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10/04/2025 | FRANCE | N°24BX02566

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 10 avril 2025, 24BX02566


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 19 juin 2023 par lequel le préfet de La Réunion a refusé de lui renouveler son titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois.



Par un jugement n° 2301031 du 15 juin 2024, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enre

gistrée le 28 octobre 2024, Mme B..., représentée par Me Belliard, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 19 juin 2023 par lequel le préfet de La Réunion a refusé de lui renouveler son titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois.

Par un jugement n° 2301031 du 15 juin 2024, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 octobre 2024, Mme B..., représentée par Me Belliard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 15 juin 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 juin 2023 par lequel le préfet de La Réunion a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet de La Réunion de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

- elle méconnaît l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2025, le préfet de La Réunion conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, conformément à l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français qui constituent des conclusions nouvelles.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2024/002651 du 26 septembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Lucie Cazcarra.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante comorienne, née le 9 décembre 1970 à Domoni-Anjouan (Comores), est entrée en France le 21 août 2017 dans le cadre d'une évacuation sanitaire où elle a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour valable jusqu'au 11 juin 2018. Elle a sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade et, par arrêté du 29 août 2019, le préfet de La Réunion a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois. Par un arrêt n° 20BX04246 du 27 septembre 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du 16 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté et a enjoint au préfet de La Réunion de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Le préfet de la Réunion a ainsi délivré, le 18 octobre 2021, à Mme B... une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " en qualité d'étranger malade, valable jusqu'au 17 octobre 2022. Le 8 septembre 2022, Mme B... a sollicité le renouvellement de sa carte de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 19 juin 2023, le préfet de La Réunion a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par la présente requête, Madame B... relève appel du jugement du 15 juin 2024 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

3. A supposer même le moyen invoqué, Mme B... n'est pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-7 précitées dès lors qu'elle n'établit pas avoir présenté de demande sur ce fondement.

4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme B... se prévaut des liens personnels, intenses et stables, qu'elle aurait noués en France. Bien qu'établissant la présence en France de son frère, titulaire d'une carte de résident, ainsi que de ses neveux et nièces, de nationalité française, Mme B... ne justifie pas des liens qu'elle entretiendrait avec eux, dont la plupart résident dans la Drôme. Si la requérante fait valoir que le père de son fils A..., né le 15 mars 2006 aux Comores, est français et a déposé une demande de certificat de nationalité française pour leur fils, elle ne justifie pas de l'obtention par ce dernier de la nationalité française. Par ailleurs, la récidive de cancer dont souffre la requérante est postérieure à l'arrêté en litige, dont la légalité doit être appréciée à la date de son édiction. Mme B... ne démontre pas, en outre, qu'elle serait dépourvue de toute attache personnelle ou familiale dans son pays d'origine, les Comores, où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-sept ans et où réside toujours son époux. Enfin, si Mme B... produit un contrat de travail conclu le 25 juillet 2022, pour une durée de six mois, en qualité d'ouvrière agricole polyvalente, elle ne justifie pas d'une insertion professionnelle stable et durable en France. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision par laquelle le préfet de La Réunion a refusé de lui délivrer un titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour ces mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet en prenant l'obligation de quitter le territoire français contestée doivent être écartés.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

7. Mme B... sollicite l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à son encontre par le préfet le 19 juin 2023. Cependant, l'intéressée n'a contesté, devant le tribunal administratif de La Réunion, que le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français pris par le préfet à cette même date. Par suite, elle ne peut, pour la première fois en appel, demander l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français qui constitue une demande nouvelle et est, par suite, irrecevable.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de La Réunion du 19 juin 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais d'instance :

9. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par Me Belliard, avocat de Mme B..., et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Bénédicte Martin, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 avril 2025.

La rapporteure,

Lucie CazcarraLa présidente,

Bénédicte Martin La greffière,

Laurence Mindine

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX02566


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX02566
Date de la décision : 10/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: Mme Lucie CAZCARRA
Rapporteur public ?: Mme REYNAUD
Avocat(s) : BELLIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-10;24bx02566 ?
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