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08/01/2025 | FRANCE | N°24BX01352

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 08 janvier 2025, 24BX01352


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 6 février 2024 par lequel le préfet de la Gironde l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de retour et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trois ans.



Par un jugement n° 2401004 et 2401005 du 12 février 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

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Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 juin 2024 et 24 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 6 février 2024 par lequel le préfet de la Gironde l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de retour et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2401004 et 2401005 du 12 février 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 juin 2024 et 24 septembre 2024, M. B..., représenté par Me Debril, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 12 février 2024 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 février 2024 par lequel le préfet de la Gironde l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trois ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de l'instruction de ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- le signataire de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne justifie pas de sa compétence ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision de refus de délai pour le départ volontaire :

- la décision de refus de départ volontaire méconnaît les articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision fixant le pays renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est illégale dès lors qu'il est titulaire d'un titre de séjour espagnol ;

Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français, est entachée d'incompétence de son auteur, n'est pas motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier ;

- elle méconnaît l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est arrivé en France en 2021, y réside avec sa famille, travaille en qualité de coiffeur et qu'il ne constitue pas une menace à l'ordre public ;

- elle est entachée d'un vice de procédure tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale en ce que le préfet s'est fondé sur des mises en causes révélées par la consultation du traitement des antécédents judiciaires pour estimer qu'il ne justifiait pas d'une intégration en France, sans procéder au préalable à la saisine des services du procureur de la République, pour demande d'information sur les suites judiciaires, le privant ainsi d'une garantie ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est illégale dès lors qu'il est titulaire d'un titre de séjour espagnol.

Par une décision du 11 avril 2024, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux a admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Clémentine Voillemot ;

- et les observations de Me Debril, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité algérienne, né le 6 mars 1993, déclare être entré en France en 2021. Par un arrêté du 6 février 2024, le préfet de la Gironde l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trois ans. M. B... relève appel du jugement du 12 février 2024 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de renvoi et interdiction du territoire français pour une durée de trois ans.

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, par un arrêté du 31 août 2023, régulièrement publié le jour même au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture, le préfet de la Gironde a donné délégation de signature à Mme C..., cheffe du bureau de la lutte contre l'immigration irrégulière, de l'ordre public et du contentieux, à l'effet de signer les décisions de la nature de celle en litige.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ". La décision en litige, qui vise les textes applicables et notamment les dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte les considérations de fait la fondant en précisant que M. B..., est entré irrégulièrement en France, que sa femme y réside également en situation irrégulière avec leurs deux enfants de 4 ans et 19 mois. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde a suffisamment motivé sa décision.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". M. B... ne conteste pas être entré irrégulièrement en France et s'y être maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour. Il est d'ailleurs constant qu'il n'a jamais demandé de titre de séjour en France et ne justifie pas remplir les conditions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour. Ainsi, il n'est pas établi que ces dispositions auraient été méconnues par la décision portant obligation de quitter le territoire français.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré irrégulièrement en France et a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 30 janvier 2022. Si B... fait valoir qu'il est marié et père de deux enfants, nés le 8 décembre 2019 et le 5 mai 2022, il est constant que son épouse est également en situation irrégulière et que ses deux filles sont en bas-âge, de sorte que la cellule familiale pourra se reconstituer en Algérie. En outre, si M. B... produit un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en qualité de coiffeur depuis le 1er juillet 2023 et des bulletins de paie jusqu'en décembre 2023, ces éléments ne suffisent pas à démontrer une réelle insertion dans la société française. Dans ces circonstances, en obligeant M. B... à quitter le territoire français, le préfet de la Gironde n'a pas porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale.

7. En cinquième lieu, aux termes des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

8. La fille aînée de M. B... est née le 8 décembre 2019 et était scolarisée en moyenne section à l'école maternelle à la date de la décision en litige et sa seconde fille est née le 5 mai 2022 et avait ainsi moins de deux ans. Compte-tenu de ce qui a été dit au point 6 et de la possibilité pour la cellule familiale de se reconstituer en Algérie, le préfet de la Gironde n'a pas méconnu les stipulations précitées en obligeant M. B... à quitter le territoire français.

9. En dernier lieu, pour les mêmes motifs qu'énoncés au point 6, le préfet de la Gironde n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

En ce qui concerne le refus d'accorder un délai de départ volontaire :

10. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 de ce même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ".

11. Pour estimer qu'il existait un risque que M. B... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français, le préfet s'est fondé, compte tenu des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé en France, sur les alinéas 1, 4, 5 et 8 de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si M. B... soutient qu'il n'existait pas de risque qu'il se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français en se prévalant d'une demande de titre de séjour déposée en Espagne le 4 décembre 2023, cet élément ne suffit pas à remettre en cause ce risque alors d'ailleurs qu'il a, lors de son audition du 5 février 2024, après avoir été interpellé pour conduite d'un véhicule sans permis et défaut d'assurance, déclaré souhaiter rester en France avec sa famille et qu'il contesterait une éventuelle nouvelle mesure d'éloignement qui serait prise à son encontre.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 9 que l'obligation de quitter le territoire français dont a fait l'objet M. B... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

13. En second lieu, la circonstance que, postérieurement à l'arrêté en litige, un titre de séjour espagnol a été délivré à M. B... le 11 juin 2024, est sans incidence sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi.

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

14. En premier lieu, pour le même motif qu'énoncé au point 2, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision doit être écarté.

15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 et les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées ".

16. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

17. L'arrêté en litige, qui vise notamment les articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, expose qu'il ressort de l'audition de M. B... qu'il est entré irrégulièrement en France à une date indéterminée, qu'il est sans ressources légales, ne justifie pas de l'intensité et de l'ancienneté de ses liens sur le territoire français, a été interpellé pour conduite d'un véhicule sans permis et circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance le 4 février 2024, est défavorablement connu des services de police pour des faits de vol avec destruction ou dégradation le 29 janvier 2022 et qu'il a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 30 janvier 2022, sous une autre identité, à laquelle il n'a pas déféré. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde, a suffisamment motivé sa décision et n'a pas entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation personnelle du requérant.

18. En troisième lieu, pour les mêmes motifs qu'énoncés aux points 5 à 9, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation doivent être écartés.

19. En quatrième lieu, la circonstance que M. B... a obtenu un titre de séjour espagnol le 11 juin 2024, soit postérieurement à la décision en litige du 6 février 2024, et alors même qu'il en aurait sollicité la délivrance le 4 décembre 2023, ne saurait être utilement invoquée pour contester la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

20. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". L'article L. 612-10 du même code dispose que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...). ".

21. Si M. B... soutient que le préfet ne pouvait retenir à son encontre des éléments mentionnés au fichier des antécédents judiciaires, il ressort toutefois des termes de la décision attaquée que le préfet s'est fondé sur des éléments portés à sa connaissance à l'issue de l'audition de l'intéressé devant un officier de police judiciaire. Il ressort du procès-verbal de cette audition que M. B... a reconnu avoir été interpellé en janvier 2022 dans une procédure de vol au préjudice de l'enseigne Auchan, et avoir déclaré une fausse identité quoique cette procédure ait été classée sans suite. Ainsi, il ressort des pièces du dossier que le préfet de Gironde ne s'est pas uniquement fondé sur la consultation du fichier des antécédents judiciaires mais également sur l'audition de M. B....

22. Toutefois, comme il vient d'être dit au point précédent, M. B... a déclaré lors de son audition du 5 février 2024, et il n'est pas contesté sur ce point, que la procédure pour vol de janvier 2022 a été classée sans suite. Ainsi, ces faits ne peuvent être retenus contre M. B... alors qu'ils sont pourtant mentionnés dans les justifications de la décision en litige. C'est donc à tort que le préfet de la Gironde a fondé sa décision en retenant ces faits. Il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas allégué en défense, que le préfet de la Gironde aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur les autres motifs retenus dans l'arrêté attaqué. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté en litige en tant qu'il porte interdiction de retour sur le territoire français.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

24. Le présent arrêt qui annule seulement l'interdiction de retour sur le territoire français contenue dans l'arrêté en litige n'appelle pas de mesure d'exécution particulière.

Sur les frais de l'instance :

25. Dans les circonstances de l'espèce, l'Etat n'est pas la partie principalement perdante à l'instance. Par suite, les conclusions présentées par le requérant au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2401004, 2401005 du tribunal administratif de Bordeaux du 12 février 2024 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français contenue dans l'arrêté du 6 février 2024.

Article 2 : L'arrêté du préfet de la Gironde du 6 février 2024 est annulé en tant seulement qu'il porte interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Nicolas Normand, président,

Mme Clémentine Voillemot, première conseillère,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 janvier 2025.

La rapporteure,

Clémentine Voillemot

Le président,

Nicolas Normand

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°24BX01352


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX01352
Date de la décision : 08/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. NORMAND
Rapporteur ?: Mme Clémentine VOILLEMOT
Rapporteur public ?: M. ELLIE
Avocat(s) : DEBRIL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-08;24bx01352 ?
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