Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la décision du 11 août 2020 par laquelle le président de la collectivité territoriale de Guyane a procédé à la rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée devant arriver à échéance le 15 novembre 2021, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé sur sa réclamation préalable présentée le 22 février 2021 et de condamner la collectivité territoriale de Guyane à lui payer la somme de 46 236 euros à titre d'indemnité compensatrice de la perte de salaires, le treizième mois, les primes d'ancienneté, l'indemnité légale de licenciement, une indemnité de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, et une indemnité de 15 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence.
Par un jugement n° 2100740 du 27 octobre 2022, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2023 et un mémoire en réplique non communiqué, enregistré le 17 octobre 2024, M. C..., représenté par Me Bouchet, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2100740 du tribunal administratif de la Guyane du 27 octobre 2022 ;
2°) d'annuler la décision du 11 août 2020 à effet au 16 août 2020 par laquelle le président de la collectivité territoriale de Guyane a procédé à la rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée devant arriver à échéance le 15 novembre 2021, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé sur sa réclamation préalable présentée le 22 février 2021 ;
3°) de condamner la collectivité territoriale de Guyane à lui payer la somme de 46 236 euros à titre d'indemnité compensatrice de la perte de salaires, le treizième mois, les primes d'ancienneté, l'indemnité légale de licenciement, une indemnité de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et une indemnité de 15 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence ;
4°) de mettre à la charge de la collectivité territoriale de Guyane la
somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier s'il n'est pas établi que sa minute a été signée ;
- le tribunal administratif de la Guyane a dénaturé les pièces du dossier en estimant que la décision litigieuse en date du 11 août 2020 et notifiée par courrier daté du 24 août 2020 devait être regardée comme le refus d'un renouvellement de son contrat et non comme une rupture anticipée de son contrat ; le contrat de travail daté du 21 août 2020, signé et paraphé des parties et portant sur une durée de 1 an et 3 mois (soit du 16 août 2020 au 15 novembre 2021) qu'il avait produit comporte une valeur probante suffisante alors que le contrat présenté par la collectivité qui porte sur une durée de trois mois (du 16 août 2020 au 15 novembre 2020) n'est pas probant ; si la possibilité de ne renouveler le contrat que pour une période de trois mois a bien été évoquée dans les discussions, ce n'est pas la solution qui a finalement été retenue ; le contrat produit par la collectivité ne comporte en page 1 que les paraphes RA et en page 2, aucun paraphe alors qu'il s'agit de la page sur laquelle est indiquée la durée du contrat et la page 3 est identique de sorte qu'il s'agit vraisemblablement d'une copie sur laquelle a été ajoutée la date du 24 août 2020 ; la page 3 de ce contrat ne constitue pas la suite de la page 2 comme s'il manquait un paragraphe ; de toute évidence, la page 2 a été modifiée dès lors que concernant la durée, le texte a été décalé vers le bas et il y manque quelques lignes enlevant toute cohérence avec la suite figurant en page 3 ; des paraphes sont également manquants sur cette pièce 2 ; les pages 2 et 3 ne comportent pas la même taille de police et la pagination n'est pas cadrée au même format ; en définitive, le contrat de travail signé et paraphé par l'ensemble des parties a été modifié en sa page 2 pour raccourcir la durée du contrat et pour y ajouter " Au terme de cette période, ledit contrat ne sera pas renouvelé " ; ce contrat est falsifié ; l'arrêté du 21 août 2020 portant attribution de régime indemnitaire vise d'ailleurs expressément le contrat de travail du 16 août 2020 au 15 novembre 2021 ; un courriel du 18 novembre 2020 qui lui a été adressé par la direction des ressources humaines de la collectivité, évoquant une prétendue " erreur matérielle " dans le contrat signé, l'invite d'ailleurs à régulariser cette erreur soit par la signature d'un contrat de 3 mois (du 16 août 2020 au 15 novembre 2020) soit par la signature d'un contrat de 6 mois (du 16 août 2020 au 28 février 2021) ;
- la rupture anticipée du contrat traduit un licenciement disciplinaire puisqu'elle ne répond à aucune des hypothèses envisagées par le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 ; or, en méconnaissance de l'article 36-1 de ce décret pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984, le licenciement n'a pas été précédé d'une consultation de la commission consultative paritaire ; en outre, en méconnaissance des articles 37 et 42 de ce décret, il n'a jamais été averti de son droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel, n'a jamais été informé de son droit à l'assistance de défenseurs de son choix, n'a pas été convoqué à un entretien préalable de licenciement, dont la convocation doit être adressée par lettre recommandée avec avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge au moins 5 jours ouvrables avant la date de l'entretien ; cette décision a, au demeurant, été prise en violation du principe du contradictoire et des droits de la défense ; enfin, la décision est irrégulière en la forme pour n'avoir pas été notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;
- le licenciement est entaché d'inexactitude matérielle des faits et les griefs formulés, à les supposer caractérisés, ne sont pas de nature à le justifier ;
- ce licenciement est disproportionné ;
- en toute hypothèse, la lettre de licenciement est datée du 11 août 2020 alors que le contrat de travail a été renouvelé par lettre en date du 21 août 2020 et le même jour, il lui était notifié un arrêté portant attribution du régime indemnitaire pour travaux supplémentaires à compter du 16 août 2020 de sorte que le renouvellement du contrat de travail le 21 août 2020 emporte nécessairement rétractation de la décision de licenciement en date du 11 août 2020 ;
- la décision illégale fautive ouvre droit à réparation ;
- sans emploi depuis son éviction illégale du service, il est en droit de réclamer une indemnité compensatrice de la perte de salaires qu'il aurait dû percevoir s'il était en poste sur un an soit la somme de 46 236 euros à laquelle s'ajoutent le 13 ème mois et la prime d'ancienneté attribuée au personnel après une année d'ancienneté de présence effective ;
- il est en droit de réclamer une indemnité de licenciement en vertu des articles 45 et 46 du décret du 15 février 1988 ;
- son préjudice moral est caractérisé par la circonstance qu'il a légitimement cru que son contrat était renouvelé jusqu'au 15 novembre 2021 lors de la signature du contrat de travail le 21 août 2020 alors que le 24 août 2020, il a reçu notification d'une lettre de licenciement datée du 11 août 2020 ;
- les troubles dans ses conditions d'existence sont caractérisés par le fait qu'il est sans emploi et sans ressources.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 avril 2024, la collectivité territoriale de Guyane, représentée par Me Magnaval, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun moyen n'est fondé.
Par ordonnance du 17 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 avril 2024 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Ellie, rapporteur public,
- les observations de Me Magnaval, représentant la collectivité territoriale de Guyane.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., attaché territorial contractuel de catégorie A, a été affecté au poste de directeur de la régie d'exploitation de l'abattoir territorial à compter du 16 novembre 2015, en vertu de contrats à durée déterminée conclus avec le président de la collectivité territoriale de Guyane. Par un jugement du 27 octobre 2022, le tribunal administratif de la Guyane, après avoir estimé que le dernier contrat de travail de M. C... avait été renouvelé pour une durée de trois mois, du 16 août au 15 novembre 2020, et que les conclusions du requérant tendaient donc à l'annulation de la décision du 11 août 2020 par laquelle le président de la collectivité n'a pas renouvelé son contrat, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de cette décision, ensemble la décision implicite de rejet née le 22 mars 2021 du silence gardé sur sa réclamation préalable présentée le 22 février 2021, d'autre part, à la condamnation de la collectivité territoriale de Guyane à lui payer la somme de 46 236 euros à titre d'indemnité compensatrice de la perte de salaires, le treizième mois, les primes d'ancienneté, l'indemnité légale de licenciement, une indemnité de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et une indemnité de 15 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence. M. C... relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. Il ressort de la minute du jugement attaqué, transmise à la cour par le tribunal administratif de la Guyane, qu'elle a été signée par la rapporteure, le président et la greffière, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative cité au point précédent. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée aux parties ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ces jugements. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement est irrégulier car il ne serait pas signé doit être écarté.
Sur le cadre du litige :
4. D'une part, lorsque sont présentées dans la même instance des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision et des conclusions relevant du plein contentieux tendant au versement d'une indemnité pour réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive que le requérant estime constituée par cette même décision, cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux. Les conclusions de M. C... tendent en l'espèce à la fois à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 11 août 2020 et à la condamnation de la collectivité territoriale de Guyane à lui verser une somme d'argent à raison de l'illégalité fautive de cette décision et cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble de ses conclusions le caractère d'un recours de plein contentieux.
5. D'autre part, la décision implicite par laquelle le président de la collectivité territoriale de Guyane a rejeté le recours préalable indemnitaire formé par M. C... a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande du requérant qui, en formulant des conclusions indemnitaires, a donné à sa requête le caractère, sur ce point, d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a lié le contentieux sont, ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, sans incidence sur la solution du litige. Dès lors, les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet de la réclamation préalable de M. C... ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la nature de la décision du 11 août 2020 :
6. Sauf circonstance particulière, la décision par laquelle l'autorité administrative compétente met fin aux relations contractuelles doit être regardée comme un refus de renouvellement de contrat si elle intervient à l'échéance du nouveau contrat et comme un licenciement si elle intervient au cours de ce nouveau contrat.
7. La collectivité territoriale de Guyane et M. C... ont produit respectivement un renouvellement de contrat de travail daté du 21 août 2020 et signé des deux parties mentionnant une durée de renouvellement du contrat de trois mois (du 16 août 2020 au 15 novembre 2020) et un renouvellement de contrat daté du même jour et également signé des deux parties mentionnant une durée de renouvellement du contrat de 1 an et 3 mois (du 16 août 2020 au 15 novembre 2021). Les signatures des parties figurant en page trois des deux contrats produits sont strictement identiques. La collectivité territoriale de Guyane admet qu'elle avait envisagé ces deux hypothèses de renouvellement de contrat mais indique ne pas être en mesure d'expliquer pourquoi le contrat produit par le requérant comporte la signature de son président. Il ressort, à cet égard, des pièces du dossier que le document produit par la collectivité ne comporte en page 1 que les paraphes RA et en page 2 aucun paraphe alors qu'il s'agit de la page sur laquelle est indiquée la durée du contrat. Un paragraphe est également manquant en haut de la page 3 de ce document et la taille de la police de caractères n'est pas identique sur toutes les pages. Le document produit par le requérant comporte, pour sa part, tous les paraphes en bas de chaque page et les pages 2 et 3 de ce document s'enchainent logiquement. Au surplus, l'arrêté du 21 août 2020 portant attribution du régime indemnitaire au requérant vise expressément le contrat de travail du 16 août 2020 au 15 novembre 2021. Enfin, un courriel du 18 novembre 2020 avait été adressé au requérant par la direction des ressources humaines de la collectivité, évoquant une " erreur matérielle " dans le contrat signé et l'invitant à régulariser cette erreur par la signature d'un contrat de 3 mois (du 16 août 2020 au 15 novembre 2020) ou de 6 mois (du 16 août 2020 au 28 février 2021). Les documents annotés et/ou barrés par le président de la collectivité figurant au dossier de renouvellement des contrats de l'agent n'infirment pas cette constatation de fait. Dans ces circonstances, et dès lors que le document produit par M. C... ne présente aucune incohérence dans sa présentation, au contraire de celui produit par la collectivité, le renouvellement du contrat daté du 21 août 2020 doit être regardé comme intervenu, ainsi que le prétend le requérant, pour une durée d'un an et trois mois. Par suite, dès lors que le renouvellement de ce contrat expirait le 15 novembre 2021, la décision du 11 août 2020 du président de la collectivité territoriale de Guyane mettant fin aux relations contractuelles entre les deux parties au 15 novembre 2020 constitue nécessairement une mesure de licenciement.
En ce qui concerne la légalité de la décision du 11 août 2020 :
8. En premier lieu, aux termes de l'article 42 du décret n°88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale dans sa rédaction alors applicable " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. La convocation à l'entretien préalable est effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. L'agent peut se faire accompagner par la personne de son choix. ". En outre, aux termes de l'article 42-1 de ce décret : " Lorsqu'à l'issue de l'entretien prévu à l'article 42 et de la consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, l'autorité territoriale décide de licencier un agent, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement, ainsi que la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis. ".
9. Il ressort des pièces du dossier et notamment d'un courrier en date du 11 août 2020 adressé par la collectivité à M. C... que ce dernier a bénéficié d'un entretien le 6 août 2020 dont l'objet portait sur le non renouvellement de son contrat expirant le 15 novembre 2021 et non sur son licenciement. Par ailleurs, M. C... n'a pas été destinataire d'une lettre de convocation à un entretien préalable à son licenciement mais d'un simple message électronique en date du 31 juillet 2020 l'informant d'une réunion dans le bureau du directeur général des services le 6 août 2020 à 08h30. Enfin, la décision du 11 août 2020 annonçant la fin du contrat de l'intéressé n'a pas été adressée par lettre recommandée. M. C... est donc fondé à soutenir que cette décision, prise au terme d'une procédure irrégulière, est illégale.
10. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la collectivité aurait entendu licencier M. C... pour des motifs disciplinaires et qu'elle n'aurait donc pas respecté la procédure adossée à ce type de licenciement. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des articles 36-1 et 37 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 applicables aux sanctions disciplinaires doivent être écartés comme inopérants.
11. En troisième lieu, il ressort de la décision du 11 août 2020 de la collectivité territoriale de Guyane, qu'elle justifie la fin des relations contractuelles par des difficultés managériales et par la gestion budgétaire de l'abattoir, ainsi que par des relations tendues avec les partenaires externes et internes de l'établissement. La collectivité se prévaut, à ce titre, d'un courrier du 4 août 2020 du requérant dans lequel M. C... reconnait qu' " en raison de quelques aléas techniques et administratifs ", il n'avait " pu atteindre l'objectif plein et entier de réorganiser totalement le service de production et le service administratif " et que la gestion de cet abattoir a été publiquement mise en cause lors de la séance de l'assemblée plénière de la collectivité du 12 juin 2019 ainsi qu'en témoigne une vidéo de cette séance à laquelle la collectivité fait référence et dont le contenu n'est pas contesté, au cours de laquelle il a notamment été demandé à M. C... par le président de la collectivité de " prendre ses responsabilités " et lui a été reproché de ne pas gérer la question des congés non remplacés, de ne pas avoir anticipé la panne d'un compresseur de chambre froide et d'être confronté à des plaintes de plusieurs fournisseurs relatives à une rupture d'égalité dans l'accès à l'abattoir. La collectivité fait aussi valoir sans être contestée que, durant cette même séance, les graves difficultés budgétaires de l'abattoir ont été abordées et précise, à ce titre, que cette mission relevait bien de la fiche de poste de l'intéressé. Ces faits, qu'aucune pièce du dossier ne permet de mettre en doute, sont de nature à justifier un licenciement. Si M. C... invoque l'attitude conflictuelle et désinvolte de quelques agents du service de production et du service administratif, les mesures de réorganisation responsables des conflits sociaux, des anomalies dans le fonctionnement de l'abattoir, la circonstance qu'il a dû faire face en 2019 et en 2020 à plusieurs accidents de travail et aux contraintes liées au covid-19, sa demande non satisfaite d'utilisation d'un autre logiciel de paie et de budget, puis les erreurs de gestion et le manque de réactivité de la direction du service du pôle économie, développement numérique et innovation (PEDNI), aucun de ces éléments invoqués par M. C... ni aucune pièce du dossier ne révèlent que le président de la collectivité territoriale de Guyane se serait fondé sur des faits matériellement inexacts, se serait livré à une appréciation erronée de l'intérêt du service ou que le licenciement présenterait un caractère disproportionné.
12. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il ne peut être déduit du renouvellement du contrat intervenu le 21 août 2020 et de l'intervention d'un arrêté portant attribution du régime indemnitaire pour travaux supplémentaires à compter du 16 août 2020 que la décision de licenciement en date du 11 août 2020 aurait été rapportée.
13. Il résulte de ce qui précède que, pour le motif exposé au point 9 ci-dessus, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses conclusions en annulation de la décision du 11 août 2020.
Sur les conclusions indemnitaires :
14. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité.
15. Ainsi que cela résulte de ce qui a été dit ci-dessus, l'éviction illégale du service du service de M. C... résulte de vices de procédure mentionnés au point 9 du présent arrêt mais est justifiée au fond.
16. Il suit de là, d'une part, qu'il y a lieu de rejeter les conclusions de M. C... tendant, d'une part, au versement d'une indemnité compensatrice de la perte de salaires qu'il aurait dû percevoir s'il avait été encore en poste pendant un an, d'un 13ème mois de salaire et d'une prime d'ancienneté, et d'autre part, à la réparation des troubles dans ses conditions d'existence liés à la perte de son emploi.
17. En revanche, en application des dispositions de l'article 43 du décret n° 88-145 du 15 février 1988, qui dispose que " En cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire, une indemnité de licenciement est versée à l'agent recruté pour une durée indéterminée ou à l'agent recruté pour une durée déterminée et licencié avant le terme de son contrat ", le requérant est fondé à soutenir qu'il a droit à une indemnité de licenciement à déterminer conformément à l'article 45 de ce décret, au regard de sa dernière rémunération nette des cotisations de la sécurité sociale et, le cas échéant, des cotisations d'un régime de prévoyance complémentaire, effectivement perçue au cours du mois civil précédant le licenciement laquelle ne doit comprendre ni les prestations familiales, ni le supplément familial de traitement, ni les indemnités pour travaux supplémentaires ou autres indemnités accessoires.
18. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral causé par le caractère irrégulier de la procédure de licenciement menée à l'encontre de M. C... en allouant à l'intéressé une somme de 3 000 euros.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté l'entièreté de sa demande.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. C..., qui n'a pas dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que demande la collectivité territoriale de Guyane au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la collectivité territoriale de Guyane une somme de 1 500 euros à verser à M. C... au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La décision du 11 août 2020 du président de la collectivité territoriale de Guyane est annulée.
Article 2 : La collectivité territoriale de Guyane est condamnée à verser à M. C... une indemnité de licenciement à déterminer par application des dispositions de l'article 45 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 et une somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de la Guyane est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 4 : La collectivité territoriale de Guyane versera à M. C... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la collectivité territoriale de Guyane.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
M. Nicolas Normand, président-assesseur,
Mme Clémentine Voillemot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024.
Le rapporteur,
Nicolas B...
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX00170