Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune de La Lande-de-Fronsac à lui verser la somme globale de 37 094,24 euros, en réparation des préjudices qu'elle a subis résultant de la faute de la commune, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2020, date de réception de sa réclamation préalable indemnitaire.
Par un jugement n° 2100060 du 10 novembre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la commune de la Lande-de-Fronsac à verser à Mme A... la somme de 3 000 euros, tous intérêts compris à la date du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2023, Mme A..., représentée par Me Noël, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 novembre 2022 en tant qu'il limite l'indemnisation qui lui est due à la somme de 3 000 euros, tous intérêts compris à la date du jugement ;
2°) de condamner la commune de La Lande-de-Fronsac à lui verser la somme globale de 37 094,24 euros, en réparation des préjudices qu'elle a subis résultant de la faute de la commune, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2020, date de réception de sa réclamation préalable indemnitaire ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Lande-de-Fronsac la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que le montant d'indemnisation est trop faible, d'autant plus s'il prend en compte la somme de 1 213,26 euros qui lui était due pour le mois de septembre 2020 ;
- il a été mis fin à son contrat le 31 août 2020, alors que son échéance était initialement fixée au 30 septembre 2020 et il s'agit ainsi d'une décision de licenciement ;
- la commune a méconnu la procédure de licenciement d'un agent contractuel ; d'une part, dès lors qu'elle était agent contractuel au sein de la commune depuis plus de 3 ans, la commune aurait dû respecter un préavis de 2 mois pour la licencier, en application des dispositions de l'article 40 du décret du 15 février 1988 ; d'autre part, la commune n'a pas respecté la forme de la convocation à l'entretien préalable au licenciement, ni davantage mentionné l'objet de la convocation, en méconnaissance des dispositions de l'article 42 de ce décret ;
- son licenciement ne repose sur aucun fondement, si ce n'est de simples querelles entre collègues, en méconnaissance des articles 39-2 et 39-3 du décret du 15 février 1988 ;
- s'il s'agit d'une décision de non-renouvellement de son contrat arrivé à son terme, la commune a méconnu la procédure de non renouvellement du contrat d'un agent prévu à l'article 38-1 du décret du 15 février 1988 ; elle n'a pas été destinataire d'une décision de non renouvellement de son contrat et, a fortiori, le délai de prévenance de deux mois n'a pas été respecté ;
- la décision de non renouvellement de son contrat ne repose sur aucun fondement, l'intérêt du service n'étant pas établi par la commune ; sa manière de servir était excellente et elle a toujours rempli ses missions avec un grand professionnalisme, comme en attestent ses collègues, la promesse de titularisation et la demande de projet d'arrêté pour stagiairisation de juillet 2020 ;
- elle doit être indemnisée de son préjudice professionnel et financier à hauteur de 17 094,24 euros et de son préjudice moral et ses troubles dans les conditions d'existence à hauteur de 20 000 euros.
Par ordonnance du 6 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 décembre 2023 à 12 heures.
Un mémoire produit pour la commune de La Lande-de-Fronsac, représentée par Me Hassine, a été enregistré le 15 novembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-63 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Clémentine Voillemot,
- les conclusions de M. Sébastien Ellie, rapporteur public,
- et les observations de Me Deyris, représentant Mme A..., présente à l'audience, et de Me Marty, représentant la commune de La Lande-de-Fronsac.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... a été engagée par la commune de La Lande-de-Fronsac sur un emploi d'avenir dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi du 1er avril 2017 au 31 mars 2020. Elle a ensuite été recrutée en qualité d'agent technique contractuel du 1er avril 2020 au 30 septembre 2020 sur les mêmes fonctions. Elle a été convoquée pour un entretien le 10 août 2020 au cours duquel elle a été informée que son contrat ne serait pas renouvelé. Une attestation a été délivrée le 13 août 2020 indiquant que le contrat à durée déterminée arrivait à échéance le 31 août 2020. Mme A... a adressé à la commune, le 7 octobre 2020, une réclamation indemnitaire pour obtenir réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des conditions dans lesquelles il a été mis fin à ses fonctions. Par la présente requête, Mme A... relève appel du jugement du 10 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a limité l'indemnisation de son préjudice à la somme de 3 000 euros.
2. Il résulte du jugement attaqué et il n'a pas été contesté durant l'instruction que la commune de La Lande-de-Fronsac n'a pas renouvelé le contrat à durée déterminée de six mois de Mme A... sans motif tiré de l'intérêt du service ou pris en considération de la personne et n'a pas respecté le délai de prévenance.
3. D'une part, lorsqu'un agent public sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision de ne pas renouveler son contrat ou de le modifier substantiellement sans son accord, sans demander l'annulation de cette décision, il appartient au juge de plein contentieux, forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, de lui accorder une indemnité versée pour solde de tout compte et déterminée en tenant compte notamment de la nature et de la gravité de l'illégalité, de l'ancienneté de l'intéressé, de sa rémunération antérieure et des troubles dans ses conditions d'existence.
4. Il résulte de l'instruction que, comme l'ont retenu les premiers juges, la décision mettant fin aux fonctions de Mme A... constitue une décision de non-renouvellement de son contrat à durée déterminée malgré l'erreur de date dans l'attestation du 13 août 2020 mentionnant une fin de contrat au 31 août 2020 au lieu du 30 septembre 2020. En appel, Mme A... soutient que le montant alloué est insuffisant sans contester le fondement de responsabilité retenu ni le principe d'une réparation forfaitaire de ses préjudices. Il résulte de l'instruction, que Mme A..., née le 30 octobre 1993, était âgée de 26 ans à la date de la fin de son contrat à durée déterminée de six mois, qu'elle cumulait une ancienneté de trois ans et six mois dans ses fonctions et percevait un revenu net mensuel de 1 218,26 euros et justifie que cette décision de non-renouvellement a eu un impact sur son état de santé et sa situation financière. Au regard de ces éléments et de la gravité de la faute commise par la commune de La Lande-de-Fronsac, il sera fait une juste évaluation du préjudice subi par la requérante du fait de l'illégalité de la décision de ne pas renouveler son contrat en portant à la somme de 4 000 euros l'indemnité de 2 500 euros qui lui avait été allouée par les premiers juges, venant en complément de la somme de 1 212,46 euros que la commune de La Lande de Fronsac s'est engagée à lui verser.
5. D'autre part, l'agent non titulaire ayant été illégalement privé du bénéfice de tout ou partie du préavis a droit à une indemnité correspondant au préjudice résultant de cette privation, dont il revient au juge administratif, saisi de conclusions à cette fin, de fixer le montant.
6. Il est constant que Mme A... n'a été informée de la décision de ne pas renouveler son contrat que lors d'un entretien le 10 août 2020, puis par courrier du 13 août 2020 qui comportait, au demeurant, une date de fin de contrat erronée au 31 août 2020 au lieu du 30 septembre 2020. Ainsi, Mme A... n'a été avertie de la décision de non-renouvellement de son contrat que quelques jours avant de cesser ses fonctions. Dans ces circonstances, la méconnaissance du délai de prévenance de deux mois est de nature à justifier l'indemnisation de Mme A... des préjudices qu'elle estime avoir subis en ayant été tardivement avertie du non-renouvellement de son contrat. Il sera fait une juste évaluation du préjudice moral subi par la requérante en portant à la somme de 1 500 euros l'indemnité de 500 euros qui lui avait été allouée par les premiers juges.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la requérante est seulement fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la commune de La Lande-de-Fronsac à lui verser une somme limitée à 2 500 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision de non renouvellement de son contrat et une somme limitée à 500 euros en réparation de son préjudice moral lié à la privation du délai de préavis et à demander que l'indemnisation de ces chefs de préjudice soit portée respectivement à 4 000 et à 1 500 euros. Ainsi, elle est fondée à demander que la somme que la commune de La Lande-de-Fronsac a été condamnée à lui verser en réparation de son préjudice total soit portée à 5 500 euros.
Sur les frais liés au litige :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. (...) ".
9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de La Lande-de-Fronsac une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La somme que la commune de La Lande-de-Fronsac a été condamnée à verser à Mme A... en réparation de ses préjudices à l'article 1er du jugement du 10 novembre 2022 du tribunal administratif de Bordeaux est portée à 5 500 euros.
Article 2 : Le jugement du 10 novembre 2022 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.
Article 3 : La commune de La Lande-de-Fronsac versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... et à la commune de La Lande-de-Fronsac.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Nicolas Normand, président-assesseur,
Mme Clémentine Voillemot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024.
La rapporteure,
Clémentine VoillemotLa présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde, en ce qui le concerne, et à tous commissaire de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX00151