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13/02/2025 | FRANCE | N°24BX01985

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 13 février 2025, 24BX01985


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :





Mme A... C... doit être regardée comme ayant demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 27 janvier 2023, intervenue en cours d'instance, par laquelle la préfète de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ".



Par un jugement n° 2201564 du 12 juillet 2024, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :
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Par une requête enregistrée le 7 août 2024, Mme C..., représentée par Me Tierney-Hancock, doit être regardée co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... doit être regardée comme ayant demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 27 janvier 2023, intervenue en cours d'instance, par laquelle la préfète de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ".

Par un jugement n° 2201564 du 12 juillet 2024, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2024, Mme C..., représentée par Me Tierney-Hancock, doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges ;

2°) d'annuler la décision du 27 janvier 2023 par laquelle la préfète de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui accorder un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'une atteinte disproportionnée à son droit à la vie privée et familiale en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du préambule de la Constitution de 1946, de l'article 55 de la Constitution et de l'article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 ;

- elle méconnait les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2024, le préfet de Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Béatrice Molina-Andréo a été entendu au cours de l'audience publique :

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., ressortissante guinéenne née le 1er janvier 1995, est entrée irrégulièrement en France le 31 juillet 2018. Après le rejet de sa demande d'asile par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 janvier 2020, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 19 juin 2020, Mme C... a fait l'objet, par arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 26 août 2020, d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, assortie d'une interdiction de retour sur le territoire pour une durée d'un an, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Limoges du 22 octobre 2020, puis par une ordonnance de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 24 juillet 2021. Mme C... n'a pas exécuté cette mesure d'éloignement et a sollicité le 15 mars 2022 la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Par une décision du 27 janvier 2023, qui s'est substituée à la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration, la préfète de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer le de séjour sollicité. Par jugement du 12 juillet 2024, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande à fin d'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

3. Mme C... soutient qu'elle vit, depuis 2018, en concubinage avec un compatriote, M. B... C..., titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2032 et avec lequel elle a eu deux enfants, nés en France les 11 décembre 2021 et 28 novembre 2023. Toutefois, et alors que la requérante ne peut utilement se prévaloir de la naissance de son second enfant qui est postérieure à la date de la décision contestée à laquelle s'apprécie sa légalité, il ressort d'une enquête administrative des services des renseignements territoriaux ayant procédé à une visite inopinée au domicile déclaré du couple le 6 juin 2022 que la réalité de la communauté de vie n'a pas pu être vérifiée, le concubin de la requérante n'étant pas sur place, cette dernière n'ayant aucune information sur ses activités et les quelques effets personnels au domicile de celui-ci ne permettant pas d'affirmer qu'il aurait résidé à cette adresse. Mme C... n'apporte pas suffisamment d'éléments permettant d'infirmer les conclusions de cette enquête en se bornant à produire des quittances d'électricité et d'avis d'imposition à son seul nom, la copie du titre de séjour de M. C... délivré le 14 avril 2022 et l'acte de naissance de l'enfant né le 11 décembre 2021. Par ailleurs, si Mme C... soutient qu'ils élèvent ensemble leur enfant, elle ne produit aucune pièce qui serait de nature à établir une quelconque contribution du père de l'enfant à l'entretien et à l'éducation de celui-ci. Dans ces conditions, et alors que Mme C... s'est maintenue irrégulièrement en France en dépit d'une mesure d'éloignement prononcée à son encontre le 26 août 2020, qu'elle ne fait état d'aucune intégration sociale ou professionnelle particulière sur le territoire national et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales fortes en Guinée où réside son fils ainé né le 8 janvier 2011, la décision attaquée portant refus de séjour n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, elle n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'a méconnu ni l'article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, ni les dispositions du préambule de la Constitution de 1946 qui garantissent le droit à une vie privée et familiale normale.

4. En second lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dispositions que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

5. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent est inopérant à l'encontre d'une décision portant refus de séjour qui, par elle-même, n'implique pas le retour de la requérante, ni celui de son concubin déclaré ou de leurs enfants, en Guinée. Dès lors, ce moyen ne peut qu'être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025.

La rapporteure,

Béatrice Molina-Andréo

La présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX01985


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24BX01985
Date de la décision : 13/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Béatrice MOLINA-ANDREO
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : TIERNEY HANCOCK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-13;24bx01985 ?
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