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04/02/2025 | FRANCE | N°24BX01415

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 04 février 2025, 24BX01415


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme I... G... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2022 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.



Par un jugement n° 2300094 du 25 avril 2024, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour administrative d'appel :
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Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 juin et 4 octobre 2024, Mme G... B... demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I... G... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2022 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2300094 du 25 avril 2024, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 juin et 4 octobre 2024, Mme G... B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guyane du 25 avril 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2022 du préfet de la Guyane ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de trois mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au bénéfice de son conseil, une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de refus de séjour ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le jugement comporte une contradiction dans ses motifs ;

- le tribunal n'a pas statué sur ses conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- l'arrêté est entaché d'incompétence de sa signataire ;

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de la Guyane, qui n'a pas produit d'observations.

Par une ordonnance du 25 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 14 novembre 2024.

Par un courrier du 3 octobre 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office.

Mme G... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G... B..., ressortissante haïtienne née le 1er juillet 2002, est entrée en France en janvier 2018. Par un arrêté du 17 novembre 2022, le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme G... B... relève appel du jugement du 25 avril 2024 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu, le tribunal a statué tant sur les conclusions de la requérante dirigées contre le refus de titre de séjour que sur celles dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français. Le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer sur une partie des conclusions de la demande de première instance doit donc être écarté.

3. En deuxième lieu, le tribunal, qui a indiqué que la demande de titre de séjour de Mme G... B... avait été présentée sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puis a considéré que la décision de refus de séjour ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale, a ainsi entendu écarter le moyen tiré de la méconnaissance desdites dispositions. L'appelante n'est par suite pas fondée à soutenir que le tribunal n'aurait pas répondu à ce moyen.

4. En troisième lieu, Mme G... B... n'a pas soulevé, devant le tribunal, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du refus de titre de séjour. La circonstance que le tribunal n'ait pas statué sur un tel moyen, qui ne se soulève pas d'office, n'est ainsi pas susceptible d'affecter la régularité du jugement attaqué.

5. En dernier lieu, si Mme G... B... soutient que le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs, un tel moyen, qui se rattache au bien-fondé du jugement, est sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

6. Par un arrêté 8 avril 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Guyane du même jour, le préfet de la Guyane a donné délégation à M. D... E..., directeur général de la sécurité, de la réglementation et des contrôles, à l'effet de signer les actes et décisions dans toutes les matières relevant de l'immigration et de la citoyenneté. L'article 4 de cet arrêté vise plus particulièrement les actes pris en matière d'accueil au séjour des étrangers, et notamment, les décisions de refus de séjour et les obligations de quitter le territoire français. L'article 14 de cet arrêté autorise M. E... à subdéléguer sa signature aux agents placés sous son autorité. Par un arrêté du 12 avril 2022, également publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Guyane du même jour, M. E... a donné délégation à M. C... F..., directeur général adjoint de la sécurité, de la réglementation et des contrôles et directeur de l'immigration et de la citoyenneté à l'effet de signer les actes relatifs à l'activité de la direction de l'immigration et de la citoyenneté tels que définis aux articles 4, 5 et 10 de l'arrêté du 8 avril 2022. En cas d'absence ou d'empêchement de M. C... F..., l'article 2 de cet arrêté donne délégation, notamment, à Mme A... H..., cheffe du bureau de l'éloignement et du contentieux, en matière de refus de séjour, d'éloignement et de contentieux. Il résulte de ces délégations et subdélégations que Mme A... H..., signataire de l'arrêté contesté, était compétente pour signer les décisions de refus de séjour et d'éloignement en litige. Le moyen tiré de l'incompétence de la signataire dudit arrêté doit dès lors être écarté.

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

7. En premier lieu, la décision de refus de séjour comporte les éléments de fait et de droit qui la fondent. Elle est, par suite suffisamment motivée.

8. En second lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

9. Mme G... B... est entrée en Guyane à l'âge de 15 ans pour vivre auprès de ses grands-parents, qui sont en situation régulière sur le territoire français. Elle a été scolarisée à compter de son arrivée en France, a obtenu en 2022 un baccalauréat général et s'est inscrite au titre de l'année 2022-2023 en première année de licence " sciences et vie de la terre ". Elle s'est ensuite inscrite, au titre de l'année 2023-2024, à un BTS " Tourisme " en métropole et réside depuis lors chez sa sœur, qui bénéficie d'une carte de séjour pluriannuelle. Toutefois, à la date de l'arrêté querellé, la requérante vivait en France depuis moins de quatre ans. De plus, l'intéressée, célibataire et sans charge de famille, ne conteste pas disposer d'attaches familiales dans son pays d'origine où vivent, a minima, ses parents, et ne justifie pas davantage d'une insertion particulière au sein de la société française. Mme G... B... n'est, dans ces conditions, pas fondée à soutenir que le préfet, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, si l'obligation de quitter le territoire constitue une mesure de police qui, comme telle, doit être motivée, cette motivation se confond avec celle du refus du titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas de mention spécifique, dès lors que, comme c'est le cas en l'espèce, ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives permettant de l'assortir d'une mesure d'éloignement ont été rappelées. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ne peut être accueilli.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

12. Eu égard à la situation familiale et personnelle de Mme G... B... telle que décrite ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent doit être écarté.

13. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de Mme G... B... doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme G... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guyane du 17 novembre 2022. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme G... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme I... G... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Vincent Bureau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2025.

La rapporteure,

Marie-Pierre Beuve-Dupuy

Le président,

Laurent Pouget Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX01415


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX01415
Date de la décision : 04/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: M. DUFOUR
Avocat(s) : LAPORTE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-04;24bx01415 ?
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