, le délai d'instruction n'est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n'est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l'urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l'expiration du délai d'instruction, sans qu'une telle demande puisse y faire obstacle.

15. Et aux termes de l'article R.431-35 du code de l'urbanisme, alors applicable : " La déclaration préalable précise : (...) e) Les éléments, fixés par arrêtés, nécessaires au calcul des impositions ; (...) ". Aux termes de l'article R.431-36 du même code, alors applicable : " Le dossier joint à la déclaration comprend : (...) c) Une représentation de l'aspect extérieur de la construction faisant apparaître les modifications projetées et si le projet a pour effet de modifier celui-ci ; (...) (...) Lorsque la déclaration porte sur un projet de création ou de modification d'une construction et que ce projet est visible depuis l'espace public ou que ce projet est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le dossier comprend également les documents mentionnés aux c et d de l'article R. 431-10. (...) ". Aux termes de l'article R.431-10 de ce code : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; (...) ".

16. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite du dépôt de la déclaration préalable de M. et Mme C..., le 2 novembre 2020, le service instructeur de la commune d'Artigueloutan, par un courrier du 30 novembre 2020, les a informés de l'absence de document représentant l'aspect extérieur de la construction et faisant apparaitre les modifications projetées, ainsi que d'un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans son environnement et de l'absence de renseignement et de signature du feuillet fiscal. Si les requérants font valoir que ce courrier ne leur a pas été notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ils ont eux-mêmes indiqué dans deux lettres adressées à la commune le 22 décembre 2020 et le 19 avril l'avoir reçu dans leur boite aux lettres le 1er décembre 2020, soit dans le délai requis prévu par l'article R. 423-22 du code de l'urbanisme.

17. D'autre part, si M. et Mme C... soutiennent que les pièces complémentaires réclamées n'étaient pas exigibles, il est constant qu'elles sont par nature au nombre des pièces dont la production par le pétitionnaire est requise par les dispositions précitées du code de l'urbanisme. Or, il ressort du dossier de déclaration préalable que le cadre 1.1 du formulaire Cerfa n'était ni rempli, ni signé, alors qu'il mentionne que " Les lignes ci-dessous doivent être obligatoirement renseignées, quelle que soit la nature de la construction ". Il ressort également du dossier de déclaration préalable qu'il ne comportait pas de représentation graphique des modifications apportées, ni de document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain, alors qu'il est constant que le projet est visible depuis l'espace public. C'est donc à juste titre que la production de ces pièces a été réclamée par le service instructeur.

18. La décision du 30 novembre 2020 a, par suite, eu pour effet d'interrompre le délai d'instruction prévu à l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme, qui a recommencé à courir le 28 décembre 2020, date à laquelle les pièces manquantes ont été reçues, et de faire naître une décision tacite de rejet de la déclaration préalable de M. et Mme C... le 28 janvier 2021, en application de l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, à la date de l'arrêté attaqué, le 8 mars 2021, le délai de trois mois au cours duquel la maire d'Artigueloutan pouvait retirer la décision tacite de non-opposition à la déclaration préalable dont étaient titulaires M. et Mme C... en application des dispositions précitées de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme n'était pas expiré, contrairement à ce que soutiennent les requérants.

19. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, alors applicable : " I. -L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; (...) ". Aux termes de l'article R. 562-3 du même code : " Le dossier de projet de plan comprend : (...) / 3° Un règlement précisant, en tant que de besoin : / a) Les mesures d'interdiction et les prescriptions applicables dans chacune de ces zones en vertu des 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 562-4 de ce code : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan local d'urbanisme, conformément à l'article L. 153-60 du code de l'urbanisme (...) ".

20. Il résulte de ces dispositions que le classement de terrains par un plan de prévention des risques d'inondation ( PPRi) a pour objet de déterminer, en fonction de la nature et de l'intensité du risque auquel ces terrains sont exposés, les interdictions et prescriptions nécessaires, à titre préventif, notamment pour ne pas aggraver le risque pour les vies humaines. La nature et l'intensité du risque doivent être appréciés de manière concrète au regard notamment de la réalité et de l'effectivité des ouvrages de protection ainsi que des niveaux altimétriques des terrains en cause à la date à laquelle le plan est établi.

21. En l'espèce, la décision attaquée est fondée sur le motif d'interdiction des murs bahuts, figurant aux articles 3.2, 3.3 et 4.1.2 du règlement du PPRi de l'Ousse et de ses affluents, tant pour les clôtures existantes que pour les clôtures nouvelles.

22. Aux termes de l'article 3.3 du règlement du PPRi de l'Ousse et de ses affluents, approuvé par arrêté préfectoral du 27 novembre 2018 : " Réglementation applicable aux projets sur les biens et activités existants. L'extension ou la reconstruction de clôtures (en limites séparatives de propriété ou non) est autorisée sous réserve d'être conçue de manière à favoriser le libre écoulement des eaux de crues. Les murs bahuts (soubassement) sont interdits. Nonobstant cette disposition, la reconstruction de clôtures pourrait faire l'objet d'une autorisation particulière, dès lors qu'elle serait imposée par un avis des monuments historiques. (...) Le comblement partiel d'un mur existant ou sa rehausse peut être autorisé sous réserve que l'opération visée soit située au-dessus de la cote de référence ". Le glossaire du PPRi précise qu'un mur bahut est défini comme un " Mur de faible hauteur formant soubassement, surmonté d'un grillage. Ils sont interdits en zone inondable ".

23. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'assiette du projet se situe en zone verte du PPRi, correspondant aux secteurs " faiblement exposés à l'inondation en zone urbanisée " pour lesquels " l'objectif est d'admettre certains types de constructions prenant en compte l'exposition au risque de façon à ne pas augmenter la vulnérabilité des biens ". Il est constant que le projet litigieux a pour but de rehausser de façon substantielle un muret existant supportant une clôture grillagée, construction qui correspond à la définition d'un mur bahut, interdit y compris en zone verte par les dispositions précitées du PPRi. Cette interdiction vise à ne pas créer d'obstacle à l'écoulement de l'eau et elle est justifiée par les objectifs du PPRi dans cette zone " de ne pas aggraver les risques ou d'en provoquer de nouveaux, d'assurer la sécurité des personnes et limiter ou réduire la vulnérabilité des biens ". Si les requérants soutiennent que cette interdiction ne se justifierait pas en zone verte, ils ne contestent toutefois pas que le secteur du projet a été soumis à plusieurs inondations au cours des années récentes, et produisent eux-mêmes des photographies de leur propriété submergée. Ils invoquent également une incohérence tenant à ce que le PPRi ouvre par ailleurs des possibilités de rehausse et de reconstruction de clôtures en murs pleins dans la même zone, mais il résulte des mentions du plan que ces dérogations sont cantonnées aux projets situés au-dessus d'une cote de référence, et il est constant que le terrain d'assiette du projet de M. et Mme C... n'est pas lui-même situé au-dessus de cette cote. Ils ne sauraient davantage se prévaloir d'une atteinte au principe d'égalité qui résulterait de ce que le plan autorise dans la zone concernée des projets de plus grande ampleur que leurs travaux, notamment des surélévations de maison, cette distinction tenant à la nature différente des travaux considérés, qui appelle des réponses adaptées à l'objectif de prévention des risques d'inondation poursuivi par le plan, dont les prescriptions n'apparaissent en l'occurrence pas manifestement disproportionnées au regard des buts poursuivis. Enfin, la circonstance que les propriétaires d'une parcelle voisine aient eu le droit d'édifier un mur bahut est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse, alors au demeurant que les requérants n'établissent pas qu'il ait été édifié après l'approbation du PPRi. Par suite, les moyens tirés par M. et Mme C... de l'illégalité du PPRi, par voie d'exception, et de l'erreur de droit entachant l'arrêté du 8 mars 2021, doivent être écartés.

24. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel la maire d'Artigueloutan a retiré la décision tacite par laquelle elle ne s'était pas opposée à leur déclaration préalable en vue du rehaussement d'un muret soutenant une clôture, ensemble la décision du 5 mai 2021 par laquelle cette même autorité a rejeté leur recours gracieux formé contre cet arrêté.

Sur les frais liés au litige :

25. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2101672 du 28 mars 2023 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et B... C... et à la commune d'Artigueloutan.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Vincent Bureau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025.

Le rapporteur,

Vincent Bureau

Le président,

Laurent Pouget

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23BX01450


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01450
Date de la décision : 29/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: M. Vincent BUREAU
Rapporteur public ?: M. DUFOUR
Avocat(s) : CAUBET-HILLOUTOU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-29;23bx01450 ?
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