Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner l'Opéra national de Bordeaux à lui verser les sommes de 70 704 euros au titre du préjudice financier et de 10 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, assorties des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2020, date de la réception de sa réclamation préalable.
Par un jugement n° 2004442 du 24 novembre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er février 2023 et le 15 avril 2024, M. A..., représenté par Me Noël, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2004442 du tribunal administratif de Bordeaux du 24 novembre 2022 ;
2°) de condamner l'Opéra national de Bordeaux à lui verser les sommes de 70 704 euros au titre du préjudice financier et de 10 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, assorties des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2020, date de la réception de sa réclamation préalable ;
3°) de mettre à la charge de l'Opéra national de Bordeaux la
somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal n'a retenu qu'une seule faute de l'Opéra national de Bordeaux à savoir le fait de ne pas l'avoir formé ou dispensé de formation pour l'année 2018 en vue de l'établissement de son dossier d'avancement ;
- la responsabilité de l'Opéra national de Bordeaux résulte aussi du fait de l'avoir maintenu durant près de quinze années sur des fonctions ne correspondant pas à son grade ni à son cadre d'emploi puisqu'il a occupé de l'année 1999 à son départ en retraite le 16 novembre 2019, les fonctions de régisseur technique et production, poste de catégorie B, alors que, officiellement, ce poste n'avait pas été créé, tout en conservant le grade d'agent de maîtrise territorial, de catégorie C ; au surplus, il avait passé avec succès l'examen professionnel afférent ;
- l'Opéra n'était pas tenu par les avis défavorables émis par la commission administrative paritaire, à tout le moins depuis sa réussite à l'examen professionnel le 20 juin 2013, et pouvait parfaitement le nommer au grade de technicien principal de deuxième classe ; le règlement intérieur de la commission administrative paritaire catégorie B près le centre de gestion de la Gironde dispose d'ailleurs en son article 15, intitulé " Portée des avis " : " La commission administrative paritaire émet des avis ; il s'agit d'avis simples. " ;
- l'Opéra national de Bordeaux aurait dû créer un poste correspondant à son grade ;
- pour la promotion 2018, si la CAP a rendu un avis défavorable à sa promotion, c'est parce que le dossier n'était pas complet, dès lors qu'il n'avait pas suivi la formation de professionnalisation obligatoire pour intégrer un nouveau cadre d'emploi, et que l'Opéra national de Bordeaux n'a pas davantage fourni de dispense de formation émanant du CNFPT, comme le prévoit le décret n° 2008-512 du 29 mai 2008 ;
- il existe un lien de causalité entre la responsabilité fautive de l'Opéra et les préjudices subis ; il avait une chance sérieuse d'être nommé au grade de technicien principal de deuxième classe ;
- sa perte de traitement mensuel peut être évaluée à 300 euros, et entre le 1er janvier 2014 et son départ à la retraite, 70 mois se sont écoulés ; son préjudice s'élève ainsi à 21 000 euros ;
- le montant mensuel de la perte de pension de retraite s'élève à 250 euros ; il y a lieu de capitaliser cette perte de pension et d'appliquer le barème de capitalisation publié par la Gazette du Palais, actualisé en 2018, reposant sur la table de mortalité sexuée pour 2010-2012 et un taux d'intérêt de 0,5%, appliqué dans le cas d'un homme âgé de soixante-six ans, âge auquel il a fait valoir ses droits à la retraite, soit un préjudice de 49 704 euros ;
- son préjudice moral et ses troubles dans ses conditions d'existence doivent être évalués à 10 000 euros, car il a travaillé au sein de l'ONB durant près de quarante-cinq ans, avec un dévouement et un professionnalisme reconnus et salués de tous, et qu'il n'a pas pu accéder à un grade de catégorie B, alors pourtant qu'il a durant de nombreuses années, occupé les fonctions afférentes au grade de technicien principal sans que ni son statut ni sa rémunération ne soient mis en corrélation avec celles-ci.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 mars 2023, l'Opéra national de Bordeaux, représenté par Me Heymans, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'aucun moyen n'est fondé et que c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il avait commis une faute pour l'année 2018 en ne formant pas l'intéressé au poste auquel il postulait ou en ne le dispensant pas de formation.
Par ordonnance du 15 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 22 avril 2024 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-547 du 6 mai 1988 ;
- le décret n° 89-229 du 17 avril 1989 ;
- le décret n° 2008-512 du 29 mai 2008 ;
- le décret n° 2010-329 du 22 mars 2010 ;
- le décret n° 2010-1357 du 9 novembre 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Ellie, rapporteur public,
- les observations de Me Deyris, représentant M. A... et de Me Quevarec, représentant l'Opéra national de Bordeaux.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A... a été recruté en 1975 par l'Opéra national de Bordeaux en qualité de manœuvre spécialisé. En 2013, date à laquelle il évoluait dans le grade d'agent de maitrise, il a passé avec succès l'examen de technicien professionnel de deuxième classe. Depuis cette date, l'Opéra national de Bordeaux a adressé chaque année à la commission administrative paritaire sa candidature aux fins d'inscription sur la liste d'aptitude pour l'avancement au grade de technicien principal de deuxième classe au titre de la promotion interne, mais l'intéressé n'a pas bénéficié de cet avancement. Le 16 novembre 2019, M. A... a été admis à faire valoir ses droits à la retraite. Par demande préalable du 28 mai 2020 reçu le 2 juin suivant, il a demandé à l'Opéra national de Bordeaux de l'indemniser des préjudices financier et moral subis depuis le 1er janvier 2014, du fait de l'absence de promotion. En l'absence de réponse de l'Opéra national de Bordeaux est née une décision implicite de rejet. M. A... relève appel du jugement du 24 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Opéra national de Bordeaux à lui verser les sommes de 70 704 euros au titre du préjudice financier et de 10 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, assorties des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2020.
Sur la responsabilité de l'Opéra national de Bordeaux :
En ce qui concerne la faute résultant de l'absence d'inscription de M. A... sur une liste d'aptitude :
2. Aux termes de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 alors en vigueur : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration ou à une organisation internationale intergouvernementale, non seulement par voie de concours, selon les modalités définies au 2° de l'article 36, mais aussi par la nomination de fonctionnaires ou de fonctionnaires internationaux, suivant l'une des modalités ci-après : / 1° Inscription sur une liste d'aptitude après examen professionnel ; 2° Inscription sur une liste d'aptitude établie par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents. (...) Sans préjudice des dispositions du 1° du II de l'article 12-1 et de la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 28, les listes d'aptitude sont établies par l'autorité territoriale pour les collectivités non affiliées à un centre de gestion et par le président du centre de gestion pour les fonctionnaires des cadres d'emplois, emplois ou corps relevant de sa compétence, sur proposition de l'autorité territoriale. Le nombre d'agents inscrits sur une liste d'aptitude ne peut être supérieur au nombre d'emplois pouvant être effectivement pourvus. ". Aux termes de l'article 6 du décret du 22 mars 2010, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. Les recrutements dans le deuxième grade interviennent : (...) / 2° Après inscription sur la liste d'aptitude établie en application du 1° de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Les conditions d'inscription sur cette liste sont définies par les statuts particuliers de chaque cadre d'emplois relevant du présent décret. ". L'article 9 de ce même décret dispose : " La proportion de nominations susceptibles d'être prononcées au titre du 2° des articles 4 et 6 est fixée à raison d'un recrutement pour trois nominations intervenues dans la collectivité ou l'établissement ou l'ensemble des collectivités ou établissements affiliés à un centre de gestion, de candidats admis à l'un des concours mentionnés aux articles 4 et 6 ou de fonctionnaires du cadre d'emplois, dans les conditions fixées par l'article 31 du décret n° 2013-593 du 5 juillet 2013 relatif aux conditions générales de recrutement et d'avancement de grade et portant dispositions applicables aux fonctionnaires de la fonction publique territoriale. Toutefois, le nombre de nominations susceptibles d'être prononcées au titre du 2° des articles 4 et 6 peut être calculé en appliquant la proportion mentionnée à l'alinéa précédent à 5 % de l'effectif des fonctionnaires en position d'activité et de détachement dans le cadre d'emplois considéré de la collectivité ou de l'établissement ou de l'ensemble des collectivités ou établissements affiliés à un centre de gestion au 31 décembre de l'année précédant celle au titre de laquelle sont prononcées les nominations lorsque ce mode de calcul permet un nombre de nominations plus élevé que celui résultant de l'application des dispositions de ce même alinéa ". L'article 7 du décret du 9 novembre 2010 dispose : " Les recrutements opérés au titre du 2° de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée interviennent dans le grade de technicien selon les modalités prévues au 2° de l'article 4 et aux articles 8, 9 et 30 du décret du 22 mars 2010 susvisé et selon les modalités suivantes./ Peuvent être inscrits sur la liste d'aptitude prévue au 2° de l'article 4 précité :/ 1° Les fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des agents de maîtrise territoriaux ; / 2° Les fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux titulaires du grade d'adjoint technique principal de 1re classe ; / 3° Les fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement titulaires du grade d'adjoint technique principal de 1re classe. / Les fonctionnaires mentionnés au 1° doivent compter au moins huit ans de services effectifs, en position d'activité ou de détachement dans un emploi d'une collectivité territoriale ou de l'Etat, dont cinq années au moins en qualité de fonctionnaire territorial dans un cadre d'emplois technique./ Les fonctionnaires mentionnés aux 2° et 3° doivent compter au moins dix ans de services effectifs, en position d'activité ou de détachement dans un emploi d'une collectivité territoriale ou de l'Etat, dont cinq années au moins en qualité de fonctionnaire territorial dans un cadre d'emplois technique./ L'inscription sur les listes d'aptitude ne peut intervenir qu'au vu des attestations établies par le Centre national de la fonction publique territoriale précisant que l'agent a accompli, dans son cadre d'emplois ou emploi d'origine, la totalité de ses obligations de formation de professionnalisation pour les périodes révolues.. ".
3. En premier lieu, il ressort des dispositions précitées que si la réussite de M. A... en 2013 à l'examen de technicien professionnel de deuxième classe lui donnait vocation à être inscrit sur la liste d'aptitude correspondant à son cadre d'emplois, elle ne lui conférait toutefois aucun droit à être inscrit sur cette liste et à être promu dans ledit grade de technicien de deuxième classe. En outre, M. A... a effectivement été proposé, chaque année, à compter de sa réussite à cet examen professionnel, par l'Opéra national de Bordeaux, en vue de son inscription sur cette liste d'aptitude. Le président de l'Opéra national de Bordeaux a même adressé le 20 mai 2016 au président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Gironde une lettre dans laquelle il attirait son attention sur la situation particulièrement méritante de M. A.... Si la commission administrative paritaire a systématiquement rendu un avis défavorable depuis 2013 à ces demandes et si le président du centre de gestion de la Gironde auquel était affilié l'Opéra de Bordeaux n'a jamais inscrit M. A... sur cette liste parce que le nombre des agents du même cadre d'emplois que le sien ayant vocation à y être inscrits est supérieur au nombre d'inscriptions possibles au regard notamment de la règle des quotas prévue par l'article 9 du décret du 22 mars 2010 susmentionné, il ne résulte pas de cette situation de fait et de droit que l'Opéra national de Bordeaux aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité, même si les évaluations de M. A... ont toujours été excellentes et si ses qualités professionnelles sont reconnues. Celui-ci ne conteste d'ailleurs pas que les agents inscrits sur la liste d'aptitude relevant de son cadre d'emploi présentaient une valeur professionnelle supérieure à la sienne.
4. En second lieu, l'Opéra national de Bordeaux n'était pas l'autorité compétente pour l'inscription de M. A... sur la liste d'aptitude au grade de technicien de deuxième classe. Il suit de là que c'est sans portée utile que le requérant soutient que l'Opéra national de Bordeaux se serait placé en situation de compétence liée par les avis défavorables rendus par la commission administrative paritaire préalablement aux demandes d'inscription sur cette liste.
5. Il résulte de ce qui précède que l'absence d'inscription de M. A... sur une liste d'aptitude ne résulte pas d'une faute de l'Opéra national de Bordeaux.
En ce qui concerne la faute tenant à l'absence de création d'un emploi :
6. Aux termes de l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 " Les emplois de chaque collectivité ou établissement sont créés par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement. La délibération précise le grade ou, le cas échéant, les grades correspondant à l'emploi créé. Elle indique, le cas échéant, si l'emploi peut également être pourvu par un agent contractuel sur le fondement de l'article 3-3. Dans ce cas, le motif invoqué, la nature des fonctions, les niveaux de recrutement et de rémunération de l'emploi créé sont précisés. Aucune création d'emploi ne peut intervenir si les crédits disponibles au chapitre budgétaire correspondant ne le permettent. ".
7. S'il résulte des dispositions précitées que l'organe délibérant de l'Opéra national de Bordeaux peut créer un emploi, il résulte des énonciations figurant au point 3 du présent arrêt que la décision de promouvoir un agent public sur un grade supérieur ne pouvait en l'espèce intervenir qu'après inscription de l'agent sur une liste d'aptitude arrêtée par le président du centre de gestion auquel est rattaché l'Opéra national de Bordeaux et que le président de l'Opéra n'avait qu'une emprise très limitée dans ce processus puisqu'il ne pouvait que proposer l'inscription de l'un de ses agents sur cette liste. Il suit de là que l'Opéra national de Bordeaux n'a commis aucune faute à l'origine de l'absence de promotion de M. A... en ne créant pas un nouvel emploi de technicien de deuxième classe.
En ce qui concerne la faute résultant du défaut d'adéquation entre le grade et la fonction :
8. Aux termes de l'article 3 du décret du 6 mai 1988 " Les agents de maîtrise principaux sont chargés de missions et de travaux techniques nécessitant une expérience professionnelle confirmée et comportant notamment : 1° La surveillance et l'exécution suivant les règles de l'art de travaux confiés à des entrepreneurs ou exécutés en régie ; 2° L'encadrement de plusieurs agents de maîtrise ou de fonctionnaires appartenant aux cadres d'emplois techniques de catégorie C ou au cadre d'emplois des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles ; ils participent, le cas échéant, à l'exécution du travail, y compris dans les domaines du dessin et du maquettisme ;3° La direction des activités d'un atelier, d'un ou de plusieurs chantiers et la réalisation de l'exécution de travaux qui nécessitent une pratique et une dextérité toutes particulières ".
9. L'administration doit, en principe, affecter un agent sur un emploi correspondant à son grade. L'intérêt du service peut justifier qu'il soit affecté sur un emploi correspondant à un grade inférieur ou supérieur à celui dont il est titulaire.
10. M. A..., agent de maitrise principal dans les 15 années précédant son départ à la retraite, soutient qu'il a occupé de fait les fonctions de régisseur technique et production de l'Opéra national de Bordeaux, poste de catégorie B, alors que, officiellement, ce poste n'existe pas. Il fait valoir en s'appuyant sur des attestations d'agents ayant évolué au sein de l'Opéra national de Bordeaux qu'il a " coordonné des livraisons et étapes de montage ", " a supervisé des choix de matériels techniques ", a préparé des " plannings des horaires préliminaires ", " a élaboré des plans pour le montage en vue de vérifier les angles de vue ", " a participé aux adaptations des décors ", " a veillé au respect des cadres réglementaires du travail et aux normes de sécurité des scènes ", " a assisté à tous les spectacles et répétitions ", " analysait les conditions techniques d'accueil des théâtres/Opéras et établissait des préconisations ", " prévoyait tous les plannings relatifs à la technique " et " organisait la mise en œuvre technique des spectacles ". Ces missions sont toutefois globalement conformes à celles que l'article 3 du décret précité du 6 mai 1988 permet de confier à un agent de maitrise principal. Il suit de là que l'Opéra national de Bordeaux n'a commis aucune faute qui résulterait d'un défaut d'adéquation entre le grade et les fonctions effectivement confiées à M. A.... Au demeurant, à supposer même que M. A... ait été conduit, dans une certaine mesure, à réaliser des missions relevant d'un grade supérieur, l'intérêt du service pouvait justifier ses conditions d'emploi et ainsi qu'il a été indiqué au point 3 du présent arrêt, l'Opéra national de Bordeaux s'est toujours efforcé de faire profiter M. A... des mécanismes de promotion interne depuis 2005.
En ce qui concerne la faute résultant d'une méconnaissance de l'obligation de formation de professionnalisation :
11. Aux termes de l'article 6 du décret du 29 mai 2008, dans sa rédaction alors applicable : " La formation mentionnée au a du 1° de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1984 susvisée vise à faciliter l'intégration des fonctionnaires territoriaux par l'acquisition de connaissances relatives à l'environnement territorial dans lequel s'exercent leurs missions. Elle porte notamment sur l'organisation et le fonctionnement des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, les services publics locaux et le déroulement des carrières des fonctionnaires territoriaux. Les obligations de formation d'intégration ne s'appliquent pas aux fonctionnaires relevant de l'article 45 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Les fonctionnaires recrutés au titre du 1° et du 2° de l'article 39 de la même loi en sont dispensés. ".
12. D'une part, si en vertu des dispositions de l'article 35 du décret du 17 avril 1989, les membres des commissions administratives paritaires (CAP) sont soumis à l'obligation de discrétion professionnelle en ce qui concerne tous les faits et documents dont ils ont eu connaissance en cette qualité et si la violation de l'obligation de discrétion professionnelle peut fonder des poursuites disciplinaires, l'éventuel manquement à cette obligation qu'aurait commis le membre de la CAP représentant la CGT en produisant des attestations en date du 30 avril 2019 et du 8 décembre 2020 qui affirment que le dossier était incomplet parce que l'agent " n'a pas été envoyé en formation de professionnalisation obligatoire pour intégrer un nouveau cadre d'emploi, et l'employeur n'a pas non plus fourni de dispense auprès du CNFPT pour cet agent comme le prévoit le décret n° 2008-512 du 29 mai 2008 articles 17-18 chapitre IV " n'est pas de nature à obliger le juge à écarter cette pièce des débats.
13. D'autre part, il ressort de l'attestation précitée, et ainsi que le soutient M. A..., que si la CAP a refusé son inscription sur la liste d'aptitude au titre de l'année 2018, c'est parce que son employeur n'a pas respecté son obligation de formation de professionnalisation pour intégrer un nouveau cadre d'emploi, en méconnaissance des dispositions de l'article 6 du décret précité du 29 mai 2008. Si l'Opéra national de Bordeaux produit en défense un courrier adressé au président du centre de gestion de la Gironde le 18 avril 2019, dans lequel il attire l'attention du président sur la difficulté pour ses agents de réaliser le nombre de jours de formation requis, ainsi qu'une dispense de formation accordée à M. A... le 23 avril 2019, ces éléments sont postérieurs à l'année 2018. Par suite, M. A... doit être regardé comme apportant la preuve de ce que, en ne lui proposant pas une formation et en ne lui fournissant pas davantage de dispense, l'Opéra national de Bordeaux a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
Sur les préjudices :
14. Son employeur ayant commis une faute de nature à engager sa responsabilité, M. A... est en droit d'obtenir réparation des préjudices directs et certains qui en résultent.
15. Pour écarter la demande, le tribunal a relevé que " M. A... soutient que la faute commise par l'ONB l'a privé d'une chance d'obtenir son inscription sur la liste d'aptitude au grade de technicien de deuxième classe au titre de l'année 2018. Toutefois, M. A... a été régulièrement proposé pour l'inscription sur la liste d'aptitude en 2013, 2014, 2015, 2016, 2017 et 2019, et chacune de ces années, eu égard au faible nombre de postes offerts à la promotion et au grand nombre d'agents promouvables, la CAP a rendu un avis défavorable sur son dossier. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que la faute commise par l'ONB l'a privé d'une chance sérieuse d'obtenir son avancement au grade de technicien de deuxième classe. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à demander une indemnité égale à la différence entre les rémunérations qu'il a effectivement perçues entre 2014 et 2019, et celles qui lui auraient été versées s'il avait obtenu le grade de technicien de deuxième classe. Il n'est pas davantage fondé à demander une indemnité correspondant à la retraite qu'il aurait perçue s'il avait obtenu ce grade, ni à solliciter la réparation d'un préjudice moral au titre de troubles dans les conditions d'existence ". Il y a lieu d'écarter la demande du requérant tendant aux mêmes fins par adoption de ces motifs pertinemment retenus par le tribunal administratif.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Opéra national de Bordeaux, qui n'a pas dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que demande M. A... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par l'Opéra national de Bordeaux au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Opéra national de Bordeaux sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à l'Opéra national de Bordeaux.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
M. Nicolas Normand, président-assesseur,
Mme Clémentine Voillemot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024.
Le rapporteur,
Nicolas B...
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX00304