Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Gold Shamz a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'une part, d'annuler l'acte de l'office national des forêt (ONF) Guyane du 26 mars 2021, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre cette décision le
19 mai 2021, " l'avis " du ministre de l'agriculture et de l'alimentation du 11 mars 2021 et la décision du 5 mai 2021 par laquelle le préfet de la Guyane a arrêté l'instruction de demandes d'autorisation d'exploiter portant sur un projet d'extraction de ressources aurifères " Crique Galloni 1 et 2 " sur le territoire de la commune de Saint-Laurent du Maroni et d'autre part, de prononcer la régularisation de l'autorisation environnementale attaquée en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.
Par un jugement n° 2100933 du 1er décembre 2022, le tribunal administratif de La Guyane a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er mars 2023, la société Gold Shamz représentée par Me Semonin, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guyane du 1er décembre 2022;
2°) d'annuler l'acte de l'Office national des forêt (ONF) Guyane du 26 mars 2021, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre cette décision le 19 mai 2021, " l'avis " du ministre de l'agriculture et de l'alimentation du 11 mars 2021 et la décision du 5 mai 2021 par laquelle le préfet de la Guyane a arrêté l'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter portant sur un projet d'extraction de ressources aurifères " Crique Galloni 1 et 2 ".
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que d'une part, il ne contient pas l'analyse de l'ensemble des observations de la requérante du 24 octobre 2022 répondant aux moyens susceptibles d'être relevés d'office par le tribunal et en ce que d'autre part, les observations présentées sur un tel moyen n'ont pas été communiquées aux parties et, si des observations ont été déposées par les autres parties, elles n'ont également pas été communiquées ;
- la lettre de l'ONF du 26 mars 2021 ne constitue pas, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, une simple mesure d'information ne présentant pas le caractère d'un acte susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; en effet, la décision du préfet portant arrêt de l'instruction est fondée sur ce refus de l'ONF, ensemble l'avis du ministre de l'agriculture et de l'alimentation du 11 mars 2021 ; or, la lettre de l'ONF et l'avis du ministre de l'agriculture et de l'alimentation sont interdépendants en ce que l'ONF se dit être compétent pour donner son accord, que l'accord du propriétaire ou du gestionnaire conditionne l'instruction de la demande d'autorisation d'exploitation présentée par la société requérante et que l'ONF avait donné un accord préalable sous condition de l'avis favorable du ministre de l'agriculture et de l'alimentation ; en outre, le préfet serait, selon le tribunal, en situation de compétence liée par cet avis ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que les moyens soulevés à l'encontre de la décision du préfet de la Guyane du 5 mai 2021 ne sauraient être utilement invoqués parce que le dossier de demande d'autorisation d'exploitation ne comportait pas l'accord préalable du propriétaire ; si en application de l'article 5 du décret n° 2001-204, le préfet " se trouvait tenu d'arrêter l'instruction de la demande ", il appartenait au juge de vérifier la présence de l'élément qui détermine l'existence de cette compétence liée, à savoir le refus d'accord du propriétaire et les raisons justifiant cette décision, ce d'autant plus qu'elle émane d'organismes d'État à savoir l'ONF et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation ; si le préfet se trouve en situation de compétence liée dans le cas d'absence de pièce démontrant l'accord du propriétaire, et après avoir mis le pétitionnaire en mesure de produire ledit accord, tel n'est pas le cas lorsqu'il ne s'agit pas d'une absence de pièce mais d'un refus d'accord de l'ONF et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation pour des raisons environnementales ;
- les " avis " de l'ONF et du ministre de l'agriculture sont entachés d'un défaut de motivation dès lors que l'article L. 211-2 3° et 7° du code des relations entre le public et l'administration oblige à motiver les décisions qui subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives et les décisions qui refusent une autorisation ; la décision du préfet du 5 mai 2021 n'est pas plus étayée, car elle s'appuie simplement sur le courrier de refus de l'ONF pour déclarer que le dossier de demande d'autorisation d'exploiter serait incomplet ;
- dès lors que la demande d'autorisation d'exploitation sollicitée est localisée aux abords de la crique Galloni au sein d'une forêt domaniale qui relève du domaine privé de l'Etat de sorte que seul l'accord du propriétaire devait être obtenu et joint à la demande et non l'accord du gestionnaire, l'ONF ne pouvait pas compétemment délivrer un accord le 7 décembre 2020 à la condition suspensive que le ministre de l'agriculture saisi par ses services rende un avis favorable sur la demande d'autorisation d'occupation du domaine forestier ; la procédure de demande d'autorisation d'exploitation et la décision du préfet du 5 mai 2021 sont par conséquent irrégulières ; en outre, quand bien même l'avis de l'ONF aurait été nécessaire, un tel avis ne peut qu'être considéré comme partial car cet avis de l'ONF se fonde uniquement sur la superposition de la zone de l'autorisation d'exploiter avec une SPPGM ; or, c'est l'ONF lui-même qui a créé cette SPPGM ;
- la décision de retrait de l'accord préalable d'occupation temporaire du domaine forestier de l'ONF du 26 mars 2021, ensemble l'avis défavorable du ministre de l'agriculture du 11 mars 2021, contreviennent également aux dispositions contenues à l'article 5 du décret n° 2001-204 ; en effet, l'ONF semble s'être appuyé implicitement sur un jugement rendu par le tribunal administratif de Cayenne le 12 décembre 2019 pour obliger les opérateurs miniers souhaitant obtenir une autorisation d'exploiter à solliciter de la part de l'ONF un accord écrit au sens de l'article 5 du décret n°2001-204 alors que l'ONF avait déjà donné son accord préalable par une décision du 7 décembre 2020, postérieurement au jugement précédemment cité ;
- le ministre de l'agriculture n'avait pas compétence pour donner un accord préalable à l'autorisation d'exploiter car s'il ressort de l'article 5 du décret n°2001-204 du 6 mars 2001 que l'opérateur minier doit joindre à son dossier de demande d'autorisation l'accord écrit du propriétaire lorsque son projet s'implante sur un domaine forestier privé, toutefois les SPPGM constituent des cas particuliers, pour lesquels l'accord préalable du ministre n'est obligatoire que lorsque l'acte est de nature à compromettre les objectifs fixés dans le document d'aménagement de la forêt concernée ; or, en l'espèce, il ressort du SDOM qu'il consacre la possibilité d'exercer une activité minière dans le périmètre d'une SPPGM ; l'instruction technique DGPE/SDFCB/2016-414 du 18/05/2016 va dans le même sens ; un tel avis n'est requis que lorsque l'autorisation sollicitée est de nature à compromettre la réalisation des objectifs fixés dans le document d'aménagement de la forêt concernée ; le jugement est ainsi entaché d'une erreur de droit et ce d'autant qu'il a appliqué les dispositions du code forestier alors même que, conformément à ce qui est précisé dans l'instruction technique DGPE/SDFCB/2016-414 du 18/05/2016, l'accord du ministre n'est pas requis lorsque l'autorisation est soumise aux dispositions spéciales du code minier ;
- l'État français, par le biais de son représentant en Guyane en la personne du préfet a fait preuve d'un défaut manifeste d'impartialité dans sa décision d'arrêt de l'instruction du 5 mai 2021 s'agissant de la demande d'autorisation d'exploiter ;
- la décision d'arrêt de l'instruction du 5 mai 2021 viole manifestement les dispositions contenues à l'article 5 du décret n°2001-204 et est, à cet égard, entachée d'une erreur de droit ;
- c'est par erreur manifeste d'appréciation que la décision du préfet de la Guyane du 5 mai 2021, la décision de l'ONF du 26 mars 2021 et l'avis défavorable du MAA du 11 mars 2021 estiment que la superposition du périmètre d'une demande d'AEX avec une SPPGM n'entraîne pas l'interdiction de toute exploitation minière sur cette série de protection spécifique au regard des prescriptions contenues dans le SDOM et du programme régional de la forêt et du bois (PRFB) et des arrêtés et documents d'aménagement de trois forêts domaniales cités dans le courrier du ministre de l'agriculture du 11 mars 2021 ;
- la décision du préfet du 5 mai 2021 est entachée d'un détournement de pouvoir ; elle s'inscrit dans un contexte de tension pour l'orpaillage, notamment avec la médiatisation du projet " Montagne d'or " et l'opposition citoyenne à ce projet ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que c'est à juste titre que le tribunal a rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre la lettre du 26 mars 2021 et qu'aucun des moyens de la requête dirigés contre les autres décisions n'est opérant ou fondé.
Par un mémoire, enregistré le 20 novembre 2023, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que c'est à juste titre que le tribunal a rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre la lettre du 26 mars 2021 et qu'aucun des moyens de la requête dirigés contre les autres décisions n'est opérant ou fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code forestier ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code minier ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret n° 2001-204 du 6 mars 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Ellie, rapporteur public,
- les observations de Me Semonin représentant la société Gold Shamz.
Considérant ce qui suit :
1. Le 30 mars 2021, la société Gold Shamz, exploitante minière, a déposé auprès du préfet de la Guyane deux demandes d'autorisation d'exploitation et portant sur le secteur de la crique Galloni, située au sein de la forêt domaniale de Sparouine. Cette société a également sollicité auprès de l'office national des forêts (ONF), le 16 mars 2020, une demande d'occupation du domaine forestier au sein duquel se trouve la crique Galloni. Par courrier du 7 décembre 2020, l'ONF a donné son accord sur cette demande, sous la condition suspensive que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation donne un avis favorable sur le projet. Le 11 mars 2021, le ministre chargé des forêts s'est prononcé défavorablement sur la demande d'autorisation d'occupation du domaine forestier de l'Etat. Par un courrier du 26 mars 2021, l'ONF a notamment informé la société Gold Shamz de l'avis défavorable du ministre. Le 19 mai 2021, la société Gold Shamz a formé un recours gracieux contre cet acte de l'ONF. Par un courrier du 5 mai 2021, le préfet de la Guyane a notifié à la société pétitionnaire l'arrêt de l'instruction de sa demande d'autorisation d'exploiter pour le projet d'extraction de ressources aurifères dans le secteur de la crique Galloni. La société Gold Shamz relève appel du jugement du 1er décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'agriculture et de l'alimentation du 11 mars 2021, ensemble " l'avis " de l'ONF du 26 mars 2021, la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre cette décision le 19 mai 2021 et la décision du 5 mai 2021 par laquelle le préfet de la Guyane a arrêté l'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter portant sur le projet d'extraction de ressources aurifères " Galloni 1 et 2 " situé dans la crique Galloni sur le territoire de la commune de Saint-Laurent du Maroni.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué ".
3. Par lettre du 11 octobre 2022, le tribunal administratif de la Guyane a informé les parties de ce qu'il était susceptible de relever d'office les moyens suivants " situation de compétence liée du préfet de la Guyane impliquant l'arrêt de l'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter en l'absence d'accord du propriétaire du domaine ; irrecevabilité des conclusions dirigées contre la lettre de l'ONF du 26 mars 2021 en tant qu'elle est insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, ne présentant aucun caractère décisoire. ". En réponse à cette lettre, des observations présentées pour le compte de la société Gold Shamz ont été enregistrées au greffe du tribunal le 24 octobre 2022. Ces observations de la société Gold Shamz ont été communiquées aux parties par une lettre du tribunal du 25 octobre 2022 et aucune autre observation n'a été déposée par les autres parties. Il suit de là que le moyen tiré de ce que le jugement est irrégulier en ce que les observations présentées par la société Gold Shamz sur le moyen relevé par la cour n'ont pas été communiquées aux parties et en ce que si des observations ont été déposées par les autres parties, elles n'ont pas été communiquées, ne peut qu'être écarté.
4. En second lieu aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative " La décision mentionne que l'audience a été publique [...] Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application [...] ".
5. En indiquant dans le jugement attaqué que " les moyens dirigés contre l'avis de l'ONF et l'avis du ministre de l'agriculture et de l'alimentation sont recevables dès lors qu'il existe une connexité forte entre ces décisions et la décision du préfet de la Guyane, contestée dans la présente instance ", le tribunal a analysé les observations présentées par la société Gold Shamz en réponse au moyen d'ordre public. Au demeurant, lorsqu'une partie se borne à produire des observations sur des moyens relevés d'office, s'il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant l'audience publique et de les viser dans sa décision, il n'est pas tenu de les analyser. Il suit de là que le moyen tiré de ce que le jugement est irrégulier en ce qu'il ne contient pas l'analyse de l'ensemble des observations de la société Gold Shamz du 24 octobre 2022 doit être écarté.
Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre " l'avis " de l'office national des forêts du 26 mars 2021, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre celui-ci :
6. Au soutien de sa demande introduite devant le tribunal administratif de la Guyane, la société Gold Shamz demandait d'annuler " l'avis " de l'ONF Guyane du 26 mars 2021 contenu dans un courrier, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre cette décision le 19 mai 2021. Dans cette même lettre du 26 mars 2021, l'ONF informait le gérant de la société Gold Shamz que le ministre avait rendu un avis défavorable à sa demande et joignait cet avis. Dans cette mesure, la lettre portée à la connaissance de la société Gold Shamz constitue un courrier d'information dont le caractère non décisoire excluait qu'elle puisse faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Dans cette lettre, l'office nationale des forêts informait également le gérant de la société Gold Shamz de ce que " l'instruction de sa demande ne pourra aboutir " à l'obtention des droits miniers. Dès lors que l'ONF n'est pas compétent pour décider de l'arrêt de l'instruction d'une demande tendant à la délivrance d'une autorisation d'exploiter une mine, celui-ci a nécessairement entendu, par cette formulation, porter à la connaissance de la société la circonstance qu'il refusait de lui délivrer une autorisation d'occupation du domaine forestier de l'Etat dans la mesure où la condition suspensive prévue à sa délivrance dans sa décision du 7 décembre 2020 et tenant à un accord du ministre de l'agriculture, en application des dispositions du 2ème alinéa de l'article D. 221-3 du code forestier puisque le projet est éventuellement de nature à compromettre la réalisation des objectifs fixés dans le document d'aménagement forestier, n'était pas remplie. Dans cette mesure, le courrier de l'ONF fait grief à la société requérante et c'est donc à tort que le tribunal administratif de la Guyane a estimé que les conclusions dirigées contre cette décision du 26 mars 2021 et contre la décision implicite de rejet de son recours gracieux n'étaient pas recevables. Son jugement doit, dans cette mesure, être annulé. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par la société requérante devant le tribunal administratif de la Guyane.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision du 11 mars 2021 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation en charge des forêts :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 (...) ".
8. Par sa décision du 11 mars 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, chargé des forêts, a refusé d'octroyer à la société Gold Shamz une autorisation d'occupation du domaine forestier de l'Etat. Cette décision indique que : " les arrêtés d'aménagement définissent des " séries " selon l'usage principal auquel la partie de forêt est destinée : (...) série de protection physique et générale des milieux et des paysages (SSPGM). Cette dernière vise à protéger les zones de captage d'eau potable, les têtes de bassins versants, les berges des principaux fleuves et les fortes pentes. Elle signifie qu'il existe un enjeu reconnu du point de vue de l'écologie et des paysages et la mention claire d'interdiction d'activité minière y figure dans les arrêtés des forêts domaniales Paul Isnard, Sparouine et Montagne de Fer. (...) Compte tenu des éléments du dossier transmis, des arrêtés d'aménagement pris sur les forêts domaniales concernées, et de l'impact négatif qu'entraînerait la délivrance d'une AEX sur la surface d'une SPPGM, de nature à compromettre l'objectif de protection inscrit dans le document d'aménagement, et au vu des avis validés par la direction générale de l'ONF, (...) les demandes d'AEX émanant de (...) Gold Shamz (...) doivent être rejetées ". Dans ces conditions, la décision du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, en charge des forêts, est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
9. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 2212-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Font (...) partie du domaine privé : / (...) 2° Les bois et forêts des personnes publiques relevant du régime forestier ". Aux termes de l'article L. 211-1 du code forestier : " I. - Relèvent du régime forestier, constitué des dispositions du présent livre, et sont administrés conformément à celui-ci : / 1° Les bois et forêts qui appartiennent à l'Etat, ou sur lesquels l'Etat a des droits de propriété indivis (...) ". Aux termes de l'article L. 221-1 du même code : " L'Office national des forêts est un établissement public national à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle de l'Etat ". Aux termes de l'article D. 221-3 de ce code applicable à l'espèce : " L'administration chargée des domaines établit et passe en la forme administrative, pour le compte de l'Office national des forêts, les actes, contrats et conventions constitutifs de droits réels sur les bois et forêts de l'Etat ou sur lesquels l'Etat a des droits de propriété indivis, dont l'Office assure la gestion et l'équipement conformément au second alinéa de l'article L. 221-2 (...) / Les autres actes, contrats et conventions ayant pour objet l'utilisation ou l'occupation des bois et forêts mentionnés au premier alinéa sont passés par l'Office national des forêts. Lorsque ces actes sont de nature à compromettre la réalisation des objectifs fixés dans le document d'aménagement de la forêt concernée, prévu à l'article L. 212-1, ou lorsque l'acte porte sur une durée égale ou supérieure à dix-huit ans, l'Office national des forêts recueille l'accord préalable du ministre chargé des forêts (...) ".
10. Il résulte des dispositions précitées que lorsque, comme en l'espèce, des actes impliquant l'occupation des bois et forêts appartenant au domaine privé de l'Etat, sont de nature à compromettre la réalisation des objectifs fixés dans le document d'aménagement de la forêt concernée, l'office national des forêts doit, avant de passer ces actes, recueillir l'accord préalable du ministre chargé des forêts.
11. En l'espèce, la forêt domaniale de Belizon, pour laquelle la société requérante a demandé une autorisation d'occupation, relève du domaine privé de l'Etat. Dès lors que l'office national des forêts représente l'État pour la gestion de son domaine forestier, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation était compétent, dans la mesure où l'autorisation domaniale sollicitée est de nature à compromettre la réalisation des objectifs fixés dans le document d'aménagement de la forêt concernée, pour donner son accord préalable. La circonstance que le schéma départemental d'orientation minière (SDOM) de la Guyane n'inclut pas dans les zones d'interdiction d'activité minières les espaces appartenant à une série de protection physique des milieux (SPPGM) n'est pas de nature à remettre en cause l'exigence de cet accord. Si la société Gold Shamz invoque, par ailleurs, l'instruction technique DGPE/SDFCB/2016-414 du 18 mai 2016 issue du ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentation et de la forêt pour soutenir que pour tous les titres miniers la compétence relèverait de la direction régionale des finances publiques (DRFIP) et que les autorisations seraient exemptées d'accord du ministère chargé des forêts, cette même instruction technique, à la supposer publiée, indique toutefois que : " les services du ministère de l'agriculture chargés de la forêt, par ailleurs, doivent être saisis et consultés sur les actes de nature à compromettre la réalisation des objectifs fixés dans le document d'aménagement de la forêt concernée, qui risquent d'impacter le plus la mise en valeur et la protection des forêts, de porter préjudice aux peuplements ou à l'utilisation des massifs (...) L'article L. 221-1 du code forestier énonce le principe de la tutelle du ministère chargé des forêts sur l'ONF. En ce qui concerne les actes ouvrant à des tiers des droits à l'occupation ou l'utilisation des forêts de l'Etat (...) l'ONF doit recueillir l'accord préalable du ministre chargé des forêts : / - lorsque ces actes sont de nature à compromettre la réalisation des objectifs fixés dans le document d'aménagement de la forêt concernée, prévu à l'article L. 212-1 (...). Dans tous les cas où cet accord doit être recueilli, le directeur général de l'ONF saisit le ministère chargé des forêts (...). L'accord du ministère chargé des forêts n'est pas nécessaire dans les cas de concessions résultant d'une opération déclarée d'utilité publique ou de concessions du droit d'exploiter des mines (...) en vertu d'acte pris par la puissance publique dans le cadre de la législation spéciale instituée à cet effet (code minier), qui relèvent d'obligations faites par la loi aux propriétaires (...) ". Ainsi, contrairement aux allégations de la société requérante, sa demande d'autorisation d'occuper du domaine forestier, au sein duquel se trouve la crique Galloni, en vue d'obtenir une autorisation d'exploiter les ressources aurifères n'est pas au nombre des exceptions pour lesquelles l'accord du ministre chargé des forêts n'est pas nécessaire. Dans ces conditions, il résulte de ce qui précède que la société Gold Shamz n'est pas fondée à soutenir que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, chargé des forêts, n'était pas compétent pour donner un accord préalable à l'autorisation d'exploiter sollicitée. Par suite, le moyen doit être écarté.
12. D'autre part, aux termes de l'article 5 du décret n° 2001-204 du 6 mars 2011 relatif aux autorisations d'exploitation de mines dans les départements d'outre-mer : " La demande d'autorisation d'exploitation est assortie d'un dossier (...) A ce dossier est joint, pour la zone considérée, l'accord écrit du propriétaire ou, pour les biens relevant du domaine public, du gestionnaire. / Cette demande est adressée au préfet (...) ".
13. Dès lors qu'en application des dispositions précitées l'accord écrit de l'Etat propriétaire est nécessaire à l'instruction des autorisations d'exploitation pour les biens autres que ceux relevant du domaine public, l'opérateur devait joindre à son dossier de demande l'accord de l'Etat-propriétaire sur la zone considérée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du décret n° 2001-204 du 6 mars 2011 doit être écarté.
14. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que les zones de captage d'eau potable, les têtes de bassins versants, les berges des principaux fleuves et les fortes pentes des forêts domaniales Paul Isnard, Sparaouine et Montagne de fer, concernées par la demande d'exploiter en cause, correspondent à des espaces appartenant à une série de protection physique des milieux (SPPGM) qui doivent être protégées. Compte tenu de cet enjeu écologique et de l'impact négatif qu'entraînerait la délivrance d'une autorisation d'exploitation se superposant à la surface d'une SPPGM, et quand bien même le SDOM, le programme régional de la forêt et du bois et les arrêtés d'aménagement des forêts de Paul Isnard, Sparaouine et Montagne de fer n'interdisent pas une exploitation aurifère sous contrainte dans le périmètre d'une SPPGM, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation en charge des forêts, par sa décision du 11 mars 2021 a refusé de délivrer à la société requérante l'autorisation nécessaire en ce qu'elle est nature à compromettre l'objectif de protection inscrit dans le document d'aménagement. Les arrêtés d'aménagement prévoient d'ailleurs que ces forêts sont affectées " prioritairement à la fonction de production ligneuse et à la fonction écologique " tout en assurant une fonction sociale et de production physique.
15. Il résulte de ce qui précède que la société Gold Shamz n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 11 mars 2021 par laquelle le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, en charge des forêts, a refusé de donner son accord préalable à l'autorisation d'exploitation.
En ce qui concerne la décision du 26 mars 2021 de l'office nationale des forêts refusant d'accorder une autorisation d'occupation domaniale, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre celle-ci :
16. En premier lieu, la décision du 26 mars 2021 qui rappelle au gérant de la société Gold Shamz qu'il a déposé une demande d'autorisation d'occupation du domaine forestier de l'Etat, que sa demande porte sur un terrain positionnée en zone 2 du SDOM sur un secteur avec contraintes au vu des conditions d'attribution de l'accord écrit du propriétaire préalable à une demande d'autorisation d'exploiter, que la demande se superpose à une série de protection physique et générale des milieux (SPPGM) définie dans le document d'aménagement du massif forestier de Sparaouine pour la période 2018-2042 qui a fait l'objet d'un arrêté du ministre de l'agriculture en date du 20 juillet 2019 qui identifie 3 séries dont une SPPGM couvrant 7 144 ha destinée à favoriser la continuité écologique du domaine forestier et assurer le lien fonctionnel entre les zones non concernées par l'exploitation forestière, que le périmètre objet de la demande étant en superposition avec une SPPGM et que le ministre de l'agriculture a été saisi conformément à l'alinéa 2 de l'article D 221-3 du code forestier mais que celui-ci n'a pas donné son accord en conséquence de quoi l'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter ne pourra pas aboutir, est, en tout état de cause, suffisamment motivée en droit et en fait.
17. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs, que ceux mentionnés au point 11 du présent arrêt, la société Gold Shamz n'est pas fondée à soutenir que l'ONF n'était pas compétent pour délivrer un accord le 7 décembre 2020 assorti d'une condition suspensive tenant à ce que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, saisi par ses services, rende un avis favorable sur le projet.
18. En troisième lieu, si au nombre des principes généraux du droit qui s'imposent à l'administration, figure le principe d'impartialité, il existe bien en l'espèce, une séparation organique entre, d'une part, la direction générale des territoires et de la mer (DGTM), service relevant de la préfecture de la Guyane en charge de l'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter et, d'autre part, l'ONF qui est un établissement public sous tutelle du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire chargé de donner son accord pour l'utilisation et l'occupation d'une zone de la forêt de Sparaouine dans le cadre de la demande d'autorisation d'exploiter mais aussi du ministre de l'agriculture et de l'alimentation en charge des forêts dont l'accord préalable est requis en application du deuxième alinéa de l'article D. 221-3 du code forestier. Il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la décision du 26 mars 2021 de l'ONF refusant d'accorder une autorisation d'occupation domaniale est intervenue en méconnaissance du principe d'impartialité. Par ailleurs, si la série de protection physique et générale des milieux (SPPGM) est définie dans un document d'aménagement du massif forestier de Sparaouine pour la période 2018-2042 qui a fait l'objet d'un arrêté du ministre de l'agriculture en date du 20 juillet 2019, le principe d'impartialité n'interdisait en tout état de cause pas à l'ONF d'y faire référence dans sa décision du 26 mars 2021.
19. En quatrième lieu, la requérante soutient que la décision est entachée d'une erreur d'appréciation car la condition suspensive tenant à l'accord du ministre en charge des forêts doit être regardée comme remplie dès lors que l'autorisation d'exploitation demandée n'est pas de nature à compromettre l'objectif de protection inscrit dans le document d'aménagement. Toutefois, pour les motifs exposés au point 11 du présent arrêt, le ministre a compétemment refusé de délivrer son accord. Par suite, le moyen doit être écarté.
20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, par les moyens soulevés, les conclusions dirigées contre la décision de l'office national des forêts du 26 mars 2021 et la décision de rejet du recours gracieux, doivent en tout état de cause être rejetées.
En ce qui concerne la décision du 5 mai 2021 du préfet de la Guyane :
21. Aux termes de l'article 5 du décret n° 2001-204 du 6 mars 2001 relatif aux autorisations d'exploitation de mines dans les départements d'outre-mer " La demande d'autorisation d'exploitation comprend les éléments suivants : [...] b) Pour la zone considérée, l'accord écrit du propriétaire ou, pour les biens relevant du domaine public, du gestionnaire [...] ".
22. Il résulte de ce qui précède que l'office national des forêts, compétent pour délivrer l'accord concernant l'utilisation ou l'occupation des bois et forêts de Guyane en sa qualité de gestionnaire de la forêt domaniale, a refusé le 26 mars 2021, de délivrer celui-ci en raison d'un désaccord du ministre chargé des forêts intervenu régulièrement en application de l'article D. 221-3 du code forestier, le 11 mars 2021. En l'absence d'accord de ce gestionnaire, l'autorisation d'exploiter ne pouvait être instruite et le préfet était donc tenu d'arrêter l'instruction du dossier par sa décision du 5 mai 2021. Par suite, les moyens tirés du défaut de motivation de cette décision, de l'erreur de droit, du défaut d'impartialité du représentant de l'Etat en Guyane, de la méconnaissance de l'article 5 du décret n°2001-204, de l'erreur d'appréciation et du détournement de pouvoir ne sauraient être utilement invoqués contre cette décision. Le moyen soulevé, par voie d'exception de l'illégalité des décisions des 11 et 26 mars 2021, doit, pour sa part, être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 7 à 15 du présent arrêt.
23. Il résulte de tout ce qui précède que d'une part, la société Gold Shamz n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 11 mars 2021 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et de la décision du 5 mai 2021 du préfet de la Guyane et que d'autre part, les conclusions de la société Gold Shamz tendant à l'annulation de la décision de l'Office national des forêt Guyane du 26 mars 2021, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cette décision le 19 mai 2021, doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
24. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la société Gold Shamz, d'une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2100933 du 1er décembre 2022 du tribunal administratif de la Guyane est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions relatives à la décision du 26 mars 2021 de l'office nationale des forêts, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux.
Article 2 : La demande de la société Gold Shamz tendant à l'annulation de la décision du 26 mars 2021 de l'office nationale des forêts et de la décision implicite de rejet du recours gracieux, ainsi que le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Gold Shamz, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Fabienne Zuccarello, présidente.
M. Nicolas Normand, président-assesseur,
Mme Carine Farault, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 février 2025.
Le rapporteur,
Nicolas A...
La présidente,
Fabienne Zuccarello La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 23BX00593