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28/11/2024 | FRANCE | N°24BX00898

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 28 novembre 2024, 24BX00898


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... D... et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler les arrêtés du 26 septembre 2023 par lesquels le préfet de la Gironde a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par deux jugements n° 2306090 et 2306099 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.



Procédure devant la cour :



I°) Par une requête, enregistrée sous le n° 24BX00897 le 12...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler les arrêtés du 26 septembre 2023 par lesquels le préfet de la Gironde a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par deux jugements n° 2306090 et 2306099 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête, enregistrée sous le n° 24BX00897 le 12 avril 2024, Mme B... D... épouse A..., représentée par Me Haas, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er février 2024 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois, sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- elle établit la réalité de son ancienneté en France, l'installation de son entière vie privée et familiale en France depuis 6 ans, la scolarité de sa fille depuis 4 années et l'intégration professionnelle de son époux qui travaille comme ouvrier agricole de manière continue depuis 4 ans dans une société où il est également associé ;

- la décision est entachée d'une méconnaissance des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; si la résidence doit être habituelle, elle n'a pas à être continue ;

- elle et son époux n'ont plus aucun membre de leurs familles au Maroc ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant a été méconnu ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est privée de base légale ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant a été méconnu ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est privée de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2024, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par Mme D... épouse A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 6 août 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 septembre 2024 à 12 heures.

II°) Par une requête, enregistrée sous le n° 24BX00898 le 12 avril 2024, M. C... A..., représenté par Me Haas, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er février 2024 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois, sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- il établit la réalité de son ancienneté en France depuis plus de 10 ans, l'installation de son entière vie privée et familiale en France depuis 6 ans, la scolarité de sa fille depuis 4 années ; il travaille comme ouvrier agricole de manière continue depuis 4 ans dans une société où il est également associé ;

- la décision est entachée d'une méconnaissance des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sa situation n'a pas fait l'objet d'une examen sérieux au regard des motifs exceptionnels relatifs à la délivrance d'une carte de séjour " salarié " ;

- l'emploi d'agriculteur salarié fait partie des métiers en tension ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; si la résidence doit être habituelle, elle n'a pas à être continue ;

- le couple n'a plus aucun membre de leurs familles au Maroc ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie ;

- l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant a été méconnu ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est privée de base légale ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant a été méconnu ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est privée de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2024, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 6 août 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 septembre 2024 à 12 heures.

Par décisions du bureau d'aide juridictionnelle en date du 5 mars 2024, les demandes de bénéfice de l'aide juridictionnelle de Mme D... épouse A... et de M. A... ont été rejetées.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Martin,

- et les observations de Me Haas, représentant Mme B... D... épouse A... et M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain, né le 15 mai 1968, serait entré en France au mois de décembre 2012. Son épouse, Mme D..., née le 18 janvier 1978, de même nationalité, l'aurait rejoint le 20 février 2017. Ayant sollicité le 19 juillet 2023 leur admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que, pour monsieur, sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié, ils se sont vus opposer un refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de renvoi, par deux arrêtés du 26 septembre 2023 du préfet de la Gironde. Par deux requêtes distinctes enregistrées respectivement sous les numéros 24BX00897 et 24BX00898, Mme D... épouse A... et M. A... relèvent appel des jugements par lesquels le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées n° 24BX00897 et n° 24BX00898 concernent la situation d'un couple. Elles présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le refus de titre de séjour opposé à M. A... :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine./ L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. D'une part, si M. A... se prévaut de la durée de sa présence en France depuis le 5 janvier 2012, il ressort toutefois de pièces du dossier qu'aucune pièce n'est présentée au titre de l'année 2012 et que les pièces produites par l'intéressé pour les années 2013, 2015 et 2016 qui consistent essentiellement en des bordereaux d'envois de mandats et quelques factures ou bon de commandes, ne couvrent pas l'ensemble des périodes considérées et sont insuffisantes pour établir sa présence continue en France entre 2012 et 2016. Par la seule production de cartes d'admission à l'aide médicale de l'État, de pièces à caractère médical pour le couple et l'enfant, de certificats d'hébergement par l'associée de l'entreprise Le Sabatey, d'aides et de secours ponctuels, de quelques documents bancaires et d'assurance, mentionnant pour certains des adresses en région parisienne, et d'avis d'imposition à compter de 2017, l'appelant ne démontre pas le caractère habituel de sa présence et de celle de la cellule familiale sur le territoire national au cours des années postérieures à 2016. Les attestations produites par les proches, rédigées en des termes généraux et peu circonstanciés, ne permettent pas à M. A... de justifier de la stabilité et de l'intensité de son intégration sociale et professionnelle sur le territoire français. Dans ces conditions, il ne justifie pas, à la date de la décision contestée d'une résidence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans. D'autre part, l'appelant fait également valoir que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situe désormais en France dès lors qu'il détient un contrat à durée indéterminée depuis le 1er octobre 2020 en qualité d'ouvrier agricole dans une entreprise qu'il aurait vocation à reprendre et dans laquelle il détient 50 parts et que sa fille, née le 30 novembre 2017, est scolarisée en France depuis 2020, le foyer familial s'étant reconstitué à Cazats. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... est résident longue durée en vertu d'un titre délivré en Espagne du 26 juin 2020 au 24 mai 2025 et que sa fille est de nationalité espagnole. Par suite, alors même que M. A... n'aurait plus d'attaches familiales au Maroc, où il a vécu jusqu'à l'âge de 44 ans, la décision portant refus de titre de séjour ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés. Pour ces mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ".

6. Les dispositions citées au point précédent ne prescrivent pas la délivrance d'un titre de séjour de plein droit mais laissent à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un ressortissant étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels dont l'intéressé se prévaut. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que l'autorité administrative n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'elle a portée sur sa situation. Les éléments dont fait état M. A..., tirés de la durée de sa présence en France, des attaches familiales dont il y dispose, de l'activité professionnelle qu'il y exerce, ne permettent nullement d'établir que sa situation relèverait de " considérations humanitaires " ou de " motifs exceptionnels " permettant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Gironde, qui a procédé à un examen sérieux et approfondi de la situation de l'appelant au regard de ces dispositions, en aurait fait une inexacte application ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, pour les motifs exposés au point 4, M. A... ne justifie pas de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure, au motif de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, dont serait entachée la décision portant refus de séjour, ne peut qu'être écarté.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

9. M. A... n'établit pas que sa fille, compte tenu de sa nationalité espagnole et de son jeune âge, serait dans l'impossibilité d'être scolarisée en Espagne où lui et son épouse, titulaires de titres de résidents longue durée valables jusqu'au 24 mai 2025, peuvent reconstituer la cellule familiale. Dès lors, le préfet de la Gironde n'a pas méconnu les stipulations précitées.

Sur le refus de titre de séjour opposé à Mme A... :

10. Mme A... soutient totaliser une durée de présence de plus de six ans à la date de la décision en litige. Elle se prévaut de la scolarité en France de sa fille et de la présence de son mari qui exerce une activité professionnelle et réside sur le territoire national depuis plus de dix ans. Toutefois, compte tenu de ce qui a été dit au point 4 et alors que Mme A... a obtenu le renouvellement de sa carte de résident espagnole, valable du 28 février 2020 au 11 janvier 2025 après y avoir déclaré un domicile, en se bornant à produire des pièces à caractère médical, des documents de l'assurance maladie et des justificatifs de secours ponctuels entre 2017 et 2023, ainsi que, pour 2023, des courriers de la caisse d'allocations familiales, l'intéressée ne démontre pas l'intensité et la stabilité des liens privés et familiaux développés en France. Si elle fait valoir la présence de son frère en France, elle a également une sœur résidant en Espagne. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde n'a pas, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, porté au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, méconnu ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des effets des décisions en litige sur sa situation personnelle doit être écarté.

11. Mme A..., qui est arrivée en France en 2017, se prévaut de sa durée de séjour, de la présence et de l'activité professionnelle de son époux et de la scolarisation de son enfant né en Espagne. Toutefois, d'une part, la seule circonstance que le foyer familial serait installé en France depuis 2017, soit six ans à la date de la décision en litige, ne saurait constituer, à elle seule, une circonstance exceptionnelle ou un motif humanitaire. Mme A..., qui n'établit pas avoir une activité professionnelle, ne justifie pas d'une insertion particulièrement forte dans la société française, la seule circonstance que sa fille soit scolarisée en France, au demeurant en classe de maternelle à la date de la décision attaquée, étant insuffisante à cet égard. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. La décision litigieuse n'a ni pour objet ni pour effet de séparer l'appelante de son enfant. Il ne ressort pas des pièces des dossiers que celui-ci ne pourrait poursuivre sa vie familiale dans le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays où il serait, avec ses parents, légalement admissibles. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.

Sur les obligations de quitter le territoire français :

13. Il ressort de ce qui vient d'être dit que les requérants n'établissent pas que le refus de titre de séjour est entaché d'illégalité. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour.

14. Les moyens tirés de ce que les décisions en litige méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 7,9,10 et 12 du présent arrêt.

Sur les décisions fixant le pays de renvoi :

15. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de renvoi seraient privées de base légale en raison de l'illégalité des décisions d'éloignement prises à leur encontre.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 26 septembre 2023 du préfet de la Gironde portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Leurs requêtes doivent ainsi être rejetées, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles relatives aux frais liés aux litiges.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse A..., à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 novembre 2024.

La rapporteure,

Bénédicte MartinLa présidente,

Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,

Laurence Mindine

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX00897, 24BX00898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX00898
Date de la décision : 28/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme REYNAUD
Avocat(s) : HAAS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-28;24bx00898 ?
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