Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat intercommunal de Port d'Albret (SIPA) a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner in solidum, sur le fondement de la garantie décennale, la société par actions simplifiée (SAS) Safège et son assureur ainsi que la société XL Insurance Company SE, venant aux droits de la société AXA Corporate Solutions Assurances, à lui verser la somme de 246 000 euros toutes taxes comprises (TTC) en réparation des désordres affectant la digue nord du courant de Soustons.
Par un jugement n° 2002549 du 23 février 2023, le tribunal administratif de Pau a condamné la société Safège à lui verser une indemnité de 23 040 euros TTC et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 avril 2023, le syndicat intercommunal de Port d'Albret, représenté par Me Dulout, demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Pau en tant qu'il limite son indemnisation à la somme de 23 040 euros TTC et de condamner la société Safège à lui verser la somme de 246 000 euros TTC au titre des désordres affectant la digue nord du courant de Soustons, augmentée des intérêts calculés par application de l'indice national BT01 du coût de la construction à compter du dépôt du rapport d'expertise ;
2°) de mettre à la charge de la société Safège les dépens constitués des frais d'expertise pour un montant total de 23 437,74 euros et des frais d'huissier d'un montant de 300 euros ;
3°) de mettre à la charge de la société Safège une somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la régularité du jugement :
- il est insuffisamment motivé dès lors que le tribunal n'indique pas pourquoi l'indemnité dont il demande le paiement constituerait un enrichissement sans cause, ne justifie pas la faute retenue à son encontre comme une cause exonératoire de responsabilité partielle et ne justifie pas le partage des dépens entre les parties ;
- le dispositif du jugement fixe le montant total de la somme due par la société Safège à un montant inférieur aux indemnités réparatrices identifiées dans ses motifs ;
- le tribunal a opposé à tort l'irrecevabilité de sa demande d'homologation du rapport d'expertise ;
- un mémoire produit postérieurement à la clôture d'instruction a été visé sans avoir été soumis au débat contradictoire ; l'absence de renvoi de l'audience l'a contraint à déposer une note en délibéré ;
S'agissant du bien-fondé du jugement :
- la cour confirmera le jugement en ce qu'il a considéré, au vu des conclusions de l'expertise judiciaire, que les désordres affectant la digue nord résultent d'une carence de diagnostic imputable au maitre d'œuvre ;
- le tribunal a retenu à tort une faute exonératoire de sa part, résultant d'un défaut d'entretien de l'ouvrage dès lors que, sur ce point, le maitre d'œuvre a failli dans sa mission de conseil ;
- il a droit à la réparation intégrale des désordres affectant l'ouvrage, pour le montant chiffré par l'expert à la somme de 246 606 euros TTC.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 juillet 2024, la société par actions simplifiée (SAS) Safège, représentée par Me Rivière, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à titre principal à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Pau du 23 février 2023 en tant qu'il prononce une condamnation à son encontre, à titre subsidiaire à sa seule réformation en ce qu'il a mis pour moitié les dépens à sa charge ; elle demande également qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge du syndicat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les désordres affectant la digue nord du courant de Soustons ne relèvent pas de la garantie décennale des constructeurs ; l'expert n'établit pas que cette digue ne remplirait plus son rôle ni que sa solidité serait atteinte ;
- l'expert estime que les désordres proviennent d'une absence de tenue du soubassement des enrochements et lui reproche à tort de ne pas avoir réalisé un bon diagnostic ; or, le marché a été conclu pour la réalisation de travaux de remise en état des digues tenant compte d'un aléa de dommages admissibles se traduisant par la nécessité d'entretenir l'ouvrage, ce dont le SIPA a été informé dès l'établissement du dossier des ouvrages exécutés (DOE) ; les désordres en cause relèvent des dommages occasionnels admissibles au regard desquels les travaux de réhabilitation de la digue ont été définis ; sa responsabilité ne saurait donc être engagée, même pas au titre du devoir de conseil dès lors qu'elle a informé le SIPA à plusieurs reprises de la nécessité de procéder à l'entretien de l'ouvrage ;
- à supposer que sa responsabilité soit retenue, comme l'a jugé le tribunal, la faute du maitre de l'ouvrage, résultant du défaut d'entretien de l'ouvrage, devra être considérée comme totalement exonératoire ; à défaut, le montant des travaux de remise en état, estimé à 20 000 euros hors taxe (HT), ne pourra être mis à sa charge.
Par ordonnance du 23 juillet 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2024 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Valérie Réaut ;
- les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public ;
- et les observations de Me Jean, représentant de la société Safège.
Considérant ce qui suit :
1. Le courant de Soustons, qui canalise l'exutoire du lac marin de Port d'Albret vers l'océan Atlantique, a été protégé par deux digues, sud et nord, respectivement aménagées en 1958 et 1979. Par un marché conclu le 14 septembre 2011, le syndicat intercommunal de Port d'Albret (SIPA), gestionnaire de ces digues, a confié à la société Safège une étude de diagnostic approfondi de ces ouvrages pour un montant de 29 625, 20 euros toutes taxes comprises (TTC). Puis, par un second marché du 20 septembre 2012, il a confié à la même société la maitrise d'œuvre des travaux de réhabilitation des digues, attribués à un groupement d'entreprises. Après les tempêtes d'avril 2016, le SIPA a sollicité une expertise judiciaire afin de déterminer les causes des désordres ayant affecté les ouvrages à cette occasion. Au vu des conclusions du rapport d'expertise déposé le 14 mars 2020, l'établissement public a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner in solidum la société Safège et son assureur à lui verser, sur le fondement de la garantie décennale, une somme de 246 000 euros TTC en réparation des désordres ayant affecté la digue nord. Le SIPA relève appel du jugement du 23 février 2023 en tant que le tribunal a limité l'indemnisation mise à la charge de la société Safège à la somme de 23 040 euros TTC. Par la voie de l'appel incident, la société Safège conclut à l'annulation du jugement en tant qu'il prononce une condamnation à son encontre et met à sa charge les dépens.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, comme l'ont rappelé les premiers juges, il n'appartient pas à la juridiction administrative d'homologuer un rapport d'expertise en l'absence de tout texte le prévoyant. Par suite, en rejetant comme irrecevables les conclusions présentées par le SIPA tendant à l'homologation du rapport d'expertise du 14 mars 2020, le tribunal n'a pas entaché sa décision d'irrégularité.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que, par un courrier du 26 octobre 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de ce que l'instruction serait susceptible d'être close sans avertissement préalable par l'émission d'une ordonnance de clôture ou d'un avis d'audience à compter du 1er décembre 2022. Ensuite, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée par une ordonnance du 5 décembre 2022. Postérieurement à cette date, la société Safège et le SIPA ont produit des mémoires enregistrés le même jour, le 6 février 2023. Aucun d'eux ne fait état d'une circonstance de fait ou de droit nouvelle justifiant qu'ils auraient été dans l'impossibilité de produire ces mémoires avant la clôture d'instruction. Dans ces conditions, la magistrate rapporteure n'était donc pas tenue de les communiquer, et a pu régulièrement se borner à les viser sans les analyser.
4. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient le SIPA, au point 10 de leur jugement, les premiers juges ont suffisamment motivé leur décision en exposant que l'absence d'entretien courant de la digue nord caractérise une faute de l'établissement public exonératoire de la responsabilité décennale du constructeur. De même, le jugement est suffisamment motivé lorsque, en son point 12, le tribunal explique qu'il ne peut condamner le maitre d'œuvre au paiement de l'indemnité réclamée dès lors qu'elle correspond à des travaux d'amélioration de l'ouvrage ne relevant pas de la garantie décennale ne pouvant donc être mis à la charge de la société Safège.
5. En quatrième lieu, les premiers juges exposent au point 13 de leur décision que le coût de remise en état de la digue nord doit être évalué à 20 000 euros mais que la faute exonératoire du SIPA exclut que cette somme soit mise à la charge de la société Safège. Au point 14 du jugement, ils retiennent, en revanche, que les frais de maitrise d'œuvre que l'établissement public devra exposer pour redéfinir le dimensionnement de la digue nord doivent être supportés par le maitre d'œuvre. Par suite, en condamnant la société Safège, à l'article 2 du dispositif du jugement, à verser au SIPA la somme de 23 040 euros TTC correspondant au coût de cette maitrise d'œuvre, le tribunal n'a pas entaché sa décision d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif.
6. En dernier lieu, la circonstance alléguée que le tribunal aurait fait une mauvaise application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative relève du bien-fondé du jugement attaqué et non de sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
7. Il résulte de l'instruction que la digue sud du courant du Soustons est composée d'un musoir, d'une digue courante et d'une digue protégée d'une longueur totale de 215 mètres linéaires suivie d'un quai de 150 mètres linaires tandis que la digue nord est composée, à partir de son musoir, d'une digue courante et d'une digue protégée, d'une longueur totale de 240 mètres linéaires, prolongées par un éperon transversal. Ces digues sont constituées d'une ossature de deux à trois files de pieux en bois qui encagent des enrochements calcaires et, côté chenal, d'un talus en enrochements naturels dont les pieds sont bloqués par une dernière file de pieux en bois. A l'issue d'un marché de diagnostic, la société Safège a défini le dimensionnement nécessaire à la réhabilitation de ces ouvrages, et le marché de travaux a été confié à un groupement d'entreprises par un acte d'engagement notifié le 22 avril 2013. Selon les articles I.1 et II.3 du cahier des clauses techniques particulières de ce marché, la réhabilitation de la digue nord a concerné son musoir et les 240 mètres linéaires de digue. A la fin de l'exécution des travaux, plusieurs tempêtes survenues en janvier 2014 ont causé des dommages aux ouvrages dont la reprise a donné lieu à la signature d'un avenant au marché de maitrise d'œuvre et d'un avenant au marché de travaux publics. Ces travaux supplémentaires ont notamment porté sur la consolidation d'un talus en enrochements existant au droit de la Résidence " Courant " et sur la création d'un ouvrage de protection de 50 mètres linéaires, composé d'un épaulement d'enrochements, reliant la digue nord à l'éperon puis à ce talus. Les travaux de réfection des digues ont été réceptionnés sans réserve le 10 octobre 2024 à effet du 14 mars 2014 et les travaux supplémentaires ont été réceptionnés sans réserve le 13 octobre 2014 à effet du 10 octobre 2014. A la suite de nouveaux désordres qui ont affecté la digue nord lors d'une tempête d'avril 2016, le SIPA a recherché la responsabilité de la société Safège en sa qualité de maitre d'œuvre, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs.
En ce qui concerne le caractère décennal des désordres :
8. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il apparaît, soit que les désordres ne lui sont en aucune manière imputables, soit que ces désordres étaient apparents lors de la réception des travaux.
9. D'une part, la garantie décennale est une responsabilité légale à laquelle les parties n'ont pu déroger par voie contractuelle. Il s'ensuit que la société Safège ne peut utilement faire valoir que le SIPA aurait contractuellement accepté une dégradation accidentelle de l'ouvrage dans le délai d'épreuve.
10. D'autre part, il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise judiciaire de M. A... du 14 mars 2020 intégrant les conclusions du sapiteur du 19 septembre 2019, que les désordres en litige concernent seulement l'extrémité de la digue nord, soit l'ouvrage d'enrochements d'une longueur de 50 mètres linéaires créé à la suite des tempêtes de janvier 2014. Au vu des photographies du constat d'huissier du 9 mai 2016 et du rapport d'expertise, ces désordres sont caractérisés par des décrochements des enrochements du talus et de la crète de la digue, qui se sont répandus dans la crique naturelle qu'elle forme jusqu'à l'éperon. Il résulte également de l'instruction que ces décrochements assez nombreux dépassent l'aléa admissible pour un tel type d'ouvrage et présentent un caractère substantiel qui manifeste le sous-dimensionnement de l'ouvrage et conduit à considérer que l'épaulement d'enrochements n'a pas rempli sa fonction de protection contre le courant. Par suite, contrairement à ce que soutient la société Safège, les désordres affectant cette zone de la digue nord ont rendu l'ouvrage impropre à sa destination et sont donc susceptibles d'engager sa responsabilité au titre de la garantie décennale des constructeurs.
En ce qui concerne la cause et l'imputabilité des désordres :
11. La garantie décennale est due par les constructeurs, en l'absence même de faute imputable à ces derniers, dès lors que les désordres peuvent être regardés comme leur étant imputables au titre des missions qui leur ont été confiées par le maitre de l'ouvrage dans le cadre de l'exécution des travaux litigieux.
12. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport de l'expert judiciaire, reprenant les conclusions du sapiteur, que les désordres proviennent, selon " l'explication la plus plausible " retenue par le sapiteur, de deux phénomènes non pris en compte par le maitre d'œuvre, à savoir, d'une part, " l'excitation d'un mode propre " du courant qui en accentue la force, et d'autre part, l'afflux de vagues provenant de la mer à l'arrière de la digue et érodant l'ouvrage par surverse, particulièrement au niveau du prolongement de la digue nord constitué de l'épaulement d'enrochements construit à la suite des tempêtes de janvier 2014. Ces travaux supplémentaires n'ont pas été précédés d'une étude préalable en vue d'en définir les caractéristiques au regard des contraintes auxquelles il était susceptible d'être exposé. Par suite, il y a lieu de considérer que les désordres ayant affecté cet ouvrage résultent d'un défaut de conception imputable à la société Safège.
13. En second lieu, s'il résulte de l'instruction que le SIPA a bien été informé par la société Safège, lors de la visite de garantie de parfait achèvement du 7 mai 2015, de l'obligation d'entretien régulier des ouvrages qui lui incombe par une note reprenant le fascicule relatif à la surveillance et l'entretien des ouvrages maritimes publié par le Centre d'études techniques maritimes et fluviales - service technique du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer -, le manquement du SIPA à son obligation d'entretien de l'ouvrage, à le supposer avéré, ne saurait être qualifié de faute exonératoire des dommages en litige dès lors que les désordres résultent exclusivement d'un défaut de conception de l'ouvrage. Il s'ensuit que le SIPA est fondé à soutenir que les premiers juges lui ont imputé à tort une faute exonératoire de la responsabilité de la société Safège.
En ce qui concerne la réparation des désordres :
14. Le maître d'ouvrage a droit à la réparation intégrale des préjudices qu'il a subis lorsque la responsabilité décennale du constructeur est engagée, sans que l'indemnisation qui lui est allouée à ce titre puisse dépasser le montant des travaux strictement nécessaires pour rendre l'ouvrage conforme à sa destination en usant des procédés de remise en état les moins onéreux possible.
15. Si les travaux de reprise nécessitent la réalisation de prestations qui n'étaient pas prévues par le marché initial et qui apportent à l'ouvrage une plus-value, celle-ci doit être déduite du montant de l'indemnisation due au maître d'ouvrage, même si la réalisation de ces prestations est le seul moyen de remédier aux désordres. Toutefois, dans le cas où des travaux sont nécessaires pour rendre un ouvrage conforme à sa destination, il n'y a lieu d'opérer un abattement sur les indemnités mises à la charge des entrepreneurs responsables des désordres auxquels lesdits travaux doivent mettre fin que si ceux-ci ont apporté à l'ouvrage une plus-value par rapport à la valeur des ouvrages et installations prévues au contrat. Dans le cas où le montant d'un marché serait inférieur à son coût réel de réalisation et que les entrepreneurs n'ont pas exécuté le marché conformément à ses stipulations, les travaux nécessaires pour rendre l'ouvrage conforme à ses caractéristiques contractuelles ne peuvent être regardés comme lui conférant une plus-value dont bénéficierait le maitre d'ouvrage.
16. Comme il a été dit, les dommages affectant la digue nord étant imputables à un défaut de conception, les travaux de reprises ne peuvent consister en la simple remise en état de l'ouvrage, laquelle ne suffirait pas à rendre l'ouvrage conforme à sa destination et à garantir le maitre de l'ouvrage contre le renouvellement des désordres. L'expert a évalué à 246 606 euros TTC le coût de réfection de la portion de la digue nord selon des modalités répondant aux contraintes du lieu d'implantation. Dès lors que ces travaux de reprise, qui consistent à remplacer la portion d'enrochements par une digue avec une structure de pieux en bois, sont nécessaires pour rendre l'ouvrage conforme à sa destination et n'excèdent pas l'objet du marché, la société Safège n'est pas fondée à soutenir qu'ils seraient à l'origine d'une amélioration de l'ouvrage devant donner lieu à un abattement sur l'indemnité due au maitre de l'ouvrage. Par suite, il y a lieu de fixer à 246 606 euros TTC le montant de l'indemnité à laquelle peut prétendre le SIPA en réparation des désordres ayant affecté la digue nord du courant de Soustons.
17. Il résulte de tout ce qui précède que l'appel incident de la société Safège doit être rejeté et que le SIPA est fondé à obtenir une indemnisation d'un montant de 246 606 euros TTC et, par suite, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a limité le montant de l'indemnité allouée à la somme de 23 040 euros TTC.
En ce qui concerne l'application de l'indice du coût de la construction :
18. L'évaluation des dommages subis par le SIPA doit être faite à la date à laquelle, leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, il pouvait procéder aux travaux destinés à y remédier, soit, au plus tard, à la date à laquelle l'expert désigné par le tribunal administratif a déposé son rapport. Si le SIPA demande que l'indemnité qui lui est accordée en réparation des désordres soit indexée sur l'indice BT01 du coût de la construction, il n'établit pas avoir été dans l'impossibilité financière et technique de réaliser les travaux de reprise des désordres dès la date de dépôt du rapport d'expertise. Par suite, la demande d'indexation présentée par le syndicat intercommunal ne peut être accueillie.
Sur les frais d'expertise :
19. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 12 à 17, il y a lieu d'infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 23 737, 74 euros, à parts égales à la charge du SIPA et de la société Safège, et de mettre ses frais à la charge exclusive de la société Safège.
Sur les frais liés au litige :
20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Safège une somme de 1 500 euros à verser au SIPA sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat requérant, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande au même titre la société Safège.
DECIDE :
Article 1er : L'indemnité de 23 040 euros toutes taxes comprises que la société Safège a été condamnée à verser au syndicat intercommunal de Port d'Albret en réparation du désordre ayant affecté la digue nord du courant de Soustons est portée à 246 606 euros toutes taxes comprises.
Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 23 737, 74 euros, sont mis à la charge définitive de la société Safège.
Article 3 : Le jugement n° 2002549 du 23 février 2023 du tribunal administratif de Pau est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : La société Safège versera au syndicat intercommunal de Port d'Albret une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat intercommunal de Port d'Albret et à la société par actions simplifiée Safège.
Délibéré après l'audience du 18 mars 2025 à laquelle siégeaient :
M. Laurent Pouget, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
Mme Valérie Réaut, première conseillère
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2025.
La rapporteure,
Valérie Réaut
Le président,
Laurent Pouget Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne à la préfète des Landes en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX01096