Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 décembre 2022, 12 septembre 2023 et 23 octobre 2023, la société à responsabilité limitée (SARL) Champs Gazania, représentée par Me Elfassi, demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2022 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer une autorisation environnementale tendant à la construction et à l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Milhac-de-Nontron ;
2°) de lui délivrer l'autorisation sollicitée ;
3°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer l'autorisation sollicitée dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ou de procéder au réexamen de sa demande dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les intervenantes sont dépourvues d'intérêt à intervenir ;
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'étude d'impact n'est pas insincère dès lors que le carnet de photomontages est conforme à la réalité ;
- l'étude d'impact présente un caractère suffisant et est conforme à l'article R. 122-5 du code de l'environnement en ce qu'elle comporte les considérations ayant présidé au choix du site d'implantation parmi lesquelles figure le gisement éolien ;
- son projet ne porte pas atteinte aux intérêts protégés visés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur d'appréciation compte tenu des mesures d'évitement et de réduction proposées pour rendre l'impact résiduel des éoliennes sur les chiroptères et l'avifaune non significatif ;
- il est entaché d'erreur d'appréciation en ce que le préfet a considéré que son projet impliquait une demande de dérogation " espèces protégées " ;
- il est entaché d'erreur d'appréciation en ce que le préfet a considéré que son projet entrainait une aggravation du risque incendie du massif forestier au sein duquel il doit être implanté.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 28 juin 2023, Mme B..., représentée par Me Monpion, conclut au rejet de la requête de la SARL Champs Gazania.
Elle soutient que :
- elle justifie d'un intérêt à intervenir ;
- les motifs de refus opposés par le préfet de la Dordogne dans l'arrêté attaqué sont fondés dès lors que le projet litigieux est incompatible avec les intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement, qu'il nécessitait une demande de dérogation " espèces protégées " et qu'il ne prend pas en compte le risque incendie ;
- le projet en litige dépasse les seuils réglementaires des émergences admissibles, en méconnaissance de l'article 26 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le dossier de demande d'autorisation ne comporte aucune justification sur le choix du site et les photomontages produits dans le volet paysager de la demande ainsi que le croquis censé représenter les rapports d'échelle minimisent l'impact visuel réel du projet.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 21 juillet 2023, l'Association Vivre, Informer et Agir pour le Périgord-Limousin (VIAPL), représentée par Me Monpion, conclut au rejet de la requête de la SARL Champs Gazania.
Elle soutient que :
- elle justifie d'un intérêt à intervenir ;
- les motifs de refus opposés par le préfet de la Dordogne dans l'arrêté attaqué sont fondés dès lors que le projet litigieux est incompatible avec les intérêts protégés par l'article L.511-1 du code de l'environnement, qu'il nécessitait une demande de dérogation " espèces protégées " et qu'il ne prend pas en compte le risque incendie ;
- le projet en litige dépasse les seuils réglementaires des émergences admissibles, en méconnaissance de l'article 26 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le dossier de demande d'autorisation ne comporte aucune justification du choix du site et les photomontages produits dans le volet paysager de la demande ainsi que le croquis censé représenter les rapports d'échelle minimisent l'impact visuel réel du projet.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2023, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement dans l'attente de la régularisation des vices relevés. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 21 septembre 2023, la Société pour l'Etude, la Protection et l'Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest (SEPANSO) Dordogne, représentée par Me Maginot, demande que la cour rejette la requête de la SARL Champs Gazania.
Elle soutient que :
- elle justifie d'un intérêt à intervenir ;
- l'arrêté attaqué est motivé ;
- les motifs de refus du préfet sont parfaitement fondés.
Par ordonnance du 23 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code forestier ;
- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- l'arrêté du 6 février 2024 classant les bois et forêts exposés au risque d'incendie au titre des articles L. 132-1 et L. 133-1 du code forestier ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lucie Cazcarra,
- les conclusions de Mme Pauline Reynaud, rapporteure publique,
- les observations de Me Elfassi, représentant la société Champs Gazania,
- et les observations de Me Maginot, représentant l'association SEPANSO Dordogne et de Me Saint-Martin, représentant l'association VIAPL et Mme B....
Une note en délibéré présentée par la société Champs Gazania a été enregistrée le 15 novembre 2025.
Considérant ce qui suit :
1. La société Champs Gazania a sollicité le 23 mai 2018 l'autorisation d'exploiter un parc éolien " le Petit Bos ", composé de quatre aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Milhac-de-Nontron. Par un arrêté du 3 octobre 2022, le préfet de la Dordogne a rejeté cette demande. La société Champs Gazania demande à la cour l'annulation de cet arrêté.
Sur la recevabilité des interventions :
2. Est recevable à former une intervention devant le juge du fond toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige.
En ce qui concerne l'intérêt à intervenir de Mme A... :
3. Mme A... réside dans l'aire immédiate du projet, à moins de deux kilomètres de la zone d'implantation potentielle du parc éolien. Il résulte de l'instruction, notamment de la zone d'influence visuelle telle qu'elle figure dans le volet paysager de l'étude d'impact, que les éoliennes litigieuses, d'une hauteur de 200 mètres en bout de pale, seront visibles depuis son habitation. Compte tenu des inconvénients que le projet est susceptible de présenter, et alors même que l'intervention de Mme A... a été enregistrée par la cour avant le mémoire en défense du préfet de la Dordogne, elle a intérêt au maintien de l'arrêté attaqué. Par suite, son intervention en défense doit être admise.
En ce qui concerne l'intérêt à intervenir de l'association Vivre, Informer et Agir pour le Périgord-Limousin (VIAPL) :
4. Il résulte des stipulations de l'article 2 des statuts de l'association " Vivre, Informer et Agir pour le Périgord-Limousin " que celle-ci exerce son action sur le département de la Dordogne, et plus particulièrement sur la commune de Milhac-de-Nontron, et qu'elle a pour but " de protéger les espaces naturels, le patrimoine bâti, les sites et paysages ", de " lutter contre toutes les atteintes qui pourraient être portées à la santé et à la sécurité des hommes, des animaux et des choses et notamment chaque fois qu'elles seront susceptibles de toucher aux caractères naturels des espaces et des paysages, aux équilibres biologiques et d'une façon générale, à l'environnement, aux hommes, à la faune et à la flore ", " y compris par toute action en justice, contre (...) les usines d'aérogénérateurs dites "parcs" éoliens ". Par son implantation et ses caractéristiques, le projet, qui comporte quatre aérogénérateurs, est susceptible d'entraîner des incidences défavorables sur les intérêts que l'association a pour objet de protéger, notamment sur le paysage du territoire où elle exerce son action. Dans ces conditions et alors même que son intervention a été enregistrée par la cour avant le mémoire en défense du préfet de la Dordogne, elle a intérêt au maintien de l'arrêté attaqué. Son intervention en défense doit donc être admise.
En ce qui concerne l'intérêt à intervenir de la Société pour l'Etude, la Protection et l'Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest (SEPANSO) Dordogne :
5. Aux termes du second alinéa de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : " Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 ainsi que les fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique et les associations agréées de pêcheurs professionnels justifient d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément ".
6. La SEPANSO Dordogne verse à l'instance un arrêté du préfet de la Dordogne du 1er décembre 2022 portant renouvellement de son agrément accordé dans le cadre départemental au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement. Il ressort de l'article 2 de ses statuts que cette association a pour objet, dans le département de la Dordogne, de sauvegarder la faune, la flore, le milieu naturel, ainsi que les équilibres biologiques et de préserver les sites et paysages. Dès lors que le projet en litige est susceptible d'entrainer des effets dommageables sur l'environnement d'une partie du territoire pour lequel elle est agréée, la SEPANSO Dordogne justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de la défense.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe :
7. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 7° Refusent une autorisation (...) ".
8. En l'espèce, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il relève que le projet est positionné dans un milieu naturel dont les caractéristiques et la valeur d'habitats d'espèces font apparaitre des enjeux élevés. Il relève également l'insuffisance des mesures d'évitement et de réduction des impacts sur les espèces patrimoniales, l'insuffisante justification de l'absence de demande de dérogation pour le dérangement ou la destruction d'espèces protégées et de leurs habitats ainsi que l'insuffisante prise en compte des contraintes liées à la défense des forêts contre l'incendie.
9. Dans ces conditions, l'arrêté comporte des éléments suffisamment précis pour permettre à la société Champs Gazania de comprendre les motifs du refus qui lui a été opposé. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne :
10. Il résulte de l'instruction que pour refuser à la société Champs Gazania l'autorisation sollicitée, le préfet de la Dordogne a opposé deux motifs tirés, d'une part, de l'absence de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées et, d'autre part, de l'aggravation du risque d'incendie et l'impossibilité de délivrance d'une autorisation de défrichement.
11. Aux termes de l'article L. 181-1 du code de l'environnement : " L'autorisation environnementale, dont le régime est organisé par les dispositions du présent livre ainsi que par les autres dispositions législatives dans les conditions fixées par le présent titre, est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : (...) 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 181-2 du même code : " I.-L'autorisation environnementale tient lieu, y compris pour l'application des autres législations, des autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments suivants, lorsque le projet d'activités, installations, ouvrages et travaux relevant de l'article L. 181-1 y est soumis ou les nécessite : (...) 11° Autorisation de défrichement en application des articles (...) L. 375-4 du code forestier ; / (...) ". L'article L. 181-3 du même code prévoit : " I.-L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. /II.-L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : (...) 9° La préservation des intérêts énumérés par l'article L. 112-1 du code forestier et celle des fonctions définies à l'article L. 341-5 du même code, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu d'autorisation de défrichement ; / (...) ".
12. L'article L. 112-1 du code forestier, auquel renvoient les dispositions précitées, prévoit que : " Les forêts, bois et arbres sont placés sous la sauvegarde de la Nation, sans préjudice des titres, droits et usages collectifs et particuliers. / Sont reconnus d'intérêt général : 1° La protection et la mise en valeur des bois et forêt (...) ". Quant à l'article L. 341-5 du même code, il dispose que : " L'autorisation de défrichement peut être refusée lorsque la conservation des bois et forêts ou des massifs qu'ils complètent, ou le maintien de la destination forestière des sols, est reconnu nécessaire à une ou plusieurs des fonctions suivantes : (...) 9° A la protection des personnes et des biens et de l'ensemble forestier dans le ressort duquel ils sont situés contre les risques naturels, notamment les incendies et les avalanches ".
13. Il résulte de l'instruction que le projet de parc éolien porté par la société Champs Gazania requérait une autorisation de défrichement d'une surface de 13 645 m², ainsi qu'un déboisement supplémentaire de 24 745 m² en phase travaux. Les communes d'accueil du projet étant classées en risque " moyen " vis-à-vis des feux de forêt selon le dossier départemental des risques majeurs (DDRM) de la Dordogne, ainsi que le relève l'étude d'impact en page 88, la société Champs Gazania a sollicité, dans le cadre de l'élaboration de son dossier de demande d'autorisation, l'avis du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) sur les éventuelles contraintes régissant les zones d'implantation de son projet éolien sur les communes de Milhac-de-Nontron et de Saint-Saud-Lacoussière. Par un courrier du 25 novembre 2016, le SDIS a adressé à la société plusieurs recommandations en matière d'accessibilité, réitérées en des termes similaires dans un courrier adressé par le SDIS à la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Nouvelle-Aquitaine le 5 juin 2018.
14. Dans son courrier, le SDIS a rappelé les deux conséquences majeures induites par l'implantation d'éoliennes au sein d'un massif forestier tenant, d'une part, à l'aggravation du risque de mise à feu pendant la période de travaux puis tout au long de l'exploitation du site et, d'autre part, aux contraintes liées aux mâts lors de l'intervention des avions bombardiers d'eau, sur un rayon d'environ 600 mètres autour de ceux-ci. Il a donc insisté sur la nécessité de compenser ces conséquences par la création ou le renforcement d'infrastructures destinées aux moyens terrestres de lutte contre l'incendie, qui ne pourront plus recevoir d'appui aérien en certains endroits du site. Parmi les principales recommandations, figurent, au titre de l'accessibilité des secours, la nécessité de prévoir que l'entrée principale soit reliée à la voie publique par une voie " engin " et que, sur le site, les cheminements permettant l'intervention des services de secours soient clairement matérialisés au sol ou balisés. Le SDIS relève également l'importance de " conserver la cohérence du maillage entre les pistes de défense de la forêt contre l'incendie (DFCI) et les chemins forestiers ". Il précise à cet égard que " des pistes pourront être créées afin de réaliser un maillage de parcelles de maximum 25 hectares ".
15. Il résulte de l'étude d'impact que la mesure E1, destinée à prendre en compte les recommandations du SDIS et à limiter le risque d'incendie, ne prévoit pas le maillage du site alors même qu'il est constant que deux îlots forestiers de plus de 25 hectares sont inclus dans la zone tampon de 600 mètres : un îlot de 42,8 hectares au nord-ouest de l'éolienne 2 et un îlot de 41,6 hectares autour de l'éolienne 3, tous deux composés de plantations de résineux particulièrement exposées au feu. Cette même étude se borne par ailleurs à faire mention de ce que " les caractéristiques des pistes pour permettre l'accessibilité des secours seront conformes aux dimensions demandées ", sans préciser les pistes concernées. En mars 2022, la société pétitionnaire a apporté des compléments à sa demande d'autorisation environnementale. Elle a notamment renforcé les réserves incendie en prévoyant 7 citernes de 120 m3.et fait valoir que tout point du massif est à une distance inférieure à 200 mètres des voies accessibles au SDIS. Elle indique également que les chemins forestiers nécessaires à la défense du massif forestier seront renforcés afin de respecter les préconisations de gabarits édictées par le SDIS. Au-delà de l'absence de toute précision apportée sur les chemins forestiers devant être renforcés, la société porteuse du projet ne justifie pas de la création de pistes de défense de la forêt contre l'incendie afin d'assurer un maillage avec les chemins forestiers et rendre ainsi accessible le site aux secours. Lors de la réunion de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites du 27 septembre 2022, la cheffe de projet a d'ailleurs indiqué que la demande de création de pistes supplémentaires n'avait pas été suivie dès lors que cette mesure aurait impacté des zones humides et aurait conduit à d'autres défrichements.
16. Si la société Champs Gazania fait valoir qu'en prévoyant 7 citernes sur le site elle va au-delà des recommandations du SDIS, qui n'en prévoyait que 4, et que d'autres mesures, telles que le recours à des matériaux inertes pour fabriquer la base des éoliennes, le poste de livraison et le local technique, permettront de prévenir le risque incendie, ces mesures ne peuvent suppléer aux conditions fixées à l'accessibilité des secours. La disponibilité en eau ne peut en effet exonérer le pétitionnaire de garantir un accès au massif forestier. Or, en l'espèce, la création de nouvelles pistes, destinées à garantir l'accessibilité au site, s'imposait d'autant plus que, comme l'a indiqué la société requérante dans l'étude d'impact, " le projet n'entrainera pas d'impact négatif sur des éventuelles pistes DFCI du massif puisque celui-ci est peu accessible et peu desservi en accès ".
17. Dans ces conditions, et alors que le département de la Dordogne demeure particulièrement exposé au risque d'incendie aux termes de l'arrêté du 6 février 2024 classant les bois et forêts exposés au risque d'incendie au titre des articles L. 132-1 et L. 133-1 du code forestier, c'est à bon droit que le préfet de la Dordogne a considéré que le projet ne propose pas de solution prenant en compte la contrainte induite par la présence d'éoliennes lors de l'intervention d'avions bombardiers d'eau.
18. Ce seul motif, tiré de l'absence de prise en compte de l'aggravation du risque incendie du massif forestier au sein duquel sont implantées les éoliennes, suffit à justifier le refus de la demande de défrichement et, par suite, le rejet de l'autorisation environnementale sollicitée par la société requérante.
19. Il résulte de ce qui précède que la société Champs Gazania n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 3 octobre 2022 par lequel le préfet de la Dordogne a rejeté sa demande d'autorisation tendant à la construction et à l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Milhac-de-Nontron.
Sur les conclusions tendant à la délivrance de l'autorisation sollicitée ou aux fins d'injonction :
20. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la société Champs Gazania tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 octobre 2022, n'implique ni la délivrance par la cour de l'autorisation sollicitée, ni qu'il soit enjoint à l'administration de délivrer cette autorisation ou de réexaminer la demande. Par voie de conséquence, les conclusions de la société requérante aux fins de délivrance de l'autorisation sollicitée ainsi que celles, subsidiaires, aux fins d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la société Champs Gazania la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Les interventions de Mme A..., de l'association Vivre, Informer et Agir pour le Périgord-Limousin et de la Société pour l'Etude, la Protection et l'Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest Dordogne sont admises.
Article 2 : La requête de la société Champs Gazania est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Champs Gazania, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à Mme B..., à l'association Vivre, Informer et Agir pour le Périgord-Limousin et à la Société pour l'Etude, la Protection et l'Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest Dordogne.
Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,
Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2024.
La rapporteure,
Lucie CazcarraLa présidente,
Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,
Laurence Mindine
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22BX02981