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13/03/2025 | FRANCE | N°24BX01880

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 13 mars 2025, 24BX01880


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.



Par un jugement n° 2400547 du 3 juillet 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une re

quête enregistrée le 25 juillet 2024, Mme B..., représentée par

Me Chretien, demande à la cour :



1°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2400547 du 3 juillet 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 juillet 2024, Mme B..., représentée par

Me Chretien, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des articles L. 425-9, L. 423-23 ou L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à défaut, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer dans un délai de huit jours une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de

1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- l'arrêté méconnait les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 janvier 2025, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'il confirme les termes de ses mémoires transmis en première instance.

Par une décision n° 2024/002158 du 13 août 2024, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux a admis Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Béatrice Molina-Andreo a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante marocaine née le 16 février 1984, déclare être entrée en France, via l'Italie, en 2009. Après avoir fait l'objet d'un premier refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français par arrêté du préfet de la Gironde du 1er juin 2015, qu'elle n'a pas exécutée, Mme B... a sollicité le 10 octobre 2019 la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Elle a bénéficié d'un titre sur ce fondement, deux fois renouvelé, du 25 mars 2020 au 3 mai 2023. Le 18 avril 2023, Mme B... a demandé le renouvellement de son titre de séjour. Après avoir saisi, pour avis, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), le préfet de la Gironde, par arrêté du 19 décembre 2023, a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par la présente requête, Mme B... relève appel du jugement du 3 juillet 2024 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ".

3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi allant dans le sens de ses conclusions. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

4. Il ressort des pièces du dossier que par un avis du 26 juillet 2023, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié.

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., qui a levé le secret médical, souffre d'une pathologie psychiatrique nécessitant un traitement par diazepam, lithium carbonate, acamprosate calcique, naltrexone chlorydrate et alimenazine. Si Mme B... soutient que sa pathologie a justifié la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade du

25 mars 2020 au 3 mai 2023, elle n'établit, ni même n'allègue, que les médicaments composant son traitement ne seraient pas disponibles à la date de l'arrêté attaqué, à laquelle s'apprécie sa légalité, dans son pays d'origine, ni même qu'il n'existerait pas d'autres traitements équivalents pour la prise en charge de sa pathologie. Dans ces conditions, et quand bien même les membres de sa famille résidant en France lui apporteraient un soutien moral, le préfet de la Gironde, en rejetant la demande de titre de séjour dont il était saisi, après avoir tenu compte de l'avis de l'OFII selon lequel Mme B... peut effectivement accéder à un traitement approprié au Maroc, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Mme B... se prévaut de sa présence en France depuis 2009. Toutefois, à supposer même que les quelques pièces produites pour chacune des années en cause suffisent à établir une résidence habituelle en France de la requérante depuis 2009, il est constant que celle-ci a déjà fait l'objet d'une première mesure d'éloignement le 1er juin 2015 qu'elle n'a pas exécutée, qu'elle n'a sollicité la régularisation de sa situation administrative qu'en 2019 et qu'en quatorze ans de durée alléguée de présence en France, elle n'a bénéficié d'un titre de séjour qu'entre le

25 mars 2020 et le 3 mai 2023, laquelle autorisation temporaire à séjourner sur le territoire français en raison de son état de santé ne lui a en tout état de cause pas donné vocation à y demeurer durablement. En dehors de sa mère et de son frère, qui sont titulaires de cartes de résident valables dix ans, Mme B..., qui est célibataire et sans charge de famille, ne justifie d'aucune autre attache sur le territoire national, ni d'aucune intégration particulière. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est établi ni que la présence de sa famille résidant en France à ses côtés serait indispensable eu égard à son état de santé, ni qu'elle serait dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans, l'arrêté contesté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de la Gironde n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'emportent l'arrêté en litige sur la situation personnelle de l'intéressée.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en annulation de l'arrêté préfectoral du 19 décembre 2023. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 20 février 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 mars 2025.

La rapporteure,

Béatrice Molina-AndréoLa présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Stéphanie Larrue

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX01880


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24BX01880
Date de la décision : 13/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Béatrice MOLINA-ANDREO
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : CHRETIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-13;24bx01880 ?
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